Catena Aurea 10517
10517 Lc 15,17-24
S. Grég. de Nysse. (comme précéd). Le plus jeune fils avait traité son père avec mépris en quittant la maison paternelle, et en dissipant tout son patrimoine; mais lorsque dans la suite il fut brisé par les travaux, réduit à la condition de mercenaire, et à manger la même nourriture que les pourceaux, instruit par une aussi grande infortune, il revint dans la maison de son père: «Rentrant alors en lui-même, il dit: Combien de mercenaires, dans la maison de mon père, ont du pain en abondance, et moi ici je meurs de faim». - S. Ambr. Il a bien raison de rentrer en lui-même, lui qui s'en est tant éloigné; car en retournant à Dieu, on se rend à soi-même, et on s'en sépare quand on se sépare de Jésus-Christ. - S. Aug. (Quest. évang., 2, 33). Il rentra en lui-même, lorsqu'il ramena dans l'intérieur de sa conscience ses affections qu'il avait laissé s'égarer sur toutes ces vanités extérieures qui nous séduisent et nous entraînent.
S. Bas. (de la préface des régl. dévelop). On peut distinguer trois degrés d'obéissance d'après leurs différents motifs. Ou bien nous nous éloignons du mal par la crainte des supplices, et nous sommes dans une disposition servile; ou nous faisons ce qui nous est commandé exclusivement par le désir de la récompense, et nous ressemblons à des mercenaires; ou enfin nous obéissons par amour pour le bien et pour celui qui nous a donné la loi, et nos dispositions sont celles d'un véritable fils. - S. Ambr. Car le fils qui a dans son coeur le gage de l'Esprit saint, ne cherche pas les avantages passagers de la terre, mais il conserve ses droits d'héritier. Il y a aussi de bons mercenaires, tels que ceux que le père de famille envoie travailler à sa vigne (Mt 20,1-16). Ils ne se nourrissent pas de siliques, mais ont le pain en abondance. - S. Aug. (Quest. évang). Mais comment pouvait-il le savoir, lui qui, comme tous les idolâtres, était tombé dans un si grand oubli de Dieu? Cette pensée de retour ne lui vint donc qu'à la prédication de l'Évangile. C'est alors que cette âme put déjà s'apercevoir que dans le grand nombre de ceux qui prêchaient la vérité, il en était plusieurs qui n'étaient pas conduits par l'amour de la vérité, mais par le désir d'obtenir les avantages de la terre, quoique cependant ils n'annonçaient pas une autre doctrine, comme font les hérétiques. On les appelle justement mercenaires, parce qu'ils demeurent dans la même maison, et rompent le même pain de la parole; toutefois, ils ne sont pas appelés à l'héritage éternel, mais ils travaillent pour une récompense purement temporelle.
S. Chrys. (comme précéd). Après que cet enfant prodigue a souffert dans une terre étrangère le digne châtiment de ses égarements, vaincu par l'extrémité de ses malheurs, c'est-à-dire par la famine et la pauvreté, il commence à réfléchir sur la cause de sa détresse, lui qui, sous l'impulsion d'une volonté vicieuse a quitté son père pour des étrangers, sa maison pour l'exil, les richesses pour la pauvreté, l'abondance de tous les biens pour l'extrême indigence. Aussi écoutez cet aveu si expressif: «Et moi ici, je meurs de faim», c'est-à-dire, moi qui ne suis pas un étranger, mais le fils d'un si bon père, et le frère d'un fils si soumis, moi qui étais libre et de condition noble, je suis devenu plus misérable que les mercenaires en tombant du comble de ma grandeur première dans l'abîme de l'humiliation. - S. Grég. de Nysse. Il n'y eut pour lui de retour à sa félicité première qu'après qu'il fut rentré en lui-même, pour sentir tout le poids de sa misère, et qu'il eut réfléchi sur les paroles de repentir qui suivent: «Je me lèverai», etc. - S. Aug. (Quest. évang). «Je me lèverai», parce qu'en effet, il était comme étendu à terre; «à mon père», parce qu'il était au service du maître de ces pourceaux. Les autres paroles sont celles du pécheur qui songe à faire pénitence en confessant son péché, mais qui n'en vient pas encore à l'action; car il ne fait pas encore cet aveu à son père; il se propose de le faire lorsqu'il se présentera devant lui. Il faut donc bien comprendre le sens de ces paroles: «Venir à son père»; elles veulent dire être établi par la foi dans l'Église, où la confession peut être légitime et avantageuse. Il prend donc la résolution de dire à son père: «Mon père». - S. Ambr. Qu'il est miséricordieux ce Dieu qui, tout offensé qu'il est, ne dédaigne pas ce nom de père que le pécheur lui donne ! «J'ai péché», c'est le premier aveu que nous devons faire devant l'auteur de notre nature, le roi de la miséricorde, le confident et le juge de nos fautes. Mais bien que Dieu connaisse toutes choses, il attend néanmoins votre confession extérieure, car la confession de bouche (Rm 10,10) est nécessaire pour le salut. Celui qui se charge lui-même, allége le poids de l'erreur qui pèse sur lui, et ôte à l'accusateur le désir de l'accuser, en le prévenant par une confession volontaire. C'est en vain, d'ailleurs, que vous voudriez en dérober la connaissance à celui pour qui rien n'est caché, tandis que vous pouvez sans danger avouer ce que vous savez lui être déjà connu. Confessez-vous donc, pour que le Christ intercède en votre faveur, pour que l'Église prie pour vous, pour que le peuple fidèle verse des larmes sur vous. Ne craignez pas de n'être pas exaucé, votre avocat vous assure du pardon; votre protecteur s'engage à vous donner la grâce; le témoin de la tendresse de votre père vous promet la réconciliation qu'il vous réserve. Il ajoute: «Contre le ciel et devant vous». - S. Chrys. (comme précéd). Ces paroles: «Devant vous», nous apprennent que ce père c'est Dieu, qui seul voit toutes choses, et pour qui les péchés même dont la pensée est comme ensevelie dans le coeur, ne peuvent demeurer cachés.
