1997 Directoire pour la catechèse 29
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Nombreux sont les aspects positifs de la catéchèse qui, ces dernières années, montrent sa vitalité. Certains méritent d'être mis en évidence:
- Le grand nombre de prêtres, de religieux et de laïcs qui se consacrent avec enthousiasme et persévérance à la catéchèse. C'est l'une des activités ecclésiales les plus mises en relief.
- Il faut souligner aussi le caractère missionnaire de la catéchèse actuelle et sa tendance à garantir l'adhésion à la foi des catéchumènes et des catéchisés, dans un monde où le sens religieux s'obscurcit. Dans cette dynamique, on perçoit clairement que la catéchèse doit acquérir le caractère de la formation intégrale, et ne pas se réduire à un simple enseignement: elle devra, en effet, travailler à susciter une véritable conversion.(54)
- D'où l'importance extraordinaire du développement de la catéchèse des adultes(55) dans le projet catéchétique de très nombreuses Eglises particulières. Cette option semble être devenue prioritaire dans les plans pastoraux de nombreux diocèses. Elle occupe une place centrale également dans certains mouvements et groupes ecclésiaux.
- Favorisée sans doute par les orientations récentes du Magistère, la pensée catéchétique a gagné, de nos jours, en densité et en profondeur. De nombreuses Eglises particulières disposent déjà d'orientations pastorales adaptées.
Notes:
(54) Cf. CTR 19.
(55) Cf. CTR 43
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Toutefois, il est nécessaire d'examiner attentivement certains problèmes pour essayer de leur trouver des solutions:
- Le premier a trait à la conception de la catéchèse comme école de foi, comme apprentissage et entraînement à toute la vie chrétienne, conception qui n'est pas pleinement entrée dans la conscience des catéchistes.
- En ce qui concerne l'orientation de fond, le concept de " Révélation " imprègne généralement l'activité catéchétique; cependant le concept conciliaire de " Tradition " en tant que réel élément d'inspiration a une influence moins grande. De fait, dans beaucoup de catéchismes, la référence à l'Ecriture Sainte est quasi exclusive, et pas suffisamment accompagnée de la réflexion et de la vie bimillénaire de l'Eglise.(56) La nature ecclésiale de la catéchèse apparaît, dans ce cas, moins claire. Le concours de la Sainte Ecriture, de la Tradition et du Magistère, " chacun à sa façon ",(57) ne féconde pas encore harmonieusement la transmission catéchétique de la foi.
- Quant à l'objectif de la catéchèse, à savoir la promotion de la communion avec Jésus-Christ, la nécessité apparaît d'une présentation plus équilibrée de toute la vérité sur le mystère du Christ. L'accent est mis parfois uniquement sur son humanité, sans référence explicite à sa divinité; en d'autre cas, moins fréquents de nos jours, l'accent est mis exclusivement sur sa divinité, au point d'assombrir la réalité du mystère de l'Incarnation du Verbe.(58)
- Quant au contenu de la catéchèse, divers problèmes demeurent, comme certaines lacunes doctrinales au sujet de la vérité sur Dieu et sur l'homme, sur le péché, la grâce et les fins dernières. Une formation morale plus solide est nécessaire; l'histoire de l'Eglise est présentée de manière inadéquate et sa doctrine sociale n'est pas assez mise en évidence. En certaines régions, on assiste à une prolifération de catéchismes et de textes dus à des initiatives particulières, aux tendances sélectives et aux accentuations si différentes qu'elles nuisent à l'indispensable convergence dans l'unité de la foi.(59)
- " La Catéchèse est intrinsèquement reliée à toute l'action liturgique et sacramentelle ".(60) Souvent, pourtant, la pratique de la catéchèse n'a qu'un rapport faible ou décousu avec la liturgie. On constate peu d'attention aux signes et aux rites liturgiques et une pauvre mise en valeur des sources liturgiques. Des parcours catéchètiques sont peu ou pas du tout reliés à l'année liturgique et les célébrations n'y ont qu'une présence marginale.
- En ce qui concerne la pédagogie, après l'insistance excessive de certains sur la valeur des méthodes et des techniques, on continue à ne pas porter l'attention qu'il faudrait aux exigences et à l'originalité de la pédagogie propre de la foi.(61) On tombe facilement dans le dualisme " contenu-méthode ", avec des réductions dans un sens comme dans l'autre. Quant à la dimension pédagogique, le discernement théologique nécessaire n'a pas toujours été opéré.
- Enfin, en ce qui concerne la différence des cultures dans le service de la foi, le problème reste de savoir transmettre l'Evangile en tenant compte du contexte culturel des peuples auxquels il est annoncé, de sorte qu'il puisse être réellement perçu comme une grande nouvelle pour la vie des personnes et de la société.(62)
- La formation à l'apostolat et à la mission est l'une des tâches fondamentales de la catéchèse. Cependant, tandis que progresse dans l'activité catéchétique une nouvelle sensibilité concernant la formation des fidèles laïcs au témoignage chrétien, au dialogue interreligieux et à l'engagement séculier, l'éducation à la mission ad gentes apparaît encore faible et insuffisante. Souvent la catéchèse ordinaire réserve une attention marginale et épisodique aux missions.
Notes:
(56) Cf. CTR 27.
(57) DV 10.
(58) CTR 29.
(59) Cf. CTR 30
(60) CTR 23
(61) Cf. CTR 58
(62) Cf. EN 63
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Après avoir examiné le terrain, le semeur envoie ses ouvriers annoncer l'Evangile dans le monde entier, en leur communiquant - dans ce but - la force de son esprit. Il leur enseigne, en même temps, à lire les signes des temps et exige d'eux qu'ils soient bien préparés pour les semailles.
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La voix de l'Esprit que Jésus, par le Père, a fait parvenir à ses disciples se fait entendre aussi à travers les événements de l'histoire.(63) Dans les mutations de la situation actuelle et dans les motivations profondes des défis lancés à l'évangélisation, il faut découvrir " les signes véritables de la présence ou du dessein de Dieu ".(64) Cette analyse doit s'effectuer à la lumière de la foi, avec une attitude de compassion et de miséricorde. Avec l'aide des sciences humaines,(65) toujours nécessaires, l'Eglise cherche à découvrir le sens de la situation actuelle à l'intérieur de l'histoire du Salut. Ses jugements sur la réalité sont toujours des diagnostics en vue de la mission.
Notes:
(63) Cf. FC 4 ChL 3e.
(64) GS 11 cf. GS 4
(65) Cf. GS 62 FC 5.
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Pour être en mesure d'exprimer sa vitalité et son efficacité, la catéchèse aujourd'hui devrait prendre les orientations suivantes:
- avant tout, se proposer comme un véritable service pour l'évangélisation de l'Eglise, avec un caractère missionnaire accentué;
- elle doit s'adresser à certains de ses destinataires privilégiés, comme ont été et continuent de l'être les petits enfants, les enfants, les adolescents, les jeunes et les adultes, en partant surtout de ces derniers;
- à l'exemple de la catéchèse patristique, elle doit modeler la personnalité du croyant et être par conséquent une école vraie et propre de pédagogie chrétienne;
- elle doit annoncer les mystères essentiels du christianisme, en promouvant l'expérience trinitaire de la vie dans le Christ comme centre de la vie de foi;
- elle doit enfin considérer comme tâche prioritaire la préparation de catéchistes qui aient une foi profonde.
" Allez dans le monde entier, proclamez l'Evangile à toute la création " (Mc 16,15).
" Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit. Et voici que je suis avec vous pour toujours jusqu'à la fin du monde " (Mt 28,19-20).
" Vous allez recevoir une force, celle de l'Esprit Saint qui descendra sur vous. Vous serez alors mes témoins. jusqu'aux extrémités de la terre " (Ac 1,8).
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Jésus, après sa résurrection, envoya l'Esprit-Saint de la part du Père pour qu'il accomplisse de l'intérieur l'oeuvre du salut et qu'il stimule les disciples à poursuivre sa mission dans le monde entier, comme lui-même avait été envoyé par le Père. Il fut le premier évangélisateur, le plus grand. Il annonça le Royaume de Dieu (66) comme étant l'intervention nouvelle et définitive de Dieu dans l'histoire, et il désigna cette annonce comme " l'Evangile ", c'est-à-dire la Bonne Nouvelle. Il lui consacra toute sa vie terrestre: il fit connaître la joie d'appartenir au Royaume,(67) les exigences de celui-ci et sa grande charte,(68) les mystères qu'il contient,(69) la vie fraternelle de ceux qui y pénètrent,(70) et sa plénitude future.(71)
Notes:
(66) Cf. Mc 1,15 cf. parallèles RMA 12-20 CEC 541-560
(67) