Caté Somme - 19. La loi divine - le Décalogue
- Qu'entendez-vous par la loi divine?
- J'entends, par la loi divine, la loi que Dieu a donnée aux hommes, en se manifestant à eux surnaturellement (I-II 91,4-5).
- Quand Dieu a-t-il donné cette loi aux hommes?
- Dieu a donné cette loi aux hommes, une première fois, d'une manière très simple, avant leur chute, dans le paradis terrestre; mais il l'a donnée, d'une façon beaucoup plus spéciale, plus tard, par l'entremise de Moïse et des prophètes; et, d'une manière beaucoup plus parfaite, par Jésus-Christ et les apôtres (I-II 91,5).
- Comment s'appelle la loi divine donnée par Dieu aux hommes par l'entremise de Moïse?
- Elle s'appelle la loi ancienne (I-II 98,6).
- Et comment s'appelle la loi divine donnée par Dieu aux hommes par Jésus-Christ et les apôtres?
- Elle s'appelle la loi nouvelle (I-II 106,3-4).
- La loi ancienne était-elle pour tous les hommes?
- Non, la loi ancienne était seulement pour le peuple juif (I-II 98,4-5).
- Pourquoi Dieu avait-il donné une loi spéciale au peuple juif?
- Parce que ce peuple était destiné à préparer dans l'ancien monde la venue du Sauveur des hommes qui devait sortir de lui (I-II 96,4).
- Comment s'appellent les préceptes qui étaient propres au peuple juif et ne regardaient que lui dans la loi ancienne?
- Ils s'appellent les préceptes judiciaires et les préceptes cérémoniels (I-II 99,3-4).
- N'y avait-il pas aussi dans la loi ancienne d'autres préceptes qui sont demeurés dans la loi nouvelle?
- Oui, il y avait aussi dans la loi ancienne des préceptes qui sont demeurés dans la loi nouvelle.
- Comment s'appellent ces préceptes de la loi ancienne qui sont demeurés dans la loi nouvelle?
- On les appelle les préceptes moraux (I-II 99,1-2).
- Pourquoi ces préceptes moraux de la loi ancienne sont-ils demeurés dans la loi nouvelle?
- Parce qu'ils constituent ce qu'il y a d'essentiel et d'absolument inaliénable dans les règles de la moralité se rapportant à tout homme, du simple fait qu'il est homme (I-II 100,1).
- Ces préceptes moraux ont donc toujours été et seront toujours les mêmes pour tous les hommes?
- Oui, ces préceptes moraux ont toujours été et seront toujours les mêmes pour tous les hommes (I-II 100,8).
- Sont-ils la même chose que la loi naturelle?
- Oui, ces préceptes moraux sont la même chose que la loi naturelle (I-II 100,1).
- Pourquoi dites-vous donc qu'ils font partie de la loi divine?
- Parce que, pour leur donner encore plus de force et pour empêcher que la raison humaine dévoyée ne les oublie ou ne les corrompe, Dieu a voulu les promulguer lui-même solennellement, quand il s'est manifesté à son peuple choisi, du temps de Moïse; et aussi parce que Dieu les a promulgués en vue de la fin surnaturelle à laquelle tout homme est appelé par lui (I-II 100,3).
- Comment s'appellent ces préceptes moraux ainsi promulgués solennellement par Dieu du temps de Moïse?
- Ils s'appellent le Décalogue (I-II 100,3-4).
- Que signifie ce mot: Décalogue?
- Ce mot est un mot grec qui veut dire les dix paroles, parce que c'est au nombre de dix que Dieu donna ces préceptes.
- Quels sont ces dix préceptes du Décalogue?
- Ces dix préceptes du Décalogue sont les suivants :
1°) Tu n'auras point d'autres dieux que moi;
2°) Tu ne prendras point en vain le nom du Seigneur, ton Dieu;
3°) Tu sanctifieras le jour du Seigneur;
4°) Honore ton père et ta mère;
5°) Tu ne tueras point;
6°) Tu ne commettras point d'adultère;
7°) Tu ne commettras point de vol;
8°) Tu ne porteras point de faux témoignage contre ton prochain;
9°) Tu ne convoiteras point la femme de ton prochain;
10°) Tu ne convoiteras rien de ce qui est à ton prochain (I-II 100,4-6).
- Ces dix préceptes suffisent-ils à régler toute la vie morale de l'homme dans l'ordre de la vertu?