S. Aug. (Quest. évang). Mais ce péché contre le ciel est-il le même que le péché commis sous les yeux de Dieu, dans ce sens que le ciel serait la majesté sublime du Père? Ou bien faut-il entendre: J'ai péché contre le ciel en présence des âmes saintes qui l'habitent, et devant vous dans le secret de ma conscience? - S. Chrys. (comme précéd). Ou bien encore faut il entendre par le ciel Jésus-Christ? car celui qui pèche contre le ciel, qui malgré son élévation est cependant un élément visible, pèche contre l'homme, dont le Fils de Dieu s'est revêtu pour notre salut. - S. Ambr. Ou encore ces paroles veulent dire que le péché diminue dans l'âme les dons célestes de l'Esprit saint; ou que nous n'aurions pas dû nous séparer du sein de la Jérusalem céleste qui est notre mère. Or, après être tombé si bas, il doit se garder de s'élever, aussi ajoute-t-il: «Je ne suis plus digne d'être appelé votre fils», mais afin que cette humiliation volontaire lui obtienne la grâce dont il déclare n'être point digne, il ajoute: «Traitez-moi comme un de vos mercenaires». - Bède. Il n'ose aspirer à l'affection dont jouit un fils qui ne peut douter que tout ce qui est à son père ne soit à lui, il se contente de demander la condition d'un mercenaire prêt à servir pour son salaire, et encore déclare-t-il qu'il ne peut obtenir cette condition que par l'indulgence de son père.
S. Grég. de Nysse. Le Saint-Esprit, nous décrit les égarements et le retour de cet enfant prodigue, pour nous apprendre comment nous devons déplorer les égarements de notre coeur. - S. Chrys. (hom. 14 sur l'Epît. aux Rom). Aussitôt qu'il a pris cette résolution, source pour lui de tous les biens: «J'irai vers mon Père», il franchit sans tarder la distance qui le sépare de lui: «Et se levant, il vint vers son pore». Imitons son exemple, ne soyons pas effrayés de la longueur du chemin; car pourvu que nous le voulions, le retour sera prompt et facile; il suffit que nous nous détachions du péché qui nous a éloignés de la maison paternelle. Mais voyez la tendresse de ce bon père pour ceux qui reviennent à lui: «Comme il était encore loin, son père le vit», etc. - S. Aug. (Quest. évang). Avant même qu'il comprit ce qu'était Dieu, dont il était si éloigné, mais qu'il commençait à chercher avec amour, son père le vit. L'Écriture nous dit avec raison que Dieu ne voit point les impies et les superbes, comme s'ils n'étaient pas présents à ses yeux; car il n'y a que ceux qu'on aime dont on puisse dire qu'on les a toujours devant les yeux.
S. Chrys. (Ch. des Pèr. gr). Le père comprit le repentir de son fils, il n'attendit point qu'il eût fait l'aveu de ses fautes, et il prévint ses désirs par les effets de sa miséricorde: «Et il fut touché de compassion». - S. Grég. de Nysse. La volonté de confesser ses égarements suffit pour apaiser son père, le déterminer à aller à sa rencontre et à couvrir son cou de ses baisers: «Il accourut, se jeta à son cou, et le baisa». C'est la figure du joug spirituel imposé aux lèvres de l'homme par la tradition évangélique qui a mis fin aux observances légales. - S. Chrys. (hom. sur le pèr. et ses deux enfants). Or, que signifie cette condescendance du père qui va à la rencontre de son fils? c'est que nos péchés étaient un obstacle insurmontable qui nous empêchait d'arriver jusqu'à Dieu par nos propres forces. Mais pour lui qui pouvait parvenir jusqu'à notre infirmité, il est descendu jusqu'à nous; et il baise cette bouche d'où était sortie la confession dictée par un coeur repentant, et que ce bon père a reçue avec tant de joie.
