Catena Aurea 12218

vv. 18-22

12218 Jn 2,18-22

Théophyl. Les Juifs voyant Jésus agir avec une si grande puissance, et dire hautement: «Cessez de faire de la maison de mon Père une maison de trafic», lui demandent un miracle. «Les Juifs prenant la parole, lui dirent: Par quel miracle nous prouvez-vous que tous avez le droit de faire ces choses ?» - S. Chrys. (hom. 22). Etait-il donc besoin d'un miracle pour lui donner le droit de mettre fin à des actions coupables? Le zèle ardent qu'il faisait paraître pour la maison de Dieu, n'était-il pas une preuve éclatante de sa puissance? Ils se souvenaient bien de la prédiction du prophète, mais ils ne laissent pas de lui demander un miracle, parce qu'ils sont mécontents de le voir entraver le honteux trafic auquel ils se livraient dans le temple et qu'ils veulent l'empêcher d'exercer cette puissance. Ils ont la prétention de le déterminer ou à faire un miracle, ou à revenir sur la défense qu'il leur a faite. Aussi Notre-Seigneur ne leur accorde pas le miracle qu'il demande. Il leur répond comme il fera plus tard à ceux qui venaient lui demander un prodige dans le ciel: «Cette génération coupable et adultère demande un signe, et il ne lui sera donné d'autre signe que celui du prophète Jonas»(Mt 12). C'est la même réponse de part et d'autre, mais dans cette dernière circonstance, le Sauveur s'exprime plus clairement, tandis qu'ici sa réponse a quelque chose de plus obscur. Sans nul doute il eut accédé à leur demande, lui qui multipliait les miracles avant même qu'on le lui demandât, s'il n'avait remarqué tout ce que leur âme r enfermait de fourberie: «Il leur dit donc: Détruisez ce temple, et je le relèverai en trois jours». - Bède. Ils demandent à Notre-Seigneur un signe qui établit le droit qu'il se donnait de défendre dans le temple le trafic qui s'y faisait ordinairement; et il leur répond que ce temple était la figure de son corps dans lequel on ne pourrait trouver la moindre tache du péché. Voici donc le sens de ses paroles: de même que je purifie ce temple inanimé du trafic coupable et des crimes dont vous le souillez, ainsi je ressusciterai après trois jours, lorsque tous l'aurez détruit de vos propres mains, ce temple de mon corps, dont ce temple matériel est la figure.

Théophyl. Ces paroles: «Détruisez ce temple» ne sont pas toutefois une provocation à l'homicide, mais une preuve que leurs desseins criminels ne lui sont pas inconnus. Or, que les ariens écoutent cette parole du Seigneur qui vient détruire l'empire de la mort: «Je le relèverai par ma propre puissance». - S. Aug. (Traité 10 sur S. Jean). C'est aussi Dieu le père qui l'a ressuscité, comme il le lui demande dans le livre des Psaumes: «Ressuscitez-moi, et je le leur rendrai» (Ps 40, 10). Mais que fait le Père sans le Verbe? De même donc que le Père ressuscite le Fils, le Fils aussi se ressuscite lui-même, car le Fils a dit: «Mon père et moi nous ne sommes qu'un» (Jn 10). - S. Chrys. (hom. 22). Mais pourquoi leur donne-t-il de préférence le signe de sa résurrection? Parce que ce miracle était celui de tous qui prouvait invinciblement qu'il n'était pas seulement un homme, qu'il pouvait triompher de la mort, et détruire d'un seul coup l'empire tyrannique qu'elle exerçait depuis si longtemps.

Orig. (Traité 12 sur S. Jean). Ces deux choses, le corps de Jésus et le temple, me paraissent être la figure de l'Eglise qui est construite de pierres vivantes pour former une maison spirituelle, un sacerdoce saint; et aussi conformément à ces autres paroles: «Vous êtes le corps de Jésus-Christ et les membres les uns des autres». (1Co 12,27). Cet édifice de pierre semble renversé, et les os du Christ semblent dispersés par le vent des adversités et des tribulations, mais il sera rétabli et ressuscitera le troisième jour qui doit répandre ses clartés sur un nouveau ciel et sur une nouvelle terre. De même qu e le corps sensible de Jésus-Christ a été crucifié et enseveli avant de ressusciter, ainsi le corps mystique du Sauveur composé de tous les saints a été crucifié avec lui. Aucun d'eux, en effet, qui se glorifie en autre chose qu'en la croix de Notre-Seigneur Jésus-Christ, par laquelle il est crucifié pour le monde. (Ga 6, 14). Aucun d'eux également qui ne soit enseveli avec Jésus-Christ, et ne ressuscite avec lui, parce qu'il marche dans une sainte nouveauté de vie (Rm 6); mais aucun d'eux cependant n'a encore eu part à la bienheureuse résurrection. Aussi n'est-il point écrit: Je le rétablirai le troisième jour, mais: «dans trois jours», pour marquer que la restauration de ce temple s'accomplira pendant toute la durée de ces trois jours. Théophyl. - Les Juifs qui s'imaginaient qu'il parlait du temple matériel, se moquaient de lui. «Les Juifs répartirent: On a mis quarante-six ans à bâtir ce temple, et vous le rebâtirez en trois jours ?»