- Oui; ils suffisent, quant aux vertus principales, qui regardent les devoirs essentiels de l'homme envers Dieu et le prochain; mais, pour la perfection de toutes les vertus, ils ont dû être expliqués et complétés par l'enseignement des prophètes dans l'ancienne loi, et plus encore par l'enseignement de Jésus-Christ et des apôtres dans la loi nouvelle (I-II 100,3 I-II 100,11).
- Quel est le meilleur moyen de bien entendre ces préceptes et ce qui les explique ou les complète pour la perfection de la vie morale?
- C'est de les étudier à l'occasion de chacune des vertus considérées dans le détail.
- Cette étude se fera-t-elle alors d'une manière aisée?
- Oui, car la nature même de la vertu expliquera la nature et l'obligation du précepte.
- Sera-ce en même temps le moyen de bien entendre toute la perfection de la loi nouvelle?
- Oui, parce que la perfection de cette loi consiste précisément dans son rapport avec l'excellence de toutes les vertus (I-II 100,2 I-II 108,0).
- Cette excellence de toutes les vertus revêt-elle un caractère particulier dans la loi nouvelle?
- Oui, elle y revêt le caractère de conseils s'ajoutant aux préceptes (I-II 108,4).
- Qu'entendez-vous par les conseils s'ajoutant aux préceptes?
- J'entends les invitations faites, par Jésus-Christ, à toutes les âmes de bonne volonté, de se détacher, par amour pour lui et pour obtenir une plus parfaite jouissance de lui dans son ciel, des choses qu' elles pourraient vouloir sans compromettre l'essentiel de la vertu, mais qui peuvent être un obstacle à la perfection de cette vertu (I-II 108,4).
- A combien se ramènent ces conseils?
- Ils se ramènent à trois: la pauvreté, la chasteté et l'obéissance (I-II 108,4).
- Y a-t-il un état spécial où l'on puisse pratiquer excellemment ces conseils?
- Oui, c'est l'état religieux (I-II 108,4).
- Suffit-il de la direction donnée par la loi pour que l'homme vive de la vie de la vertu et laisse de côté la vie contraire du péché ou du vice?
- Non, il y faut encore le secours de la grâce (I-II 109,0 I-II 94,0).
- Qu'est-ce que vous entendez par la grâce?
- J'entends, par la grâce, un secours spécial de Dieu, qui aide l'homme à faire le bien et à fuir le mal.
- Ce secours spécial de Dieu est-il toujours nécessaire à l'homme?
- Oui, ce secours spécial de Dieu est toujours nécessaire à l'homme.
- L'homme ne peut-il donc jamais de lui-même faire aucun bien ou éviter aucun mal?
- Oui, l'homme peut, de lui-même, c'est-à-dire avec les principes de sa nature que Dieu lui a donnés, et les autres secours naturels qu'il trouve autour de lui, accomplir certain bien et éviter certain mal, même dans l'ordre moral ou de la vertu; mais, si Dieu ne vient pas, par sa grâce, guérir la nature humaine blessée par le péché, l'homme ne pourra pas accomplir, même dans l'ordre de la vertu naturelle, tout le bien et éviter tout le mal; et, dans l'ordre de la vertu surnaturelle ou de la vie morale en vue du ciel à conquérir, l'homme, par sa seule nature, sans la grâce, ne peu t absolument rien (I-II 109,1 I-II 109,10).
- Que comprend cette grâce d'ordre surnaturel?
- Cette grâce d'ordre surnaturel comprend deux choses: un état habituel de l'homme; et des motions surnaturelles de l'Esprit-Saint lui-même (I-II 109,6).
- Qu'entendez-vous par cet état habituel de l'homme?
- J'entends, par cet état habituel, un ensemble de qualités produites et conservées par Dieu lui-même dans l'âme, qui divinisent l'homme dans son être et dans ses facultés (I-II 110,1 I-II 110,4).
- Comment s'appelle la qualité foncière qui divinise l'être de l'homme?
- Elle s'appelle la grâce habituelle ou sanctifiante (I-II 110,1-2 I-II 110,4).
- Et comment s'appellent les autres qualités surnaturelles qui divinisent les facultés de l'homme?
- Ce sont les vertus et les dons (I-II 110,3).
- Est-ce que les vertus et les dons sont liés à la grâce habituelle ou sanctifiante?
