1981 Familiaris consortio 78

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Mariages mixtes

78. Le nombre croissant de mariages entre catholiques et autres baptisés requiert par ailleurs une attention pastorale particulière à la lumière des orientations et des normes contenues dans les plus récents documents du Saint-Siège et dans ceux que les Conférences épiscopales ont élaborés, pour en permettre l'application concrète dans les diverses situations.
Les couples qui vivent l'expérience d'un mariage mixte présentent des exigences particulières qu'on peut réduire à trois catégories principales.
Avant tout, il faut avoir présent à l'esprit les devoirs de la partie catholique qui découlent de la foi, pour tout ce qui concerne le libre exercice de celle-ci et l'obligation qui s'ensuit de pourvoir, selon ses propres forces, à ce que les enfants soient baptisés et éduqués dans la foi catholique.
Il faut tenir compte des difficultés particulières inhérentes aux rapports entre mari et femme pour tout ce qui regarde le respect de la liberté religieuse : celle-ci peut être violée soit par des pressions indues pour obtenir le changement des convictions religieuses du conjoint, soit par des obstacles qui seraient mis à la libre manifestation de ces convictions dans la pratique: religieuse.
En ce qui concerne la forme liturgique et Canonique du mariage, les Ordinaires peuvent faire largement usage de leurs facilités selon les diverses nécessités.
En traitant de ces exigences spéciales, il faut tenir compte des Points suivants :
- dans la préparation qui convient à ce type de mariage, on doit accomplir tout effort raisonnable pour bien faire comprendre la doctrine catholique sur les qualités et les exigences du mariage, comme aussi pour s'assurer que n'existeront pas à l'avenir les pressions et les obstacles dont on vient de parler ;
- il est de la plus grande importance que, avec l'appui de sa communauté, la partie catholique soit fortifiée dans sa foi et positivement aidée à en acquérir une compréhension plus mûre et à mieux la pratiquer, de manière à devenir un vrai témoin crédible au sein de la famille, à travers la vie et la qualité de l'amour manifesté a l'autre conjoint et aux enfants.
Les mariages entre catholiques et autres baptisés présentent, tout en ayant une physionomie particulière, de nombreux éléments qu'il est bon de valoriser et de développer, soit pour leur valeur intrinsèque, soit pour la contribution qu'ils peuvent apporter au mouvement oecuménique. Cela se vérifie en particulier lorsque les deux époux sont fidèles à leurs engagements religieux. Le baptême commun et le dynamisme de la grâce fournissent aux époux, dans ces mariages, le fondement et la motivation qui les portent à exprimer leur unité dans la sphère des valeurs morales et spirituelles.
Dans ce but, et aussi pour mettre en évidence l'importance oecuménique d'un tel mariage mixte, vécu pleinement dans la foi des deux conjoints chrétiens, on recherchera, même si cela ne s'avère pas toujours facile, une cordiale collaboration entre le ministre catholique et le ministre non catholique, dès le moment de la préparation au mariage et des noces.
Quant à la participation du conjoint non catholique à la communion eucharistique, on suivra les normes établies par le Secrétariat pour l'unité des chrétiens. (Instruction In quibus rerum circumstantiis, 15/6/1972 . Note du 17/10/1973).
En diverses parties du monde, on enregistre un nombre croissant de mariages entre catholiques et non baptisés. Dans nombre d'entre eux, le conjoint non baptisé professe une autre religion et ses convictions doivent être traitées avec respect, selon les principes de la déclaration Nostra aetate du Concile oecuménique Vatican II sur les relations avec les religions non chrétiennes. Mais dans beaucoup d'autres cas, particulièrement dans les sociétés sécularisées, la personne non baptisée ne professe aucune religion. Pour ces mariages, il est nécessaire que les Conférences épiscopales et les différents évêques prennent des mesures pastorales adéquates, visant à garantir la défense de la foi du conjoint catholique et la sauvegarde de son libre exercice, surtout quant à son devoir de faire ce qui est en son pouvoir pour que les enfants soient baptisés et éduqués de manière catholique. Le conjoint catholique doit être également soutenu de toute façon dans son effort pour donner, à l'intérieur de la famille chrétienne, un témoignage authentique de foi et de vie catholiques.