Alcuin. Remarquez que les Juifs ne veulent point parler ici de la première construction du temple par Salomon, et qui dura sept ans, mais de sa reconstruction par Zorobabel, qui se prolongea pendant quarante-six ans au milieu des obstacles sans nombre que les ennemis ne cessaient d'y apporter. (Esd 1, 4). - Orig. Il en est qui prétendent qu'on peut compter ces quarante-six ans du jour où David consulta le prophète Nathan sur la construction du temple, s'occupant dès lors d'amasser les matériaux nécessaires. Ne serait-il pas même possible que ce nombre quarante appliqué au temple soit la figure des quatre éléments du monde, et le nombre six le symbole du sixième jour où l'homme fut créé? - S. Aug. (de la Trinité, chap. 5). On peut dire encore que ce nombre exprime convenablement la perfection du corps du Seigneur. En effet, six fois quarante-six font deux cent soixante-seize, c'est-à-dire neuf mois et six jours. Or, c'est justement le temps que le corps de Jésus se développa dans le sein de sa mère jusqu'au jour de sa naissance, comme nous pouvons le conclure de la tradition de nos ancêtres, tradition que l'Eglise a revêtue de son autorité. C'est en effet, le huitième jour des calendes d'avril, c'est-à-dire le vingt-cinq mars, que l'on croit que Jésus fut conçu et souffrit la mort, et c'est le huitième jour des calendes de janvier, c'est-à-dire le vingt-cinq décembre, qu'il est né. Depuis le jour de sa conception jusqu'à celui de sa naissance, on compte donc deux cent soixante-seize jours que l'on obtient par le nombre quarante-six multiplié par six. - S. Aug. (Liv. des 88 quest., quest. 6). Tels sont, dît-on, les phénomènes progressifs de la conception de l'homme; pendant les six premiers jours son corps, a l'apparence du lait; durant les neuf jours suivants ce lait se change en sang; ce sang se coagule pendant les douze jours qui suivent; puis les organes se forment et les contours des membres se dessinent pendant dix-huit autres jours, et le corps continue à se développer le reste du temps jusqu'à l'époque de l'enfantement. Or, les nombres six, neuf, douze, dix-huit additionnés ensemble, font quarante-cinq; et en ajoutant un, quarante-six. Si on multiplie quarante-six par le nombre six qui se trouve en tête de cette addition, on obtient deux cent soixante-seize, c'est-à-dire neuf mois et six jours. Ce n'est donc point sans raison qu'on a mis quarante-six ans à construire le temple qui était la figure du corps du Sauveur, mais pour que les années de sa construction fussent le symbole et l'image des jours pendant lesquels le corps du Seigneur atteignit sa perfection.

S. Aug. (Traité 10 sur S. Jean). Ou bien encore, Notre Seigneur a reçu son corps d'Adam, mais sans en prendre le péché. Il a donc reçu de lui le temple de son corps, mais non l'iniquité qui doit être bannie de ce temple. Si vous prenez les quatre mots grecs íáôïëÞ, orient; äýóéò, l'occident; Üññôò, le septentrion; ìåóçìîñßá, le midi; et que vous re unissiez les quatre premières lettres de ces mots, vous avez le nom d'Adam. Aussi le Seigneur nous déclare qu'il rassemblera ses élus des quatre vents, lorsqu'il viendra juger les hommes. Les lettres qui servent à former le nom d'Adam, correspondent en grec au nombre quarante-six qui est le nombre d'années qu'a duré la construction du temple. Ce nom, en effet, est composé de a, c'est-à-dire un; de d, quatre; de á, c'est-a -dire un; de y, quarante; ce qui fait en tout quarante-six. Mais les Juifs, esclaves des inclinations de la chair, ne pouvaient goûter que les choses charnelles, et ne comprenaient pas le langage spirituel du Sauveur. Aussi l'Évangéliste nous explique de quel temple il voulait parler: «Mais Jésus voulait parler du temple de son corps».

Théophyl. Apollinaire nous oppose ce texte pour prouver que la chair de Jésus-Christ était inanimée, parce que le temple auquel il la compare était lui-même inanimé. Dites donc alors que la chair de Jésus était un composé de pierres et de bois, puisque tels sont les éléments qui entrent dans la construction du temple. Vous prétendez que ces paroles: «Mon âme est troublée», etc. (Jn 12), «J'ai le pouvoir de donner mon âme», etc. (Jn 10) ne doivent point s'entendre d'une âme raisonnable; dans quel sens prendrez-vous donc ces paroles: «Seigneur, je remets mon âme entre vos mains ?» (Lc 23). Car vous ne pouvez pas davantage l'entendre d'une âme raisonnable, pas plus que ces autres paroles: «Vous ne laisserez pas mon âme dans l'enfer» (Ps 15) - Orig. Le corps du Seigneur est ici appelé le temple de Dieu, parce que de même que le temple de Dieu était rempli de la gloire de Dieu qui l'habitait, ainsi le corps de Jésus-Christ qui représente l'Eglise contient le Fils unique, qui est l'image substantielle de la gloire de Dieu.