- Oui, les vertus et les dons sont liés à la grâce habituelle ou sanctifiante, de telle sorte qu'ils dérivent de cette grâce et qu'elle ne peut jamais exister dans l'âme sans qu' ils existent dans les facultés.
- Cette grâce et ces vertus et ces dons qui divinisent l'âme et ses facultés, sont-ils quelque chose de bien précieux et de bien grand?
- Oui, car c'est ce qui fait l'homme enfant de Dieu et lui donne le pouvoir d'agir comme tel.
- Un homme revêtu et orné de la grâce avec les vertus et les dons l'emporte-t-il en perfection sur tout le monde créé, dans l'ordre de la nature?
- Oui, sans en excepter même les anges, considérés dans leur nature seule (I-II 113,9 ad 2).
- Il n'y a donc rien qui doive être davantage souhaité par l'homme, sur cette terre, que d'avoir ainsi la grâce de Dieu avec les vertus et les dons?
- Non, il n'y a rien que l'homme doive plus désirer, sur cette terre, que de posséder et conserver, en y progressant tous les jours, cette grâce de Dieu avec les vertus et les dons.
- Comment est-ce que l'homme peut ainsi posséder et conserver, en y progressant tous les jours, sur cette terre, la grâce de Dieu avec les vertus et les dons?
- En correspondant fidèlement à l'action surnaturelle de l'Esprit-Saint, qui le sollicite à se préparer à recevoir la grâce, s'il ne l'a pas encore, ou à y progresser tous les jours, s' il la possède déjà (I-II 112,3 I-II 113,3 I-II 113,5).
- Comment s'appelle cette action de l'Esprit-Saint?
- Cette action de l'Esprit-Saint porte le nom de grâce actuelle (I-II 109,6 I-II 112,3).
- C'est donc avec le secours ou sous l'action de la grâce actuelle que nous nous disposons à recevoir la grâce habituelle ou sanctifiante, si nous ne l'avons pas encore, ou à y progresser, si nous l'avons déjà?
- Oui, c'est avec le secours ou sous l'action de la grâce actuelle que nous nous disposons à recevoir la grâce habituelle ou sanctifiante, si nous ne l'avons pas encore, ou à y progresser, si nous l'avons déjà.
- Cette grâce actuelle peut-elle produire son plein effet en nous, sans nous, et malgré nous?
- Non, cette grâce actuelle ne peut pas produire son plein effet en nous, sans nous et malgré nous (I-II 113,3).
- Il faut donc que notre libre arbitre coopère à l'action de la grâce actuelle?
- Oui, il faut que notre libre arbitre coopère à cette action de la grâce actuelle.
- Comment s'appelle cette coopération de notre libre arbitre à l'action de la grâce actuelle?
- Elle s'appelle la correspondance à la grâce.
- Quel caractère revêt l'acte de notre libre arbitre, quand il correspond ainsi à l'action de la grâce actuelle et que la grâce habituelle est dans l'âme?
- Il revêt toujours le caractère d'acte méritoire (I-II 114,1-2).
- Y a-t-il plusieurs sortes de mérites, pour notre acte méritoire?
- Oui, il y a le mérite condigne et le mérite de convenance (I-II 114,2).
- Qu'entendez-vous par le mérite condigne?
- J'entends le mérite qui donne un droit strict et de justice à recevoir la récompense (I-II 114,2).
- Que faut-il pour que l'acte de l'homme soit méritoire du mérite condigne?
- Il faut que cet acte soit fait sous la motion de la grâce actuelle; qu'il émane de la grâce sanctifiante par la vertu de charité; et qu'il tende à l'acquisition de la vie éternelle pour soi, ou encore à l'augmentation en soi de la grâce et des vertus (I-II 114,2 I-II 114,4).
- Ne peut-on pas mériter pour les autres la vie éternelle, ou la grâce sanctifiante, ou l'augmentation de cette grâce, d'un mérite condigne?
- Non, on ne peut mériter ces sortes de biens, pour les autres, que d'un mérite de convenance, le mérite condigne pour les autres étant le propre de Jésus-Christ, comme chef et tête de l'Église (I-II 114,5 I-II 114,8).
- Qu'entendez-vous par le mérite de convenance?
- J'entends le mérite qui fait que Dieu, en raison de l'amitié qui l'unit aux justes, estime à propos et en harmonie avec ce qui leur convient de répondre au plaisir qu'ils s'appliquent à lui faire par leurs bonnes oeuvres, en leur faisant lui-même plaisir par la concession de ce qu'ils lui demandent ou de ce qu'ils désirent (I-II 114,6).
