1998 Catéchisme 2360

III L'amour des époux

2360 La sexualité est ordonnée à l'amour conjugal de l'homme et de la femme. Dans le mariage l'intimité corporelle des époux devient un signe et un gage de communion spirituelle. Entre les baptisés, les liens du mariage sont sanctifiés par le sacrement.

2361 "La sexualité, par laquelle l'homme et la femme se donnent l'un à l'autre par les actes propres et exclusifs des époux, n'est pas quelque chose de purement biologique, mais concerne la personne humaine dans ce qu'elle a de plus intime. Elle ne se réalise de façon véritablement humaine que si elle est partie intégrante de l'amour dans lequel l'homme et la femme s'engagent entièrement l'un vis-à-vis de l'autre jusqu'à la mort" (FC 11):

Tobie se leva du lit, et dit à Sara: "Debout, ma soeur! Il faut prier tous deux, et recourir à notre Seigneur, pour obtenir sa grâce et sa protection". Elle se leva et ils se mirent à prier pour obtenir d'être protégés, et il commença ainsi: "Tu es béni, Dieu de nos pères ... C'est toi qui a créé Adam, c'est toi qui a créé Eve sa femme, pour être son secours et son appui, et la race humaine est née de ces deux-là. C'est toi qui a dit: 'Il ne faut pas que l'homme reste seul, faisons-lui une aide semblable à lui'. Et maintenant, ce n'est pas le plaisir que je cherche en prenant ma soeur, mais je le fais d'un coeur sincère. Daigne avoir pitié d'elle et de moi et nous mener ensemble à la vieillesse!" Et ils dirent de concert:"Amen, amen". Et ils se couchèrent pour la nuit (Tb 8,4-9).

2362 "Les actes qui réalisent l'union intime et chaste des époux sont des actes honnêtes et dignes. Vecue d'une manière vraiment humaine, ils signifient et favorisent le don réciproque par lequel les époux s'enrichissent tous les deux dans la joie et la reconnaissance" (GS 49). La sexualité est source de joie et de plaisir:

Le Créateur lui-même ... a établi que dans cette fonction (de génération) les époux éprouvent un plaisir et une satisfaction du corps et de l'esprit. Donc, les époux ne font rien de mal en recherchant ce plaisir et en en jouissant. Ils acceptent ce que le Créateur leur a destiné. Néanmoins, les époux doivent savoir se maintenir dans les limites d'une juste modération (Pie XII, discours 29 octobre 1951).

2363 Par l'union des époux se réalise la double fin du mariage: le bien des époux eux-mêmes et la transmission de la vie. On ne peut séparer ces deux significations ou valeurs du mariage sans altérer la vie spirituelle du couple ni comprometttre les biens du mariage et l'avenir de la famille.


L'amour conjugal de l'homme et de la femme est ainsi placé sous la double exigence de la fidélité et de la fécondité.



La fidélité conjugale

2364 Le couple conjugal forme "une intime communauté de vie et d'amour fondée et dotée de ses lois propres par le Créateur. Elle est établie sur l'alliance des conjoints, c'est-à-dire sur leur consentement personnel et irrévocable" (GS 48). Tous deux se donnent définitivement et totalement l'un à l'autre. Ils ne sont plus deux, mais forment désormais une seule chair. L'alliance contractée librement par les époux leur impose l'obligation de la maintenir une et indissoluble (cf. CIC 1056). "Ce que Dieu a uni, l'homme ne doit point le séparer" (Mc 10,9 cf. Mt 19,1-12 1Co 7,10-11).

2365 La fidélité exprime la constance dans le maintien de la parole donnée. Dieu est fidèle. Le sacrement du mariage fait entrer l'homme et la femme dans la fidélité du Christ pour son Eglise. Par la chasteté conjugale, ils rendent témoignage à ce mystère à la face du monde.

S. Jean Chrysostome suggère aux jeunes mariés de tenir ce discours à leur épouse: "Je t'ai prise dans mes bras, et je t'aime, et je te préfère à ma vie même. Car la vie présente n'est rien, et mon rêve le plus ardent est de la passer avec toi, de telle sorte que nous soyons assurés de n'être pas séparés dans celle qui nous est réservée ... Je mets ton amour au-dessus de tout, et rien ne me serait plus pénible que de n'avoir pas les mêmes pensées que les tiennes" (hom. in
Ep 20,8).


La fécondité du mariage

2366 La fécondité est un don, une fin du mariage, car l'amour conjugal tend naturellement à être fécond. L'enfant ne vient pas de l'extérieur s'ajouter à l'amour mutuel des époux; il surgit au coeur même de ce don mutuel, dont il est un fruit et un accomplissement. Aussi l'Eglise, qui "prend parti pour la vie" (FC 30), enseigne-t-elle que "tout acte matrimonial doit rester ouvert à la transmission de la vie" (HV 11). "Cette doctrine, plusieurs fois exposée par le magistère, est fondée sur le lien indissoluble que Dieu a voulu et que l'homme ne peut rompre de son initiative entre les deux significations de l'acte conjugal: union et procréation" (HV 12 cf. Pie XI, enc. "Casti connubii").

2367 Appelés à donner la vie, les époux participent à la puissance créatrice et à la paternité de Dieu (cf. Ep 3,14 Mt 23,9). "Dans le devoir qui leur incombe de transmettre la vie et d'être des éducateurs (ce qu'il faut considérer comme leur mission propre), les époux savent qu'ils sont les coopérateurs du Dieu créateur et comme ses interprètes. Ils s'acquitteront donc de leur charge en toute responsabilité humaine et chrétienne" (GS 50).

2368 Un aspect particulier de cette responsabilité concerne la régulation de la procréation. Pour de justes raisons (cf. GS 50), les époux peuvent vouloir espacer les naissances de leurs enfants. Il leur revient de vérifier que leur désir ne relève pas de l'égoïsme mais est conforme à la juste générosité d'une paternité responsable. En outre ils régleront leur comportement suivant les critères objectifs de la moralité:

Lorsqu'il s'agit de mettre en accord l'amour conjugal avec la transmission responsable de la vie, la moralité du comportement ne dépend pas de la seule sincérité de l'intention et de la seule appréciation des motifs; mais elle doit être déterminée selon des critères objectifs, tirés de la nature même de la personne et de ses actes, critères qui respectent, dans un contexte d'amour véritable, la signification totale d'une donation réciproque et d'une procréation à la mesure de l'homme; chose impossible si la vertu de chasteté conjugale n'est pas pratiquée d'un cour loyal (GS 51).

2369 "C'est en sauvegardant ces deux aspects essentiels, union et procréation, que l'acte conjugal conserve intégralement le sens de mutuel et véritable amour et son ordination à la très haute vocation de l'homme à la paternité" (HV 12).


2370 La continence périodique, les méthodes de régulation des naissances fondées sur l'auto-observation et le recours aux périodes infécondes (cf. HV 16) sont conformes aux critères objectifs de la moralité. Ces méthodes respectent le corps des époux, encouragent la tendresse entre eux et favorisent l'éducation d'une liberté authentique. En revanche, est intrinsèquement mauvaise "toute action qui, soit en prévision de l'acte conjugal, soit dans son déroulement, soit dans le développement de ses conséquences naturelles, se proposerait comme but ou comme moyen de rendre impossible la procréation" (HV 14):

Au langage qui exprime naturellement la donation réciproque et totale des époux, la contraception oppose un langage objectivement contradictoire selon lequel il ne s'agit plus de se donner totalement l'un à l'autre. Il en découle non seulement le refus positif de l'ouverture à la vie, mais aussi une falsification de la vérité interne de l'amour conjugal, appelé à être un don de la personne tout entière". Cette différence anthropologique et morale entre la contraception et le recours aux rythmes périodiques "implique deux conceptions de la personne et de la sexualité humaine irréductibles l'une à l'autre (FC 32).

2371 "Par ailleurs, que tous sachent bien que la vie humaine et la charge de la transmettre ne se limitent pas aux horizons de ce monde et n'y trouvent ni leur pleine dimension, ni leur plein sens, mais qu'elles sont toujours à mettre en référence avec la destinée éternelle des hommes" (GS 51).

2372 L'Etat est responsable du bien-être des citoyens. A ce titre, il est légitime qu'il intervienne pour orienter la démographie de la population. Il peut le faire par voie d'une information objective et respectueuse, mais non point par voie autoritaire et contraignante. Il ne peut légitimement se substituer à l'initiative des époux, premiers responsables de la procréation et de l'éducation de leurs enfants (cf. HV 23 PP 37). Il n'est pas autorisé à favoriser des moyens de régulation démographique contraires à la morale.


Le don de l'enfant

2373 La Sainte Ecriture et la pratique traditionnelle de l'Eglise voient dans les familles nombreuses un signe de la bénédiction divine et de la générosité des parents (cf. GS 50).

2374 Grande est la souffrance des couples qui se découvrent stériles. "Que pourrais-tu me donner, demande Abram à Dieu? Je m'en vais sans enfant ..." (Gn 15,2). "Fais-moi avoir aussi des enfants ou je meurs!" crie Rachel à son mari Jacob (Gn 30,1).

2375 Les recherches qui visent à réduire la stérilité humaine sont à encourager, à la condition qu'elles soient placées "au service de la personne humaine, de ses droits inaliénables, de son bien véritable et intégral, conformément au projet et à la volonté de Dieu" ( instr. "Donum vitæ" intr. 2).


2376 Les techniques qui provoquent une dissociation des parentés, par l'intervention d'une personne étrangère au couple (don de sperme ou d'ovocyte, prêt d'utérus) sont gravement déshonnêtes. Ces techniques (insémination et fécondation artificielles hétérologues) lèsent le droit de l'enfant à naître d'un père et d'une mère connus de lui et liés entre eux par le mariage. Elles trahissent "le droit exclusif à ne devenir père et mère que l'un par l'autre" ( instr. "Donum vitæ" 2,1).

2377 Pratiquées au sein du couple, ces techniques (insémination et fécondation artificielles homologues) sont peut-être moins préjudiciables, mais elles restent moralement irrecevables. Elles dissocient l'acte sexuel de l'acte procréateur. L'acte fondateur de l'existence de l'enfant n'est plus un acte par lequel deux personnes se donnent l'une à l'autre, il "remet la vie et l'identité de l'embryon au pouvoir des médecins et des biologistes, et instaure une domination de la technique sur l'origine et la destinée de la personne humaine. Une telle relation de domination est de soi contraire à la dignité et à l'égalité qui doivent être communes aux parents et aux enfants (cf. instr. "Donum vitæ" 2,5). "La procréation est moralement privée de sa perfection propre quand elle n'est pas voulue comme le fruit de l'acte conjugal, c'est-à-dire du geste spécifique de l'union des époux ... Seul le respect du lien qui existe entre les significations de l'acte conjugal et le respect de l'unité de l'être humain permet une procréation conforme à la dignité de la personne" ( instr. "Donum vitæ" 2,4).

2378 L'enfant n'est pas un , mais un don. Le "don le plus excellent du mariage" est une personne humaine. L'enfant ne peut être considéré comme un objet de propriété, ce à quoi conduirait la reconnaissance d'un prétendu "droit à l'enfant". En ce domaine, seul l'enfant possède de véritables droits: celui "d'être le fruit de l'acte spécifique de l'amour conjugal de ses parents, et aussi le droit d'être respecté comme personne dès le moment de sa conception" ( instr. "Donum vitæ" 2,8).

2379 L'Evangile montre que la stérilité physique n'est pas un mal absolu. Les époux qui, après avoir épuisé les recours légitimes à la médecine, souffrent d'infertilité s'associeront à la Croix du Seigneur, source de toute fécondité spirituelle. Ils peuvent marquer leur générosité en adoptant des enfants délaissés ou en remplissant des services exigeants à l'égard d'autrui.



IV Les offenses à la dignité du mariage

2380 L'adultère. Ce mot désigne l'infidélité conjugale. Lorsque deux partenaires, dont l'un au moins est marié, nouent entre eux une relation sexuelle, même éphémère, ils commettent un adultère. Le Christ condamne l'adultère même de simple désir (cf. Mt 5,27-28). Le sixième commandement et le Nouveau Testament proscrivent absolument l'adultère (cf. Mt 5,32 Mt 19,6 Mc 10,11 1Co 6,9-10). Les prophètes en dénoncent la gravité. Ils voient dans l'adultère la figure du péché d'idolatrie (cf. Os 2,7 Jr 5,7 Jr 13,27).


2381 L'adultère est une injustice. Celui qui le commet manque à ses engagements. Il blesse le signe de l'Alliance qu'est le lien matrimonial, lèse le droit de l'autre conjoint et porte atteinte à l'institution du mariage, en violant le contrat qui le fonde. Il compromet le bien de la génération humaine et des enfants qui ont besoin de l'union stable des parents.



Le divorce

2382 Le Seigneur Jésus a insisté sur l'intention originelle du Créateur qui voulait un mariage indissoluble (cf. Mt 5,31-32 Mt 19,3-9 Mc 10,9 Lc 16,18 1Co 7,10-11). Il abroge les tolérances qui s'étaient glissées dans la loi ancienne (cf. Mt 19,7-9).


Entre baptisés catholiques, "le mariage conclu et consommé ne peut être dissout par aucune puissance humaine ni pour aucune cause, sauf par la mort" (CIC 1141).

2383 La séparation des époux avec maintien du lien matrimonial peut être légitime en certains cas prévus par le Droit canonique (cf.CIC 1151-1155).

Si le divorce civil reste la seule manière possible d'assurer certains droits légitimes, le soin des enfants ou la défense du patrimoine, il peut être toléré sans constituer une faute morale.

2384 Le divorce est une offense grave à la loi naturelle. Il prétend briser le contrat librement consenti par les époux de vivre l'un avec l'autre jusqu'à la mort. Le divorce fait injure à l'Alliance de salut dont le mariage sacramentel est le signe. Le fait de contracter une nouvelle union, fût-elle reconnue par la loi civile, ajoute à la gravité de la rupture: le conjoint remarié se trouve alors en situation d'adultère public et permanent:

Si le mari, après s'être séparé de sa femme, s'approche d'une autre femme, il est lui-même adultère, parce qu'il fait commettre un adultère à cette femme; et la femme qui habite avec lui est adultère, parce qu'elle a attiré à elle le mari d'une autre (S. Basile, moral. RGB 73).

2385 Le divorce tient aussi son caractère immoral du désordre qu'il introduit dans la cellule familiale et dans la société. Ce désordre entraîne des préjudices graves: pour le conjoint, qui se trouve abandonné; pour les enfants, traumatisés par la séparation des parents, et souvent tiraillés entre eux; pour son effet de contagion, qui en fait une véritable plaie sociale.

2386 Il se peut que l'un des conjoints soit la victime innocente du divorce prononcé par la loi civile; il ne contrevient pas alors au précepte moral. Il existe une différence considérable entre le conjoint qui s'est efforcé avec sincérité d'être fidèle au sacrement du mariage et se voit injustement abandonné, et celui qui, par une faute grave de sa part, détruit un mariage canoniquement valide (cf. FC 84).


Autres offenses à la dignité du mariage

2387 On comprend le drame de celui qui, désireux de se convertir à l'Evangile, se voit obligé de répudier une ou plusieurs femmes avec lesquelles il a partagé des années de vie conjugale. Cependant la polygamie ne s'accorde pas à la loi morale. Elle "s'oppose radicalement à la communion conjugale: elle nie, en effet, de façon directe le dessein de Dieu tel qu'il nous a été révélé au commencement; elle est contraire à l'égale dignité personnelle de la femme et de l'homme, lesquels dans le mariage se donnent dans un amour total qui, de ce fait même, est unique et exclusif" (FC 19 cf. GS 47). Le chrétien ancien polygame est gravement tenu en justice d'honorer les obligations contractées à l'égard de ses anciennes femmes et de ses enfants.


2388 L'inceste désigne des relations intimes entre parents ou alliés, à un degré qui interdit entre eux le mariage (cf. Lv 18,7-20). S. Paul stigmatise cette faute particulièrement grave: "On n'entend parler que d'inconduite parmi vous ... C'est au point que l'un d'entre vous vit avec la femme de son père! ... Il faut qu'au nom du Seigneur Jésus ... nous livrions cet individu à Satan pour la perte de sa chair ..." (1Co 5,1 1Co 5,4-5). L'inceste corrompt les relations familiales et marque une régression vers l'animalité.

2389 On peut rattacher à l'inceste les abus sexuels perpétrés par des adultes sur des enfants ou adolescents confiés à leur garde. La faute se double alors d'une atteinte scandaleuse portée à l'intégrité physique et morale des jeunes, qui en resteront marqués leur vie durant, et d'une violation de la responsabilité éducative.

2390 Il y a union libre lorsque l'homme et la femme refusent de donner une forme juridique et publique à une liaison impliquant l'intimité sexuelle.

L'expression est fallacieuse: que peut signifier une union dans laquelle les personnes ne s'engagent pas l'une envers l'autre et témoignent ainsi d'un manque de confiance, en l'autre, en soi-même, ou en l'avenir?

L'expression recouvre des situations différentes: concubinage, refus du mariage en tant que tel, incapacité à se lier par des engagements à long terme (cf.
FC 81). Toutes ces situations offensent la dignité du mariage; elles détruisent l'idée même de la famille; elles affaiblissent le sens de la fidélité. Elles sont contraires à la loi morale: l'acte sexuel doit prendre place exclusivement dans le mariage; en dehors de celui-ci, il constitue toujours un péché grave et exclut de la communion sacramentelle.

2391 Plusieurs réclament aujourd'hui une sorte de "droit à l'essai", là où il existe une intention de se marier. Quelle que soit la fermeté du propos de ceux qui s'engagent dans des rapports sexuels prématurés, "ceux-ci ne permettent pas d'assurer dans sa sincérité et sa fidélité la relation interpersonnelle d'un homme et d'une femme, et notamment de les protéger contre les fantaisies et les caprices" ( décl. "Persona humana" 7). L'union charnelle n'est moralement légitime que lorsque s'est instaurée une communauté de vie définitive entre l'homme et la femme. L'amour humain ne tolère pas l'"essai". Il exige un don total et définitif des personnes entre elles (cf. FC 80).



En bref

2392 "L'amour est la vocation fondamentale et innée de tout être humain" (FC 11).

2393 En créant l'être humain homme et femme, Dieu donne la dignité personnelle d'une manière égale à l'un et à l'autre. Il revient à chacun, homme et femme, de reconnaître et d'accepter son identité sexuelle.

2394 Le Christ est le modèle de la chasteté. Tout baptisé est appelé à mener une vie chaste, chacun selon son propre état de vie.

2395 La chasteté signifie l'intégration de la sexualité dans la personne. Elle comporte l'apprentissage de la maîtrise personnelle.

2396 Parmi les péchés gravement contraires à la chasteté, il faut citer la masturbation, la fornication, la pornographie et les pratiques homosexuelles.

2397 L'alliance que les époux ont librement contractée implique un amour fidèle. Elle leur confère l'obligation de garder indissoluble leur mariage.

2398 La fécondité est un bien, un don, une fin du mariage. En donnant la vie, les époux participent à la paternité de Dieu.

2399 La régulation des naissances représente un des aspects de la paternité et de la maternité responsables. La légitimité des intentions des époux ne justifie pas le recours à des moyens moralement irrecevables (p. ex. la stérilisation directe ou la contraception).

2400 L'adultère et le divorce, la polygamie et l'union libre sont des offenses graves à la dignité du mariage.



Article 7 Le septième commandement

Tu ne commettras pas de vol (Ex 20,15 Dt 5,19).

Tu ne voleras pas (Mt 19,18).

2401 Le septième commandement défend de prendre ou de retenir le bien du prochain injustement et de faire du tort au prochain en ses biens de quelque manière que ce soit. Il prescrit la justice et la charité dans la gestion des biens terrestres et des fruits du travail des hommes. Il demande en vue du bien commun le respect de la destination universelle des biens et du droit de propriété privée. La vie chrétienne s'efforce d'ordonner à Dieu et à la charité fraternelle les biens de ce monde.




I La Destination universelle et la propriété privée des biens

2402 Au commencement, Dieu a confié la terre et ses ressources à la gérance commune de l'humanité pour qu'elle en prenne soin, la maîtrise par son travail et jouisse de ses fruits (cf. Gn 1,26-29). Les biens de la création sont destinés à tout le genre humain. Cependant la terre est répartie entre les hommes pour assurer la sécurité de leur vie, exposée à la pénurie et menacée par la violence. L'appropriation des biens est légitime pour garantir la liberté et la dignité des personnes, pour aider chacun à subvenir à ses besoins fondamentaux et aux besoins de ceux dont il a la charge. Elle doit permettre que se manifeste une solidarité naturelle entre les hommes.

2403 Le droit à la propriété privée, acquise par le travail, ou reçue d'autrui par héritage, ou par don, n'abolit pas la donation originelle de la terre à l'ensemble de l'humanité. La destination universelle des biens demeure primordiale, même si la promotion du bien commun exige le respect de la propriété privée, de son droit et de son exercice.

2404 "L'homme, dans l'usage qu'il en fait, ne doit jamais tenir les choses qu'il possède légitimement comme n'appartenant qu'à lui, mais les regarder aussi comme communes: en ce sens qu'elles puissent profiter non seulement à lui, mais aux autres" (GS 69). La propriété d'un bien fait de son détenteur un administrateur de la Providence pour le faire fructifier et en communiquer les bienfaits à autrui, et d'abord à ses proches.

2405 Les biens de production - matériels ou immatériels - comme des terres ou des usines, des compétences ou des arts, requièrent les soins de leurs possesseurs pour que leur fécondité profite au plus grand nombre. Les détenteurs des biens d'usage et de consommation doivent en user avec tempérance, réservant la meilleure part à l'hôte, au malade, au pauvre.


2406 L'autorité politique a le droit et le devoir de régler, en fonction du bien commun, l'exercice légitime du droit de propriété (cf. GS 71 SRS 42 CA 40 CA 48).



II Le respect des personnes et de leurs biens

2407 En matière économique, le respect de la dignité humaine exige la pratique de la vertu de tempérance, pour modérer l'attachement aux biens de ce monde; de la vertu de justice, pour préserver les droits du prochain et lui accorder ce qui lui est dû; et de la solidarité, suivant la règle d'or et selon la libéralité du Seigneur qui "de riche qu'il était s'est fait pauvre pour nous enrichir de sa pauvreté" (2Co 8,9).


Le respect des biens d'autrui

2408 Le septième commandement interdit le vol, c'est-à-dire l'usurpation du bien d'autrui contre la volonté raisonnable du propriétaire. Il n'y a pas de vol si le consentement peut être présumé ou si le refus est contraire à la raison et à la destination universelle des biens. C'est le cas de la nécessité urgente et évidente où le seul moyen de subvenir à des besoins immédiats et essentiels (nourriture, abri, vêtement ...) est de disposer et d'user des biens d'autrui (cf. GS 69).

2409 Toute manière de prendre et de détenir injustement le bien d'autrui, même si elle ne contredit pas les dispositions de la loi civile, est contraire au septième commandement. Ainsi, retenir délibérément des biens prêtés ou des objets perdus; frauder dans le commerce (cf. Dt 25,13-16); payer d'injustes salaires (cf. Dt 24,14-15 Jc 5,4); hausser les prix en spéculant sur l'ignorance ou la détresse d'autrui (cf. Am 8,4-6).

Sont encore moralement illicites: la spéculation par laquelle on agit pour faire varier artificiellement l'estimation des biens, en vue d'en tirer un avantage au détriment d'autrui; la corruption par laquelle on détourne le jugement de ceux qui doivent prendre des décisions selon le droit; l'appropriation et l'usage privés des biens sociaux d'une entreprise; les travaux mal faits, la fraude fiscale, la contrefaçon des chèques et des factures, les dépenses excessives, le gaspillage. Infliger volontairement un dommage aux propriétés privées ou publiques est contraire à la loi morale et demande réparation.


2410 Les promesses doivent être tenues, et les contrats rigoureusement observés dans la mesure où l'engagement pris est moralement juste. Une part notable de la vie économique et sociale dépend de la valeur des contrats entre personnes physiques ou morales. Ainsi les contrats commerciaux de vente ou d'achat, les contrats de location ou de travail. Tout contrat doit être convenu et exécuté de bonne foi.

2411 Les contrats sont soumis à la justice commutative qui règle les échanges entre les personnes dans l'exact respect de leurs droits. La justice commutative oblige strictement; elle exige la sauvegarde des droits de propriété, le paiement des dettes et la prestation des obligations librement contractées. Sans la justice commutative, aucune autre forme de justice n'est possible.

On distingue la justice commutative de la justice légale qui concerne ce que le citoyen doit équitablement à la communauté, et de la justice distributive qui règle ce que la communauté doit aux citoyens proportionnellement à leurs contributions et à leurs besoins.

2412 En vertu de la justice commutative, la réparation de l'injustice commise exige la restitution du bien dérobé à son propriétaire:


Jésus bénit Zachée de son engagement: "Si j'ai fait du tort à quelqu'un, je lui rends le quadruple" (
Lc 19,8). Ceux qui, d'une manière directe ou indirecte, se sont emparés d'un bien d'autrui, sont tenus de le restituer, ou de rendre l'équivalent en nature ou en espèce, si la chose a disparu, ainsi que les fruits et avantages qu'en aurait légitimement obtenu son propriétaire. Sont également tenus de restituer à proportion de leur responsabilité et de leur profit tous ceux qui ont participé au vol en quelque manière, ou en ont profité en connaissance de cause; par exemple ceux qui l'auraient ordonné, ou aidé, ou recélé.

2413 Les jeux de hasard (jeu de cartes, etc.) ou les paris ne sont pas en eux-même contraires à la justice. Ils deviennent moralement inacceptables lorsqu'ils privent la personne de ce qui lui est nécessaire pour subvenir à ses besoins et à ceux d'autrui. La passion du jeu risque de devenir un asservissement grave. Parier injustement ou tricher dans les jeux constitue une matière grave, à moins que le dommage infligé soit si léger que celui qui le subit ne puisse raisonnablement le considérer comme significatif.

2414 Le septième commandement proscrit les actes ou entreprises qui, pour quelque raison que ce soit, égoïste ou idéologique, mercantile ou totalitaire, conduisent à asservir des êtres humains, à méconnaître leur dignité personnelle, à les acheter, à les vendre et à les échanger comme des marchandises. C'est un péché contre la dignité des personnes et leurs droits fondamentaux que de les réduire par la violence à une valeur d'usage ou à une source de profit. S. Paul ordonnait à un maître chrétien de traiter son esclave chrétien "non plus comme un esclave, mais comme un frère ..., comme un homme, dans le Seigneur" (Phm 1,16).



Le respect de l'intégrité de la création

2415 Le septième commandement demande le respect de l'intégrité de la création. Les animaux, comme les plantes et les êtres inanimés, sont naturellement destinés au bien commun de l'humanité passée, présente et future (cf. Gn 1,28-31). L'usage des ressources minérales, végétales et animales de l'univers, ne peut être détaché du respect des exigences morales. La domination accordée par le Créateur à l'homme sur les êtres inanimés et les autres vivants n'est pas absolue; elle est mesurée par le souci de la qualité de la vie du prochain, y compris des générations à venir; elle exige un respect religieux de l'intégrité de la création (cf. CA 37-38).

2416 Les animaux sont des créatures de Dieu. Celui-ci les entoure de sa sollicitude providentielle (cf. Mt 6,26). Par leur simple existence, ils le bénissent et lui rendent gloire (cf. Da 3,57-58). Aussi les hommes leur doivent-ils bienveillance. On se rappellera avec quelle délicatesse les saints, comme S. François d'Assise ou S. Philippe Neri, traitaient les animaux.

2417 Dieu a confiés les animaux à la gérance de celui qu'Il a créé à son image (cf. Gn 2,19-20 Gn 9,1-4). Il est donc légitime de se servir des animaux pour la nourriture et la confection des vêtements. On peut les domestiquer pour qu'ils assistent l'homme dans ses travaux et dans ses loisirs. Si elles restent dans des limites raisonnables, les expérimentations médicales et scientifiques sur les animaux sont des pratiques moralement recevables, puisqu'elles contribuent à soigner ou épargner des vies humaines.

2418 Il est contraire à la dignité humaine de faire souffrir inutilement les animaux et de gaspiller leurs vies. Il est également indigne de dépenser pour eux des sommes qui devraient en priorité soulager la misère des hommes. On peut aimer les animaux; on ne saurait détourner vers eux l'affection due aux seules personnes.



III La doctrine sociale de l'Eglise

2419 "La révélation chrétienne conduit à une intelligence plus pénétrante des lois de la vie sociale" (GS 23). L'Eglise reçoit de l'Evangile la pleine révélation de la vérité de l'homme. Quand elle accomplit sa mission d'annoncer l'Evangile, elle atteste à l'homme, au nom du Christ, sa dignité propre et sa vocation à la communion des personnes; elle lui enseigne les exigences de la justice et de la paix, conformes à la sagesse divine.

2420 L'Eglise porte un jugement moral, en matière économique et sociale, "quand les droits fondamentaux de la personne ou le salut des âmes l'exigent" (GS 76). Dans l'ordre de la moralité elle relève d'une mission distincte de celle des autorités politiques: l'Eglise se soucie des aspects temporels du bien commun en raison de leur ordination au souverain Bien, notre fin ultime. Elle s'efforce d'inspirer les attitudes justes dans le rapport aux biens terrestres et dans les relations socio- économiques.


2421 La doctrine sociale de l'Eglise s'est développée au dix- neuvième siècle lors de la rencontre de l'Evangile avec la société industrielle moderne, ses nouvelles structures pour la production de biens de consommation, sa nouvelle conception de la société, de l'Etat et de l'autorité, ses nouvelles formes de travail et de propriété. Le développement de la doctrine de l'Eglise, en matière économique et sociale, atteste la valeur permanente de l'enseignement de l'Eglise, en même temps que le sens véritable de sa Tradition toujours vivante et active (cf. CA 3).


2422 L'enseignement social de l'Eglise comporte un corps de doctrine qui s'articule à mesure que l'Eglise interprète les événements au cours de l'histoire, à la lumière de l'ensemble de la parole révélée par le Christ Jésus avec l'assistance de l'Esprit Saint (cf. SRS 1 SRS 41). Cet enseignement devient d'autant plus acceptable pour les hommes de bonne volonté qu'il inspire davantage la conduite des fidèles.

2423 La doctrine sociale de l'Eglise propose des principes de réflexion; elle dégage des critères de jugement; elle donne des orientations pour l'action:


Tout système suivant lequel les rapports sociaux seraient entièrement déterminés par les facteurs économiques est contraire à la nature de la personne humaine et de ses actes (cf.
CA 24).


2424 Une théorie qui fait du profit la règle exclusive et la fin ultime de l'activité économique est moralement inacceptable. L'appetit desordonné de l'argent ne manque pas de produire ses effets pervers. Il est une des causes des nombreux conflits qui perturbent l'ordre social (cf. GS 63 LE 7 CA 35).

Un système qui "sacrifie les droits fondamentaux des personnes et des groupes à l'organisation collective de la production" est contraire à la dignité de l'homme (GS 65). Toute pratique qui réduit les personnes à n'être que de purs moyens en vue du profit, asservit l'homme, conduit à l'idolâtrie de l'argent et contribue à répandre l'athéisme. "Vous ne pouvez servir à la fois Dieu et Mammon" (Mt 6,24 Lc 16,13).

2425 L'Eglise a rejeté les idéologies totalitaires et athées associées, dans les temps modernes, au "communisme" ou au "socialisme". Par ailleurs, elle a récusé dans la pratique du "capitalisme" l'individualisme et le primat absolu de la loi du marché sur le travail humain (cf. CA 10 CA 13 CA 44). La régulation de l'économie par la seule planification centralisée pervertit à la base les liens sociaux; sa régulation par la seule loi du marché manque à la justice sociale "car il y a de nombreux besoins humains qui ne peuvent être satisfaits par le marché" (CA 34). Il faut préconiser une régulation raisonnable du marché et des initiatives économiques, selon une juste hiérarchie des valeurs et en vue du bien commun.




1998 Catéchisme 2360