1998 Catéchisme 64
cf. DV 2
Dieu a tout dit en son Verbe
65 "Après avoir, à bien des reprises et de bien des manières, parlé par les prophètes, Dieu 'en ces jours qui sont les derniers, nous a parlé par son Fils'" (He 1,1-2). Le Christ, le Fils de Dieu fait homme, est la Parole unique, parfaite et indépassable du Père. En Lui Il dit tout, et il n'y aura pas d'autre parole que celle-là. S. Jean de la Croix, après tant d'autres, l'exprime de façon lumineuse, en commentant He 1,1-2:
Dès lors qu'il nous a donné son Fils, qui est sa Parole, Dieu n'a pas d'autre parole à nous donner. Il nous a tout dit à la fois et d'un seul coup en cette seule Parole ...; car ce qu'il disait par parties aux prophètes, il l'a dit tout entier dans son Fils, en nous donnant ce tout qu'est son Fils. Voilà pourquoi celui qui voudrait maintenant l'interroger, ou désirerait une vision ou une révélation, non seulement ferait une folie, mais ferait injure à Dieu, en ne jetant pas les yeux uniquement sur le Christ, sans chercher autre chose ou quelque nouveauté (Carm. 2, 22).
Il n'y aura plus d'autre Révélation
66 "L'Economie chrétienne, étant l'Alliance Nouvelle et définitive, ne passera donc jamais et aucune nouvelle révélation publique n'est dès lors à attendre avant la manifestation glorieuse de notre Seigneur Jésus-Christ" (DV 4). Cependant, même si la Révélation est achevée, elle n'est pas complètement explicitée; il restera à la foi chrétienne d'en saisir graduellement toute la portée au cours des siècles.
n. 84
67 Au fil des siècles il y a eu des révélations dites "privées", dont certaines ont été reconnues par l'autorité de l'Eglise. Elles n'appartiennent cependant pas au dépôt de la foi. Leur rôle n'est pas d'"améliorer" ou de "compléter" la Révélation définitive du Christ, mais d'aider à en vivre plus pleinement à une certaine époque de l'histoire. Guidé par le Magistère de l'Eglise, le sens des fidèles sait discerner et accueillir ce qui dans ces révélations constitue un appel authentique du Christ ou de ses saints à l'Eglise.
La foi chrétienne ne peut pas accepter des "révélations" qui prétendent dépasser ou corriger la Révélation dont le Christ est l'achèvement. C'est le cas de certaines Religions non-chrétiennes et aussi de certaines sectes récentes qui se fondent sur de telles "révélations".
68 Par amour, Dieu s'est révélé et s'est donné à l'homme. Il apporte ainsi une réponse définitive et surabondante aux questions que l'homme se pose sur le sens et le but de sa vie.
69 Dieu s'est révélé à l'homme en lui communiquant graduellement son propre Mystère par des actions et par des paroles.
70 Au delà du témoignage que Dieu donne de lui-même dans les choses créées, Il s'est manifesté lui-même à nos premiers parents. Il leur a parlé et, après la chute, leur a promis le salut (cf. Gn 3,15) et leur a offert son alliance.
71 Dieu conclut avec Noé une alliance éternelle entre Lui et tous les êtres vivants (cf. Gn 9,16). Elle durera tant que dure le monde.
72 Dieu a élu Abraham et a conclu une alliance avec lui et sa descendance. Il en a formé son peuple auquel il a révélé sa loi par Moïse. Il l'a préparé par les prophètes à accueillir le salut destiné à toute l'humanité.
73 Dieu s'est révélé pleinement en envoyant son propre Fils en qui il a établi son Alliance pour toujours. Celui-ci est la Parole définitive du Père, de sorte qu'il n'y aura plus d'autre Révélation après Lui.
n. 851
74 Dieu "veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité" (1Tm 2,4), c'est-à-dire du Christ Jésus (cf. Jn 14,6). Il faut donc que le Christ soit annoncé à tous les peuples et à tous les hommes et qu'ainsi la Révélation parvienne jusqu'aux extrémités du monde:
Cette Révélation donnée pour le salut de toutes les nations, Dieu, avec la même bienveillance, prit des dispositions pour qu'elle demeurât toujours en son intégrité et qu'elle fût transmise à toutes les générations (DV 7).