S. Ambr. Il vient donc à votre rencontre, parce qu'il entend le langage des secrètes pensées de votre coeur; et alors que vous êtes encore bien loin, il accourt au-devant de vous pour lever tous les obstacles: il embrasse son fils avec effusion, (car il vient à sa rencontre dans sa prescience, et l'embrasse dans sa tendresse), et se jette à son cou par un élan d'amour paternel, pour relever ce fils si abattu, et redresser vers le ciel celui qui était accablé sous le poids de ses péchés, et courbé vers les choses de la terre. Aussi j'aime mieux être le fils égaré que la brebis perdue, car si la brebis est retrouvée par le pasteur, le fils est comblé d'honneur par son père. - S. Aug. (quest. Evang). Ou bien encore, il accourt et se jette à son cou: parce que ce père n'a pas quitté son Fils unique dans lequel il est accouru jusque dans notre lointain pèlerinage; car Dieu était dans Jésus-Christ se réconciliant le monde. (2Co 5,19). Il tombe sur son cou, c'est-à-dire, qu'il abaisse pour l'étreindre son bras, qui est Notre-Seigneur Jésus-Christ (1Co 1,24 Is 53,1 Lc 1,51). Il le console par la parole de la grâce qui lui donne l'espérance de la rémission de ses péchés; c'est ainsi qu'au retour de ses longs égarements, il lui donne le baiser d'amour paternel. Une fois entré dans l'Église, il commence la confession de ses péchés; mais sans la faire aussi complète qu'il se l'était proposé: «Et le Fils lui dit: Mon Père, j'ai péché contre le ciel et à vos yeux, je ne suis plus digne d'être appelé votre fils». Il veut obtenir de la grâce de Dieu ce dont il avoue que ses fautes le rendent indigne, car il n'ajoute pas ce qu'il s'était proposé de dire: «Traitez-moi comme un de vos mercenaires». Lorsqu'il était sans pain, il désirait la condition des mercenaires, mais il la dédaigne avec une noble fierté après qu'il a reçu le baiser de son père.
S. Chrys. (Ch. des Pèr. gr). Le père n'adresse point la parole à son fils, mais à ses serviteurs, parce que le pécheur repentant est tout entier à la prière, et ne reçoit pas une réponse verbale, mais prouve intérieurement les effets puissants de la miséricorde divine: «Et le père dit à ses serviteurs: Apportez vite sa robe première et l'en revêtez». - Théophyl. Ces serviteurs, ce sont ou les anges qui servent à Dieu de ministres, ou les prêtres qui par le baptême et la parole sainte revêtent l'âme en Jésus-Christ «Car nous tous qui avons été baptisés en Jésus-Christ, nous avons revêtu Jésus-Christ». (Ga 3,27). - S. Aug. (quest. Evang). Ou bien cette robe première, c'est la dignité qu'Adam a perdue par son péché: les serviteurs qui l'apportent sont les prédicateurs de la réconciliation. - S. Ambr. Ou bien cette robe, c'est le vêtement de la sagesse dont les apôtres couvrent la nudité de notre corps; cette robe première, c'est le premier degré de la sagesse, parce qu'il en est une autre pour laquelle il n'y a point de mystère. L'anneau est le signe d'une foi sincère et l'emblème de la vérité: «Et mettez-lui un anneau au doigt». - Bède. C'est-à-dire, dans l'action, afin que ses oeuvres fassent éclater sa foi, et que la foi à son tour confirme les oeuvres. - S. Aug. (quest. Evang). Ou bien l'anneau au doigt c'est le gage de l'Esprit saint, à cause de la participation à la grâce dont le doigt est comme la figure. - S. Chrys. (hom. sur le Père et ses deux enf). Ou bien il commande de lui mettre au doigt un anneau, comme le symbole du signe du salut, ou plutôt comme un signe d'alliance, et un gage de l'union que Jésus-Christ contracte avec l'Église son épouse, et aussi avec l'âme repentante qui s'unit avec Jésus-Christ par l'anneau de la foi,
S. Aug. (quest. Evang). La chaussure qu'on lui met aux pieds figure la préparation à la prédication de l'Évangile qui consiste à ne point s'approcher de trop près des choses de la terre: «Et mettez-lui une chaussure aux pieds». - S. Chrys. (comme précéd). Ou bien il commande de lui mettre une chaussure aux pieds, soit pour protéger ses pas, et donner à sa marche plus de fermeté dans les sentiers gus. sauts de ce monde, soit comme symbole de la mortification des membres, car tout le cours de notre vie est comparé au pied dans les Écritures (Jb 23,11 Ps 25,12 Pr 3,23 Si 6,25 Si 1,20), et les chaussures sont comme un symbole de mortification, puisqu'elles sont faites avec des peaux d'animaux qui sont morts. Le père commande ensuite d'amener le veau gras et de le tuer pour le festin qu'il fait préparer: «Et amenez le veau gras», c'est-à-dire Notre-Seigneur Jésus-Christ, ainsi appelé à cause du sacrifice de son corps immaculé; et parce qu'il est une victime si riche et si excellente, qu'elle suffit à la rédemption du monde entier. Ce n'est pas le père lui-même qui met à mort le veau gras, mais il le laisse immoler à d'autres, car c'est par la permission du Père, et le consentement du Fils que ce dernier a été crucifié par les hommes. - S. Aug. (quest. Evang). Ou bien le veau gras est le Seigneur qui dans son incarnation a été rassasié d'opprobres. Il commande qu'on l'amène, c'est-à-dire qu'on l'annonce, et qu'en l'annonçant on rende la vie aux entrailles épuisées de ce fils mourant de faim. Il ordonne aussi de le mettre à mort, c'est-à-dire de prêcher sa mort, car il est vraiment immolé pour celui qui croit à son immolation et à sa mort.