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Action pastorale devant certaines situations irrégulières

79. Dans le soin qu'il a mis à protéger la famille dans toutes ses dimensions - et pas seulement la dimension religieuse -, le Synode des Evêques n'a pas manqué de prendre attentivement en considération quelques-unes des situations qui sont irrégulières au plan religieux et souvent même au plan civil et qui, dans les changements rapides affectant aujourd'hui les cultures, sont en train, hélas, de se répandre même parmi les catholiques, avec un sérieux dommage pour l'institution familiale et pour la société dont elle constitue la cellule fondamentale.

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a) Le mariage à l'essai

80. Une première situation irrégulière consiste dans ce que l'on appelle "le mariage à l'essai", que beaucoup aujourd'hui voudraient justifier en lui attribuant une certaine valeur. Qu'il soit inacceptable, la raison humaine le laisse déjà entendre par elle-même, en montrant combien il est peu convaincant de parler d'un "essai" quand il s'agit de personnes humaines, dont la dignité exige qu'elles soient toujours et seulement le terme de l'amour de donation sans aucune limite, de temps ou autre.
Pour sa part, l'Eglise ne peut admettre ce type d'union pour des motifs supplémentaires et originaux découlant de la foi. D'un côté, en effet, le don du corps dans le rapport sexuel est le symbole réel de la donation de toute la personne ; une telle donation, d'ailleurs, dans le dessein actuel de Dieu, ne peut se réaliser dans sa pleine vérité sans le concours de l'amour de charité donné par le Christ. Et d'un autre côté, le mariage entre deux baptisés est le symbole réel de l'union du Christ avec l'Eglise, union qui n'est pas temporaire ou "à l'essai", mais éternellement fidèle ; entre deux baptisés, il ne peut donc exister qu'un mariage indissoluble.
Une telle situation ne peut normalement être surmontée si la personne humaine n'a pas été éduquée depuis son enfance, avec l'aide de la grâce du Christ et sans crainte, à dominer la concupiscence naissante et à instaurer avec les autres des rapports d'amour véritable. Cela ne s'obtient pas sans une vraie formation à l'amour authentique et à l'usage correct de la sexualité, capable d'introduire la personne humaine selon toutes ses dimensions, et donc aussi son corps, dans la plénitude du mystère du Christ.
Il sera très utile d'enquêter sur les causes de ce phénomène, même dans son aspect psychologique et sociologique, pour arriver à trouver une thérapie adéquate.

81

b) Unions libres de fait

81. Il s'agit d'unions qui n'ont aucun lien institutionnel publiquement reconnu, ni civil, ni religieux. Ce phénomène, toujours plus fréquent, ne peut pas ne pas attirer l'attention des pasteurs d'âmes, d'autant plus qu'il provient d'éléments bien divers et qu'en agissant sur eux il sera peut-être possible d'en limiter les conséquences.
Certains, en effet, se considèrent comme contraints à cet état par des situations difficiles d'ordre économique, culturel et religieux, dans la mesure où, en contractant un mariage régulier, ils seraient exposés à un dommage, à la perte d'avantages économiques, à des discriminations, etc. Chez d'autres, on rencontre une attitude de mépris, de contestation ou de rejet de la société, de l'institution familiale, de l'ordre socio-politique, ou encore la seule recherche du plaisir. D'autres, enfin, y sont poussés par l'ignorance et la pauvreté extrêmes, parfois aussi par des conditions de vie dues à des situations de véritable injustice, ou encore par une certaine immaturité psychologique qui les rend hésitants et leur fait craindre de contracter un lien stable et définitif. En certains pays, les coutumes traditionnelles prévoient le mariage proprement dit seulement après une période de cohabitation et après la naissance du premier enfant.
Chacun de ces éléments pose à l'Eglise des problèmes pastoraux ardus, à cause des graves conséquences qui en découlent, soit au plan religieux et moral (perte du sens religieux du mariage, conçu à la lumière de l'Alliance de Dieu avec son peuple ; privation de la grâce du sacrement ; grave scandale), soit même au plan social (destruction du concept de la famille ; affaiblissement du sens de la fidélité, même envers la société ; traumatismes psychologiques possibles chez les enfants ; affirmation de l'égoïsme).
Les pasteurs et la communauté ecclésiale s'appliqueront à bien connaître de telles situations et leurs causes concrètes, cas par cas ; ils auront à coeur d'approcher avec discrétion et respect ceux qui vivent ainsi ensemble ; de s'employer à les éclairer patiemment, à les reprendre avec charité, à leur donner un témoignage familial chrétien, autrement dit tout ce qui peut les acheminer vers la régularisation de leur situation. Par-dessus tout cependant, on fera une oeuvre de prévention, en cultivant le sens de la fidélité dans toute l'éducation morale et religieuse des jeunes, en les instruisant sur les conditions et les structures qui favorisent cette fidélité sans laquelle il n'y a pas de vraie liberté, en les aidant à mûrir spirituellement, en leur faisant comprendre la riche réalité humaine et surnaturelle du mariage-sacrement.
Le peuple de Dieu interviendra aussi auprès des autorités publiques afin que celles-ci, résistant à ces tendances qui désagrègent la société elle-même et sont dommageables pour la dignité, la sécurité et le bien-être des divers citoyens, s'emploient à éviter que l'opinion publique ne soit entraînée à sous-estimer l'importance institutionnelle du mariage et de la famille. Et parce que, dans beaucoup de régions, à cause de l'extrême pauvreté découlant de structures économiques et sociales injustes et inadaptées, les jeunes ne sont pas dans des conditions leur permettant de se marier comme il convient, il faut souhaiter que la société et les autorités publiques favorisent le mariage légitime grâce à une série d'interventions sociales et politiques de nature à garantir le salaire familial, à prendre des mesures permettant une habitation apte à la vie familiale, à créer des possibilité adéquates de travail et de vie.