75 "Le Christ Seigneur en qui s'achève toute la Révélation du Dieu très haut, ayant accompli lui-même et proclamé de sa propre bouche l'Evangile d'abord promis par les prophètes, ordonna à ses apôtres de le prêcher à tous comme la source de toute vérité salutaire et de toute règle morale en leur communiquant les dons divins" (DV 7).
La prédication apostolique ...
76 La transmission de l'Evangile, selon l'ordre du Seigneur, s'est faite de deux manières:
oralement "par les apôtres, qui, dans la prédication orale, dans les exemples et les institutions transmirent, soit ce qu'ils avaient appris de la bouche du Christ en vivant avec lui et en le voyant agir, soit ce qu'ils tenaient des suggestions du Saint-Esprit";
par écrit "par ces apôtres et par des hommes de leur entourage, qui, sous l'inspiration du même Esprit Saint, consignèrent par écrit le message de salut" (DV 7).
... continuée dans la succession apostolique
n. 861
77 "Pour que l'Evangile fût toujours gardé intact et vivant dans l'Eglise, les apôtres laissèrent comme successeurs les évêques, auxquels ils 'transmirent leur propre charge d'enseignement'" (DV 7). En effet, "la prédication apostolique, qui se trouve spécialement exprimée dans les livres inspirés, devait être conservée par une succession ininterrompue jusqu'à la consommation des temps" (DV 8).
n. 174 n. 1124 n. 2651
78 Cette transmission vivante, accomplie dans l'Esprit Saint, est appelée la Tradition en tant que distincte de la Sainte Ecriture, quoique étroitement liée à elle. Par elle, "l'Eglise perpétue dans sa doctrine, sa vie et son culte et elle transmet à chaque génération tout ce qu'elle est elle-même, tout ce qu'elle croit" (DV 8). "L'enseignement des saints Pères atteste la présence vivifiante de cette Tradition, dont les richesses passent dans la pratique et la vie de l'Eglise qui croit et qui prie" (DV 8).
79
Ainsi, la communication que le Père a faite de Lui-même par son Verbe dans l'Esprit Saint, demeure présente et agissante dans l'Eglise: "Dieu qui parla jadis ne cesse de converser avec l'Epouse de son Fils bien-aimé, et l'Esprit Saint, par qui la voix vivante de l'Evangile retentit dans l'Eglise et par elle dans le monde, introduit les croyants dans la vérité tout entière et fait que la parole du Christ habite en eux avec abondance" (DV 8).
Une source commune ...
80 "Elles sont reliées et communiquent étroitement entre elles. Car toutes deux jaillissent d'une source divine identique, ne forment pour ainsi dire qu'un tout et tendent à une même fin" (DV 9). L'une et l'autre rendent présent et fécond dans l'Eglise le mystère du Christ qui a promis de demeurer avec les siens "pour toujours, jusqu'à la fin du monde" (Mt 28,20).
... deux modes distincts de transmission
81 "La Sainte Ecriture est la parole de Dieu en tant que, sous l'inspiration de l'Esprit divin, elle est consignée par écrit".
"Quant à la sainte Tradition, elle porte la parole de Dieu, confiée par le Christ Seigneur et par l'Esprit Saint aux apôtres, et la transmet intégralement à leurs successeurs, pour que, illuminés par l'Esprit de vérité, en la prêchant, ils la gardent, l'exposent et la répandent avec fidélité".
82 Il en résulte que l'Eglise à laquelle est confiée la transmission et l'interprétation de la Révélation, "ne tire pas de la seule Ecriture Sainte sa certitude sur tous les points de la Révélation. C'est pourquoi l'une et l'autre doivent être reçues et vénérées avec égal sentiment d'amour et de respect" (DV 9).
Tradition apostolique et traditions ecclésiales
83 La Tradition dont nous parlons ici est celle qui vient des Apôtres et transmet ce que ceux-ci ont reçu de l'enseignement et de l'exemple de Jésus et ce qu'ils ont appris par l'Esprit Saint. En effet, la première génération de chrétiens n'avait pas encore un Nouveau Testament écrit, et le Nouveau Testament lui-même atteste le processus de la Tradition vivante.