«Mangeons et réjouissons-nous». - S. Ambr. Mangeons la chair du veau gras, parce que c'était la victime que le prêtre offrait pour ses péchés. Notre-Seigneur nous représente son Père se livrant à la joie d'un festin, pour nous montrer que le salut de notre âme est la nourriture de son Père, et que la rémission de nos péchés est sa joie. - S. Chrys. (comme précéd). Le père se réjouit du retour de son fils, et en signe de joie fait un festin avec le veau gras; ainsi le Créateur se réjouit des fruits de miséricorde produits par l'immolation de son fils, et l'acquisition du peuple fidèle est pour lui comme un festin de joie: «Car mon fils que voici était mort, et il revit, il était perdu, et il est retrouvé». - S. Athan. Celui-là seul meurt qui a existé: ainsi les Gentils n'existent plus, le chrétien seul est vivant. On peut encore entendre ces paroles du genre humain: Adam a existé, et nous avons tous existé en lui, il est mort, et tous sont morts en lui, l'homme est donc réparé dans cet homme qui était mort. On peut aussi les appliquer à celui qui fait pénitence, car il ne peut mourir sans avoir auparavant vécu, quant aux gentils ils ont reçu la vie par la grâce aussitôt qu'ils eurent embrassé la foi, tandis que celui qui tombe dans le péché, revient à la vie par la pénitence. - Théophyl. Si l'on n'a égard qu'à l'excès de ses vices, il était mort sans espoir de retour; mais si l'on considère la nature humaine, qui est sujette à la mutabilité, et peut se convertir du vice à la vertu, il était simplement perdu, car c'est un moindre mal de se perdre que de mourir. Tout homme ainsi rappelé à la vie et purifié de ses crimes participe au veau gras et devient une cause de joie pour son père et pour ses serviteurs, c'est-à-dire pour les anges et pour les prêtres: «Et ils commencèrent à faire grande chère». - S. Aug. (quest. Evang). Ces festins de joie et cette fête se célèbrent aujourd'hui par toute l'Église répandue dans tout l'univers, car ce veau gras qui est le corps et le sang du Seigneur est offert à Dieu le Père, et nourrit toute la maison.
10525 Lc 15,25-32
Bède. Aux murmures des scribes et des pharisiens, qui reprochaient au Sauveur d'accueillir favorablement les pécheurs; il répond par trois paraboles, qu'il leur expose successivement. Dans les deux premières, il montre combien la conversion des pécheurs est un sujet de joie pour lui et pour les anges; le but de cette troisième parabole n'est plus seulement de faire ressortir cette grande joie, mais de condamner les murmures de ces esprits envieux: «Cependant, poursuit-il, son fils aîné était dans les champs». - S. Aug. (Quest. évang). Ce fils aîné, c'est le peuple d'Israël; il n'est point allé dans une région lointaine, cependant il n'est pas dans la maison, il est dans les champs, c'est-à-dire, qu'il travaille pour acquérir les biens de la terre dans le riche héritage de la loi et des prophètes. Il revient des champs et approche de la maison, c'est-à-dire, qu'il désapprouve les travaux de son oeuvre servile, en considérant d'après les mêmes Écritures la liberté de l'Église: «Et comme il revenait et approchait de la maison, il entendit une symphonie et des danses»,c'est-à-dire, ceux qui, remplis de l'Esprit saint, prêchaient l'Évangile dans une parfaite harmonie de doctrine: «Et il appela un des serviteurs»,etc., c'est-à-dire, qu'il se met à lire un des prophètes et cherche à savoir en l'interrogeant la cause de ces fêtes qu'on célèbre dans l'Église, dont il voit qu'il ne fait pas encore partie. Le prophète, serviteur de son père, lui répond: «Votre frère est revenu»,etc. Comme s'il lui disait: Votre frère s'en était allé jusqu'aux extrémités de la terre, de là cette joie. plus vive de ceux qui font entendre des chants nouveaux, car «ses louanges retentissent d'un bout de la terre à l'autre». (Is 42,10). Et pour fêter le retour de celui qui était égaré, on a immolé l'homme qui sait ce que c'est de souffrir, «parce que ceux auxquels il n'avait point été annoncé l'ont vu». (Is 53, 3; Is 52, 45).