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c) Catholiques unis par le seul mariage civil

82. Le cas de catholiques qui, pour des motifs idéologiques ou pour des raisons pratiques, préfèrent contracter un mariage civil, refusant ou repoussant à plus tard la célébration du mariage religieux, devient de plus en plus fréquent. On ne peut considérer que leur situation soit semblable à celle de ceux qui vivent ensemble sans aucun lien, car il y a au moins un certain engagement dans un état de vie précis et probablement stable, même si, souvent, la perspective d'un éventuel divorce n'est pas étrangère à cette décision. En demandant, de la part de l'Etat, la reconnaissance publique d'un tel lien, ces couples montrent qu'ils sont prêts à en assumer aussi les obligations en même temps que les avantages. Malgré cela, l'Eglise ne peut pas non plus accepter cette situation.
L'action pastorale tendra à faire admettre la nécessaire cohérence entre le choix de vie et la foi que l'on professe, et elle s'efforcera de faire tout ce qui est possible pour amener ces personnes à régulariser leur situation selon les principes chrétiens. Tout en faisant preuve à leur égard d'une grande charité et en les amenant à participer à la vie des diverses communautés, les pasteurs de l'Eglise ne pourront malheureusement pas les admettre aux sacrements.

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d) Personnes séparées, et divorcés non remariés

83. Divers motifs, tels l'incompréhension réciproque, l'incapacité de s'ouvrir à des relations interpersonnelles, etc., peuvent amener à une brisure douloureuse, souvent irréparable, du mariage valide. Il est évident que l'on ne peut envisager la séparation que comme un remède extrême après que l'on ait vainement tenté tout ce qui était raisonnablement possible pour l'éviter.
La solitude et d'autres difficultés encore sont souvent le lot du conjoint séparé, surtout s'il est innocent. Dans ce cas, il revient à la communauté ecclésiale de le soutenir plus que jamais, de lui apporter estime, solidarité, compréhension et aide concrète afin qu'il puisse rester fidèle même dans la situation difficile qui est la sienne ; de l'aider à cultiver le pardon qu'exige l'amour chrétien et à rester disponible à une éventuelle reprise de la vie conjugale antérieure.
Le cas du conjoint qui a été contraint au divorce est semblable lorsque, bien conscient de l'indissolubilité du lien du mariage valide, il ne se laisse pas entraîner dans une nouvelle union, et s'emploie uniquement à remplir ses devoirs familiaux et ses responsabilités de chrétien. Alors, son témoignage de fidélité et de cohérence chrétienne est d'une valeur toute particulière pour le monde et pour l'Eglise ; celle-ci doit plus que jamais lui apporter une aide pleine de sollicitude affectueuse, sans qu'il y ait aucun obstacle à son admission aux sacrements.