- C'est donc toujours dans l'intimité de Dieu avec les justes, ou dans la vie de la grâce et des vertus sous l'action de l'Esprit-Saint, que consiste toute la raison de mérite pour l'homme?
- Oui, c'est toujours dans l'intimité de Dieu avec les justes, ou dans la vie de la grâce et des vertus sous l'action de l'Esprit-Saint, que consiste toute la raison de mérite pour l'h omme; et tout ce qu'il fait, hors de ce cadre, même si ce n'est pas mauvais en soi, est chose absolument vaine, ou qui ne lui servira de rien au jour des suprêmes rétributions (I-II 114,6).
- Pourriez-vous m'expliquer le détail de cette vie de la grâce et des vertus sous l'action de l'Esprit-Saint, qui doit constituer le tout de la vie de l'homme sur cette terre?
- Oui, et ce sera l'objet de tout ce qui nous reste à dire dans l'étude de la marche ou du retour de l'homme vers Dieu par ses actes moraux.
- Quelles sont les plus grandes de toutes les vertus et celles dont il importe au plus haut point de produire les actes?
- Ce sont les vertus théologales.
- Pourquoi dites-vous que ces vertus sont les plus grandes et celles dont il importe au plus haut point de produire les actes?
- Parce que ce sont elles qui font que l'homme atteint sa fin dernière surnaturelle autant qu'il peut et doit l'atteindre sur cette terre pour rendre toute sa vie méritoire et posséder un jour dans le ciel cette même fin dernière qui doit être son éternel bonheur.
- Il est donc impossible que l'homme fasse rien de bon surnaturellement sans les vertus théologales?
- Oui, il est tout à fait impossible que l'homme fasse rien de bon surnaturellement sans les vertus théologales.
- Quelles sont les vertus théologales?
- Les vertus théologales sont: la foi, l'espérance et la charité.
- Qu'est-ce que la foi?
- La foi est une vertu surnaturelle qui fait que notre intelligence adhère très fermement et sans crainte de se tromper, bien qu'elle ne le voie pas, à ce que Dieu nous a révélé, notamment sur lui-même et sur sa volonté de se donner un jour lui-même à nous comme objet de notre bonheur parfait (II-II 1,2 II-II 4,0).
- Comment notre intelligence peut-elle adhérer fermement, sans crainte de se tromper, à ce que Dieu a révélé et qu'elle ne voit pas?
- En se fondant sur l'autorité de Dieu, qui ne peut ni se tromper, ni nous tromper (II-II 1,1).
- Et pourquoi Dieu ne peut-il ni se tromper, ni nous tromper?
- Parce qu'il est la vérité même (II-II 1,1 II-II 4,8).
- Mais comment savons-nous que Dieu nous a révélé ce que vous dites?
- Nous le savons par ceux à qui il l'a révélé et par ceux à qui il a confié le dépôt de sa révélation (II-II 1,6 II-II 1,10).
- Quels sont ceux à qui Dieu l'a révélé?
- C'est d'abord le premier homme lui-même, à qui Dieu s'est manifesté directement; ce sont ensuite tous les prophètes de l'Ancien Testament; et, enfin, les apôtres au temps de Jésus-Christ (II-II 1,7).
- Comment savons-nous que Dieu s'est ainsi révélé au premier homme, aux prophètes, aux apôtres?
- Nous le savons par l'histoire qui nous le rapporte et qui nous dit aussi les prodiges ou les miracles faits par Dieu pour convaincre les hommes de son intervention surnaturelle.
- Le miracle prouve-t-il d'une façon absolue que Dieu est intervenu?
- Oui, puisqu'il est le signe même de Dieu, nulle créature ne pouvant l'accomplir par sa propre vertu.
- Où se trouve l'histoire de ces interventions surnaturelles de Dieu et de sa révélation?
- Cette histoire se trouve surtout dans l'Écriture sainte ou la Bible.
- Qu'entendez-vous par l'Écriture sainte ou la Bible?
- J'entends un ensemble de livres divisés en deux groupes qu'on appelle l'Ancien et le Nouveau Testament.
- Ces livres ressemblent-ils à tous les autres livres?
- Non, ces livres ne ressemblent pas à tous les autres livres; car les autres livres sont écrits par des hommes, tandis que ceux-là ont été écrits par Dieu lui-même.