S. Chrys. (hom. 22 sur S. Jean). Deux choses s'opposaient à ce que les disciples comprissent parfaitement le sens de ces paroles: la première, c'était le fait même de la résurrection; la seconde, c'est que Dieu lui-même habitait le temple de son corps, ce que le Seigneur avait exprimé en termes mystérieux et cachés, en disant: «Détruisez ce temple, et je le relèverai en trois jours». Aussi ajoute-t-il: «Lors donc qu'il fut ressuscité d'entre les morts, ses disciples se ressouvinrent qu'il avait dit cela, et ils crurent à l'Ecriture et à la parole qu'avait dite Jésus.» - Alcuin. Avant la résurrection, ils ne comprenaient pas les Écritures, parce qu'ils n'avaient pas encore reçu l'Esprit saint, et «l'Esprit saint n'avait pas encore été donné, parce que Jésus n'était pas encore glorifié» (Jn 7). Mais le jour de sa résurrection, Notre-Seigneur apparut à ses disciples, et leur ouvrit l'intelligence pour comprendre ce que la loi et les prophètes avaient prédit de lui (Lc 24). «Et ils crurent alors à l'Ecriture», (c'est-à-dire aux prophètes qui avaient prédit qu'il ressusciterait le troisième jour), et à la parole que Jésus leur avait dite: «Détruisez ce temple», etc.

Orig. Dans le sens analogique, nous parviendrons au complément de la foi, au jour de la grande résurrection du corps entier de Jésus, c'est-à-dire de son Eglise; car la foi qui voit Dieu tel qu'il est, est bien différente de celle qui ne le voit que comme dans un miroir et sous des images obscures.


vv. 23-25

12223 Jn 2,23-25

Bède. L'Évangéliste vient de raconter ce qu'avait fait le Sauveur en arrivant à Jérusalem, il fait connaître maintenant la conduite qui fut tenue à son égard pendant son séjour à Jérusalem: «Lorsque Jésus était à Jérusalem», etc. - Orig. Il nous faut examiner comment la vue des miracles dont ils furent témoins en détermina un grand nombre à croire en lui; car nous ne lisons pas qu'il ait fait aucun miracle à Jérusalem, à moins qu'il n'en ait fait sans que l'Évangile les ait rapportés. C'est à vous de voir si l'on ne doit pas mettre au nombre des miracles l'action de Jésus faisant un fouet avec des cordes, et chassant les marchands hors du temple.

S. Chrys. (hom. 22). Les disciples qui s'étaient attachés à Jésus-Christ, non pour ses miracles, mais pour sa doctrine, avaient été les mieux inspirés. En effet, les esprits vulgaires sont attirés par l'éclat des miracles, tandis que les âmes plus élevées sont beaucoup plus sensibles à la vérité des prophéties ou de la doctrine. Aussi l'Évangéliste ajoute: «Mais Jésus ne se fiait pas à eux». - S. Aug. (Traité 11) Que signifient ces paroles? «Ils croyaient au nom de Jésus, et Jésus ne se fiait pas à eux ?» Est-ce qu'ils ne croyaient pas en réalité, et que leur foi n'était qu'apparente? Mais alors l'Évangéliste n'aurait pas dit aussi expressément: «Beaucoup crurent en son nom». Chose extraordinaire et merveilleuse ! Les hommes croient en Jésus-Christ, et Jésus-Christ ne se fie pas aux hommes. C'est surtout parce qu'il est le Fils de Dieu; s'il a souffert, c'est parce que telle était sa volonté, et s'il ne l'avait pas voulu, il n'eût jamais souffert. Or, tels sont tous les catéchumènes. Si nous demandons à un catéchumène: Croyez-vous en Jésus-Christ? il répond: je crois, et fait sur lui le signe de la croix. Si nous lui faisons cette question: Mangez-vous la chair du Fils de l'homme? Il ne sait ce que nous lui disons, parce que Jésus ne s'est pas encore confié à lui. - Orig. On peut dire encore que Jésus ne se fie pas à ceux qui croient en son nom, mais qui ne croient pas encore en lui; car ceux-là seuls croient en lui qui suivent la voie étroite qui conduite la vie (Mt 7). Ceux dont la foi ne repose que sur les miracles ne croient pas en lui, mais en son nom.

S. Chrys. (hom. 22). Ou bien encore, l'Évangéliste s'exprime de la sorte, parce que Jésus ne se fiait pas à eux, comme il se fie à des disciples parfaits, il ne leur confiait pas encore tous ses dogmes, comme à des fidèles fortement affermis dans la foi; car il ne s'arrêtait pas aux paroles qui sortent de la bouche, il pénétrait jusqu'au fond des coeurs, et savait parfaitement le moment favorable pour ses divines communications. C'est pour cela que l'auteur sacré ajoute: «Parce qu'il les connaissait tous, et qu'il n'avait pas besoin que personne lui rendit témoignage d'aucun homme, car il savait lui-même ce qu'il y avait dans l'homme». En effet, il n'appartient qu'à Dieu, qui seul a formé les coeurs des hommes, de connaître ce qu'ils renferment de plus intime. Il n'avait donc nul besoin de témoignages étrangers pour lui apprendre les pensées secrètes des coeurs qu'il avait créés.

S. Aug. (Traité 11). Ce divin ouvrier connaissait mieux ce qui était dans son oeuvre, que l'oeuvre ne pouvait le connaître elle-même. Ainsi Pierre sentait bien ce qui se passait au fond de son coeur, lorsqu'il disait à Jésus: «Je vous suivrai jusqu'à la mort», (Jn 13) mais Notre-Seigneur savait bien mieux ce qui était dans l'homme, lorsqu'il lui répondait: «Avant que le coq chante, vous me renierez trois fois». - Bède. Avertissement salutaire de ne jamais nous reposer entièrement sur le témoignage de notre conscience, mais d'être toujours dans une craintive sollicitude; car ce qui demeure caché pour nous, ne saurait échapper aux yeux du Juge éternel.


CHAPITRE III


vv. 1-3

12301 Jn 3,1-3

S. Aug. (Traité 12 sur S. Jean). L'Évangéliste venait de dire que pendant le séjour de Jésus à Jérusalem, beaucoup crurent en son nom, en voyant les prodiges et les miracles qu'il opérait. De ce nombre était Nicodème, un des pharisiens. - Bède. (pour la fête de l'inv. de la sainte croix). Saint Jean nous fait connaître son rang et sa dignité: «C'était un des chefs des Juifs»,. et la démarche qu'il fit: «Il vint de nuit trouver Jésus». Il désirait s'instruire plus à fond dans un entretien secret des mystères de la foi, dont les miracles publics du Sauveur lui avaient fait connaître les premiers éléments.

S. Chrys. (hom. 24 sur S. Jean). Cet homme était encore esclave de la faiblesse judaïque, et il vient de nuit, parce qu'il craignait de faire de jour cette démarche. C'est ce même motif de crainte auquel l'Évangéliste fait allusion, lorsqu'il dit: «Cependant plusieurs d'entre les princes mêmes crurent en lui, mais à cause des pharisiens, ils ne le confessaient pas, de peur d'être chassés de la synagogue» (Jn 12, 12). - S. Aug. (Traité 12). Nicodème était du nombre de ceux qui crurent en Jésus-Christ, mais qui n'avaient pas encore reçu une nouvelle naissance, et c'est la raison pour laquelle il vient de nuit. C'est à ceux qui sont nés de nouveau de l'eau et de l'Esprit saint, que l'Apôtre dit: «Vous avez été autrefois ténèbres, vous êtes maintenant lumière dans le Seigneur». - HAYM. Cette démarche qu'il fait la nuit est parfaitement appropriée aux dispositions de son âme, encore couverte des ténèbres de l'ignorance, et privée de cette vive lumière qui le fit croire parfaitement au Dieu véritable; car la nuit, dans la sainte Ecriture, est le symbole de l'ignorance: «Et il lui dit: Maître, nous savons que vous êtes un docteur envoyé de Dieu». Le mot rabbi, en hébreu, a la même signification que le mot magister, (maître) en latin. Il donne à Jésus le nom de maître, et non celui de Dieu, parce qu'il le regardait comme envoyé de Dieu, mais sans croire encore à sa divinité.

S. Aug. (Traité 12). Quel motif l'avait porté à croire? le voici: «Car personne ne saurait faire les miracles que vous faites, si Dieu n'est avec lui». Nicodème faisait donc partie de ce grand nombre de Juifs qui avaient cru au nom de Jésus, en voyant les miracles qu'il opérait. - S. Chrys. (hom. 24). Cependant les prodiges ne lui donnent pas encore une bien haute idée de Jésus, il avait de lui une opinion toute humaine; il en parle comme d'un prophète envoyé de Dieu pour une mission spéciale, et qui a besoin pour la remplir d'un secours étranger, bien que son Père, en l'engendrant de toute éternité, lui ait communiqué toute perfection, qu'il se suffise à lui-même, et n'ait rien en lui d'imparfait. Comme le dessein de Notre-Seigneur, pendant un certain temps, était moins de révéler sa divinité, que de persuader qu'il n'était en rien contraire à son Père, son langage est empreint de ménagements et de modération, tandis qu'il déploie dans toutes ses actions un pouvoir souverain. C'est pour cette raison qu'il ne révèle clairement à Nicodème rien de sublime sur sa personne; mais il corrige seulement l'opinion peu relevée qu'il avait de lui, en lui apprenant qu'il n'a besoin de personne pour opérer ses miracles: «Jésus lui répondit: «En vérité, en vérité, je vous le dis, nul, s'il ne naît de nouveau, ne peut voir le royaume de Dieu». - S. Aug. (Traité 12). Voilà ceux à qui Jésus se fie, à ceux qui sont nés de nouveau, et ne viennent pas trouver Jésus de nuit, comme Nicodème. Jésus lui dit donc: «Nul, s'il ne naît de nouveau», etc. - S. Chrys. (hom. 24). Paroles dont voici le sens: Comme vous n'êtes pas encore né de nouveau par la génération spirituelle dont Dieu est l'auteur, la connaissance que vous avez de moi est loin d'être spirituelle, elle est toute charnelle et toute humaine. Or, je vous le déclare, ni vous, ni un autre, quel qu'il soit, ne pouvez, sans cette nouvelle naissance qui vient de Dieu, comprendre la gloire dont je suis environné, et vous restez nécessairement en dehors du royaume; car la génération dont le baptême est le principe, répand les plus vives lumières dans l'âme. Un peut encore suivre cette version: «Nul, à moins d'être né», etc., c'est-à-dire votre naissance ne vient pas d'en haut, si vous n'avez pas reçu une foi ferme et inébranlable aux vérités révélées, vous êtes hors de la voie, et loin du royaume des cieux. Notre-Seigneur parle ici de lui-même, et veut faire comprendre qu'il n'est pas seulement ce qu'il parait extérieurement, mais qu'il est besoin d'autres yeux pour le voir tel qu'il est. Suivant les uns, cette expression: d'en haut, signifie du ciel, suivant les autres, dès le commencement. Si les Juifs avaient entendu cette doctrine, ils auraient bien vite laissé Jésus eu se moquant de lui, mais Nicodème, en continuant d'interroger Jésus-Christ, fait paraître l'amour d'un vrai disciple pour son maître.