Il faut en distinguer les "traditions" théologiques, disciplinaires, liturgiques ou dévotionnelles nées au cours du temps dans les Eglises locales. Elles constituent des formes particulières sous lesquelles la grande Tradition reçoit des expressions adaptées aux divers lieux et aux diverses époques. C'est à sa lumière que celles-ci peuvent être maintenues, modifiées ou aussi abandonnées sous la conduite du Magistère de l'Eglise.
L'héritage de la foi confié à la totalité de l'Eglise
n. 857 n. 871
84 "L'héritage sacré" (cf. 1Tm 6,20 2Tm 1,12-14) de la foi ("depositum fidei"), contenu dans la Sainte Tradition et dans l'Ecriture Sainte a été confié par les Apôtres à l'ensemble de l'Eglise. "En s'attachant à lui le peuple saint tout entier uni à ses pasteurs reste assidûment fidèle à l'enseignement des apôtres et à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières, si bien que, dans le maintien, la pratique et la confession de la foi transmise, s'établit, entre pasteurs et fidèles, une singulière unité d'esprit" (DV 10).
Le Magistère de l'Eglise
n. 888-892 n. 2032-2040
85 "La charge d'interpréter de façon authentique la Parole de Dieu, écrite ou transmise, a été confiée au seul magistère vivant de l'Eglise dont l'autorité s'exerce au nom de Jésus-Christ" (DV 10), c'est-à-dire aux évêques en communion avec le successeur de Pierre, l'évêque de Rome.
86 "Pourtant, ce magistère n'est pas au-dessus de la parole de Dieu, mais il la sert, n'enseignant que ce qui fut transmis, puisque par mandat de Dieu, avec l'assistance de l'Esprit Saint, il écoute cette Parole avec amour, la garde saintement et l'expose aussi avec fidélité, et puise en cet unique dépôt de la foi tout ce qu'il propose à croire comme étant révélé par Dieu" (DV 10).
n. 1548 n. 2037
87 Les fidèles, se souvenant de la parole du Christ à ses Apôtres: "Qui vous écoute, m'écoute" (Lc 10,16 cf. LG 20) reçoivent avec docilité les enseignements et directives que leurs Pasteurs leur donnent sous différentes formes.
Les dogmes de la foi
88 Le Magistère de l'Église engage pleinement l'autorité reçue du Christ quand il définit des dogmes, c'est-à-dire quand il propose, sous une forme obligeant le peuple chrétien à une adhésion irrévocable de foi, des vérités contenues dans la Révélation divine ou bien quand il propose de manière définitive des vérités ayant avec celles-là un lien nécessaire.
n. 2625
89 Il existe un lien organique entre notre vie spirituelle et les dogmes. Les dogmes sont des lumières sur le chemin de notre foi, ils l'éclairent et le rendent sûr. Inversement, si notre vie est droite, notre intelligence et notre coeur seront ouverts pour accueillir la lumière des dogmes de la foi (cf. Jn 8,31-32).
n. 114 n. 158 n. 234
90 Les liens mutuels et la cohérence des dogmes peuvent être trouvés dans l'ensemble de la Révélation du Mystère du Christ (cf. Cc. Vatican I: DS 3016: "nexus mysteriorum"; LG 25). "La diversité de leurs rapports avec les fondements de la foi chrétienne marque donc un ordre ou une 'hiérarchie' des vérités de la doctrine catholique" (UR 11).
Le sens surnaturel de la foi
n. 737
91 Tous les fidèles ont part à la compréhension et à la transmission de la vérité révélée. Ils ont reçu l'onction de l'Esprit Saint qui les instruit (cf. 1Jn 2,20 1Jn 2,27) et les conduit vers la vérité toute entière (cf. Jn 16,13).
n. 785
92 "L'ensemble des fidèles ... ne peut se tromper dans la foi et manifeste cette qualité par le moyen du sens surnaturel de la foi qui est celui du peuple tout entier, lorsque, 'des évêques jusqu'au dernier des fidèles laïcs', il apporte aux vérités concernant la foi et les moeurs un consentement universel" (LG 12).
n. 889
93 "Grâce en effet à ce sens de la foi qui est éveillé et soutenu par l'Esprit de vérité, et sous la conduite du magistère sacré, ... le peuple de Dieu s'attache indéfectiblement à la foi transmise aux saints une fois pour toutes, il y pénètre plus profondément en l'interprétant comme il faut et dans sa vie la met plus parfaitement en oeuvre" (LG 12).