- Que voulez-vous dire quand vous dites que ces livres ont été écrits par Dieu lui-même?
- Je veux dire que Dieu est l'auteur principal de ces livres; et qu'il s'est servi, pour les écrire, des hommes choisis par lui, comme autant d'instruments.
- Tout ce qui est contenu dans ces livres, y a donc été mis par Dieu?
- Oui, tout ce qui est contenu dans ces livres y a été mis par Dieu, à parler du premier exemplaire autographe écrit par les écrivains sacrés; car les autres ne sont divins qu'autant qu' ils sont conformes au premier.
- Lors donc que nous lisons ces livres, c'est comme si nous entendions Dieu lui-même nous parler?
- Oui, quand nous lisons ces livres, c'est comme si nous entendions Dieu lui-même nous parler.
- Mais ne pouvons-nous pas nous tromper sur le sens de cette parole de Dieu?
- Oui, nous pouvons nous tromper sur le sens de cette parole de Dieu; car, s'il est des passages qui sont par eux-mêmes très clairs, il en est d'autres qui sont obscurs.
- D'où vient cette obscurité de la parole de Dieu dans l'Écriture sainte ou la Bible?
- Cette obscurité vient d'abord des mystères mêmes qu'elle renferme, puisqu'il s'agit, en ce qu'elle a de plus essentiel, de vérités que Dieu seul connaît par lui-même, et qui dépassent toute intelligence créée; elle vient aussi de l'ancienneté de ces livres, écrits premièrement pour des peuples qui n'avaient ni notre langue, ni nos habitudes de vie; et, enfin, elle v ient des fautes qui ont pu se glisser, soit dans les copies de la langue originale, soit dans les traductions qui en ont été faites et les copies de ces traductions.
- Y a-t-il quelqu'un qui soit assuré de ne pas se tromper sur le sens de la parole de Dieu dans l'Écriture sainte, et où qu'elle se trouve?
- Oui, c'est le souverain pontife, et par lui l'Église catholique dans son enseignement universel (II-II 1,10).
- Pourquoi dites-vous que le souverain pontife et, par lui, l'Église catholique dans son enseignement universel ne peuvent pas se tromper sur le sens de la parole de Dieu dans l'Écriture sainte, et où qu' elle ait été conservée?
- Parce que Dieu lui-même a voulu qu'ils fussent infaillibles.
- Et pourquoi Dieu a-t-il voulu qu'ils fussent infaillibles?
- Parce que sans cela les hommes n'auraient pas eu les moyens nécessaires d'arriver sûrement à la fin surnaturelle à laquelle il les appelle (II-II 1,10).
- Est-ce là ce qu'on veut dire quand on dit que le pape et l'Église sont infaillibles dans les questions qui touchent à la foi et aux moeurs?
- Oui, et c'est là très exactement le sens de ces expressions, et l'on veut dire que le pape et l'Église ne peuvent jamais se tromper ni nous tromper, quand ils livrent ou interprètent aux hommes la parole de Dieu, en ce qui touche aux vérités essentielles qui regardent les choses qu'il faut croire ou qu'il faut faire, pour obtenir ce qui doit être un jour notre bonheur parfait.
- Existe-t-il un résumé de ces vérités essentielles qui regardent ce qu'il faut croire et sont le fondement de ce qu'il faut faire pour obtenir un jour notre bonheur parfait?
- Oui, c'est le symbole des apôtres ou le Credo (II-II 1,6).
- Pourriez-vous me dire le symbole des apôtres ou le Credo?
- Le voici, tel que le récite chaque jour l'Église catholique :
Je crois en Dieu, le Père tout-puissant,
Créateur du ciel et de la terre;
et en Jésus-Christ, son Fils unique, Notre Seigneur,
qui a été conçu du Saint-Esprit;
est né de la Vierge Marie;
a souffert sous Ponce Pilate, a été crucifié, est mort, a été enseveli;
est descendu aux enfers;
le troisième jour est ressuscité d'entre les morts;
est monté aux cieux, est assis à la droite de Dieu le Père tout-puissant;
d'où il viendra pour juger les vivants et les morts.
Je crois au Saint-Esprit;
à la sainte Église catholique, à la communion des saints, à la rémission des péchés;
à la résurrection de la chair, à la vie éternelle.
Ainsi soit-il.