vv. 4-8

12304 Jn 3,4-8

S. Chrys. (hom. 24). Nicodème, en venant trouver Jésus, ne voyait en lui qu'un homme, mais lorsqu'il l'entend exposer des vérités supérieures à l'intelligence de l'homme, son esprit s'efforce de s'élever à la hauteur de ces enseignements; toutefois les ténèbres qui couvrent son esprit ne lui permettent pas de s'y maintenir, il est encore dans le doute et l'incertitude, et il objecte une espèce d'impossibilité, pour engager Notre-Seigneur à s'expliquer plus clairement. Deux choses surtout le jetaient dans l'étonnement: la nouvelle naissance et le royaume, choses inouïes et inconnues parmi les Juifs. Nicodème s'attache surtout à la première difficulté qui troublait le plus ses idées: «Et Nicodème lui dit: Comment un homme peut-il naître lorsqu'il est vieux? Peut-il rentrer dans le sein de sa mère et naître de nouveau ?»

Bède. L'observation de Nicodème semble indiquer que dans sa pensée un enfant peut rentrer dans le sein de sa mère et naître de nouveau. Mais il faut se rappeler qu'il était déjà avancé en âge, et qu'il se donne lui-même comme exemple: Je suis déjà vieux, semble-t-il dire, je veux sincèrement arriver au salut, comment donc puis-je rentrer dans le sein de ma mère et y prendre une nouvelle naissance? S.Chrys. (hom. 24). Quoi, vous appelez Jésus, Maître et Docteur, vous reconnaissez qu'il est envoyé de Dieu, et vous ne recevez pas ses enseignements, et vous lui faites une question capable de porter le trouble dans les esprits? Chercher la raison des choses est en effet le propre de ceux dont la foi est encore faible, et il en est beaucoup qui ont perdu la foi au milieu de ces recherches, les uns en demandant: Comment Dieu a-t-il pu s'incarner? Les autres: Comment peut-il rester ainsi impassible? C'est sous l'impression de cette incertitude d'esprit que Nicodème fait cette question: «Comment un homme peut-il ?» etc. Mais voyez dans quelles pensées ridicules tombent ceux qui veulent mêler leurs conceptions aux vérités surnaturelles. - S. Aug. (Traité 11 sur S. Jean). C'est l'Esprit qui parle ici, et cet homme n'a que des idées charnelles; il ne connaissait qu'une seule naissance, celle qui vient d'Adam et d'Eve, et n'avait aucune connaissance de celle qui vient de Dieu et de l'Eglise. Nous devons toutefois entendre la naissance spirituelle comme Nicodème entendait la naissance charnelle, car de même qu'on ne peut rentrer dans le sein de sa mère, on ne peut non plus recevoir une seconde fois le baptême.

