1964 Ecclesiam suam 89

Les religions non chrétiennes

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Puis, autour de nous nous voyons se dessiner un autre cercle, immense lui aussi, mais moins éloigné de nous : c'est avant tout celui des hommes qui adorent le Dieu unique et souverain, celui que nous adorons nous aussi ; Nous faisons allusion aux fils, dignes de Notre affectueux respect, du peuple hébreu, fidèles à la religion que nous nommons de l'Ancien Testament ; puis aux adorateurs de Dieu selon la conception de la religion monothéiste - musulmane en particulier - qui méritent admiration pour ce qu'il y a de vrai et de bon dans leur culte de Dieu ; et puis encore aux fidèles des grandes religions afro-asiatiques. Nous ne pouvons évidemment partager ces différentes expressions religieuses, ni ne pouvons demeurer indifférents, comme si elles s'équivalaient toutes, chacune à sa manière, et comme si elles dispensaient leurs fidèles de chercher si Dieu lui-même n'a pas révélé la forme exempte d'erreur, parfaite et définitive, sous laquelle il veut être connu, aimé et servi ; au contraire, par devoir de loyauté, nous devons manifester notre conviction que la vraie religion est unique et que c'est la religion chrétienne, et nourrir l'espoir de la voir reconnue comme telle par tous ceux qui cherchent et adorent Dieu.

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Mais Nous ne voulons pas refuser de reconnaître avec respect les valeurs spirituelles et morales des différentes confessions religieuses non chrétiennes ; Nous voulons avec elles promouvoir et défendre les idéaux que nous pouvons avoir en commun dans le domaine de la liberté religieuse, de la fraternité humaine, de la saine culture, de la bienfaisance sociale et de l'ordre civil. Au sujet de ces idéaux communs, un dialogue de Notre part est possible et Nous ne manquerons pas de l'offrir là où, dans un respect réciproque et loyal, il sera accepté avec bienveillance.

Les chrétiens non catholiques

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Et voici le cercle du monde le plus voisin de Nous, celui qui s'appelle chrétien. Dans ce domaine, le dialogue, qui a pris le nom d'oecuménique, est déjà ouvert ; dans certains secteurs, il est déjà entré dans un développement positif. Il y aurait beaucoup à dire sur ce sujet si complexe et si délicat. Mais Nous ne pouvons l'épuiser ici, où Nous Nous limitons à quelques traits, d'ailleurs déjà connus. Volontiers, Nous faisons Nôtre le principe : mettons en évidence avant tout ce que nous avons de commun, avant de noter ce qui nous divise. C'est là un thème bon et fécond pour notre dialogue. Nous sommes disposé à le poursuivre cordialement. Nous dirons plus : que sur de nombreux points qui nous différencient, en fait de tradition, de spiritualité, de lois canoniques, de culte, Nous sommes prêt à étudier comment répondre aux légitimes désirs de Nos frères chrétiens, encore séparés de Nous. Rien ne peut Nous être plus désirable que de les embrasser dans une parfaite union de foi et de charité. Mais Nous devons dire aussi qu'il n'est pas en Notre pouvoir de transiger sur l'intégrité de la foi et sur les exigences de la charité. Nous entrevoyons des défiances et des résistances à cet égard. Mais maintenant que l'Eglise catholique a pris l'initiative ('décision spontanée') de recomposer l'unique bercail du Christ, elle ne cessera d'avancer en toute patience et avec tous les égards possibles ; elle ne cessera pas de montrer comment les prérogatives qui tiennent encore éloignés d'elle les frères séparés ne sont pas le fruit d'ambitions historiques ou d'une spéculation théologique imaginaire, mais qu'elles dérivent de la volonté du Christ et que, comprises dans leur véritable signification, elles tournent au bien de tous, servent à l'unité commune, à la liberté commune et à la commune plénitude chrétienne ; l'Eglise catholique ne cessera de se rendre capable et digne, dans la prière et dans la pénitence, de la réconciliation désirée.