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e) Les divorcés remariés

84. L'expérience quotidienne montre, malheureusement, que ceux qui ont recours au divorce envisagent presque toujours de passer à une nouvelle union, évidemment sans cérémonie religieuse catholique. Et comme il s'agit là d'un fléau qui, comme les autres, s'attaque de plus en plus largement aux milieux catholiques eux-mêmes, il faut d'urgence affronter ce problème avec la plus grande sollicitude. Les Pères du Synode l'ont expressément étudié. L'Eglise, en effet, instituée pour mener au salut tous les hommes, et en particulier les baptisés, ne peut pas abandonner à eux-mêmes ceux qui - déjà unis dans les liens du sacrement de mariage - ont voulu passer à d'autres noces. Elle doit donc s'efforcer, sans se lasser, de mettre à leur disposition les moyens de salut qui sont les siens.
Les pasteurs doivent savoir que, par amour de la vérité, ils ont l'obligation de bien discerner les diverses situations. Il y a en effet une différence entre ceux qui se sont efforcés avec sincérité de sauver un premier mariage et ont été injustement abandonnés, et ceux qui par une faute grave ont détruit un mariage canoniquement valide. Il y a enfin le cas de ceux qui ont contracté une seconde union en vue de l'éducation de leurs enfants, et qui ont parfois, en conscience, la certitude. subjective que le mariage précédent, irrémédiablement détruit, n'avait jamais été valide.
Avec le Synode, j'exhorte chaleureusement les pasteurs et la communauté des fidèles dans son ensemble à aider les divorcés remariés. Avec une grande charité, tous feront en sorte qu'ils ne se sentent pas séparés de l'Eglise, car ils peuvent et même ils doivent, comme baptisés, participer à sa vie. On les invitera à écouter la Parole de Dieu, a assister au Sacrifice de la messe, à persévérer dans la prière, a apporter leur contribution aux oeuvres de charité et aux initiatives de la communauté en faveur de la justice, à élever leurs enfants dans la foi chrétienne, à cultiver l'esprit de pénitence et à en accomplir les actes, afin d'implorer, jour après jour, la grâce de Dieu. Que l'Eglise prie pour eux, qu'elle les encourage et se montre à leur égard une mère miséricordieuse, et qu'ainsi elle les maintienne dans la foi et l'espérance !
L'Eglise, cependant, réaffirme sa discipline, fondée sur l'Ecriture Sainte, selon laquelle elle ne peut admettre à la communion eucharistique les divorcés remariés. Ils se sont rendus eux-mêmes incapables d'y être admis car leur état et leur condition de vie est en contradiction objective avec la communion d'amour entre le Christ et l'Eglise, telle qu'elle s'exprime et est rendue présente dans l'Eucharistie. Il y a par ailleurs un autre motif pastoral particulier: si l'on admettait ces personnes à l'Eucharistie, les fidèles seraient induits en erreur et comprendraient mal la doctrine de l'Eglise concernant l'indissolubilité du mariage.
La réconciliation par le sacrement de pénitence - qui ouvrirait la voie au sacrement de l'Eucharistie - ne peut être accordée qu'à ceux qui se sont repentis d'avoir violé le signe de l'Alliance et de la fidélité au Christ, et sont sincèrement disposés à une forme de vie qui ne soit plus en contradiction avec l'indissolubilité du mariage. Cela implique concrètement que, lorsque l'homme et la femme ne trouvent pas, pour de graves motifs - par l'exemple l'éducation des enfants remplir l'obligation de la séparation, "ils prennent l'engagement de vivre en complète continence, c'est-à-dire en s'abstenant des actes réservés aux époux " (JP II, Homélie à la messe de clôture du Vie Synode des Evêques, 25/10/1980)
De la même manière, le respect dû au sacrement de mariage, aux conjoints eux-mêmes et à leurs proches, et aussi à la communauté des fidèles, interdit à tous les pasteurs, pour quelque motif ou sous quelque prétexte que ce soit, même d'ordre pastoral, de célébrer, en faveur de divorcés qui se remarient, des cérémonies d'aucune sorte. Elles donneraient en effet l'impression d'une célébration sacramentelle de nouvelles noces valides, et induiraient donc en erreur à propos de l'indissolubilité du manage contracté validement.
En agissant ainsi, l'Eglise professe sa propre fidélité au Christ et à sa vérité ; et en même temps elle se penche avec un coeur maternel vers ses enfants, en particulier vers ceux qui, sans faute de leur part, ont été abandonnés par leur conjoint légitime.
Et avec une ferme confiance, elle croit que même ceux qui se sont éloignés du commandement du Seigneur et continuent de vivre dans cet état pourront obtenir de Dieu la grâce de la conversion et du salut, s'ils persévèrent dans la première la pénitence et la charité.