S. Ambr. Le peuple d'Israël représenté par le frère aîné, envie à son plus jeune frère, c'est-à-dire, au peuple des Gentils, le bienfait de la bénédiction paternelle; ce que faisaient les Juifs, en voyant Jésus-Christ manger avec les païens: «Il s'indigna et ne voulait pas entrer». - S. Aug. (Quest. évang). Cette indignation dure encore aujourd'hui, et ce peuple persiste à ne vouloir pas entrer. Mais lorsque la plénitude des nations sera entrée dans l'Église, le père sortira dans le temps favorable, afin que tout Israël soit sauvé. (Rm 11, 23.26) :
«Son père donc étant sorti, se mit à le prier». Les Juifs, en effet, seront un jour ouvertement appelés au salut apporté par l'Évangile, et cette vocation manifeste nous est ici représentée par la sortie du père, qui vient prier son fils aîné d'entrer. La réponse du fils aîné soulève deux questions: «Il répondit à son père: Voilà tant d'années que je vous sers, et je n'ai jamais manqué à un de vos commandements», etc. Il est évident d'abord que cette fidélité à ne transgresser aucun commandement, ne doit pas s'entendre de tous les commandements, mais de celui qui est le premier et le plus nécessaire, c'est-à-dire, qu'on ne l'a jamais vu adorer d'autre Dieu que le Dieu, seul créateur de toutes choses (Ex 20, 3). Il n'est pas moins certain que ce fils aîné ne représente pas tous les Israélites, mais ceux qui n'ont jamais quitté le culte du vrai Dieu pour adorer les idoles; car bien que ses désirs eussent pour objet les biens de la terre, il n'attendait cependant que du seul vrai Dieu ces biens communs ici-bas aux justes et aux pécheurs, selon ces paroles du Psalmiste: «Je suis devenu semblable devant vous à l'animal stupide, cependant j'ai toujours été avec vous» (Ps 72, 22.23). Mais quel est le chevreau qu'il n'a jamais reçu pour faire un festin? «Et vous ne m'avez jamais donné un chevreau pour faire bonne chère avec mes amis».Le pécheur est ordinairement figuré sous l'emblème du bouc ou de chevreau. - S. Ambr. Les Juifs demandent un chevreau, et les chrétiens un agneau; aussi on leur délivre Barabbas, tandis que l'agneau est immolé pour nous. Le fils aîné se plaint qu'on ne lui ait point donné un chevreau, parce que les Juifs ont perdu les rites de leurs anciens sacrifices; ou bien ceux qui désirent un chevreau sont ceux qui attendent l'Antéchrist. - S. Aug. (Quest. évang). Cependant, je ne vois pas comment on peut appliquer les conséquences de cette interprétation, car il est souverainement absurde que ce fils, à qui son père dira bientôt: «Vous êtes toujours avec moi», ait demandé à son père de croire à l'Antéchrist. On ne peut pas davantage voir dans ce fils ceux des Juifs qui devaient embrasser le parti de l'Antéchrist. Or, si ce chevreau est la figure de l'Antéchrist, comment pourrait-il en faire un festin, lui qui ne croit pas à l'Antéchrist? Mais si le festin de joie qui est fait avec ce chevreau signifie la joie produite par la ruine de l'Antéchrist, comment ce fils aîné du père peut-il dire que cette faveur ne lui ait jamais été accordée, puisque tous ses enfants doivent se réjouir de sa ruine? Il se plaint donc que le Seigneur ne lui ait pas été donné en festin, parce qu'il le prend pour un pécheur, car comme cette nation considère le Sauveur comme un chevreau ou comme un bouc, en le regardant comme un violateur et un profanateur du sabbat, elle n'a pu mériter la faveur d'être admise à son festin. Ces paroles: «Avec mes amis», doivent s'entendre, ou des principaux des Juifs avec le peuple, on des habitants de Jérusalem avec les autres peuples de Juda. -
S. Jér. (lett. 446, parab. du prod. au pape Damase), ou bien encore: «Vous ne m'avez jamais donné un chevreau»,c'est-à-dire, le sang d'aucun prophète ni d'aucun prêtre ne nous a délivrés de la domination romaine.