La croissance dans l'intelligence de la foi
n. 66 n. 2651
94 Grâce à l'assistance du Saint-Esprit, l'intelligence tant des réalités que des paroles de l'héritage de la foi peut croître dans la vie de l'Eglise:
- "Par la contemplation et l'étude des croyants qui les méditent en leur coeur" (DV 8); c'est en particulier "la recherche théologique qui approfondit la connaissance de la vérité révélée" (GS 62,7 cf.GS 44,2 DV 23 DV 24 UR 4). - "Par l'intelligence intérieure que les croyants éprouvent des choses spirituelles" (DV 8); "Divina eloquia cum legente crescunt" (S. Grégoire le Grand, hom. Ez 1,7,8 ). - "Par la prédication de ceux qui, avec la succession épiscopale, reçurent un charisme certain de la vérité" (DV 8).
95 "Il est donc clair que la sainte Tradition, la sainte Ecriture et le magistère de l'Eglise, par une très sage disposition de Dieu, sont tellement reliés et solidaires entre eux qu'aucune de ces réalités ne subsiste sans les autres, et que toutes ensemble, chacune à sa façon, sous l'action du seul Esprit Saint, contribuent efficacement au salut des âmes" (DV 10).
96 Ce que le Christ a confié aux apôtres, ceux-ci l'ont transmis par leur prédication et par écrit, sous l'inspiration de l'Esprit Saint, à toutes les générations, jusqu'au retour glorieux du Christ.
97 "La Sainte Tradition et la Sainte Ecriture constituent un unique dépôt sacré de la parole de Dieu" (DV 10) en lequel, comme dans un mirroir, l'Eglise pérégrinante contemple Dieu, source de toutes ses richesses.
98 "Dans sa doctrine, sa vie et son culte, l'Eglise perpétue et transmet à chaque génération tout ce qu'elle est elle-même, tout ce qu'elle croit" (DV 8).
99 Grâce à son sens surnaturel de la foi, le Peuple de Dieu tout entier ne cesse d'accueillir le don de la Révélation divine, de le pénétrer plus profondément et d'en vivre plus pleinement.
100 La charge d'interpréter authentiquement la Parole de Dieu a été confiée au seul Magistère de l'Eglise, au Pape et aux évêques en communion avec lui.
101 Dans la condescendance de sa bonté, Dieu, pour se révéler aux hommes, leur parle en paroles humaines: "En effet, les paroles de Dieu, exprimées en langues humaines, ont pris la ressemblance du langage humain, de même que le Verbe du Père éternel, ayant assumé l'infirmité de notre chair, est devenu semblable aux hommes" (DV 13).
n. 65 n. 2763
102 A travers toutes les paroles de l'Ecriture Sainte, Dieu ne dit qu'une seule Parole, son Verbe unique en qui il se dit tout entier (cf. He 1,1-3):
Rappelez-vous que c'est une même Parole de Dieu qui s'étend dans toutes les Ecritures, que c'est un même Verbe qui résonne dans la bouche de tous les écrivains sacrés, lui qui, étant au commencement Dieu auprès de Dieu, n'y a pas besoin de syllabes parce qu'il n'y est pas soumis au temps (S. Augustin, Psal. 103, 4,1).
n. 1100 n. 1184 n. 1378
103 Pour cette raison, l'Eglise a toujours vénéré les divines Ecritures comme elle vénère aussi le Corps du Seigneur. Elle ne cesse de présenter aux fidèles le Pain de vie pris sur la Table de la Parole de Dieu et du Corps du Christ (cf. DV 21).
104 Dans l'Ecriture Sainte, l'Eglise trouve sans cesse sa nourriture et sa force (cf. DV 24), car en elle, elle n'accueille pas seulement une parole humaine, mais ce qu'elle est réellement: la Parole de Dieu (cf. 1Th 2,13). "Dans les Saints livres, en effet, le Père qui est aux Cieux vient avec tendresse au-devant de ses fils et entre en conversation avec eux" (DV 21).
105 Dieu est l'Auteur de l'Ecriture Sainte. "La vérité divinement révélée, que contiennent et présentent les livres de la Sainte Ecriture, y a été consignée sous l'inspiration de l'Esprit-Saint".