- La récitation de ce symbole des apôtres, ou de ce Credo, est-il l'acte de foi par excellence?
- Oui, la récitation de ce symbole des apôtres, ou de ce Credo, est l'acte de foi par excellence; et l'on ne saurait trop le recommander à tous les fidèles comme pratique de chaque jour.
- Pourriez-vous me donner encore une autre formule de l'acte de foi, courte et précise, qui serait, elle aussi, excellemment, l'acte de la vertu surnaturelle de foi, qui est la première des vertus théologales?
- Oui; et voici cette formule, sous forme d'hommage à Dieu: Mon Dieu, je crois, sur votre parole, tout ce que vous avez révélé, en vue de vous-même, voulant être, un jour, notre bonheur parfait.
- Quels sont ceux qui peuvent faire cet acte de foi?
- Ceux-là seuls qui ont la vertu surnaturelle de foi (II-II 4,5).
- Les infidèles ne peuvent donc pas faire cet acte de foi?
- Les infidèles ne peuvent pas faire cet acte de foi; parce qu'ils ne croient pas ce que Dieu a révélé en vue de leur bonheur surnaturel: soit qu'ils l'ignorent, et ne s' abandonnent point, confiants, à l'action de Dieu, pouvant et voulant leur donner leur bien selon qu'il lui plaît; soit que, l'ayant connu, ils aient refusé d'y donner l'assentiment de leur esprit (II-II 10,0).
- Et les impies peuvent-ils faire cet acte de foi?
- Non, les impies ne peuvent pas faire cet acte de foi; parce que, même s'ils tiennent pour certain ce que Dieu a révélé, en raison de l'autorité de Dieu, qui ne peut ni se tromper, ni nous tromper, l'adhésion de leur esprit n'est point l'effet d'une sympathie surnaturelle à l'endroit de la parole de Dieu, qu'ils détestent au contraire, bien que ne pouvant pas ne pas la subir (II-II 5,2 ad 2).
- Y a-t-il des hommes qui puissent croire de la sorte, sans pourtant faire l'acte de foi de la vertu surnaturelle?
- Oui, et ils ne font en cela qu'imiter les démons (II-II 5,2).
- Les hérétiques peuvent-ils faire l'acte de foi de la vertu surnaturelle?
- Non, les hérétiques ne peuvent pas faire l'acte de foi de la vertu surnaturelle; parce que, même s'ils adhèrent, par leur esprit, à tel ou tel point de la doctrine révélée, ils n'y adhèrent point sur la parole de Dieu, mais sur leur propre jugement (II-II 5,3).
- Ces hérétiques sont-ils encore plus en défaut, par rapport à l'acte de foi, que les impies ou les démons?
- Oui, parce que la parole de Dieu ou son autorité n'est même pas ce qui motive l'adhésion de leur esprit.
- Et les apostats, peuvent-ils faire l'acte de foi?
- Non, les apostats ne peuvent pas faire l'acte de foi; parce que leur esprit a complètement rejeté ce à quoi ils avaient cru d'abord sur la parole de Dieu (II-II 12,0).
- Les pécheurs peuvent-ils faire l'acte de foi, même comme acte de la vertu surnaturelle?
- Oui, les pécheurs peuvent faire l'acte de foi, même comme acte de la vertu surnaturelle, quand ils ont, en effet, cette vertu: et ils peuvent l'avoir, quoique dans un état imparfait, quand ils n' ont pas la charité ou qu'ils sont en état de péché mortel (II-II 4,1 II-II 4,4).
- Tout péché mortel n'est donc pas un péché contre la foi?
- Non, tout péché mortel n'est pas un péché contre la foi (II-II 10,1 II-II 10,4).
- En quoi consiste exactement le péché contre la foi?
- Le péché contre la foi consiste à ne pas vouloir soumettre son esprit à la parole de Dieu par respect et par sympathie pour cette parole (II-II 10,1 II-II 10,3).
- Est-ce toujours la faute de l'homme, s'il ne soumet pas ainsi son esprit à la parole de Dieu, par respect et par sympathie pour cette parole?
- Oui, c'est toujours la faute de l'homme et parce qu'il résiste à la grâce actuelle de Dieu l'invitant à faire cet acte de soumission (II-II 6,1-2).
- Tous les hommes qui vivent sur cette terre ont-ils toujours cette grâce actuelle?