S. Ambr. Ce fils sans pudeur est semblable au pharisien qui cherchait à se justifier, parce qu'il observait la lettre de la loi, et qu'il accusait son frère d'avoir dévoré son bien avec des femmes perdues: «Et à peine votre autre fils qui a dévoré son bien avec des courtisanes, est-il revenu», etc. - S. Aug. (Quest. évang). Ces femmes perdues sont les superstitions des Gentils, et on dissipe son bien avec elles, quand au mépris de la légitime alliance qu'on a contractée avec le vrai Dieu, on se livre à une honteuse fornication avec le démon. - S. Jér. Il ajoute: «Vous avez tué pour lui le veau gras». Le peuple juif confesse donc que le Christ est venu, mais par un sentiment d'envie, il refuse le salut qui lui est offert. - S. Aug. (comme précéd). Son père ne l'accuse pas de mensonge, il le loue même d'avoir toujours persévéré avec lui, et il l'invite à se livrer aux sentiments plus parfaits d'une joie meilleure et plus douce: «Alors le père lui dit: Vous, mon fils, vous êtes toujours avec moi». - S. Jér. On peut dire encore que les paroles du fils ne sont point l'expression de la vérité, mais d'une vaniteuse présomption; aussi le père ne s'y laisse point tromper, et il cherche à calmer son fils par une autre raison, en lui disant: «Vous êtes avec moi», par la loi qui vous enchaîne, non qu'il n'ait jamais été coupable, mais parce que son père l'a toujours retiré des occasions de péché par ses châtiments? Rien d'étonnant d'ailleurs de voir mentir à son père celui qui porte envie à son frère. - S. Ambr. Cependant ce bon père ne laisse point de vouloir le sauver en lui disant: «Vous êtes toujours avec moi», ou comme juif, par l'observation de la loi, ou comme juste par l'union plus intime avec Dieu.
S. Aug. (Quest. évang). Mais que veulent dire ces paroles: «Et tout ce que j'ai est à vous ?» Est-ce que ce n'est pas aussi à son frère? Sans doute, mais les fils arrivés à la perfection, et comme entrés déjà dans l'immortalité, possèdent toutes choses, comme si chacune d'elles était à tous, et comme si toutes étaient à chacun d'eux. La cupidité rend le coeur étroit et ne peut rien posséder qu'avec égoïsme; la charité, au contraire, agrandit et dilate le coeur. Mais comment, tout ce qui est au père peut-il être au fils? Est-ce que Dieu a aussi donné à ce fils la possession des anges? Si par possession vous entendez que le possesseur soit le propriétaire et le maître, il ne lui a pas tout donné, car nous ne serons pas un jour les maîtres des anges, mais nous partagerons leur bonheur. Mais si vous entendez le mot possession dans le sens que nous disons, que les âmes possèdent la vérité, je ne vois pas pourquoi nous ne prendrions pas cette expression à la lettre, car en parlant ainsi, nous ne voulons pas dire que les âmes soient maîtresses de la vérité; si enfin le sens propre du mot possession ne se prête pas à cette interprétation, nous y renonçons volontiers, car le père ne dit pas: Vous possédez touts mais: «Tout ce qui est à moi est à vous», mais non pas comme si vous en étiez le maître. En effet, ce que nous avons d'argent peut être destiné, soit à l'entretien, soit à l'ornement de notre famille ou à quelque autre usage semblable. Car puisque ce fils peut dire, dans un sens vrai, que son père est à lui, pour. quoi ne pourrait-il pas le dire de ce que possède son père? Il faut seulement l'entendre de différentes manières; ainsi lorsque nous serons parvenus à la béatitude des cieux, les choses supérieures seront à nous pour les contempler, les êtres qui nous sont égaux pour partager leur sort, les créatures inférieures pour les dominer. Le frère aîné peut donc se livrer à la joie en toute sécurité. - S. Ambr. Car s'il veut renoncer à tout sentiment d'envie, il verra bientôt que tout est réellement à lui, les sacrements de l'Ancien Testament, s'il est juif, et ceux de la nouvelle loi, s'il est baptisé.
Théophyl. On peut encore donner à tout ce passage une explication différente: Ce fils qui se laisse aller aux murmures, figure tous ceux qui se scandalisent en voyant les progrès rapides et le salut des âmes parfaites, comme celui que David nous représente, se scandalisant de la paix dont jouissent les pécheurs. - Tit. de Bostr. Ce fils aîné, semblable à un laboureur, s'appliquait aux travaux de l'agriculture, en cultivant non un champ matériel, mais le champ de son âme, et en greffant les arbres du salut, c'est-à-dire, les vertus. - Théophyl. Ou bien il était dans les champs, c'est-à-dire dan s le monde, cultivant sa propre chair pour lui donner du pain en abondance, et semant dans les larmes pour moissonner dans la joie. - S. Chrys. (Ch. des Pèr. gr). On demande si celui qui s'afflige du bonheur des autres est atteint de la passion de l'envie. Je réponds qu'aucune âme sainte ne s'attriste de la sorte; loin de là, elle regarde le bien des autres comme le sien propre. Il ne faut pas du reste vouloir expliquer à la lettre tout ce que renferme une parabole, quand on a découvert le sens que s'est proposé l'auteur, il ne faut plus chercher autre chose. Or le but de cette parabole est d'exciter les pécheurs à revenir à Dieu avec confiance, par l'espérance des grands avantages qui leur sont promis. Aussi voyons-nous les grâces qui leur sont prodiguées devenir un sujet de trouble et de profonde jalousie pour les autres, bien qu'ils soient eux-mêmes environnés de tant d'honneurs, qu'ils puissent devenir à leur tour un sujet d'envie.