"Notre Sainte Mère l'Eglise, de par sa foi apostolique, juge sacrés et canoniques tous les livres tant de l'Ancien que du Nouveau Testament, avec toutes leurs parties, puisque, rédigés sous l'inspiration de l'Esprit Saint ils ont Dieu pour auteur et qu'ils ont été transmis comme tels à l'Eglise elle-même" (DV 11).
106 Dieu a inspiré les auteurs humains des livres sacrés. "En vue de composer ces livres sacrés, Dieu a choisi des hommes auxquels il eut recours dans le plein usage de leurs facultés et de leurs moyens, pour que, lui-même agissant en eux et par eux, ils missent par écrit, en vrais auteurs, tout ce qui était conforme à son désir, et cela seulement" (DV 11).
107 Les livres inspirés enseignent la vérité. "Dès lors, puisque toutes les assertions des auteurs inspirés ou hagiographes doivent être tenues pour assertions de l'Esprit Saint, il faut déclarer que les livres de l'Ecriture enseignent fermement, fidèlement et sans erreur la vérité que Dieu a voulu voir consignée pour notre salut dans les Lettres sacrées" (DV 11).
108 Cependant, la foi chrétienne n'est pas une "religion du Livre". Le christianisme est la religion de la "Parole" de Dieu, "non d'un verbe écrit et muet, mais du Verbe incarné et vivant" (S. Bernard, hom. miss. 4,11). Pour qu'elles ne restent pas lettre morte, il faut que le Christ, Parole éternelle du Dieu vivant, par l'Esprit Saint nous "ouvre l'esprit à l'intelligence des Ecritures" (Lc 24,45).
109 Dans l'Ecriture Sainte, Dieu parle à l'homme à la manière des hommes. Pour bien interpréter l'Ecriture, il faut donc être attentif à ce que les auteurs humains ont vraiment voulu affirmer et à ce que Dieu a bien voulu nous manifester par leurs paroles (cf. DV 12).
110 Pour découvrir l'intention des auteurs sacrés, il faut tenir compte des conditions de leur temps et de leur culture, des "genres littéraires" en usage à cette époque, des manières de sentir, de parler et de raconter courantes en ce temps-là. "Car c'est de façon bien différente que la vérité se propose et s'exprime en des textes diversement historiques, en des textes, ou prophétiques, ou poétiques, ou même en d'autres genres d'expression" (DV 12).
111 Mais puisque l'Ecriture Sainte est inspirée, il y a un autre principe de l'interprétation juste, non moins important que le précédent, et sans lequel l'Ecriture demeurerait lettre morte: "La Sainte Ecriture doit être lue et interprétée à la lumière du même Esprit qui la fit rédiger" (DV 12).
Le Concile Vatican II indique trois critères pour une interprétation de l'Ecriture conforme à l'Esprit qui l'a inspirée (cf. DV 12):
n. 128
112 1. Porter une grande attention "au contenu et à l'unité de toute l'Ecriture". En effet,aussi différents que soient les livres qui la composent, l'Ecriture est une en raison de l'unité du dessein de Dieu, dont le Christ Jésus est le centre et le coeur, ouvert depuis sa Pâque (cf. Lc 24,25-27 Lc 24,44-46).
Le coeur (cf. Ps 22,15) du Christ désigne la sainte Ecriture qui fait connaître le coeur du Christ. Ce coeur était fermé avant la Passion car l'Ecriture était obscure. Mais l'Ecriture a été ouverte après la Passion, car ceux qui désormais en ont l'intelligence considèrent et discernent de quelle manière les prophéties doivent être interprétées (S. Thomas d'A., Psal. 21, 11).
n. 81
113 2. Lire l'Ecriture dans "la Tradition vivante de toute l'Eglise". Selon un adage des Pères, "sacra Scriptura principalius est in corde Ecclesiæ quam in materialibus instrumentis scripta". En effet, l'Eglise porte dans sa Tradition la mémoire vivante de la Parole de Dieu, et c'est l'Esprit Saint qui lui donne l'interprétation spirituelle de l'Ecriture ("... secundum spiritualem sensum quem Spiritus donat Ecclesiæ": Origène, hom. in Lev. 5,5).
n. 90
114 3. Etre attentif "à l'analogie de la foi" (cf. Rm 12,6). Par "analogie de la foi" nous entendons la cohésion des vérités de la foi entre elles et dans le projet total de la Révélation.