- Oui, tous les hommes qui vivent sur cette terre ont toujours cette grâce actuelle, bien qu'à des degrés divers, et selon qu'il plaît à Dieu de la distribuer dans les conseils de sa Providence.
- Est-ce une grande grâce de Dieu d'avoir la vertu de foi surnaturelle?
- Oui, d'avoir la vertu de foi surnaturelle est, d'une certaine manière, la plus grande grâce de Dieu.
- Pourquoi dites-vous que d'avoir la foi surnaturelle est la plus grande grâce de Dieu?
- Parce que, sans la foi surnaturelle, on ne peut absolument rien dans l'ordre du salut; et qu'on est entièrement perdu pour le ciel, à moins qu'on ne la reçoive de Dieu avant de mourir (II-II 2,5 II-II 2,8 II-II 4,7).
- Ce serait donc, quand on a le bonheur de la posséder, une grande faute de s'exposer à la perdre par des fréquentations, ou des conversations, ou des lectures qui seraient de nature à y porter atteinte?
- Oui, ce serait une très grande faute, si on le faisait sciemment; et c'est toujours chose très regrettable de courir un pareil danger, même si tout d'abord il n'y avait pas de sa faute.
- Il importe donc souverainement de bien choisir ses fréquentations et ses lectures, en vue de ne pas exposer, mais, au contraire, pour conserver et développer en soi le grand bien de la foi?
- Oui, cela importe souverainement, alors surtout que, dans le monde, et avec la liberté effrénée de la presse, on peut rencontrer aujourd'hui tant d'occasions qui sont un péril pour la foi.
- Y a-t-il encore un autre péché contre la foi?
- Oui, c'est le péché de blasphème (II-II 13,0).
- Pourquoi dites-vous que le blasphème est un péché contre la foi?
- Parce qu'il va directement contre l'acte extérieur de la foi, qui est la confession de cette foi par nos paroles: tout blasphème, en effet, consiste à proférer quelque parole qui est injurieuse à Dieu ou à ses saints (II-II 13,1).
- Le blasphème est-il un grand péché?
- Le blasphème est toujours de soi un très grand péché (II-II 13,2-3).
- Est-ce que l'habitude de proférer des blasphèmes excuse ou amoindrit leur gravité, quand on les profère?
- Au contraire, cette habitude les aggrave plutôt, puisqu'au lieu de travailler à s'en corriger, on a laissé ce mal si grave s'enraciner si profondément (II-II 13,2 ad 3).
- Cette vertu de foi, en ceux où elle se trouve, suffit-elle pour leur faire pleinement atteindre, comme ils le doivent sur cette terre, la vérité de Dieu?
- Oui, elle suffit, mais selon qu'elle a, pour la servir, plusieurs dons du Saint-Esprit (II-II 8,2).
- Quels sont ces dons du Saint-Esprit destinés à servir la vertu de foi?
- Ce sont les dons d'intelligence et de science (II-II 8,0-9).
- Comment le don d'intelligence aide-t-il la vertu de foi dans la connaissance de la vérité de Dieu?
- Le don d'intelligence aide la vertu de foi dans la connaissance de la vérité de Dieu en faisant que notre esprit, sous l'action directe de l'Esprit-Saint, pénètre le sens des termes que comportent les affirmations divines, ou de toutes les propositions qui peuvent s'y rapporter, de manière à pleinement entendre ces propositions ou ces affirmations, si elles ne dépassent point la portée de notre intelligence, ou, s'il s'agit des mystères eux-mêmes, de manière à les conserver intacts, malgré toutes les difficultés que ces mystères peuvent soulever (II-II 8,2).
- Ce don d'intelligence est donc par excellence le don de la lumière?
- Oui, ce don d'intelligence est par excellence le don de la lumière, et tout ce que nous avons de clartés et de jouissances intellectuelles dans l'ordre de la vérité surnaturelle, dont la claire vue fera notre bonheur au ciel, nous le devons, sur cette terre, en première origine, à ce don d'intelligence, faisant fructifier chez nous, dans notre esprit, ces germes de vérités infinies, que sont les affirmations divines, objet propre et direct de la vertu de foi (II-II 8,2).
- Le don d'intelligence aide-t-il aussi en vue du bien à pratiquer?