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Une pensée à cet égard Nous afflige, celle de voir que c'est précisément Nous, défenseur de cette réconciliation, qui sommes considéré par beaucoup de nos frères séparés comme l'obstacle, à cause du primat d'honneur et de juridiction que le Christ a conféré à l'apôtre Pierre, et que Nous avons hérité de lui. Certains ne disent-ils pas que si la primauté du Pape était écartée, l'union des Eglises séparées avec l'Eglise catholique serait plus facile ? Nous voulons supplier les frères séparés de considérer l'inconsistance d'une telle hypothèse et non seulement parce que sans le Pape l'Eglise catholique ne serait plus telle, mais parce que l'office pastoral suprême, efficace et décisif de Pierre venant à manquer dans l'Eglise du Christ, l'unité se décomposerait ; et on chercherait en vain ensuite à la recomposer sur des principes qui remplaceraient le seul principe authentique, établi par le Christ lui-même : "Il y aurait dans l'Eglise autant de schismes qu'il y a de prêtres", écrit justement saint Jérôme (Dial. Contra Luciferianos n. 9 ; PL 23, 173) Et il faut aussi considérer que ce pivot central de la sainte Eglise ne veut pas constituer une suprématie d'orgueil spirituel et de domination humaine, mais une primauté de service, de ministère et d'amour. Ce n'est pas vaine rhétorique d'attribuer au Vicaire du Christ le titre de "Serviteur des serviteurs de Dieu".
Tel est le plan sur lequel veille Notre dialogue qui, avant même de se dérouler en conversations fraternelles, s'exprime en colloque avec le Père céleste, en effusion de prière et d'espérance.

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Nous devons noter avec joie et avec confiance, Vénérables Frères, que ce secteur varié et très étendu des chrétiens séparés est tout pénétré de ferments spirituels qui semblent préluder à des développements consolants pour la cause de leur remembrement dans l'unique Eglise du Christ. Nous voulons implorer le souffle de l'Esprit-Saint sur le "mouvement oecuménique" ; Nous voulons répéter Notre émotion et Notre joie pour l'entrevue pleine de charité tout autant que de nouvelle espérance que Nous avons eue, à Jérusalem, avec le patriarche ATHENAGORAS ; Nous voulons saluer avec respect et avec reconnaissance la participation de tant de représentants des Eglises séparées au second Concile oecuménique du Vatican ; Nous voulons assurer encore une fois que Nous considérons avec attention et religieux intérêt les phénomènes spirituels ayant rapport au problème de l'unité qui intéressent des personnes, des groupes et des communautés dotés d'une vie religieuse vivante et noble. Avec amour, avec respect, Nous saluons tous ces chrétiens, dans l'attente de pouvoir encore mieux, dans le dialogue de la sincérité et de l'amour, promouvoir avec eux la cause du Christ et de l'unité voulue par lui pour son Eglise.

L'obéissance sous forme de dialogue au sein de l'Eglise

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Et finalement Notre dialogue s'offre aux fils de la Maison de Dieu, l'Eglise une, sainte, catholique et apostolique, dont l'Eglise de Rome est "la mère et la tête". Comme Nous voudrions le goûter en plénitude de foi, de charité, d'oeuvres, ce dialogue de famille ! Combien Nous le voudrions intense et familier ! Combien sensible à toutes les vérités, à toutes les vertus, à toutes les réalités de notre patrimoine doctrinal et spirituel ! Combien sincère et ému dans son authentique spiritualité ! Combien prompt à accueillir les voix multiples du monde contemporain ! Combien capable de faire des catholiques des hommes vraiment bons, des hommes sages, des hommes libres, des hommes pleins de sérénité et de force