Les sens de l'Ecriture
115 Selon une ancienne tradition, on peut distinguer deux sens de l'Ecriture: le sens littéral et le sens spirituel, ce dernier étant subdivisé en sens allégorique, moral et anagogique. La concordance profonde des quatre sens assure toute sa richesse à la lecture vivante de l'Ecriture dans l'Eglise:
n. 110
116 Le sens littéral. C'est le sens signifié par les paroles de l'Ecriture et découvert par l'exégèse qui suit les règles de la juste interprétation "Omnes sensus (sc. sacræ Scripturæ) fundentur super litteralem" (S. Thomas d'A., I 1,10, ad 1).
n. 1101
117 Le sens spirituel. Grâce à l'unité du dessein de Dieu, non seulement le texte de l'Ecriture, mais aussi les réalités et les événements dont il parle peuvent être des signes.
1 Le sens allégorique. Nous pouvons acquérir une compréhension plus profonde des événements en reconnaissant leur signification dans le Christ; ainsi, la traversée de la Mer Rouge est un signe de la victoire du Christ,et ainsi du Baptême (cf. 1Co 10,2).
2 Le sens moral. Les événements rapportés dans l'Ecriture peuvent nous conduire à un agir juste. Elles ont été écrites "pour notre instruction" (1Co 10,11 cf. He 3,1-4,11).
3 Le sens anagogique. Nous pouvons voir des réalités et des événements dans leur signification éternelle, nous conduisant (en grec: "anagoge") vers notre Patrie. Ainsi, l'Eglise sur terre est signe de la Jérusalem céleste (cf. Ap 21,1-22,5).
118 Un distique médiéval résume la signification des quatre sens:
Littera gesta docet, quid credas allegoria,
Moralis quid agas, quo tendas anagogia.
("Le sens littéral enseigne les événements, l'allégorie ce qu'il faut croire, le sens moral ce qu'il faut faire, l'analogie vers quoi il faut tendre")
119 "Il appartient aux exégètes de s'efforcer, suivant ces règles, de pénétrer et d'exposer plus profondément le sens de la Sainte Ecriture, afin que, par leurs études en quelque sorte préparatoires, mûrisse le jugement de l'Eglise. Car tout ce qui concerne la manière d'interpréter l'Ecriture est finalement soumis au jugement de l'Eglise, qui exerce le ministère et le mandat divinement reçus de garder la parole de Dieu et de l'interpréter" (DV 12,3):
Ego vero Evangelio non crederem, nisi me catholicæ Ecclesiæ commoveret auctoritas (S. Augustin, fund. 5,6).
120 C'est la Tradition apostolique qui a fait discerner à l'Eglise quels écrits devaient être comptés dans la liste des Livres Saints (cf. DV 8,3). Cette liste intégrale est appelée "Canon" des Ecritures. Elle comporte pour l'Ancien Testament 46 (45, si l'on compte Jérémie et Baruch ensemble) écrits et 27 pour le Nouveau (cf.DS 179 DS 1334-1336 DS 1501-1504):
Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome, Josué, Juges, Ruth, les deux livres de Samuel, les deux livres des Rois, les deux livres des Chroniques, Esdras et Néhémie, Tobie, Judith, Esther, les deux livres des Maccabées, Job, les Psaumes, les Proverbes, l'Ecclésiaste, le Cantique des Cantiques, la Sagesse, l'Ecclésiastique, Isaïe, Jérémie, les Lamentations, Baruch, Ezéchiel, Daniel, Osée, Joèl, Amos, Abdias, Jonas, Michée, Nahum, Habaquq, Sophonie, Agée, Zacharie, Malachie pour l'Ancien Testament;
les Evangiles de Matthieu, de Marc, de Luc et de Jean, les Actes des Apôtres, les Epîtres de S. Paul aux Romains, la première et la deuxième aux Corinthiens, aux Galates, aux Ephésiens, aux Philippiens, aux Colossiens, la première et la deuxième aux Thessaloniciens, la première et la deuxième à Timothée, à Tite, à Philémon, l'Epître aux Hébreux, l'Epître de Jacques, la première et la deuxième de Pierre, les trois Epîtres de Jean, l'Epître de Jude et l'Apocalypse pour le Nouveau Testament.