- Oui, le don d'intelligence aide souverainement en vue du bien à pratiquer, parce que son rôle ou son effet est d'éclairer l'esprit de l'homme sur les raisons de bonté surnaturelle, en vue de la vraie fin surnaturelle de l'homme, qui est la vision de Dieu, contenues dans la vérité révélée que nous tenons de Dieu par la foi, afin que la volonté de l'homme divinisée par la charité puisse s'y porter comme il convient (II-II 8,3-5).
- Pourriez-vous me dire comment ou en quoi le don d'intelligence, qui est une perfection surnaturelle de notre esprit, se distingue de la foi ou des autres dons qui sont aussi une perfection surnaturelle de ce même esprit, tels que les dons de sagesse, de science et de conseil?
- Oui; et le voici en quelques mots. - La foi pose devant le regard de l'homme, sous forme de propositions énoncées au nom de Dieu, des vérités dont les principales le dépassent. Ces vérités tantôt regardent Dieu lui-même, tantôt les créatures, tantôt l'action de l'homme. Si l'homme, par la foi, peut assentir à ces vérités comme il convient, il ne peut en vivre par son intelligence, selon qu' il convient à l'obtention du bien que sont pour lui ces vérités, qu'à la condition d'en pénétrer les termes, selon qu'ils sont les principes ou les éléments du triple jugement qu'il peut avoir à porter à leur sujet dans ce même ordre. Le don d'intelligence a pour objet propre cette pénétration des termes des propositions énoncées au nom de Dieu. Quant au triple jugement, il est porté d'une manière parfaite, par le don de sagesse, en ce qui est des choses de Dieu; par le don de science, en ce qui est des créatures; par le don de conseil, en ce qui est de l'action de l'homme (II-II 8,6).
- Pourriez-vous me montrer, d'après cela, l'importance et le rôle du don de science, qui est le deuxième don se rapportant plus spécialement à la vertu de foi?
- Oui; et le voici également en quelques mots. Par la vertu du don de science, le fidèle, en état de grâce, sous l'action directe de l'Esprit-Saint, juge, avec une certitude absolue et une infaillible vérité, non point en usant du procédé naturel du raisonnement, mais comme d'instinct et de façon intuitive, le vrai caractère des choses créées dans leur rapport avec les choses de la foi, selon qu'elles doivent être crues ou qu'elles doivent diriger notre conduite, voyant immédiatement ce qui, dans les créatures, est en harmonie avec la vérité première, objet de foi et fin dernière de nos actes, ou ce qui ne l'est pas (II-II 9,1 II-II 9,3).
- Ce don est-il aujourd'hui d'une importance toute spéciale pour les fidèles?
- Oui, car il constitue le remède par excellence à l'un des plus grands maux qui ont affligé l'humanité, surtout depuis la Renaissance.
- Quel est ce mal dont vous parlez?
- C'est que, depuis lors, a prévalu, même dans le monde qui formait autrefois la chrétienté, le règne de la fausse science, qui n'a plus saisi le véritable rapport des créatures avec Dieu, vérité première et fin dernière de l'homme, mais, dans l'ordre spéculatif, a fait de l'étude des créatures un obstacle perpétuel à la vérité de la foi, et, dans l'ordre pratique, a suscité ce renouveau de l'antique corruption païenne d'autant plus pernicieux qu'il succédait à une floraison plus surnaturelle des vertus pratiquées par les saints.
- Est-ce là une des principales causes du mal qui règne dans le monde et afflige la société moderne?
- Oui, c'est là une des principales causes du mal qui règne dans le monde et afflige la société moderne.
- C'est donc dans la vertu de foi et dans les dons d'intelligence et de science qui l'accompagnent, quand les fidèles ont la grâce, que consiste un des plus puissants remèdes contre le mal de la société moderne impie et séparée de Dieu?
- Oui, c'est dans la vertu de foi et dans les dons d'intelligence et de science qui l'accompagnent, quand les fidèles ont la grâce, que consiste un des plus puissants remèdes contre le mal de la société moderne impie et séparée de Dieu.
- Quels sont les vices opposés à ces merveilleux dons du Saint-Esprit que sont l'intelligence et la science?
- Ce sont: l'ignorance, qui s'oppose à la science, et l'aveuglement de l'esprit avec l'hébétation du sens, qui s'opposent à l'intelligence (II-II 15,1-2).
- D'où viennent ces divers vices, surtout les deux derniers?
- Ils viennent tout spécialement des péchés charnels qui étouffent la vie de l'esprit (II-II 15,3).
Caté Somme - 19. La loi divine - le Décalogue