85

Ceux qui sont sans famille

85. je désire encore ajouter quelques mots en faveur d'une catégorie de personnes que je considère, à cause des conditions concrètes dans lesquelles elles doivent vivre - et souvent sans l'avoir voulu -, particulièrement proches du Coeur du Christ et qui méritent donc affection et sollicitude empressée de l'Eglise et notamment des pasteurs.
Il existe en effet dans le monde un grand nombre de personnes qui malheureusement ne peuvent en aucune façon se référer à ce que l'on pourrait définir une famille au sens propre. De larges portions de l'humanité vivent dans des conditions d'extrême pauvreté, où la promiscuité, le manque de logement, les relations instables et irrégulières, le défaut complet de culture ne permettent pas, dans la pratique, de pouvoir parler de famille. D'autres personnes, pour des raisons diverses, sont restées seules au monde. Pourtant "la bonne nouvelle de la famille" s'adresse aussi à elles.
En ce qui concerne ceux qui vivent dans une pauvreté extrême, j'ai déjà parlé de la nécessité urgente de travailler avec courage afin de trouver des solutions, même au niveau politique, qui permettent de les aider à surmonter cette condition inhumaine de prostration. C'est un devoir qui revient, de façon solidaire, à toute la société, mais d'une manière spéciale aux autorités en raison de leur charge et donc de leur responsabilité, comme aux familles, qui doivent faire preuve d'une grande compréhension et d'une volonté d'entraide.
A ceux qui n'ont pas de famille naturelle, il faut ouvrir davantage encore les portes de la grande famille qu'est l'Eglise, laquelle prend un visage concret dans la famille diocésaine et paroissiale, dans les communautés ecclésiales de base ou dans les mouvements d'apostolat. Personne n'est sans famille en ce monde : l'Eglise est la maison et la famille de tous, en particulier de ceux qui "peinent et ploient sous le fardeau". Mt 11,28

86

CONCLUSION


86. Vers vous, époux, vous, pères et mères de famille ; vers vous, jeunes gens et jeunes filles, qui êtes l'avenir et l'espérance de l'Eglise et du monde et qui serez, à l'aube du troisième millénaire, le noyau actif et vital de la famille ;
vers vous, vénérables et chers Frères dans l'épiscopat et le sacerdoce, chers fils et filles religieux et religieuses, et vous, âmes consacrées au Seigneur, qui êtes les témoins devant les époux de la réalité ultime de l'amour de Dieu ;
vers vous tous, hommes au jugement droit, qui à un titre ou un autre vous préoccupez du sort de la famille,
je me tourne avec une ardente sollicitude en achevant cette exhortation apostolique.


L'avenir de l'humanité passe par la famille !