- Théophyl. Ou bien encore, Notre-Seigneur, dans cette parabole, a dessein de reprendre les mauvaises dispositions de ceux qu'il appelle justes par supposition; comme s'il leur disait: Vous êtes vraiment justes, je l'admets, vous n'avez transgressé aucun des commandements, est-ce donc une raison pour ne pas vouloir accueillir ceux qui reviennent de leur conduite coupable? - S. Jér. (de l'enf. prod. à Damase). Disons encore que toute justice en comparaison de celle de Dieu, n'est qu'injustice. De là ce cri de saint Paul: «Qui me délivrera de ce corps de mort ?» (Rm 8). De là cette indignation des Apôtres, lorsqu'ils entendirent la demande de la mère des enfants de Zébédée (Mt 20). - S. Cyr. Nous éprouvons quelque fois nous-mêmes ce sentiment, nous en voyons, en effet, dont toute la vie se passe dans l'exercice des plus sublimes vertus, d'autres qui ne se convertissent à Dieu que dans l'extrême vieillesse, ou même qui, par une grâce particulière de la miséricorde divine, n'effacent leurs pêchés qu'au dernier jour de leur vie. Or il en est qui, par un sentiment de défiance inopportune, ne peuvent admettre cet excès de miséricorde, parce qu'ils ne considèrent pas la bonté du Sauveur, qui se réjouit du salut des pécheurs. -
Théophyl. Le fils dit donc à son père: J'ai passé gratuitement dans les douleurs une vie toujours exposée aux persécutions des pécheurs, et vous n'avez jamais commandé qu'on mît à mort pour moi un chevreau (c'est-à-dire, le pécheur qui me persécutait), pour me donner quelques moments de soulagement et de repos. Dans ce sens, Achab était le chevreau d'Élie, qui disait à Dieu: «Seigneur, ils ont tué vos prophètes». ().
S. Ambr. Ou bien dans un autre sens: l'Évangile nous dit que ce frère aîné revenait des champs, c'est-à-dire des occupations de la terre, et comme il ignore les choses de l'Esprit de Dieu, il se plaint qu'on n'a jamais tué pour lui un chevreau; car ce n'est pas pour satisfaire l'envie, mais pour la rédemption du monde que l'agneau a été immolé. L'envieux demande un chevreau, celui qui est innocent demande qu'on immole pour lui un agneau. Ce frère est le plus âgé, parce que l'envie est la cause d'une vieillesse prématurée; il se tient dehors, parce que la malveillance lui défend d'entrer, il ne peut souffrir ni le bruit de la symphonie et des danses, (il ne s'agit pas ici des joies du théâtre qui ne sont propres qu'à exciter les passions), c'est-à-dire les chants harmonieux du peuple qui fait éclater les sentiments d'une joie douce et suave lorsqu'un pécheur revient à Dieu. Ceux au contraire qui sont justes à leurs propres yeux, s'indignent du pardon accordé au pécheur qui avoue ses fautes. Qui êtes-vous pour vous opposer à Dieu qui veut pardonner, lorsque vous pardonnez vous-même à qui bon vous semble? Applaudissons donc à la rémission des péchés qui suit la pénitence, de peur qu'en nous montrant ainsi jaloux du pardon qui est accordé aux autres, nous nous rendions indignes de l'obtenir nous-mêmes du Seigneur. Ne portons point envie à ceux qui reviennent de loin, car nous nous sommes égarés nous-mêmes dans ces régions lointaines.
10601 Lc 16,1-7
Bède. Après avoir condamné par les trois paraboles qui précèdent la sévérité de ceux qui murmuraient de l'accueil qu'il faisait aux pécheurs repentants, le Sauveur ajoute deux autres paraboles, sur l'obligation de l'aumône et de la vie simple et modeste. Il était très naturel en effet, que le précepte de l'aumône suivit immédiatement celui de la pénitence: «Jésus disait encore à ses disciples: Un homme riche avait un économe», etc. - S. Chrys. (Ch. des Pèr. gr). Les hommes sont dominés par une fausse opinion qui ne sert qu'à augmenter leurs fautes et à diminuer leurs mérites; elle consiste à croire que tous les biens que nous possédons pour l'usage de la vie, nous les possédons comme maîtres absolus, et de les rechercher en conséquence comme les biens les plus importants. Or, c'est le contraire qui est vrai; car nous n'avons pas été placés dans cette vie comme des maîtres dans la maison qui leur appartient en propre, mais semblables à des hôtes et à des étrangers, nous sommes conduits là où nous ne voulons pas aller, et dans le temps ou nous y pensons le moins. Qui que vous soyez, rappelez-vous donc que vous n'êtes que le dispensateur de biens qui ne vous appartiennent pas, et que vous n'avez sur eux que les droits d'un usage transitoire et passager. Rejetez donc de votre âme l'orgueil qu'inspire la pensée qu'on est maître absolu pour prendre les sentiments de réserve et d'humilité qui conviennent à un simple fermier. - Bède. Le fermier est celui qui régit une ferme; d'où lui vient le nom de fermier, l'économe est l'administrateur de l'argent, des fruits, et en général de tout ce que possède son maître. - S. Ambr. Nous apprenons de là que nous ne sommes pas les maîtres, mais bien plutôt les fermiers des biens d'autrui. - Théophyl. Une autre conséquence c'est qu'au lieu d'administrer ces biens suivant la volonté du Seigneur, nous en abusons pour satisfaire nos passions, nous devenons des fermiers coupables d'infidélité: «Et celui-ci fut accusé près de lui d'avoir dissipé ses biens».
S. Chrys. (comme précéd). On rappelle alors cet économe et on lui ôte son administration: «Il l'appela et lui dit: Qu'est-ce que j'entends dire de vous? Rendez-moi compte de votre gestion, car désormais vous ne pourrez plus la conserver». Le Seigneur nous tient tous les jours le même langage par les exemples qu'il nous met sous les yeux; tel qui jouissait d'une parfaite santé à midi, meurt avant la fin du jour, tel autre expire au milieu d'un festin, et cette administration nous est ôtée de différentes manières. Mais l'économe fidèle qui s'occupe sérieusement de son administration, a comme saint Paul un ardent désir d'être dégagé des liens du corps et d'être avec Jésus-Christ. (Ph 1,23). Celui au contraire dont toutes les affections sont pour la terre, voit arriver avec anxiété la fin de sa vie. En effet: «Cet économe dit alors en lui-même: Que ferai-je, puisque mon maître m'ôte la gestion de ses biens? Travailler à la terre, je n'en ai pas la force, et j'ai honte de mendier». Cette impuissance pour le travail accuse toute une vie d'indolence, car il n'aurait pas ces craintes, s'il s'était habitué à supporter les fatigues d'une vie laborieuse. Le sens figuré de cette parabole est qu'après que nous sommes sortis de cette vie, il n'est plus temps de se livrer au travail. La vie présente doit être employée à l'accomplissement des commandements, la vie future en est la récompense. Si vous n'avez rien fait ici-bas, tous vos projets pour la vie future sont superflus, et il ne vous servira pas davantage de mendier. Vous en avez pour preuve les vierges folles, qui après avoir été si imprévoyantes allèrent mendier auprès des vierges prudentes, mais revinrent sans rien obtenir (Mt 25,1-13). Chacun de nous en effet se revêt de ses oeuvres comme d'une tunique; on ne peut ni s'en dépouiller, ni la changer contre une autre. Mais cet économe infidèle forme alors le dessein de libérer les débiteurs de son maître, et de chercher en eux le remède à son infortune: «Je sais ce que je ferai, afin que lorsqu'on m'aura ôté mon emploi, je trouve des gens qui me reçoivent dans leurs maisons». Celui qui en effet pense au jour de sa mort, et cherche en faisant le bien à rendre moins accablant le poids de ses péchés, (soit en remettant leurs dettes à ceux qui lui doivent, soit en donnant aux pauvres d'abondantes aumônes), celui-là distribue les biens du Seigneur pour se faire beaucoup d'amis qui rendront de lui devant son juge un bon témoignage non par leurs discours, mais en manifestant ses bonnes oeuvres; et lui prépareront par leur témoignage un lieu de rafraîchissement et de repos. Or, rien de ce que nous avons n'est à nous, mais tout appartient à Dieu. En effet, «cet économe ayant fait venir l'un après l'autre les débiteurs de son maître, dit au premier: Combien devez-vous à mon maître? Il répondit: Cent barils d'huile». - Bède. Un baril est la même mesure que l'amphore grecque qui contenait trois urnes: «L'économe lui dit: Prenez votre billet; asseyez-vous vite, et écrivez cinquante». Il lui remet ainsi la moitié de ce qu'il doit: «Ensuite, il dit à un autre: Et vous, combien devez-vous? Il répondit: Cent mesures de froment». Cette mesure équivalait à trente boisseaux. «L'économe lui dit: Prenez votre billet et écrivez quatre-vingts»; il lui remet la cinquième partie de sa dette. Or, voici comment on peut entendre ce passage. Celui qui soulage la misère du pauvre pour moitié ou pour la cinquième partie sera récompensé pour sa miséricorde. - S. Aug. (quest. Evang., 2, 34). Ou bien encore, l'action de cet économe qui au lieu de cent barils d'huile en fait souscrire cinquante au débiteur, au lieu de cent mesures de froment, quatre-vingts doit être entendue en ce sens que les dons offerts par les juifs aux prêtres et aux lévites doivent être plus abondants dans l'Église chrétienne. Ainsi, tandis qu'ils ne donnaient que la dîme, les chrétiens doivent donner la moitié, comme Zachée le fit pour ses biens (Lc 19,8); ou ils doivent au moins surpasser les offrandes des Juifs, en donnant au moins la double dîme, c'est-à-dire la cinquième partie de leurs biens,
Catena Aurea 10517