S. Chrys. (hom. 24 sur S. Jean). Notre-Seigneur, voyant que Nicodème ne pouvait s'élever au-dessus de la génération charnelle, lui explique plus clairement le mode de cette naissance toute spirituelle: «Jésus lui répondit: En vérité, en vérité, je vous le dis, nul, s'il ne renaît de l'eau et de l'Esprit saint, ne peut entrer dans le royaume de Dieu». - S. Aug. (Traité 11) Paroles dont voici le sens: Vous ne pensez qu'à la génération charnelle, mais il faut que l'homme naisse de l'eau et de l'Esprit saint pour entrer dans le royaume de Dieu. Pour recueillir l'héritage de son père dans le temps, l'homme doit naître du sein d'une mère mortelle; pour parvenir à l'héritage éternel de Dieu le Père, il doit prendre une nouvelle naissance dans le sein de l'Eglise. L'homme est composé de deux substances différentes, d'un corps et d'une âme; cette naissance spirituelle a aussi un double mode d'action, l'eau qui est visible sert à purifier le corps, et l'Esprit saint, dont l'opération est invisible, purifie l'âme qui est également invisible. - S. Chrys. (hom. 24). Si l'on me demande comment l'homme peut recevoir de l'eau une nouvelle naissance, je demanderai à mon tour comment Adam a pu naître de la terre? Au commencement la matière première était simplement de la terre, et la formation d'Adam est tout entière l'oeuvre du Créateur; de même ici la matière est l'eau, mais cette nouvelle naissance est tout entière l'oeuvre de l'Esprit de grâce. Dieu alors donna au premier homme le paradis terrestre pour habitation, il nous ouvre maintenant le ciel. Mais pourquoi l'eau est-elle nécessaire à ceux qui reçoivent l'Esprit saint? Voici la raison de ce mystère, c'est que l'eau est le symbole d'opérations divines, de la sépulture, de la mortification, de la résurrection et de la vie. En effet, lorsque notre corps est plongé dans l'eau, le vieil homme est comme enseveli, il disparaît tout entier dans cette immersion, et reparaît ensuite tout renouvelé. C'est encore pour vous apprendre que la vertu du Père, du Fils et du Saint-Esprit, remplit toutes choses, et que Jésus-Christ attendit trois jours pour ressusciter. (hom. 26). L'eau est pour le fidèle comme le sein de la mère pour l'enfant, c'est dans l'eau que le chrétien reçoit la vie et sa forme. Mais l'enfant ne se développe que graduellement dans le sein de sa mûre, tandis que dans l'eau, le chrétien reçoit sa forme en un seul instant. Il est en effet dans la nature des corps de ne se développer et de n'atteindre leur perfection que progressivement. Il n'en est pas ainsi des natures spirituelles, elles sont parfaites aussitôt qu'elles existent. Depuis le jour où Notre-Seigneur est sorti des eaux du Jourdain, l'eau ne produit plus seulement des reptiles et des animaux privés de raison, mais des âmes spirituelles et raisonnables.

S. Aug. (du bapt. des enf., 1, 30). Notre-Seigneur ne dit pas: Nul, s'il ne renaît de l'eau et de l'Esprit saint, n'obtiendra pas le salut ou la vie éternelle, mais: «N'entrera pas dans le royaume de Dieu», et il en est qui concluent de ces paroles, qu'à la vérité les enfants doivent être baptisés pour être avec le Christ dans le royaume de Dieu, où ils ne peuvent entrer que par le baptême, mais qu'ils ne laissent pas, s'ils viennent à mourir sans baptême, d'obtenir le salut et la vie éternelle, parce qu'ils ne sont esclaves d'aucun péché. Mais pourquoi duc nouvelle naissance, si ce n'est pour produire un renouvellement complet de vie? Ou quel sera l'obstacle qui empêchera l'image de Dieu, d'entrer dans le royaume de Dieu, si ce n'est le péché ?

HAYM. De si grands et de si profonds mystères étaient au-dessus de l'intelligence de Nicodème, aussi Notre-Seigneur cherche-t-il à se faire comprendre par une comparaison empruntée à la naissance charnelle: «Ce qui est né de la chair est chair», etc., c'est-à-dire, de même que la chair engendre la chair, ainsi l'esprit engendre l'esprit. - S. Chrys. (hom. 26). Elevez-vous donc au-dessus des choses sensibles, et n'allez point penser que l'esprit engendre la chair, car la chair elle-même du Sauveur n'a pas été produite par l'esprit seul, mais par la chair. Mais ce qui est né de l'esprit est spirituel, la naissance dont il est ici question n'est point celle qui produit la substance, mais celle qui lui donne l'honneur et la grâce. Si telle a été la naissance du Fils de Dieu, qu'a-t-il de plus que ceux qui ont eu part aussi à cette naissance? Comment est-il le Fils unique de Dieu? Car je suis ne aussi de Dieu, mais sans sortir de sa substance. Et s'il n'a point pour principe la substance même de Dieu, en quoi diffère-t-il de nous. Que dis-je? Il serait même inférieur à l'Esprit saint, car cette nouvelle naissance n'a lieu que par la grâce de l'Esprit saint. Aurait-il donc besoin du secours de l'Esprit saint pour continuer à être le Fils de Dieu? En quoi cette doctrine différerait-elle de la doctrine des Juifs? Considérez ici la dignité de l'Esprit saint, l'Ecriture lui attribue les oeuvres mêmes de Dieu, elle a dit plus haut: «Ils sont nés de Dieu». Ici elle nous déclare que c'est l'Esprit saint qui les engendre. Notre-Seigneur voit que ces paroles: «Celui qui est né de l'esprit est esprit, jettent de nouveau le trouble dans les idées de ce pauvre pharisien, et il emprunte pour se faire comprendre un nouvel exemple aux choses sensibles: «Ne vous étonnez pas que je vous aie dit: Il faut que vous naissiez de nouveau», paroles qui indiquent visiblement le trouble produit dans l'esprit de Nicodème. L'objet de la comparaison que choisit le Sauveur, n'appartient pas précisément au monde matériel, il n'atteint pas non plus la nature incorporelle; ce terme de comparaison, c'est le vent: «Le vent souffle où il veut, vous entendez sa voix, mais vous ne savez d'où il vient ni où il va; ainsi en est-il de tout homme qui est né de l'Esprit». Voici l'explication de ces paroles: Rien ne peut arrêter le vent, il suit son impulsion naturelle, à plus forte raison l'action de l'Esprit saint ne pourra être entravée ni par les lois de la nature, ni par les bornes et les limites de la naissance corporelle, ni par aucun autre obstacle semblable. Qu'il soit ici question du vent, c'est ce que prouvent clairement les paroles suivantes: «Et vous entendez sa voix», c'est-à-dire, le son dont il frappe les airs. Car le Sauveur n'eût point dit à un infidèle qui ne connaissait point l'action de l'Esprit saint: «Vous entendez sa voix». Il ajoute: «Il souffle où il veut», non pas que le vent se détermine par un choix libre et volontaire, mais parce qu'il suit l'impulsion qu'il a reçue de la nature, et que sa force n'est entravée par aucun obstacle: «Et vous ne savez d'où il vient, ni où il va», c'est-à-dire, si vo us ne pouvez connaître la voie que suit le vent dont vous entendez le son, et qui est sensible au toucher, comment pourriez-vous pénétrer les opérations de l'esprit de Dieu? «Ainsi, ajoute Notre-Seigneur, est tout homme qui est né de l'Esprit».

S. Aug. (Traité 12 sur S. Jean). Mais qui de nous, par exemple, ne voit pas venir l'auster du midi au nord, ou un autre vent de l'orient à l'occident? Dans quel sens donc ne savons-nous pas d'où il vient, ni où il va? - Bède. (hom. pour l'Inv. de la sainte Cr). C'est donc l'Esprit saint qui souffle où il veut, parce qu'il a le pouvoir de choisir l'âme qu'il veut combler de la grâce de sa présence et de ses lumières, et vous entendez sa voix, lorsque celui qui est rempli de l'Esprit saint, parle en votre présence. - S. Aug. (Traité 12). Vous entendez le son des psaumes, le son de l'Évangile, le son de la parole divine, c'est la voix de l'Esprit saint. Notre-Seigneur s'exprime de la sorte, parce que l'Esprit saint anime invisiblement la parole et le sacrement, pour nous donner une nouvelle naissance. - Alcuin. Vous ne savez d'où il vient, ni où il va, car alors même que l'Esprit saint descendrait en votre présence dans l'âme d'un de vos frères, vous ne pourriez voir ni comment il y est entré, ni comment il en sortirait, parce qu'il est invisible de sa nature. - HAYM. Ou bien encore, vous ne savez d'où il vient, parce que vous ignorez comment il conduit les hommes à la foi, ni où il va, parce que vous ne savez non plus comment il les élève jusqu'à l'espérance: «Ainsi est tout homme qui est né de l'Esprit, c'est-à-dire: L'Esprit saint est un esprit invisible, ainsi celui qui naît de l'esprit naît également d'une manière invisible. - S. Aug. (Tr. 12). Ou bien, lorsque vous serez né vous-même de l'Esprit saint, vous serez une énigme pour celui qui n'a point encore eu part à cette naissance, il ne saura ni d'où vous venez, ni où vous allez. C'est pour cela que le Sauveur ajoute: «Ainsi en est-il de tout homme qui est né de l'Esprit». - Théophyl. Quoi de plus propre à confondre Macédonius, cet ennemi de l'Esprit saint, qui ose enseigner que ce divin Esprit n'est qu'un serviteur, puisque d'après ces paroles, l'Esprit saint opère dans la plénitude de sa puissance, et agit là où il veut et comme il veut ?