Il est donc indispensable et urgent que tout homme de bonne volonté s'emploie de toutes ses forces à sauvegarder et à promouvoir les valeurs et les exigences de la famille.
Je me sens poussé à demander à ce sujet un effort particulier aux fils de l'Eglise. Dans la foi, ils ont une pleine connaissance du merveilleux dessein de Dieu, ils ont donc une raison de plus de prendre à coeur la réalité de la famille, dans ce temps d'épreuve et de grâce qui est le nôtre.
Ils doivent aimer la famille de façon particulière. C'est là une consigne concrète et exigeante.
Aimer la famille signifie savoir en estime les valeurs et les possibilités, en cherchant toujours à les promouvoir. Aimer la famille signifie reconnaître les dangers et les maux qui la menacent afin de pouvoir les surmonter. Aimer la famille signifie faire en sorte de lui assurer un milieu qui soit favorable à son développement. Et c'est encore une forme éminente de l'amour que de redonner à la famille chrétienne d'aujourd'hui, souvent tentée de se décourager ou angoissée par les difficultés croissantes, des raisons de croire en elle-même, dans ses richesses de nature et de grâce, dans la mission que Dieu lui a confiée. "Oui, il faut que les familles d'aujourd'hui se ressaisissent ! Il faut qu'elles suivent le Christ! ".(JP II lettre Appropinquat iam 15/8/1980 n.1)
Les chrétiens ont en outre le devoir d'annoncer avec joie et conviction la "bonne nouvelle" sur la famille, laquelle a absolument besoin d'écouter encore et sans cesse et de comprendre toujours plus profondément les paroles authentiques qui lui révèlent son identité, ses ressources intérieures, l'importance de sa mission dans la cité des hommes et dans celle de Dieu.
L'Eglise connaît la route qui conduira la famille au coeur de sa vérité profonde. Cette route, que l'Eglise a apprise à l'école du Christ et à celle de l'histoire interprétée à la lumière de l'Esprit Saint, elle ne l'impose pas, mais elle ressent en elle- même une exigence imprescriptible de la proposer à tous, sans crainte, et même avec une confiance et une espérance très grandes, tout en sachant que la "bonne nouvelle" comporte aussi le langage de la croix. Or c'est à travers la croix que la famille peut atteindre la plénitude de son être et la perfection de son amour.
Je désire enfin inviter tous les chrétiens à collaborer, avec cordialité et courage, avec tous les hommes de bonne volonté qui exercent leurs responsabilités au service de la famille. Ceux qui se dépensent pour son bien, au sein de l'Eglise, en son nom et sous sa conduite, qu'il s'agisse de groupes ou d'individus, de mouvements ou d'associations, trouvent souvent auprès d'eux des personnes ou diverses institutions qui oeuvrent pour le même idéal. Dans la fidélité aux valeurs de l'Evangile et de l'homme, et dans le respect d'un légitime pluralisme d'initiatives, cette collaboration pourra être favorable à une promotion plus rapide et plus totale de la famille.
En conclusion de ce message pastoral qui veut attirer l'attention de tous sur les tâches, lourdes mais passionnantes, de la famille chrétienne, je désire invoquer maintenant la protection de la sainte Famille de Nazareth.
En elle, par un mystérieux dessein de Dieu, le Fils de Dieu a vécu caché durant de longues années. Elle est donc le prototype et l'exemple de toutes les familles chrétiennes. Regardons cette Famille, unique au monde, elle qui a vécu de façon anonyme et silencieuse dans un petit bourg de Palestine, elle qui a été éprouvée par la pauvreté, par la persécution, par l'exil, elle qui a glorifié Dieu d'une manière incomparablement élevée et pure: elle ne manquera pas d'assister les familles chrétiennes, et même toutes les familles du monde, dans la fidélité à leurs devoirs quotidiens, dans la façon de supporter les inquiétudes et les tribulations de la vie, dans l'ouverture généreuse aux besoins des autres, dans l'accomplissement joyeux du plan de Dieu sur elles.
Que saint Joseph, "homme juste", travailleur infatigable, gardien absolument intègre de ce qui lui avait été confié, garde ces familles, les protège, les éclaire toujours !
Que la Vierge Marie, qui est Mère de l'Eglise, soit également la Mère de l'"Eglise domestique" ! Que grâce à son aide maternelle, toute famille chrétienne puisse devenir vraiment une "petite Eglise" dans laquelle se reflète et revive le mystère de l'Eglise du Christ ! Elle qui est la Servante du Seigneur, qu'elle soit l'exemple de l'accueil humble et généreux de la volonté de Dieu ! Elle qui fut la Mère douloureuse au pied de la croix, qu'elle soit là pour alléger les souffrances et essuyer les larmes de ceux qui sont affligés par les difficultés de leurs familles !
Et que le Christ Seigneur, Roi de l'univers, Roi des familles, soit présent, comme à Cana, dans tout foyer chrétien pour lui communiquer lumière, joie, sérénité, force. En ce jour solennel consacré à sa Royauté, je lui demande que toute famille sache apporter généreusement sa contribution originale à l'avènement de son Règne dans le monde, "Règne de vie et de vérité, de grâce et de sainteté, de justice, d'amour et de paix" (Préface de la solennité du Christ-Roi) vers lequel l'histoire est en marche.
A Lui, à Marie, à Joseph, je confie toute famille. Entre leurs mains et dans leur coeur, je dépose cette exhortation : qu'ils vous la remettent eux-mêmes, vénérables Frères et chers Fils, et qu'ils ouvrent vos coeurs à la lumière que l'Evangile rayonne sur chaque famille !
A tous et à chacun, en vous assurant de ma prière constante, j'accorde de grand coeur ma Bénédiction Apostolique au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit.

Donné à Rome près de Saint-Pierre, le 22 novembre 1981, solennité du Christ, Roi de l'Univers, en la quatrième année de mon pontificat.

Joannes Paulus pp. II.
1981 Familiaris consortio 78