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Ce désir de donner aux rapports intérieurs de l'Eglise la marque d'un dialogue entre les membres d'une communauté dont la charité est le principe constitutif ne supprime pas l'exercice de la vertu d'obéissance là où l'exercice de la fonction propre de l'autorité, d'une part, de la soumission de l'autre, est réclamé, soit par l'ordre convenable à toute société bien organisée, soit surtout par la constitution hiérarchique de l'Eglise. L'autorité de l'Eglise est instituée par le Christ ; bien plus, elle le représente, elle est le véhicule autorisé de sa parole, elle est la traduction de sa charité pastorale ; si bien que l'obéissance part d'un motif de foi, devient école d'humilité évangélique, associe l'obéissant à la sagesse, à l'unité, à l'édification, à la charité qui soutiennent le corps ecclésial, confère à qui l'impose et à qui s'y conforme le mérite de l'imitation du Christ "qui s'est fait obéissant jusqu'à la mort".
Ph 2,8

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Par obéissance sous forme de dialogue Nous entendons l'exercice de l'autorité tout pénétré de la conscience d'être service, ministère de vente et de charité ; et Nous entendons l'observation des normes canoniques et la soumission respectueuse au gouvernement du supérieur légitime, avec promptitude et sérénité, ainsi qu'il convient à des fils libres et aimants. L'esprit d'indépendance, de critique, de rébellion, s'accorde mal avec la charité qui inspire la solidarité, la concorde et la paix dans l'Eglise ; il transforme facilement le dialogue en contestation, en dispute, en dissension ; phénomène très fâcheux, encore qu'il naisse, hélas ! si aisément et contre lequel la voix de l'apôtre Paul nous prémunit : "Qu'il n'y ait pas parmi vous de divisions".
1Co 1,10

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C'est dire que Nous désirons ardemment que le dialogue, intérieur au sein de la communauté ecclésiale gagne en ferveur, s'enrichisse de nouveaux sujets, de nouveaux interlocuteurs, si bien que croissent la vitalité et la sanctification du Corps mystique terrestre du Christ. Tout ce qui met en circulation les enseignements dont l'Eglise est dépositaire et dispensatrice, Nous le désirons. Nous avons déjà parlé de la vie liturgique et intérieure et de la prédication Nous pourrions ajouter : l'école, la presse, l'apostolat social, les missions, l'exercice de la charité ; autant de sujets que le Concile nous fera considérer. Et que tous ceux qui, sous la direction des autorités compétentes, participent au dialogue vitalisant de l'Eglise soient encouragés et bénis par Nous : les prêtres, d'une manière spéciale, les religieux, les très chers laïcs qui militent pour le Christ dans l'Action catholique et dans tant d'autres formes d'association et d'action.


CONCLUSION


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C'est pour Nous source de joie et de réconfort d'observer qu'un tel dialogue à l'intérieur de l'Eglise et avec l'extérieur le plus proche est déjà existant : l'Eglise est vivante aujourd'hui plus que jamais ! Mais à bien considérer les choses, il semble que tout reste encore à faire ; le travail commence aujourd'hui et ne finit jamais. Telle est la loi de notre pèlerinage sur la terre et dans le temps. Tel est le devoir ordinaire de notre ministère, Vénérés Frères ; et aujourd'hui, tout nous invite à le remplir de manière neuve, vigilante, intense.

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Quant à Nous, tandis que Nous vous en avertissons, Nous aimons mettre Notre confiance en votre collaboration et Nous vous offrons la Nôtre ; cette communion de buts et d'oeuvres, Nous l'avons demandée et Nous l'avons manifestée à peine monté - avec le nom de l'Apôtre des gentils, et Dieu veuille, avec quelque chose de son esprit - sur la Chaire de l'apôtre Pierre ; et célébrant ainsi l'unité du Christ entre nous, Nous vous envoyons, avec cette première encyclique, dans le Nom du Seigneur, Notre fraternelle et paternelle Bénédiction apostolique, que Nous étendons volontiers à toute l'Eglise et à l'humanité entière.


Paul VI, Pape


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