L'Ancien Testament
121 L'Ancien Testament est une partie inamissible de l'Ecriture Sainte. Ses livres sont divinement inspirés et conservent une valeur permanente (cf. DV 14) car l'Ancienne Alliance n'a jamais été révoquée.
122 En effet, "l'Economie de l'Ancien Testament avait pour principale raison d'être de préparer l'avènement du Christ Sauveur du monde". "Bien qu'ils contiennent de l'imparfait et du provisoire", les livres de l'Ancien Testament témoignent de toute la divine pédagogie de l'amour salvifique de Dieu: "En eux se trouvent de sublimes enseignements sur Dieu, une bienfaisante sagesse sur la vie humaine, d'admirables trésors de prière; en eux enfin se tient caché le mystère de notre salut" (DV 15).
123 Les chrétiens vénèrent l'Ancien Testament comme vraie Parole de Dieu. L'Eglise a toujours vigoureusement repoussé l'idée de rejeter l'Ancien Testament sous prétexte que le Nouveau l'aurait rendu caduc (Marcionisme).
Le Nouveau Testament
124 "La Parole de Dieu qui est une force divine pour le salut de tout croyant, se présente dans les écrits du Nouveau Testament et sa puissance s'y manifeste de façon singulière" (DV 17). Ces écrits nous livrent la vérité définitive de la Révélation divine. Leur objet central est Jésus Christ, le Fils de Dieu incarné, ses actes, ses enseignements, sa passion et sa glorification ainsi que les débuts de son Eglise sous l'action de l'Esprit Saint (cf. DV 20).
125 Les Evangiles sont le coeur de toutes les Ecritures "en tant qu'ils constituent le témoignage par excellence sur la vie et sur l'enseignement du Verbe incarné, notre Sauveur" (DV 18).
126 Dans la formation des Evangiles on peut distinguer trois étapes:
1. La vie et l'enseignement de Jésus. L'Eglise tient fermement que les quatre Evangiles, "dont elle affirme sans hésiter l'historicité, transmettent fidèlement ce que Jésus le Fils de Dieu, durant sa vie parmi les hommes, a réellement fait et enseigné pour leur salut éternel, jusqu'au jour où il fut enlevé au ciel".
2. La tradition orale. "Ce que le Seigneur avait dit et fait, les apôtres après son Ascension le transmirent à leurs auditeurs avec cette intelligence plus profonde des choses dont eux-mêmes, instruits par les événements glorieux du Christ et éclairés par l'Esprit de vérité, jouissaient".
3. Les Evangiles écrits. "Les auteurs sacrés composèrent donc les quatre Evangiles, choisissant certains des nombreux éléments soit oralement soit déjà par écrit, rédigeant un résumé des autres, ou les expliquant en fonction de la situation des Eglises, gardant enfin la forme d'une prédication, de manière à nous livrer toujours sur Jésus des choses vraies et sincères" (DV 19).
127 L'Evangile quadriforme occupe dans l'Eglise une place unique, témoins la vénération dont l'entoure la liturgie et l'attrait incomparable qu'il a exercé de tout temps sur les saints:
Il n'y a aucune doctrine qui soit meilleure, plus précieuse et plus splendide que le texte de l'Evangile. Voyez et retenez ce que notre Seigneur et Maître, le Christ, a enseigné par ses paroles et réalisé par ses actes (Ste. Césarie la Jeune, Rich.).
C'est pardessus tout l'Evangile qui m'entretient pendant mes oraisons; en lui je trouve tout ce qui est nécessaire à ma pauvre âme. J'y découvre toujours de nouvelles lumières, des sens cachés et mystérieux (Ste. Thérèse de l'Enfant-Jésus, ms. autob. A 83v).
L'unité de l'Ancien et du Nouveau Testament
128 L'Eglise, déjà aux temps apostoliques (cf. 1Co 10,6 1Co 10,11 He 10,1 1P 3,21), et puis constamment dans sa Tradition, a éclairé l'unité du plan divin dans les deux Testaments grâce à la typologie. Celle-ci discerne dans les oeuvres de Dieu dans l'Ancienne Alliance des préfigurations de ce que Dieu a accompli dans la plénitude des temps, en la personne de son Fils incarné.
129 Les chrétiens lisent donc l'Ancien Testament à la lumière du Christ mort et ressuscité. Cette lecture typologique manifeste le contenu inépuisable de l'Ancien Testament. Elle ne doit pas faire oublier qu'il garde sa valeur propre de Révélation que Notre Seigneur lui-même a réaffirmée (cf. Mc 12,29-31). Par ailleurs, le Nouveau Testament demande d'être lu aussi à la lumière de l'Ancien. La catéchèse chrétienne primitive y aura constamment recours (cf. 1Co 5,6-8 1Co 10,1-11). Selon un vieil adage, le Nouveau Testament est caché dans l'Ancien, alors que l'Ancien est dévoilé dans le Nouveau: "Novum in Vetere latet et in Novo Vetus patet" (S. Augustin, Hept. 2,73 cf. DV 16).
130 La typologie signifie le dynamisme vers l'accomplissement du plan divin quand "Dieu sera tout en tous" (1Co 15,28). Aussi la vocation des patriarches et l'Exode de l'Egypte, par exemple, ne perdent pas leur valeur propre dans le plan de Dieu, du fait qu'ils en sont en même temps des étapes intermédiaires.
131 "La force et la puissance que recèle la Parole de Dieu sont si grandes qu'elles constituent, pour l'Eglise, son point d'appui et sa vigueur et, pour les enfants de l'Eglise, la force de leur foi, la nourriture de leur âme, la source pure et permanente de leur vie spirituelle" (DV 21). Il faut "que l'accès à la Sainte Ecriture soit largement ouvert aux chrétiens" (DV 22).
132 "Que l'étude de la Sainte Ecriture soit donc pour la sacrée théologie comme son âme. Que le ministère de la Parole, qui comprend la prédication pastorale, la catéchèse, et toute l'instruction chrétienne, où l'homélie liturgique doit avoir une place de choix, trouve, lui aussi, dans cette même Parole de l'Ecriture, une saine nourriture et une saine vigueur" (DV 24).
133 L'Eglise "exhorte instamment et spécialement tous les chrétiens ... à acquérir, par la lecture fréquente des divines Ecritures, 'la science éminente de Jésus-Christ' (Ph 3,8). 'En effet, ignorer les Ecritures, c'est ignorer le Christ' (S. Jérôme)" (DV 25).
134 "Omnis Scriptura divina unus liber est, et ille unus liber Christus est, quia omnis Scriptura divina de Christo loquitur, et omnis Scriptura divina in Christo impletur" (Hugues de Saint Victor, Noe 2,8: Toute l'écriture divine n'est qu'un seul livre, et ce livre c'est le Christ, car toute l'Ecriture parle du Christ, et toute l'Ecriture divine s'accomplit dans le Christ).
135 "Les Saintes Ecritures contiennent la Parole de Dieu et, puisqu'elles sont inspirées, elles sont vraiment cette Parole" (DV 24).
136 Dieu est l'Auteur de l'Ecriture Sainte en inspirant ses auteurs humains; Il agit en eux et par eux. Il donne ainsi l'assurance que leurs écrits enseignent sans erreur la vérité salutaire (cf. DV 11).
137 L'interprétation des Ecritures inspirées doit être avant tout attentive à ce que Dieu veut révéler par les auteurs sacrés pour notre salut. "Ce qui vient de l'Esprit, n'est pleinement entendu que par l'action de l'Esprit" (Origène, hom. in Ex 4,5).
138 L'Eglise reçoit et vénère comme inspirés les 46 livres de l'Ancien et les 27 livres du Nouveau Testament.
139 Les quatre Evangiles tiennent une place centrale puisque le Christ Jésus en est le centre.
140 L'unité des deux Testaments découle de l'unité du dessein de Dieu et de sa Révélation.. L'Ancien Testament prépare le Nouveau, alors que celui-ci accomplit l'Ancien; les deux s'éclairent mutuellement; les deux sont vraie Parole de Dieu.
141 "L'Eglise a toujours vénéré les divines Ecritures, comme elle l'a fait pour le Corps même du Seigneur" (DV 21): ces deux nourissent et régissent toute la vie chrétienne. "Ta Parole est la lumière de mes pas, la lampe de ma route" (Ps 119,105 cf. Is 50,4).
1998 Catéchisme 64