1998 Catéchisme 429
430 Jésus veut dire en hébreu: "Dieu sauve". Lors de l'Annonciation, l'ange Gabriel lui donne comme nom propre le nom de Jésus qui exprime à la fois son identité et sa mission (cf. Lc 1,31). Puisque "Dieu seul peut remettre les péchés" (Mc 2,7), c'est lui qui, en Jésus, son Fils éternel fait homme "sauvera son peuple de ses péchés" (Mt 1,21). En Jésus, Dieu récapitule ainsi toute son histoire de salut en faveur des hommes.
431 Dans l'histoire du salut, Dieu ne s'est pas contenté de délivrer Israël de "la maison de servitude" (Dt 5,6) en le faisant sortir d'Egypte. Il le sauve encore de son péché. Parce que le péché est toujours une offense faite à Dieu (cf. Ps 51,6), c'est Lui seul qui peut l'absoudre (cf. Ps 51,12). C'est pourquoi Israël, en prenant de plus en plus conscience de l'universalité du péché, ne pourra plus chercher le salut que dans l'invocation du Nom du Dieu Rédempteur (cf. Ps 79,9).
432 Le nom de Jésus signifie que le Nom même de Dieu est présent en la personne de son Fils (cf. Ac 5,41 3Jn 7) fait homme pour la rédemption universelle et définitive des péchés. Il est le Nom divin qui seul apporte le salut (cf. Jn 3,5 Ac 2,21) et il peut désormais être invoqué de tous car il s'est uni à tous les hommes par l'Incarnation (cf. Rm 10,6-13) de telle sorte qu'"il n'y a pas sous le ciel d'autre Nom donné aux hommes par lequel nous puissions être sauvés" (Ac 4,12 cf. Ac 9,14 Jc 2,7).
433 Le Nom du Dieu Sauveur était invoqué une seule fois par an par le grand prêtre pour l'expiation des péchés d'Israël, quand il avait aspergé le propitiatoire du Saint des Saints avec le sang du sacrifice (cf. Lv 16,15-16 Si 50,20 He 9,7). Le propitiatoire était le lieu de la présence de Dieu (cf. Ex 25,22 Lv 16,2 Nb 7,89 He 9,5). Quand S. Paul dit de Jésus que "Dieu l'a destiné à être propitiatoire par son propre sang" (Rm 3,25), il signifie que dans l'humanité de celui-ci, "c'était Dieu qui dans le Christ se réconciliait le monde" (2Co 5,19).
434 La Résurrection de Jésus glorifie le Nom du Dieu Sauveur (cf. Jn 12,28) car désormais, c'est le Nom de Jésus qui manifeste en plénitude la puissance suprême du "Nom au-dessus de tout nom" (Ph 2,9-10). Les esprits mauvais craignent son Nom (cf. Ac 16,16-18 Ac 19,13-16) et c'est en son Nom que les disciples de Jésus font des miracles (cf. Mc 16,17), car tout ce qu'ils demandent au Père en son Nom, celui-ci le leur accorde (Jn 15,16).
435 Le nom de Jésus est au coeur de la prière chrétienne. Toutes les oraisons liturgiques se concluent par la formule "per Dominum nostrum Jesum Christum. ...". Le "Je vous salue, Marie" culmine dans "et Jésus, le fruit de tes entrailles, est béni". La prière du coeur orientale appelée "prière à Jésus" dit: "Jésus Christ, Fils de Dieu, Seigneur prend pitié de moi pécheur". De nombreux chrétiens meurent en ayant, comme Ste. Jeanne d'Arc, le seul mot de "Jésus" aux lèvres.
436 Christ vient de la traduction grecque du terme hébreu "Messie" qui veut dire "oint". Il ne devient le nom propre de Jésus que parce que celui-ci accomplit parfaitement la mission divine qu'il signifie. En effet en Israël étaient oints au nom de Dieu ceux qui lui étaient consacrés pour une mission venant de lui. C'était le cas des rois (cf. 1S 9,16 1S 10,1 1S 16,1 1S 16,12-13 1R 1,39), des prêtres (cf. Ex 29,7 Lv 8,12) et, en de rares cas, des prophètes (cf. 1R 19,16). Ce devait être par excellence le cas du Messie que Dieu enverrait pour instaurer définitivement son Royaume (cf. Ps 2,2 Ac 4,26-27). Le Messie devait être oint par l'Esprit du Seigneur (cf. Is 11,2) à la fois comme roi et prêtre (cf. Za 4,14 Za 6,13) mais aussi comme prophète (cf. Is 61,1 Lc 4,16-21). Jésus a accompli l'espérance messianique d'Israël dans sa triple fonction de prêtre, de prophète et de roi
437 L'ange a annoncé aux bergers la naissance de Jésus comme celle du Messie promis à Israël: "Aujourd'hui, dans la ville de David vous est né un Sauveur qui est le Christ Seigneur" (Lc 2,11). Dès l'origine il est "celui que le Père a consacré et envoyé dans le monde" (Jn 10,36), conçu comme "saint" (Lc 1,35) dans le sein virginal de Marie. Joseph a été appelé par Dieu à "prendre chez lui Marie son épouse" enceinte de "ce qui a été engendré en elle par l'Esprit Saint" (Mt 1,21) afin que Jésus "que l'on appelle Christ" naisse de l'épouse de Joseph dans la descendance messianique de David (Mt 1,16 cf. Rm 1,3 2Tm 2,8 Ap 22,16).
438 La consécration messianique de Jésus manifeste sa mission divine. "C'est d'ailleurs ce qu'indique son nom lui-même, car dans le nom de Christ est sous-entendu Celui qui a oint, Celui qui a été oint et l'Onction même dont il a été oint: Celui qui a oint, c'est le Père, Celui qui a été oint, c'est le Fils, et il l'a été dans l'Esprit qui est l'Onction" (S. Irénée, hær. 3,18, 3). Sa consécration messianique éternelle s'est révélée dans le temps de sa vie terrestre lors de son baptême par Jean quand "Dieu l'a oint de l'Esprit Saint et de puissance" (Ac 10,38) "pour qu'il fût manifesté à Israël" (Jn 1,31) comme son Messie. Ses oeuvres et ses paroles le feront connaître comme "le saint de Dieu" (Mc 1,24 Jn 6,69 Ac 3,14).
439 De nombreux juifs et même certains païens qui partagaient leur espérance ont reconnu en Jésus les traits fondamentaux du "fils de David" messianique promis par Dieu à Israël (cf. Mt 2,2 Mt 9,27 Mt 12,23 Mt 15,22 Mt 20,30 Mt 21,9 Mt 21,15). Jésus a accepté le titre de Messie auquel il avait droit (cf. Jn 4,25-26 Jn 11,27), mais non sans réserve parce que celui-ci était compris par une partie de ses contemporains selon une conception trop humaine (cf. Mt 22,41-46), essentiellement politique (cf. Jn 6,15 Lc 24,21).
440 Jésus a accueilli la profession de foi de Pierre qui le reconnaissait comme le Messie en annonçant la passion prochaine du Fils de l'Homme (cf. Mt 16,16-23). Il a dévoilé le contenu authentique de sa royauté messianique à la fois dans l'identité transcendante du Fils de l'Homme "qui est descendu du ciel" (Jn 3,13 cf. Jn 6,62 Da 7,13) et dans sa mission rédemptrice comme Serviteur souffrant: "Le Fils de l'Homme n'est pas venu pour être servi mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude" (Mt 20,28 cf. Is 53,10-12). C'est pourquoi le vrai sens de sa royauté n'est manifesté que du haut de la Croix (cf. Jn 19,19-22 Lc 23,39-43). C'est seulement après sa Résurrection que sa royauté messianique pourra être proclamée par Pierre devant le peuple de Dieu: "Que toute la maison d'Israël le sache avec certitude: Dieu l'a fait Seigneur et Christ, ce Jésus que vous, vous avez crucifié" (Ac 2,36).
441 Fils de Dieu, dans l'Ancien Testament, est un titre donné aux anges (cf. Dt 32,8 Jb 1,6), au peuple de l'Election (cf. Ex 4,22 Os 11,1 Jr 3,19 Si 36,11 Sg 18,13), aux enfants d'Israël (cf. Dt 14,1 Os 2,1) et à leurs rois (cf. 2S 7,14 Ps 82,6). Il signifie alors une filiation adoptive qui établit entre Dieu et sa créature des relations d'une intimité particulière. Quand le Roi-Messie promis est dit "fils de Dieu" (cf. 1Ch 17,13 Ps 2,7), cela n'implique pas nécessairement, selon le sens littéral de ces textes, qu'il soit plus qu'humain. Ceux qui ont désigné ainsi Jésus en tant que Messie d'Israël (cf. Mt 27,54) n'ont peut-être pas voulu dire davantage (cf. Lc 23,47).
442 Il n'en va pas de même pour Pierre quand il confesse Jésus comme "le Christ, le Fils du Dieu vivant" (Mt 16,16) car celui-ci lui répond avec solennité: "Cette révélation ne t'est pas venue de la chair et du sang mais de mon Père qui est dans les cieux" (Mt 16,17). Parallèlement Paul dira à propos de sa conversion sur le chemin de Damas: "Quand Celui qui dès le sein maternel m'a mis à part et appelé par sa grâce daigna révéler en moi son Fils pour que je l'annonce parmi les païens ..." (Ga 1,15-16). "Aussitôt il se mit à prêcher Jésus dans les synagogues, proclamant qu'il est le Fils de Dieu" (Ac 9,20). Ce sera dès le début (cf. 1Th 1,10) le centre de la foi apostolique (cf. Jn 20,31) professée d'abord par Pierre comme fondement de l'Eglise (cf. Mt 16,18).
443 Si Pierre a pu reconnaître le caractère transcendant de la filiation divine de Jésus Messie, c'est que celui-ci l'a nettement laissé entendre. Devant le Sanhédrin, à la demande de ses accusateurs: "Tu es donc le Fils de Dieu", Jésus a répondu: "Vous le dites bien, je le suis" (Lc 22,70 cf. Mt 26,64 Mc 14,61). Bien avant déjà, Il s'est désigné comme "le Fils" qui connaît le Père (cf. Mt 11,27 Mt 21,37-38), qui est distinct des "serviteurs" que Dieu a auparavant envoyés à son peuple (cf. Mt 21,34-36), supérieur aux anges eux-mêmes (cf. Mt 24,36). Il a distingué sa filiation de celle de ses disciples en ne disant jamais "notre Père" (cf. Mt 5,48 Mt 6,8 Mt 7,21 Lc 11,13) sauf pour leur ordonner "vous donc priez ainsi: Notre Père" (Mt 6,9); et il a souligné cette distinction: "Mon Père et votre Père" (Jn 20,17).
444 Les Evangiles rapportent en deux moments solennels, le baptême et la transfiguration du Christ, la voix du Père qui le désigne comme son "Fils bien-aimé" (cf. Mt 3,17 Mt 17,5). Jésus se désigne lui-même comme "le Fils Unique de Dieu" (Jn 3,16) et affirme par ce titre sa préexistence éternelle (cf. Jn 10,36). Il demande la foi "au Nom du Fils Unique de Dieu" (Jn 3,18). Cette confession chrétienne apparaît déjà dans l'exclamation du centurion face à Jésus en croix: "Vraiment cet homme était Fils de Dieu" (Mc 15,39), car c'est seulement dans le mystère pascal que le croyant peut donner sa portée ultime au titre de "Fils de Dieu".
445 C'est après sa Résurrection que sa filiation divine apparaît dans la puissance de son humanité glorifiée: "Selon l'Esprit qui sanctifie, par sa Résurrection d'entre les morts, il a été établi comme Fils de Dieu dans sa puissance" (Rm 1,4 cf. Ac 13,33). Les apôtres pourront confesser: "Nous avons vu sa gloire, gloire qu'il tient de son Père comme Fils unique, plein de grâce et de vérité" (Jn 1,14).
446 Dans la traduction grecque des livres de l'Ancien Testament, le nom ineffable sous lequel Dieu s'est révélé à Moïse (cf. Ex 3,14), YHWH, est rendu par "Kyrios" ("Seigneur"). Seigneur devient dès lors le nom le plus habituel pour désigner la divinité même du Dieu d'Israël. C'est dans ce sens fort que le Nouveau Testament utilise le titre de "Seigneur" à la fois pour le Père, mais aussi, et c'est là la nouveauté, pour Jésus reconnu ainsi comme Dieu lui-même (cf. 1Co 2,8).
447 Jésus lui-même s'attribue de façon voilée ce titre lorsqu'il discute avec les Pharisiens sur le sens du Psaume 109 (cf. Mt 22,41-46; cf. aussi Ac 2,34-36 He 1,13), mais aussi de manière explicite en s'adressant à ses apôtres (cf. Jn 13,13). Tout au long de sa vie publique ses gestes de domination sur la nature, sur les maladies, sur les démons, sur la mort et le péché, démontraient sa souveraineté divine.
448 Très souvent, dans les Evangiles, des personnes s'adressent à Jésus en l'appelant "Seigneur". Ce titre exprime le respect et la confiance de ceux qui s'approchent de Jésus et qui attendent de lui secours et guérison (cf. Mt 8,2 Mt 14,30 Mt 15,22 e.a.). Sous la motion de l'Esprit Saint, il exprime la reconnaissance du Mystère divin de Jésus (cf. Lc 1,43 Lc 2,11). Dans la rencontre avec Jésus ressuscité, il devient adoration: "Mon Seigneur et mon Dieu!" (Jn 20,28). Il prend alors une connotation d'amour et d'affection qui va rester le propre de la tradition chrétienne: "C'est le Seigneur!" (Jn 21,7).
449 En attribuant à Jésus le titre divin de Seigneur, les premières confessions de foi de l'Eglise affirment, dès l'origine (cf. Ac 2,34-36), que le pouvoir, l'honneur et la gloire dus à Dieu le Père conviennent aussi à Jésus (cf. Rm 9,5 Tt 2,13 Ap 5,13) parce qu'il est de "condition divine" (Ph 2,6) et que le Père a manifesté cette souveraineté de Jésus en le ressuscitant des morts et en l'exaltant dans sa gloire (cf. Rm 10,9 1Co 12,3 Ph 2,11).
450 Dès le commencement de l'histoire chrétienne, l'affirmation de la seigneurie de Jésus sur le monde et sur l'histoire (cf. Ap 11,15) signifie aussi la reconnaissance que l'homme ne doit soumettre sa liberté personnelle, de façon absolue, à aucun pouvoir terrestre, mais seulement à Dieu le Père et au Seigneur Jésus-Christ: César n'est pas "le Seigneur" (cf. Mc 12,17 Ac 5,29). "L'Eglise croit ... que la clé, le centre et la fin de toute histoire humaine se trouve en son Seigneur et Maître" (GS 10 cf. GS 45).
451 La prière chrétienne est marquée par le titre "Seigneur", que ce soit l'invitation à la prière "le Seigneur soit avec vous", ou la conclusion de la prière "par Jésus-Christ notre Seigneur" ou encore le cri plein de confiance et d'espérance: "Maran atha" ("le Seigneur vient!") ou "Marana tha" ("Viens, Seigneur!") (1Co 16,22): "Amen, viens, Seigneur Jésus!" (Ap 22,20).
452 Le nom de Jésus signifie "Dieu qui sauve". L'enfant né de la Vierge Marie est appelé "Jésus" "car c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés" (Mt 1,21): "Il n'y a pas sous le ciel d'autre Nom donné aux hommes par lequel il nous faille être sauvés" (Ac 4,12).
453 Le nom de Christ signifie "Oint", "Messie". Jésus est le Christ car "Dieu l'a oint de l'Esprit Saint et de puissance" (Ac 10,38). Il était "celui qui doit venir" (Lc 7,19), l'objet de "l'espérance d'Israël" (Ac 28,20).
454 Le nom de Fils de Dieu signifie la relation unique et éternelle de Jésus-Christ à Dieu son Père: Il est le Fils Unique du Père (cf. Jn 1,14 Jn 1,18 Jn 3,16 Jn 3,18) et Dieu lui-même (cf. Jn 1,1). Croire que Jésus-Christ est le Fils de Dieu est nécessaire pour être chrétien (cf. Ac 8,37 1Jn 2,23).
455 Le nom de Seigneur signifie la souveraineté divine. Confesser ou invoquer Jésus comme Seigneur, c'est croire en sa divinité. "Nul ne peut dire 'Jésus est Seigneur' s'il n'est avec l'Esprit Saint" (1Co 12,3).
456 Avec le Credo de Nicée-Constantinople, nous répondons en confessant: "Pour nous les hommes et pour notre salut Il descendit du ciel; par l'Esprit Saint, Il a pris chair de la Vierge Marie et s'est fait homme".
457 Le Verbe s'est fait chair pour nous sauver en nous réconciliant avec Dieu: "C'est Dieu qui nous a aimés et qui a envoyé son Fils en victime de propitiation pour nos péchés" (1Jn 4,10). "Le Père a envoyé son Fils, le sauveur du monde" (1Jn 4,14). "Celui-là a paru pour ôter les péchés" (1Jn 3,5):
Malade, notre nature demandait à être guérie; déchue, à être relevée; morte, à être ressuscitée. Nous avions perdu la possession du bien, il fallait nous la rendre. Enfermés dans les ténèbres, il fallait nous porter la lumière; captifs, nous attendions un sauveur; prisonniers, un secours; esclaves, un libérateur. Ces raisons-là étaient-elles sans importance? Ne méritaient-elles pas d'émouvoir Dieu au point de le faire descendre jusqu'à notre nature humaine pour la visiter, puisque l'humanité se trouvait dans un état si misérable et si malheureux? (S. Grégoire de Nysse, or. catech. 15).
458 Le Verbe s'est fait chair pour que nous connaissions ainsi l'amour de Dieu: "En ceci s'est manifesté l'amour de Dieu pour nous: Dieu a envoyé son Fils unique dans le monde afin que nous vivions par lui" (1Jn 4,9). "Car Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais ait la vie éternelle" (Jn 3,16).
459 Le Verbe s'est fait chair pour être notre modèle de sainteté: "Prenez sur vous mon joug et apprenez de moi ..." (Mt 11,29). "Je suis la voie, la vérité et la vie; nul ne vient au Père sans passer par moi" (Jn 14,6). Et le Père, sur la montagne de la Transfiguration, ordonne: "Ecoutez-le" (Mc 9,7 cf. Dt 6,4-5). Il est en effet le modèle des Béatitudes et la norme de la Loi nouvelle: "Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés" (Jn 15,12). Cet amour implique l'offrande effective de soi-même à sa suite (cf. Mc 8,34).
460 Le Verbe s'est fait chair pour nous rendre "participants de la nature divine" (2P 1,4): "Car telle est la raison pour laquelle le Verbe s'est fait homme, et le Fils de Dieu, Fils de l'homme: c'est pour que l'homme, en entrant en communion avec le Verbe et en recevant ainsi la filiation divine, devienne fils de Dieu" (S. Irénée, hær. 3, 19,1). "Car le Fils de Dieu s'est fait homme pour nous faire Dieu" (S. Athanase, inc. 54,3). "Unigenitus Dei Filius, suæ divinitatis volens nos esse participes, naturam nostram assumpsit, ut homines deos faceret factus homo" (S. Thomas d'A., opusc. 57 in festo Corp. Chr. 1).
461 Reprenant l'expression de S. Jean ("Le Verbe s'est fait chair": Jn 1,14), l'Eglise appelle "Incarnation" le fait que le Fils de Dieu ait assumé une nature humaine pour accomplir en elle notre salut. Dans une hymne attestée par S. Paul, l'Eglise chante le Mystère de l'Incarnation:
Ayez entre vous les mêmes sentiments qui furent dans le Christ Jésus: Lui, de condition divine, ne retint pas jalousement le rang qui l'égalait à Dieu. Mais il s'anéantit lui-même prenant condition d'esclave et devenant semblable aux hommes. S'étant comporté comme un homme, il s'humilia plus encore, obéissant jusqu'à la mort, et la mort sur la Croix!" (Ph 2,5-8 cf. LH, cantique des Vêpres du samedi).
462
L'épître aux Hébreux parle du même Mystère:
C'est pourquoi, en entrant dans le monde, le Christ dit: Tu n'as voulu ni sacrifice ni oblation; mais tu m'as façonné un corps. Tu n'as agréé ni holocauste ni sacrifices pour les péchés. Alors j'ai dit: Voici, je viens ... pour faire ta volonté (He 10,5-7, citant Ps 40,7-9 LXX).
463 La foi en l'Incarnation véritable du Fils de Dieu est le signe distinctif de la foi chrétienne: "A ceci reconnaissez l'esprit de Dieu: Tout esprit qui confesse Jésus-Christ venu dans la chair est de Dieu" (1Jn 4,2). C'est là la joyeuse conviction de l'Eglise dès son commencement, lorsqu'elle chante "le grand Mystère de la piété": "Il a été manifesté dans la chair" (1Tm 3,16).
464 L'événement unique et tout à fait singulier de l'Incarnation du Fils de Dieu ne signifie pas que Jésus-Christ soit en partie Dieu et en partie homme, ni qu'il soit le résultat du mélange confus entre le divin et l'humain. Il s'est fait vraiment homme en restant vraiment Dieu. Jésus Christ est vrai Dieu et vrai homme. Cette vérité de foi, l'Eglise a dû la défendre et la clarifier au cours des premiers siècles face à des hérésies qui la falsifiaient.
465 Les premières hérésies ont moins nié la divinité du Christ que son humanité vraie (docétisme gnostique). Dès les temps apostolique la foi chrétienne a insisté sur la vraie incarnation du Fils de Dieu, "venu dans la chair" (cf. 1Jn 4,2-3 2Jn 7). Mais dès le troisième siècle, l'Eglise a dû affirmer contre Paul de Samosate, dans un concile réuni à Antioche, que Jésus-Christ est Fils de Dieu par nature et non par adoption. Le premier concile oecuménique de Nicée en 325 confessa dans son Credo que le Fils de Dieu est "engendré, non pas créé, de la même substance ('homousios') que le Père" et condamna Arius qui affirmait que "le Fils de Dieu est sorti du néant" (DS 130) et qu'il serait "d'une autre substance que le Père" (DS 126).
466 L'hérésie nestorienne voyait dans le Christ une personne humaine conjointe à la personne divine du Fils de Dieu. Face à elle S.Cyrille d'Alexandrie et le troisième concile oecuménique réuni à Ephèse en 431 ont confessé que "le Verbe, en s'unissant dans sa personne une chair animée par une âme rationnelle, est devenu homme" (DS 250). L'humanité du Christ n'a d'autre sujet que la personne divine du Fils de Dieu qui l'a assumée et faite sienne dès sa conception. Pour cela le concile d'Ephèse a proclamé en 431 que Marie est devenue en toute vérité Mère de Dieu par la conception humaine du Fils de Dieu dans son sein: "Mère de Dieu, non parce que le Verbe de Dieu a tiré d'elle sa nature divine, mais parce que c'est d'elle qu'il tient le corps sacré doté d'une âme rationnelle, uni auquel en sa personne le Verbe est dit naître selon la chair" (DS 251).
467 Les monophysites affirmaient que la nature humaine avait cessé d'exister comme telle dans le Christ en étant assumée par sa personne divine de Fils de Dieu. Confronté à cette hérésie, le quatrième concile oecuménique, à Chalcédoine, a confessé en 451:
A la suite des saints Pères, nous enseignons unanimement à confesser un seul et même Fils, notre Seigneur Jésus-Christ, le même parfait en divinité et parfait en humanité, le même vraiment Dieu et vraiment homme, composé d'une âme rationnelle et d'un corps, consubstantiel au Père selon la divinité, consubstantiel à nous selon l'humanité, "semblable à nous en tout, à l'exception du péché" (He 4,15); engendré du Père avant tout les siècles selon la divinité, et en ces derniers jours, pour nous et pour notre salut, né de la Vierge Marie, Mère de Dieu, selon l'humanité.
Un seul et même Christ, Seigneur, Fils unique, que nous devons reconnaître en deux natures, sans confusion, sans changement, sans division, sans séparation. La différence des natures n'est nullement supprimée par leur union, mais plutôt les propriétés de chacune sont sauvegardées et réunies en une seule personne et une seule hypostase (DS 301-302).
468 Après le concile de Chalcédoine, certains firent de la nature humaine du Christ une sorte de sujet personnel. Contre eux, le cinquième concile oecuménique, à Constantinople en 553, a confessé à propos du Christ: "Il n'y a qu'une seule hypostase (ou personne), qui est notre Seigneur Jésus-Christ, un de la Trinité" (DS 424). Tout dans l'humanité du Christ doit donc être attribué à sa personne divine comme à son sujet propre (cf. déjà Cc. èse: DS 255), non seulement les miracles mais aussi les souffrances (cf. DS 424) et même la mort: "Celui qui a été crucifié dans la chair, notre Seigneur Jésus-Christ, est vrai Dieu, Seigneur de la gloire et Un de la sainte Trinité" (DS 432).
469 L'Eglise confesse ainsi que Jésus est inséparablement vrai Dieu et vrai homme. Il est vraiment le Fils de Dieu qui s'est fait homme, notre frère, et cela sans cesser d'être Dieu, notre Seigneur:
"Id quod fuit remansit et quod non fuit assumpsit", chante la Liturgie romaine (LH, antienne des laudes du premier janvier; cf. S. Léon le Grand, serm. 21,2-3). Et la liturgie de S. Jean Chrysostome proclame et chante: "O Fils Unique et Verbe de Dieu, étant immortel, tu as daigné pour notre salut t'incarner de la sainte Mère de Dieu et toujours Vierge Marie, qui sans changement es devenu homme, et qui as été crucifé, O Christ Dieu, qui, par ta mort as écrasé la mort, qui es Un de la Sainte Trinité, glorifié avec le Père et le Saint-Esprit, sauve-nous!" (Tropaire "O monoghenis").
470 Parce que dans l'union mystérieuse de l'Incarnation "la nature humaine a été assumée, non absorbée" (GS 22), l'Eglise a été amenée au cours des siècles à confesser la pleine réalité de l'âme humaine, avec ses opérations d'intelligence et de volonté, et du corps humain du Christ. Mais parallèlement, elle a eu à rappeler à chaque fois que la nature humaine du Christ appartient en propre à la personne divine du Fils de Dieu qui l'a assumée. Tout ce qu'il est et ce qu'il fait en elle relève "d'Un de la Trinité". Le Fils de Dieu communique donc à son humanité son propre mode d'exister personnel dans la Trinité. Ainsi, dans son âme comme dans son corps, le Christ exprime humainement les moeurs divines de la Trinité (cf. Jn 14,9-10):
Le Fils de Dieu a travaillé avec des mains d'homme, il a pensé avec une intelligence d'homme, il a agi avec une volonté d'homme, il a aimé avec un coeur d'homme. Né de la Vierge Marie, il est vraiment devenu l'un de nous, en tout semblable à nous, hormis le péché (GS 22).
L'âme et la connaissance humaine du Christ
471 Apollinaire de Laodicée affirmait que dans le Christ le Verbe avait remplacé l'âme ou l'esprit. Contre cette erreur l'Eglise a confessé que le Fils éternel a assumé aussi une âme raisonnable humaine (cf. DS 149).
472 Cette âme humaine que le Fils de Dieu a assumée est douée d'une vraie connaissance humaine. En tant que telle celle-ci ne pouvait pas être de soi illimitée: elle était exercée dans les conditions historiques de son existence dans l'espace et le temps. C'est pourquoi le Fils de Dieu a pu vouloir en se faisant homme "croître en sagesse, en taille et en grâce" (Lc 2,52) et de même avoir à s'enquérir sur ce que dans la condition humaine on doit apprendre de manière expérimentale (cf. Mc 6,38 Mc 8,27 Jn 11,34 etc.). Cela correspondait à la réalité de son abaissement volontaire dans "la condition d'esclave" (Ph 2,7).
473 Mais en même temps, cette connaissance vraiment humaine du Fils de Dieu exprimait la vie divine de sa personne (cf. S. Grégoire le Grand, ep. 10,39: DS 475). "La nature humaine du Fils de Dieu, non par elle-même mais par son union au Verbe, connaissait et manifestait en elle tout ce qui convient à Dieu" (S. Maxime le Confesseur, qu. dub. 66). C'est en premier le cas de la connaissance intime et immédiate que le Fils de Dieu fait homme a de son Père (cf. Mc 14,36 Mt 11,27 Jn 1,18 Jn 8,55; etc.). Le Fils montrait aussi dans sa connaissance humaine la pénétration divine qu'il avait des pensées secrètes du coeur des hommes (cf. Mc 2,8 Jn 2,25 Jn 6,61; etc.).
474 De par son union à la Sagesse divine en la personne du Verbe incarné, la connaissance humaine du Christ jouissait en plénitude de la science des desseins éternels qu'il était venu révéler (cf. Mc 8,31 Mc 9,31 Mc 10,33-34 Mc 14,18-20 Mc 14,26-30). Ce qu'il reconnaît ignorer dans ce domaine (cf. Mc 13,32), il déclare ailleurs n'avoir pas mission de le révéler (cf. Ac 1,7).
La volonté humaine du Christ
475 De manière parallèle, l'Eglise a confessé au sixième concile oecuménique (Cc. Constantinople III en 681) que le Christ possède deux volontés et deux opérations naturelles, divines et humaines, non pas opposées, mais coopérantes, de sorte que le Verbe fait chair a voulu humainement dans l'obéissance à son Père tout ce qu'il a décidé divinement avec le Père et le Saint-Esprit pour notre salut (cf. DS 556-559). La volonté humaine du Christ "suit sa volonté divine, sans être en résistance ni en opposition vis-à-vis d'elle, mais bien plutôt en étant subordonnée à cette volonté toute-puissante" (DS 556).
Le vrai corps du Christ
476 Puisque le Verbe s'est fait chair en assumant une vraie humanité, le corps du Christ était délimité (cf. Cc. Latran en 649: DS 504). A cause de cela, le visage humain de Jésus peut être "dépeint" (Ga 3,2). Au VIIe Concile oecuménique (Cc. Nicée II en 787: DS 600-603) l'Eglise a reconnu comme légitime qu'il soit représenté sur des images saintes.
477 En même temps l'Eglise a toujours reconnu que, dans le corps de Jésus, "Dieu qui est par nature invisible est devenu visible à nos yeux" (éface de Noèl). En effet, les particularités individuelles du corps du Christ expriment la personne divine du Fils de Dieu. Celui-ci a fait siens les traits de son corps humain au point que, dépeints sur une image sainte, ils peuvent être vénérés car le croyant qui vénère son image, "vénère en elle la personne qui y est dépeinte" (Cc. Nicée II: DS 601).
Le Coeur du Verbe incarné
478 Jésus nous a tous et chacun connus et aimés durant sa vie, son agonie et sa passion et il s'est livré pour chacun de nous: "Le Fils de Dieu m'a aimé et s'est livré pour moi" (Ga 2,20). Il nous a tous aimés d'un coeur humain. Pour cette raison, le Coeur sacré de Jésus, transpercé par nos péchés et pour notre salut (cf. Jn 19,34), "præcipuus consideratur index et symbolus ... illius amoris, quo divinus Redemptor æternum Patrem hominesque universos continenter adamat" (Pie XII, Enc. "Haurietis aquas": DS 3924 cf. DS 3812).
479 Au temps établi par Dieu, le Fils unique du Père, la Parole éternelle, c'est-à-dire le Verbe et l'Image substantielle du Père, s'est incarné: sans perdre la nature divine il a assumé la nature humaine.
480 Jésus-Christ est vrai Dieu et vrai homme, dans l'unité de sa Personne divine; pour cette raison il est l'unique Médiateur entre Dieu et les hommes.
481 Jésus-Christ possède deux natures, la divine et l'humaine, non confondues, mais unies dans l'unique Personne du Fils de Dieu.
482 Le Christ, étant vrai Dieu et vrai homme, a une intelligence et une volonté humaines, parfaitement accordées et soumises à son intelligence et sa volonté divines, qu'il a en commun avec le Père et le Saint-Esprit.
483 L'Incarnation est donc le Mystère de l'admirable union de la nature divine et de la nature humaine dans l'unique Personne du Verbe.
484 L'Annonciation à Marie inaugure la "plénitude des temps" (Ga 4,4), c'est-à-dire l'accomplissement des promesses et des préparations. Marie est invitée à concevoir Celui en qui habitera "corporellement la plénitude de la divinité" (Col 2,9). La réponse divine à son "comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais point d'homme?" (Lc 1,34) est donnée par la puissance de l'Esprit: "L'Esprit Saint viendra sur toi" (Lc 1,35).
485 La mission de l'Esprit-Saint est toujours conjointe et ordonnée à celle du Fils (cf. Jn 16,14-15). L'Esprit Saint est envoyé pour sanctifier le sein de la Vierge Marie et la féconder divinement, lui qui est "le Seigneur qui donne la Vie", en faisant qu'elle conçoive le Fils éternel du Père dans une humanité tirée de la sienne.
486 Le Fils Unique du Père en étant conçu comme homme dans le sein de la Vierge Marie est "Christ", c'est-à-dire oint par l'Esprit Saint (cf. Mt 1,20 Lc 1,35), dès le début de son existence humaine, même si sa manifestation n'a lieu que progressivement: aux bergers (cf. Lc 2,8-20), aux mages (cf. Mt 2,1-12), à Jean-Baptiste (cf. Jn 1,31-34), aux disciples (cf. Jn 2,11). Toute la vie de Jésus Christ manifestera donc "comment Dieu l'a oint d'Esprit et de puissance" (Ac 10,38).
487 Ce que la foi catholique croit au sujet de Marie se fonde sur ce qu'elle croit au sujet du Christ, mais ce qu'elle enseigne sur Marie éclaire à son tour sa foi au Christ.
La prédestination de Marie
488 "Dieu a envoyé son Fils" (Ga 4,4), mais pour lui "façonner un corps" (cf. He 10,5) il a voulu la libre coopération d'une créature. Pour cela, de toute éternité, Dieu a choisi, pour être la Mère de Son Fils, une fille d'Israël, une jeune juive de Nazareth en Galilée, "une vierge fiancée à un homme du nom de Joseph, de la maison de David, et le nom de la vierge était Marie" (Lc 1,26-27):
Le Père des miséricordes a voulu que l'Incarnation fût précédée par une acceptation de la part de cette Mère prédestinée, en sorte que, une femme ayant contribué à l'oeuvre de mort, de même une femme contribuât aussi à la vie (LG 56 cf. 61).
489 Tout au long de l'Ancienne Alliance, la mission de Marie a été préparée par celle de saintes femmes. Tout au commencement, il y a Eve: malgré sa désobéissance, elle reçoit la promesse d'une descendance qui sera victorieuse du Malin (cf. Gn 3,15) et celle d'être la mère de tous les vivants (cf. Gn 3,20). En vertu de cette promesse, Sara conçoit un fils malgré son grand âge (cf. Gn 18,10-14 Gn 21,1-2). Contre toute attente humaine, Dieu choisit ce qui était tenu pour impuissant et faible (cf. 1Co 1,27) pour montrer sa fidélité à sa promesse: Anne, la mère de Samuel (cf. 1S 1), Débora, Ruth, Judith et Esther, et beaucoup d'autres femmes. Marie "occupe la première place parmi ces humbles et ces pauvres du Seigneur qui espèrent et reçoivent le salut de lui avec confiance. Avec elle, la fille de Sion par excellence, après la longue attente de la promesse, s'accomplissent les temps et s'instaure l'économie nouvelle" (LG 55).
L'Immaculée Conception
490 Pour être la Mère du Sauveur, Marie "fut pourvue par Dieu de dons à la mesure d'une si grande tâche" (LG 56). L'ange Gabriel, au moment de l'Annonciation la salue comme "pleine de grâce" (Lc 1,28). En effet, pour pouvoir donner l'assentiment libre de sa foi à l'annonce de sa vocation, il fallait qu'elle soit toute portée par la grâce de Dieu.
491 Au long des siècles l'Eglise a pris conscience que Marie, "comblée de grâce" par Dieu (Lc 1,28), avait été rachetée dès sa conception. C'est ce que confesse le dogme de l'Immaculée Conception, proclamé en 1854 par le pape Pie IX:
La bienheureuse Vierge Marie a été, au premier instant de sa conception, par une grâce et une faveur singulière du Dieu tout-puissant, en vue des mérites de Jésus-Christ Sauveur du genre humain, préservée intacte de toute souillure du péché originel (DS 2803).
492 Cette "sainteté éclatante absolument unique" dont elle est "enrichie dès le premier instant de sa conception" (LG 56) lui vient tout entière du Christ: elle est "rachetée de façon éminente en considération des mérites de son Fils" (LG 53). Plus que toute autre personne créée, le Père l'a "bénie par toutes sortes de bénédictions spirituelles, aux cieux, dans le Christ" (Ep 1,3). Il l'a "élue en Lui, dès avant la fondation du monde, pour être sainte et immaculée en sa présence, dans l'amour" (cf. Ep 1,4).
493 Les Pères de la tradition orientale appellent la Mère de Dieu "la Toute Sainte" ("Panaghia"), ils la célèbrent comme "indemne de toute tache de péché, ayant été pétrie par l'Esprit Saint, et formée comme une nouvelle créature" (LG 56). Par la grâce de Dieu, Marie est restée pure de tout péché personnel tout au long de sa vie.
"Qu'il me soit fait selon ta parole ..."
494 A l'annonce qu'elle enfantera "le Fils du Très Haut" sans connaître d'homme, par la vertu de l'Esprit Saint (cf. Lc 1,28-37), Marie a répondu par "l'obéissance de la foi" (Rm 1,5), certaine que "rien n'est impossible à Dieu": "Je suis la servante du Seigneur; qu'il m'advienne selon ta parole" (Lc 1,37-38). Ainsi, donnant à la parole de Dieu son consentement, Marie devint Mère de Jésus et, épousant à plein coeur, sans que nul péché la retienne, la volonté divine de salut, se livra elle-même intégralement à la personne et à l'oeuvre de son Fils, pour servir, dans sa dépendance et avec lui, par la grâce de Dieu, au Mystère de la Rédemption (cf. LG 56):
Comme dit S. Irénée, "par son obéissance elle est devenue, pour elle-même et pour tout le genre humain, cause de salut". Aussi, avec lui, bon nombre d'anciens Pères disent ...: "Le noeud dû à la désobéissance d'Eve, s'est dénoué par l'obéissance de Marie; ce que la vierge Eve avait noué par son incrédulité, la Vierge Marie l'a dénoué par sa foi"; comparant Marie avec Eve, ils appellent Marie "la Mère des vivants" et déclarent souvent: "par Eve la mort, par Marie la vie" (LG 56).
La maternité divine de Marie
495 Appelée dans les Evangiles "la mère de Jésus" (Jn 2,1 Jn 19,25 cf. Mt 13,55), Marie est acclamée, sous l'impulsion de l'Esprit, dès avant la naissance de son fils, comme "la mère de mon Seigneur" (Lc 1,43). En effet, Celui qu'elle a conçu comme homme du Saint-Esprit et qui est devenu vraiment son Fils selon la chair, n'est autre que le Fils éternel du Père, la deuxième Personne de la Sainte Trinité. L'Eglise confesse que Marie est vraiment Mère de Dieu ("Theotokos") (cf. DS 251).
La virginité de Marie
496 Dès les premières formulations de la foi (cf. DS 10-64), l'Eglise a confessé que Jésus a été conçu par la seule puissance du Saint-Esprit dans le sein de la Vierge Marie, affirmant aussi l'aspect corporel de cet événement: Jésus a été conçu "absque semine ex Spiritu Sancto" (Cc. Latran en 649: DS 503). Les Pères voient dans la conception virginale le signe que c'est vraiment le Fils de Dieu qui est venu dans une humanité comme la nôtre:
Ainsi, S. Ignace d'Antioche (début IIe siècle): "Vous êtes fermement convaincus au sujet de notre Seigneur qui est véritablement de la race de David selon la chair (cf. Rm 1,3), Fils de Dieu selon la volonté et la puissance de Dieu (cf. Jn 1,13), véritablement né d'une vierge, ... il a été véritablement cloué pour nous dans sa chair sous Ponce Pilate ... il a véritablement souffert, comme il est aussi véritablement ressuscité" (Smyrn. 1-2).
497 Les récits évangéliques (cf. Mt 1,18-25 Lc 1,26-38) comprennent la conception virginale comme une oeuvre divine qui dépasse toute compréhension et toute possibilité humaines (cf. Lc 1,34): "Ce qui a été engendré en elle vient de l'Esprit Saint", dit l'ange à Joseph au sujet de Marie, sa fiancée (Mt 1,20). L'Eglise y voit l'accomplissement de la promesse divine donnée par le prophète Isaïe: "Voici que la vierge concevra et enfantera un fils" (Is 7,14, d'après la traduction grecque de Mt 1,23).
498 On a été parfois troublé par le silence de l'Evangile de S. Marc et des Epîtres du Nouveau Testament sur la conception virginale de Marie. On a aussi pu se demander s'il ne s'agissait pas ici de légendes ou de constructions théologiques sans prétentions historiques. A quoi il faut répondre: La foi en la conception virginale de Jésus a rencontré vive opposition, moqueries ou incompréhension de la part des non-croyants, juifs et païens (cf. S. Justin, dial. 99, 7 Origène, Cels. 1,32. 69 e.a.): elle n'était pas motivée par la mythologie païenne ou par quelque adaptation aux idées du temps. Le sens de cet événement n'est accessible qu'à la foi qui le voit dans ce "lien qui relie les mystères entre eux" (DS 3016), dans l'ensemble des Mystères du Christ, de son Incarnation à sa Pâque. S. Ignace d'Antioche témoigne déjà de ce lien: "Le prince de ce monde a ignoré la virginité de Marie et son enfantement, de même que la mort du Seigneur: trois Mystères retentissants qui furent accomplis dans le silence de Dieu" (Ep 19,1 cf. ).
Marie - "toujours Vierge"
499 L'approfondissement de sa foi en la maternité virginale a conduit l'Eglise à confesser la virginité réelle et perpétuelle de Marie (cf. DS 427) même dans l'enfantement du Fils de Dieu fait homme (cf. DS 291 DS 294 DS 442 DS 503 DS 571 DS 1880). En effet la naissance du Christ "n'a pas diminué, mais consacré l'intégrité virginale" de sa mère (LG 57). La liturgie de l'Eglise célèbre Marie comme la "Aeiparthenos", "toujours-vierge" (cf. LG 52).
500 A cela on objecte parfois que l'Ecriture mentionne des frères et soeurs de Jésus (cf. Mc 3,31-35 Mc 6,3 1Co 9,5 Ga 1,19). L'Eglise a toujours compris ces passages comme ne désignant pas d'autres enfants de la Vierge Marie: en effet Jacques et Joseph, "frères de Jésus" (Mt 13,55), sont les fils d'une Marie disciple du Christ (cf. Mt 27,56) qui est désignée de manière significative comme "l'autre Marie" (Mt 28,1). Il s'agit de proches parents de Jésus, selon une expression connue de l'Ancien Testament (cf. Gn 13,8 Gn 14,16 Gn 29,15; etc.).
501 Jésus est le Fils unique de Marie. Mais la maternité spirituelle de Marie (cf. Jn 19,26-27 Ap 12,17) s'étend à tous les hommes qu'il est venu sauver: "Elle engendra son Fils, dont Dieu a fait 'l'aîné d'une multitude de frères' (Rm 8,29), c'est-à-dire de croyants, à la naissance et à l'éducation desquels elle apporte la coopération de son amour maternel" (LG 63).
La maternité virginale de Marie dans le dessein de Dieu
502 Le regard de la foi peut découvrir, en lien avec l'ensemble de la Révélation, les raisons mystérieuses pour lesquelles Dieu, dans son dessein salvifique, a voulu que son Fils naisse d'une vierge. Ces raisons touchent aussi bien la personne et la mission rédemptrice du Christ que l'accueil de cette mission par Marie pour tous les hommes:
503 La virginité de Marie manifeste l'initiative absolue de Dieu dans l'Incarnation. Jésus n'a que Dieu comme Père (cf. Lc 2,48-49). "La nature humaine qu'il a prise ne l'a jamais éloigné du Père ...; naturellement Fils de son Père par sa divinité, naturellement fils de sa mère par son humanité, mais proprement Fils de Dieu dans ses deux natures" (Cc. Frioul en 796: DS 619).
504 Jésus est conçu du Saint-Esprit dans le sein de la Vierge Marie parce qu'il est le Nouvel Adam (cf. 1Co 15,45) qui inaugure la création nouvelle: "Le premier homme, issu du sol, est terrestre; le second homme, lui, vient du ciel" (1Co 15,47). L'humanité du Christ est, dès sa conception, remplie de l'Esprit Saint car Dieu "lui donne l'Esprit sans mesure" (Jn 3,34). C'est de "sa plénitude" à lui, tête de l'humanité rachetée (cf. Col 1,18), que "nous avons reçu grâce sur grâce" (Jn 1,16).
505 Jésus, le Nouvel Adam, inaugure par sa conception virginale la nouvelle naissance des enfants d'adoption dans l'Esprit Saint par la foi. "Comment cela se fera-t-il?" (Lc 1,34 cf. Jn 3,9). La participation à la vie divine ne vient pas "du sang, ni du vouloir de chair, ni du vouloir d'homme, mais de Dieu" (Jn 1,13). L'accueil de cette vie est virginal car celle-ci est entièrement donnée par l'Esprit à l'homme. Le sens sponsal de la vocation humaine par rapport à Dieu (cf. 2Co 11,2) est accompli parfaitement dans la maternité virginale de Marie.
506 Marie est vierge parce que sa virginité est le signe de sa foi "que nul doute n'altère" (LG 63) et de sa donation sans partage à la volonté de Dieu (cf. 1Co 7,34-35). C'est sa foi qui lui donne de devenir la mère du Sauveur: "Beatior est Maria percipiendo fidem Christi quam concipiendo carnem Christi" (S. Augustin, virg. 3).
507 Marie est à la fois vierge et mère car elle est la figure et la plus parfaite réalisation de l'Eglise (cf. LG 63): "L'Eglise devient à son tour une Mère, grâce à la parole de Dieu qu'elle reçoit dans la foi: par la prédication en effet, et par le Baptême elle engendre, à une vie nouvelle et immortelle, des fils conçus du Saint-Esprit et nés de Dieu. Elle est aussi vierge, ayant donné à son Epoux sa foi, qu'elle garde intègre et pure" (LG 64).
1998 Catéchisme 429