vv. 9-12

12309 Jn 3,9-12

HAYM. Nicodême ne peut comprendre les mystères de la puissance divine que le Sauveur vient de lui révéler; sans donc les révoquer en doute, il lui en demande la raison, non dans l'intention de le blâmer, il l'interroge dans le désir de s'instruire: «Nicodème lui répondit: Comment cela peut-il se faire ?» - S. Chrys. (hom. 26). Il reste encore dans les basses régions du judaïsme et malgré la comparaison si claire qui lui a été donnée, il continue d'interroger, aussi Notre-Seigneur lui parle-t-il avec plus de sévérité: «Jésus lui dit: Vous êtes maître en Israël, et vous ignorez ces choses ?» - S. Aug. (Traité 12) Que signifient ces paroles? L'intention de Notre-Seigneur est-elle de blesser ce maître en Israël? Non, il voulait le faire naître de l'esprit. Or, l'humilité est la condition indispensable de cette naissance, puisque c'est l'humilité elle-même qui nous fait naître de l'esprit. Or, Nicodème était comme enflé de son titre de maître, et il se croyait un homme important, parce qu'il était docteur des Juifs. Notre-Seigneur réprime donc son orgueil, pour qu'il puisse naître de l'esprit. - S. Chrys. (hom. 26). Il n'accuse pas ses mauvaises dispositions, il lui reproche seulement son ignorance et son défaut de jugement. Mais quel rapport, me demandera-t-on, pouvait-il y avoir entre cette naissance dont Jésus-Christ venait de parler et les croyances des Juifs? Le voici: La création du premier homme, la formation de la femme d'une des côtes d'Adam, les femmes stériles qui sont devenues mères, les miracles dont l'eau a été l'instrument, Elisée faisant surnager le fer sur l'eau, les Juifs passant la mer Rouge à pied sec, Naamon le syrien guéri de la lèpre dans les eaux du Jourdain, étaient autant de symboles figuratifs de cette naissance spirituelle, et de la purification qu'elle produit dans l'âme. Les oracles des prophètes rendent à leur tour témoignage quoique d'une manière plus cachée à la manière dont s'accomplit cette naissance, par exemple dans ces paroles: «Votre jeunesse sera renouvelée comme celle de l'aigle»; (Ps 12) «Bienheureux ceux dont les iniquités sont pardonnées» (Ps 31) Isaac lui-même a été une figure de cette naissance. Voilà pourquoi Notre-Seigneur dit à Nicodème: «Vous êtes maître en Israël et vous ignorez ces choses !» Le Sauveur donne une nouvelle preuve de la vérité de ses paroles en ajoutant par condescendance pour la faiblesse de ce pharisien: «En vérité, en vérité je vous le dis, nous disons ce que nous savons, et nous attestons ce que nous avons vu, et vous ne recevez pas notre témoignage». La vue est pour nous le plus sûr de tous les sens, et si nous voulons convaincre quelqu'un de l'existence d'une chose, nous lui disons que nous l'avons vue de nos yeux. C'est pour cette raison que Notre-Seigneur, parlant à Nicodème un langage humain, lui donne pour motif de certitude qu'il a vu ce dont il parle. Il ne peut être ici question de la vue des yeux du corps, et il est évident que le Sauveur veut parler ici d'une connaissance des plus certaines et qui exclut jusqu'à la possibilité de l'erreur. Or, ces paroles: «Nous savons» s'appliquent ou à lui seul ou à son Père conjointement avec lui.

HAYM. Mais pourquoi dit-il au pluriel: «Nous savons ?» Nous répondons que c'était le Fils unique de Dieu qui parlait de la sorte et qu'il montrait ainsi comment le Père est dans le Fils, le Fils dans le Père, et comment le Saint-Esprit procède invisiblement de tous les deux. - Alcuin. Ou bien il parle au pluriel en ce sens: Moi et tous ceux qui ont eu le bonheur de renaître de l'Esprit saint, nous comprenons ce que nous disons et ce que nous avons vu dans le sein du Père, nous l'attestons publiquement dans le monde, et vous qui êtes charnels et superbes, vous ne recevez pas notre témoignage. - Théophyl. Ce n'est point à Nicodème que s'appliquent ces paroles, mais à toute la nation juive qui persévéra jusqu'à la fin dans son incrédulité. - S. Chrys. (hom. 26). Ce n'est non plus ni le mécontentement ni l'aigreur qui inspirent ces paroles à Notre-Seigneur, mais un sentiment de douceur et de bonté, ainsi nous apprend-il lorsque nos paroles n'auront point porté la persuasion dans les coeurs, à ne point nous laisser aller ni à la tristesse, ni à la colère, mais à rendre notre parole digne de foi, en évitant non-seulement la colère, mais les cris qui sont une cause de disputes. Jésus, sur le point de révéler des vérités sublimes, semble se retenir par égard pour la faiblesse de ses auditeurs, il ne s'élève pas aussitôt à ces vérités dignes de sa grandeur, mais traite de choses plus en rapport avec la disposition des esprits: «Si vous ne croyez pas lorsque je vous parle des choses qui sont sur la terre, comment croirez-vous lorsque je vous parlerai des choses qui sont dans le ciel ?» - S. Aug. (Traité 12). C'est-à-dire, si vous ne croyez pas que je puisse relever le temple que vous aurez renversé, comment croirez-vous que les hommes puissent être régénérés par l'Esprit saint? - S. Chrys. (hom. 27). Ou bien encore, ne soyez point surpris, s'il appelle le baptême une chose terrestre, il l'appelle ainsi, parce qu'il se confère sur la terre, et qu'en comparaison de cette naissance étonnante qui fait sortir le Fils de la substance du Père, la naissance même spirituelle de la grâce est une chose terrestre. Et c'est avec raison qu'il ne dit pas: Vous ne comprenez point mais: «Vous ne croyez pas», car qu'un homme ne puisse faire entrer une vérité dans son intelligence, c'est un signe de folie ou d'ignorance, mais qu'il refuse de donner son adhésion à une vérité qu'il doit simplement croire, ce n'est plus de la folie, c'est une incrédulité coupable. Notre-Seigneur révélait ces vérités bien que ceux qui entendaient refusaient de les croire, parce que plus tard elles devaient être crues d'une foi vive.



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