Catéchisme France 320

Église apostolique

320 L'Église est apostolique, parce qu'elle procède de la mission confiée par Jésus à ses apôtres et parce qu'elle accueille dans l'obéissance de la foi la Révélation que les apôtres lui ont transmise. Elle se sait responsable de transmettre de génération en génération, sous l'action de l'Esprit Saint, cette Révélation, consignée dans l'Écriture.

"Le Christ Jésus lui-même, avant de donner librement sa vie pour le monde, a de telle sorte organisé le ministère apostolique et promis d'envoyer le Saint-Esprit, que ce ministère et cette mission sont tous deux associés pour mener à bien, toujours et partout, l'oeuvre du salut" (
AGD 4).

On appelle "Apôtres", au sens strict du terme, les premiers témoins de la résurrection du Christ, envoyés par lui annoncer l'Évangile au monde entier. Il s'agit des Douze, mais aussi de l'apôtre Paul (cf 1Co 9,1-2).

Le mot "apôtre" désigne aussi dans le Nouveau Testament, de façon plus large, ceux qui participent à l'annonce de l'Évangile. Est alors également apôtre, dans ce sens, celui qui, n'ayant pas été témoin direct du Seigneur ressuscité, continue la mission reçue des Apôtres.


Une foi apostolique

321 L'Église est apostolique parce que sa foi elle-même est apostolique, c'est-à-dire reçue des apôtres. La foi apostolique est un bien et une responsabilité, partagés par l'ensemble des membres du peuple de Dieu. A l'Église comme telle est promise la fidélité dans cette foi.

"La collectivité des fidèles, ayant l'onction qui vient du Saint (cf.
1Jn 2,20 1Jn 2,27), ne peut se tromper dans la foi; ce don particulier qu'elle possède, elle le manifeste par le moyen du sens surnaturel de foi qui est celui du peuple tout entier, lorsque, des évêques jusqu'aux derniers des fidèles laïcs (saint Augustin), elle apporte aux vérités concernant la foi et les moeurs un consentement universel" (LG 12).


Le ministère apostolique

322 L'Église est également apostolique en tant que rassemblée et gouvernée par les "successeurs des apôtres" que sont les évêques (cf. LG 22).

L'histoire de l'Église témoigne de la succession ininterrompue du ministère apostolique des évêques, en même temps que du souci permanent de la transmission fidèle de la foi reçue des apôtres.

Cette "succession apostolique", c'est-à-dire la succession des évêques dans la charge confiée par Jésus aux apôtres, est au service de la continuité apostolique de toute l'Église. Cette fonction est exercée par chaque évêque au sein de l'Église particulière confiée à sa charge. Mais elle s'exerce aussi collégialement, c'est-à-dire que tout évêque, au titre de l'ordination sacramentelle qu'il reçoit, participe, en union avec le pape et les autres évêques, à la charge apostolique de l'Église universelle.

323 Au ministère des évêques sont adjoints, pour le seconder, le ministère ordonné des prêtres et celui des diacres. Par eux aussi le Christ rassemble et vivifie organiquement son Corps dans l'unité en vue de la mission. Sans les ministères ordonnés, l'Église ne pourrait pas subsister. Ils appartiennent à sa structure essentielle.

Le ministère hiérarchique de l'Église signifie et exerce de manière visible la présence et l'action personnelles de Jésus qui édifie son Corps en vue du salut de tous. Les évêques et les prêtres, ministres ordonnés, dons du Christ à son Église (cf.
Ep 4,11), sont revêtus d'une grâce particulière du Saint-Esprit qui les conforme au Christ Tête, Pasteur et Serviteur, et les rend capables d'agir en son nom, pour la vie et la mission de l'Église entière. Leur ministère est "la réalisation et la manifestation d'une participation au sacerdoce du Christ, différente, par sa nature et non simplement par son degré, de la participation donnée par le baptême et par la confirmation à tous les fidèles" (CL 22).

Ces ministères tiennent donc une place tout à fait spécifique parmi les dons de l'Esprit dévolus à l'Église: "La grâce accordée aux apôtres tient la première place: l'Esprit lui-même soumet à leur autorité jusqu'aux bénéficiaires des charismes" (LG 7 cf 1Co 14)

Par le sacerdoce ministériel des évêques et des prêtres, par le service des diacres, l'Église apostolique trouve sa structure organique, parce que ce ministère sacramentel lui permet de se construire jusqu'à la "plénitude du Christ" (cf. Ep 4,13).

324 Outre les ministères ordonnés, l'Église se donne certaines structures d'organisation pour vivre son unité, grandir dans la sainteté, signifier la catholicité et poursuivre la mission reçue des apôtres: conseils presbytéraux, conseils pastoraux, synodes diocésains, où chaque fidèle apporte la contribution de ses charismes, de sa compétence, de son ministère ou de son service particulier, selon son état. Par ces structures et en ces diverses occasions s'exprime et se renforce l'unité d'une Église riche de la diversité des dons qu'y répand et y entretient le Saint-Esprit.

325 Église une, sainte, catholique et apostolique: ces quatre "notes" se complètent en se renvoyant l'une à autre. Confesser l'Église une, c'est la regarder plutôt en elle-même comme communion. La dire sainte, c'est la voir dans sa source et dans le projet définitif de Dieu. La dire catholique, c'est la situer dans la diversité du monde où elle prend corps. Affirmer qu'elle est apostolique, c'est la contempler dans l'histoire en continuité avec ses origines.

Aussi bien, une unité qui, par exemple, ne serait pas en même temps catholique risquerait de se comprendre de manière unitaire, nivelante, tout comme une catholicité qui serait pensée indépendamment de l'exigence d'unité risquerait je se dissoudre dans la diversité des formes où la foi chercherait à se couler. Les quatre "notes" doivent être comprises ensemble comme signe de la présence de l'Esprit Saint dans l'Église.


La communion des saints

326 Cette Église, dans ses communautés, dans s'es membres, et jusque dans ses structures et son organisation, est appelée à vivre et à témoigner de la sainteté et de la charité du Christ. Dans le Symbole des Apôtres, la "communion des saints" est mentionnée aussitôt après "la sainte Église catholique". "Communion des saints" peut être une désignation de l'Église.

L'Église est communion des saints dans la mesure où ses membres sont sanctifiés, c'est-à-dire rendus saints au baptême par le don de l'Esprit et par leur incorporation alors réalisée au Corps du Christ; dans la mesure aussi où elle vit de ces réalités saintes que constituent tous les sacrements, et en particulier l'eucharistie.

En effet, la communion des saints est d'abord cette communion actuelle réalisée par l'Esprit Saint entre tous les disciples du Christ vivant aujourd'hui et rassemblés dans l'Église. Ce sont eux qui, selon l'usage du Nouveau Testament, sont appelés "saints".

327 La communion des saints est une communion réalisée également avec la Sainte Vierge Marie et avec tous les saints du ciel, en particulier ceux qui sont canonisés, c'est-à-dire ceux dont l'Église a reconnu officiellement le témoignage exemplaire. En effet, les chrétiens ne trouvent pas seulement "dans la vie des saints, un modèle", mais aussi "dans la communion avec eux une famille, et dans leur intercession, un appui" (préface des Saints 1).

Mais la communion des saints s'étend également à tous "ceux qui sont morts dans la paix du Christ" (prière eucharistique IV). C'est ainsi que l'Église a, "dès les premiers temps du christianisme, entouré de beaucoup de piété la mémoire des défunts" (
LG 50), en offrant pour eux ses prières.

Elle s'étend encore à tous les morts dont Dieu seul connaît la foi (cf. prière eucharistique IV), autrement dit à tous ceux qui, sans avoir été baptisés, sont aujourd'hui citoyens de la Cité d'en haut, la Jérusalem du ciel, par grâce de Dieu qui accorde à toute personne humaine la possibilité d'être associée au mystère pascal (cf. GS 22).

La fête de la Toussaint rassemble dans une même action de grâce tous ceux, connus et inconnus, qui constituent la "cité sainte, la Jérusalem nouvelle" (Ap 21,2), accomplissement de l'humanité selon le dessein de Dieu.


L'Église en mission au coeur du monde

328 "Envoyée par Dieu aux païens pour être le sacrement universel du salut, l'Église, en vertu des exigences intimes de sa propre catholicité et obéissant au commandement de son fondateur (cf. Mc 16,16), est tendue de tout son effort vers la prédication de l'Évangile à tous les hommes" (AGD 1).

Le mot français mission, d'origine latine, est de contenu Analogue au mot apostolat, d'origine grecque. L'Église apostolique est une Église missionnaire, envoyée. Catholique, elle est impatiente voir l'Évangile rejoindre tous les hommes. "Malheur à moi, si je n'annonçais pas l'Évangile!" (1Co 9,16): cette exclamation de saint Paul ne cesse de retentir à ses oreilles.

La mission de l'Église a sa source en Dieu: elle prolonge la mission que le Fils a reçue du Père de réconcilier le monde avec lui, mission de sanctification et de communion qui s'accomplit dans l'Esprit Saint, envoyé par le Père et le Fils (cf. AGD 2-4).

Cette mission, Jésus ressuscité la confia aux disciples, quand il leur dit: "Tout pouvoir m'a été donné au ciel et sur la terre. Allez donc! De toutes les nations faites des disciples, baptisez-les au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit; et apprenez-leur à garder tous les commandements que je vous ai donnés. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde" (Mt 28,18-20).

329 La mission incombe donc à un titre particulier "à l'ordre des évêques, assistés par les prêtres en union avec le successeur de Pierre" (AGD 5). Mais elle est confiée, en union avec eux, à tous les baptisés. C'est l'Église tout entière qui est missionnaire. L'évangélisation incombe à tout le peuple de Dieu. "Le Christ [...] accomplit sa fonction prophétique jusqu'à la pleine manifestation de la gloire, non seulement par la hiérarchie qui enseigne en son nom et avec son pouvoir, mais aussi par les laïcs dont il fait pour cela également des témoins en les pourvoyant du sens de la foi et de la grâce de la parole" (LG 35).

Reprenant l'enseignement du concile Vatican II, faisant écho également aux voix qui s'étaient fait entendre lors du synode des évêques de 1987, consacré à "la vocation et [à] la mission des fidèles laïcs dans l'Église et dans le monde", Jean Paul II, dans son Exhortation apostolique sur les fidèles laïcs, rappelle ce qui fonde cette mission des laïcs: les sacrements de l'initiation chrétienne et le don du Saint-Esprit, qui les fait participants à la fonction sacerdotale, prophétique et royale de Jésus Christ (cf. CL 13-14).


Implanter l'Église sur des terres nouvelles

330 Le mot mission revêt souvent un sens particulier. Il s'agit de "l'évangélisation et [de] l'implantation de l'Église dans les peuples ou les groupes humains dans lesquels elle n'a pas encore été enracinée" (AGD 6).

Cette tâche missionnaire, pour laquelle toute l'Église doit unir ses forces, incombe aussi à l'Église particulière, à l'égard de "ceux qui, ne croyant pas au Christ, demeurent avec elle sur le même territoire" (AGD 20).

L'Église réalise cette activité par l'annonce de la Parole de Dieu et par le témoignage de ses membres, qui manifestent la joie de croire et de vivre selon l'Évangile.

L'évangélisation est un trait essentiel de l'Église. Celle-ci est missionnaire par essence (cf. Rm. 15,17-21). Tous les baptisés confirmés par l'Esprit et qui se nourrissent de l'eucharistie sont envoyés dans le monde pour y vivre comme témoins et comme apôtres. Lorsqu'on a découvert l'énergie transformatrice de l'Évangile, on ne peut que vouloir la partager. Or l'Évangile ne construit pas une autre société terrestre. Il est le ferment de notre monde. L'homme "est la première route que l'Église doit parcourir en accomplissant sa mission: il est la première route et la route fondamentale de l'Église, route tracée par le Christ lui-même, route qui, de façon immuable, passe par le mystère de l'Incarnation et de la Rédemption" (RH 14).

331 La mission se distingue cependant radicalement d'un prosélytisme qui fait bon marché des libertés et du respect des personnes.

Dans cette activité missionnaire, le rôle des laïcs est capital. De tout temps, ils ont contribué de différentes façons, en communion avec leurs pasteurs, à se laisser conduire par les impulsions de l'Esprit et à être souvent en première ligne de la vie missionnaire, en particulier dans tous les domaines de leur vie sociale et professionnelle.

Pour que cette activité missionnaire soit mieux organisée et plus féconde, l'Église encourage les chrétiens à prendre leurs responsabilités dans les communautés paroissiales et diocésaines, dans les associations de fidèles, les mouvements apostoliques, spirituels et caritatifs.

Aujourd'hui encore, c'est un signe de vitalité pour une Église d'envoyer certains des siens, laïcs, religieux ou prêtres, porter l'Évangile dans le monde entier ou coopérer à l'activité missionnaire des Églises lointaines. Une Église qui envoie des missionnaires bénéficie en retour de leur expérience et peut accueillir, grâce à eux, ce qui est vécu par les jeunes Églises.

Notre temps requiert un nouvel élan d'évangélisation. L'Église doit voir dans l'évangélisation, comme elle l'a toujours vu, sa grâce et sa vocation propres (cf.
EN 14). Elle doit reconnaître, parmi les charismes et les ministères qui lui sont donnés pour qu'elle soit pleinement catholique, la vocation missionnaire de laïcs, religieux ou prêtres envoyés vers les non-chrétiens. Elle doit puiser dans la prière, comme l'y invite son Seigneur, la force de poursuivre ardemment sa tâche missionnaire (cf. CL 35).

332 L'Église désire avec force faire partager sa foi, permettre à ceux auxquels elle s'adresse de rencontrer le Christ, d'accueillir son Évangile et de vivre de sa vie. C'est pour cela qu'elle vit, qu'elle prie, qu'elle témoigne et qu'elle agit. Mais elle sait bien que l'adhésion à la foi chrétienne dépend de l'action intérieure de l'Esprit et qu'elle n'est vraie que si elle est libre.

L'activité missionnaire, parce qu'elle vise à faire resplendir l'Évangile au coeur des hommes et des peuples, dans leurs milieux de vie et dans leurs cultures, est inconcevable indépendamment du dialogue avec ces hommes auxquels cet Évangile est destiné.

Le dialogue loyal recherché par l'Église, "conduit par le seul amour de la vérité et aussi avec la prudence requise, n'exclut personne: ni ceux qui honorent de hautes valeurs humaines, sans en reconnaître encore l'auteur, ni ceux qui s'opposent à l'Église et la persécutent de diverses façons" (
GS 92). Ce dialogue, qui prend la forme d'échanges sur le présent et l'avenir de l'humanité, sur le monde à construire, est mené dans l'Église à partir de la lumière de l'Évangile. Il est ordonné au bien de l'homme, à une plus grande humanisation de la famille humaine.


Poursuivre l'oeuvre du "bon pasteur"

333 Appeler la communauté chrétienne à conformer sa vie à l'Evangile ne détourne pas de la mission.

Saint Paul, l'apôtre des Gentils, recommande de travailler "pour le bien de tous, surtout celui de nos proches dans la foi" (
Ga 6,10).

Dans la communauté chrétienne les fidèles sont appelés à vivre et à témoigner à la manière des premiers disciples (cf. Ac 2,42 et suiv.). Ce qui importe, c'est l'union des croyants, leur progrès dans la foi, l'espérance et la charité, le soutien de leur vie sacramentelle, de leur vie morale, de leur témoignage et de leur action missionnaire.

Dans l'Église tous les croyants, tous les baptisés, y compris "ceux qui, malgré le baptême reçu dans l'Église, ont abandonné la pratique des sacrements ou même la foi" (LG 28), ont droit à l'aide et au soutien des pasteurs. Une préférence doit cependant se manifester en faveur de ceux et de celles dont l'"évangélisation " constitue le signe de l'avènement du règne de Dieu: les pauvres, de pauvreté matérielle, morale ou spirituelle (cf. Mt 11,5).

334 Cette tâche incombe en premier lieu aux pasteurs de l'Église et tout particulièrement aux évêques. Cependant les religieux et les laïcs ont à exercer, en union avec eux, leur part de responsabilité. En effet, le souci des frères dans la foi, ainsi que celui des communautés, incombe à tous les chrétiens.

L'annonce de l'Évangile aux générations nouvelles, en particulier la catéchèse des enfants et des jeunes et leur initiation chrétienne véritable, tient bien sûr une place de première importance dans la vie de l'Église. L'accueil des catéchumènes, leur formation et leur accompagnement, leur intégration dans les communautés chrétiennes, représentent aussi pour l'Église des responsabilités de premier ordre. Car, par leur désir de baptême explicitement exprimé, les catéchumènes sont déjà unis à l'Église, qui "les enveloppe comme siens dans son amour en prenant soin d'eux" (
LG 14).

Il en est de même, toujours dans la fidélité à l'Évangile, pour la visite des malades, l'accueil des étrangers, la rencontre des personnes âgées et le soutien de ceux qui souffrent de handicaps divers.

335 Les fonctions et les formes d'activité de l'Église, à l'intérieur d'elle-même et au service du monde, peuvent traditionnels. La koinônia est la fonction ou le service de "communion" qu'assure l'Église et qui peut finir par la désigner tout entière, ainsi que nous l'avons vu. La diakonia désigne le service de charité, également constitutif de l'Église. C'est sur le même radical qu'est formé le mot "diacre". La marturia désigne la fonction de témoignage de la foi et de l'amour de Dieu, fonction que l'Église est appelée à exercer dans le monde. C'est sur ce mot qu'est formé celui de "martyr". Le martyr est un "confesseur de la foi". La leiturgia est le service du culte public que l'Église doit rendre à son Dieu en célébrant les grandes oeuvres accomplies par lui en faveur des hommes. Elle est "le sommet auquel tend l'action de l'Église, et en même temps la source d'où découle toute sa vertu" (SC 10).

Ces formes d'activité de l'Église sont celles qui la caractérisent durant son pèlerinage terrestre au cours duquel elle avance à travers les persécutions du monde et les consolations de Dieu, annonçant la croix et la mort du Seigneur jusqu'à ce qu'il vienne (cf LG 8).


Dans un large dialogue

Avec tous les hommes de bonne volonté

336 Parce qu'elle est dépositaire d'un message de salut destiné à, tous les hommes, l'Église doit entretenir avec eux le plus large dialogue. Tout véritable dialogue suppose, chez ceux qui l'engagent, la clarté par rapport à ses risques et à ses limites. Mais la prudence nécessaire, le souci d'éviter les "irénismes" trop faciles doivent aller de pair avec l'audace évangélique.

Le dialogue loyal recherché par l'Église n'a pas pour unique objet les questions religieuses, ni pour uniques destinataires ceux qui s'intéresseraient à ces questions (cf.
GS 92). C'est avec tous les hommes et en tout ce qui fait leur vie que l'Église désire entrer et demeurer en dialogue.

Ce dialogue est stimulé par la conviction que l'Esprit Saint agit intérieurement en chaque personne que Dieu aime (cf. AGD 4 LG 16 GS 22). Il s'inspire de l'attitude de Jésus lui-même qui dialoguait avec ses contemporains pour les guider vers la lumière divine (cf. AGD 11). Il est une voie d'évangélisation.


Avec les croyants des autres religions

337 L'Église se soucie de rencontrer aussi, comme tels, les croyants d'autres religions, notamment les musulmans, que les chrétiens, en France, sont amenés à côtoyer fréquemment.

Le concile Vatican II dit ceci: "L'Église regarde aussi avec estime les musulmans, qui adorent le Dieu un, vivant et subsistant, miséricordieux et tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, qui a parlé aux hommes. Ils cherchent à se soumettre de toute leur âme aux décrets de Dieu, même s'ils sont cachés, comme s'est soumis à Dieu Abraham, auquel la foi islamique se réfère volontiers. Bien qu'ils ne reconnaissent pas Jésus comme Dieu, ils le vénèrent comme prophète; ils honorent sa Mère virginale, Marie, et parfois même l'invoquent avec piété. De plus, ils attendent le jour du jugement, où Dieu rétribuera tous les hommes ressuscités. Aussi ont-ils en estime la vie morale et rendent-ils un culte à Dieu, surtout par la prière, l'aumône et le jeûne" (
NAE 3).

Elle ne manque pas d'estimer ce qui, dans ces grandes religions, est authentiquement religieux, tout en attestant la foi qui lui fait reconnaître dans le Christ "le Chemin, la Vérité et la Vie" (Jn 14,6 cf. NAE 2).

Elle favorise toute action, toute démarche, tout effort qui contribuent à améliorer les relations avec ces religions, pour le service commun de l'ensemble des peuples.

En octobre 1986, l'initiative du pape Jean-Paul Il d'inviter à Assise les représentants de toutes les religions à prier pour la paix est un bon exemple de la voie à suivre.


Avec le peuple juif

338 Parmi les croyants avec lesquels l'Église se soucie d'entrer et de demeurer en dialogue, les juifs occupent une place à part, privilégiée. Ils appartiennent, en effet, au "peuple qui reçut les alliances et les promesses, et dont le Christ est issu selon la chair (cf. Rm 9,4-5), peuple très aimé du point de vue de l'élection" (LG 16). Aujourd'hui encore, "l'Église ne peut oublier qu'elle a reçu la révélation de l'Ancien Testament par ce peuple avec lequel Dieu, dans sa miséricorde indicible, a daigné conclure l'antique Alliance" (NAE 4).

"La religion juive ne nous est pas 'extrinsèque' mais, en un certain sens, elle est 'intrinsèque' à notre religion. Nous avons donc à son égard des rapports que nous n'avons avec aucune autre religion" (discours de Jean-Paul II à la synagogue de Rome, avril 1986, no. 4).

L'histoire des relations entre chrétiens et juifs a été douloureuse. L'Église encourage d'autant plus avec les membres du peuple juif un dialogue fraternel, fait d'estime et d'une meilleure connaissance réciproques. Elle condamne toute forme d'antisémitisme et porte dans sa prière ceux dont elle ne peut dissocier sa foi: "Dieu éternel et tout puissant, toi qui as choisi Abraham et sa descendance pour en faire les fils de ta promesse, conduis à la plénitude de la Rédemption le premier peuple de l'Alliance, comme ton Église t'en supplie" (liturgie du Vendredi saint).


A l'intérieur du monde chrétien, le dialogue oecuménique

339 Depuis le concile Vatican II, le dialogue avec les autres chrétiens, également disciples du Christ, mais ne partageant pas pleinement la communion ecclésiale, est devenu une préoccupation primordiale de l'Église catholique. Cette préoccupation, dite oecuménique, est celle d'une "restauration de l'unité entre tous les chrétiens" (UR 1).

Le souci de l'unité est communion au voeu et à la prière du Christ, tels qu'il les formule à la dernière Cène, au moment de quitter ses disciples: "Que tous, ils soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi. Qu'ils soient un en nous, eux aussi, pour que le monde croie que tu m'as envoyé" (Jn 17,21).

L'objectif du travail oecuménique est donc de surmonter les obstacles à la pleine communion ecclésiale entre ceux qui "portent à juste titre le nom de chrétiens", ont en commun le même baptême au nom de Dieu, révélé en Jésus Christ comme Père, Fils et Saint-Esprit, et déjà "se trouvent dans une certaine communion, bien qu'imparfaite, avec l'Église catholique" (UR 3).

340 La poursuite de la tâche oecuménique ne contredit pas la conviction que "l'unité d'une seule et unique Église [...] subsiste de façon inadmissible dans l'Église catholique [...]. Bien que l'Église catholique ait été enrichie de la vérité révélée par Dieu ainsi que de tous les moyens de grâces, néanmoins ses membres n'en vivent pas avec toute la ferveur qui conviendrait. Il en résulte que le visage de l'Église resplendit moins aux yeux de nos frères séparés ainsi que du monde entier" (UR 4).

L'Église catholique entend mettre en valeur, et faire reconnaître à ses fidèles, les authentiques réalités chrétiennes qui se rencontrent dans les autres Églises ou communautés ecclésiales: la Sainte Écriture, au premier chef, comme règle de foi et de vie, la confession du Dieu trinitaire, le baptême et les autres sacrements, la Prière du Seigneur, etc. Tous ces éléments de sanctification et de vérité subsistent hors des structures de l'Église catholique. Ils appartiennent donc au don que Dieu lui-même fait à l'Église du Christ, si bien "qu'ils appellent par eux-mêmes l'unité catholique" (LG 8).

341 La tâche oecuménique postule de la part des chrétiens un certain nombre d'exigences, de dispositions et de résolutions pratiques.

La première exigence est la conversion intérieure, nécessaire pour être libre de tout attachement à ce qui ne relève Pas de la foi elle-même, et pour devenir porteur, après en avoir bénéficié, de la parole de réconciliation reçue du Christ.

La conversion intérieure est indissociable de la prière, qui est l'âme du travail oecuménique: prière commune entre chrétiens de différentes Églises ou communautés ecclésiales; prière pour l'unité, notamment pendant la semaine qui lui est spécialement consacrée chaque année; reprise de la prière de Jésus lors de la dernière Cène, dans l'espérance de pouvoir partager un jour, entre tous les chrétiens, la même eucharistie.

La tâche oecuménique implique aussi un effort de connaissance mutuelle. Beaucoup d'ignorance, en effet, et parfois de préjugés, limitent encore une véritable compréhension et la nécessaire estime des uns et des autres.

Mais l'unité est également promue par l'engagement commun, chaque fois qu'il est possible, au service des hommes de notre temps et des grandes causes de l'humanité.

342 Les rencontres diverses de Paul VI et de Jean-Paul II avec des responsables d'autres Églises chrétiennes, les relations de l'Église catholique avec le Conseil oecuménique des Églises, les différents dialogues, manifestent la volonté de voir la communion réelle, mais encore partielle, devenir progressivement pleine communion.

Le dialogue engagé, s'il est mené comme il se doit, dans la fidélité à la Révélation et l'accueil généreux de l'autre, est exigeant. Il postule patience et persévérance. Mais ceux qui s'y livrent découvrent qu'il contribue à les renouveler dans l'intelligence de leur foi et dans leur souci de fidélité à l'Évangile. Il leur fait faire une nouvelle expérience de l'action de l'Esprit Saint dans l'Église de notre temps.


La Vierge Marie dans le mystère du Christ et de l'Eglise

343 Parler de l'Église, c'est aussi parler de la Vierge Marie. Parler de Marie, c'est encore parler de l'Église. Marie n'est-elle pas "celle qui occupe dans la Sainte Église la place la plus élevée au-dessous du Christ, et nous est toute proche" (LG 54)? Aussi, après avoir abordé le mystère du Christ, puis celui de l'Église, il est normal de mettre en lumière, comme le fait la Constitution du concile Vatican Il sur l'Église, "le rôle de la Bienheureuse Vierge dans le mystère du Verbe incarné et du Corps mystique" (LG 54).


La Fille de Sion, "comblée de grâce"

344 "Réjouis-toi, comblée de grâce [...]. Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu" (Lc 1,28-30). Cette salutation de l'ange Gabriel est beaucoup plus qu'un simple bonjour. En elle résonne l'appel à la joie, adressé jadis à la Fille de Sion, au peuple de Dieu, à qui est annoncée sa délivrance (cf. So 3,14-17 Za 2,14). Ce salut introduit une révélation: Marie est "comblée de grâce".

Comment comprendre cette expression? La grâce, c'est le don gratuit, la bienveillance amoureuse de Dieu envers les hommes qui commande tout le dessein de création et de salut. C'est cette grâce que célèbre le début de l'épître aux Éphésiens dans un élan de prière, où "l'action de grâce" répond au don de la grâce: "Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ. Dans les cieux, il nous a comblés de sa bénédiction spirituelle en Jésus Christ. En lui, il nous a choisis avant la création du monde, pour que nous soyons, dans l'amour, saints et irréprochables sous son regard. il nous a d'avance destinés à devenir pour lui des fils par Jésus Christ: voilà ce qu'il a voulu dans sa bienveillance à la louange de sa gloire, de cette grâce dont il nous a comblés en son Fils bien-aimé" (Ep 1,36).

C'est de cette grâce, exprimée ici par plusieurs mots (bénédiction, bienveillance, choix, amour, prédestination, adoption), que Marie a été comblée. Comme chacun de nous, elle a été élue pour être fille adoptive du Père. Mais sa vocation a quelque chose d'unique: elle a été choisie pour être la Mère de Jésus, de celui qui "sera saint et sera appelé Fils de Dieu" (Lc 1,35).

Appelée à "donner au monde la vie, la vie même qui renouvelle tout", elle "fut pourvue par Dieu de dons à la mesure d'une si grande tâche" (LG 56). On doit dire que tout en Marie vient de la grâce de Dieu.

345 Le Cantique de Marie

Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu, mon Sauveur
Il s'est penché sur son humble servante; désormais, tous les âges me diront bienheureuse.
Le Puissant fit pour moi des merveilles
saint est son nom.
Son amour s'étend d'âge en âge
sur ceux qui le craignent.
Déployant la force de son bras,
il disperse les superbes.
Il renverse les puissants de leur trône,
il élève les humbles.
Il comble de biens les affamés,
renvoie les riches les mains vides.
Il relève Israël, son serviteur,
il se souvient de son amour,
de la promesse faite à nos pères,
en faveur d'Abraham et de sa race, à jamais.
(
Lc 1,46-55)


La foi de Marie

346 Mais on doit dire aussi que tout, en Marie, est réponse libre et active de la foi, réponse que la grâce appelle et suscite. A la parole de l'ange, c'est-à-dire à la parole de Dieu qui lui est transmise, la Vierge de Nazareth répond: "Voici la servante du Seigneur; que tout se passe pour moi selon ta parole" (Lc 1,38). Par cette réponse Marie apportait "au salut des hommes, non pas simplement la coopération d'un instrument passif aux mains de Dieu, mais la liberté de sa foi et de son obéissance" (LG 56). Aussi Élisabeth énonce-t-elle la grande béatitude de la Vierge Marie: "Heureuse, celle qui a cru à l'accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur" (Lc 1,45).

"La foi de Marie à l'Annonciation inaugure la Nouvelle Alliance [...]. Les paroles d'Élisabeth: 'Bienheureuse celle qui a cru', ne se rapportent pas seulement à ce moment précis de l'Annonciation. Assurément, celui-ci représente le point culminant de la foi de Marie dans son attente du Christ, mais c'est aussi le point de départ, le commencement de tout son itinéraire vers Dieu, de tout son cheminement dans la foi" (RMA 14). Cette foi connaît les épreuves liées à la naissance et à l'enfance de son Fils, puis au ministère public de Jésus. "Gardant fidèlement l'union avec son Fils" (LG 58), Marie se retrouve debout au pied de la croix, vivant dans la nuit de la foi le démenti apparent des paroles de l'ange, mais " donnant à l'immolation de la victime, née de sa chair, le consentement de son amour" (LG 58). Comme la foi d'Abraham avait marqué le début de l'Ancienne Alliance, la foi de Marie est située à l'aurore de la Nouvelle Alliance. Marie, elle aussi, a cru et espéré contre toute espérance.

Tout le rôle de Marie dans l'histoire du salut doit être compris à cette double lumière de la grâce et de la foi donnée.


Mère de Jésus, donc Mère de Dieu

347 Telle est l'affirmation centrale de la foi chrétienne au sujet de Marie: Marie a été choisie pour devenir la mère de Jésus, le Christ, le Fils de Dieu, notre Sauveur. On l'appelle Mère de Jésus mais, puisque Jésus est le Fils de Dieu et Dieu lui-même, la Tradition de l'Église affirme que Marie est Mère de Dieu.

Ce titre, déjà acquis au 4e siècle, est proclamé en 431 au concile d'Éphèse, au moment des débats sur l'unité personnelle du Christ, homme et Dieu. Il ne signifie pas que Marie donne naissance à la divinité du Christ, ce qui n'aurait aucun sens. Elle a engendré selon sa chair celui qui est éternellement engendré par Dieu. Parce que "le Fils de Dieu prit d'elle la nature humaine" (
LG 55), elle est véritablement la Mère de Dieu, celle que les chrétiens d'Orient appellent la "Theotokos", c'est-à-dire "celle qui engendre Dieu".

Ce titre n'ajoute rien à ce qui se trouve déjà dans les évangiles. Et pourtant il représente une intelligence approfondie, et donc neuve, du rôle de Marie dans l'Incarnation. Mère de Dieu, Marie, Nouvelle Ève, est devenue, à la croix, mère des hommes, lorsque le Rédempteur l'a confiée au disciple qu'il aimait (cf. RMA 45).



Catéchisme France 320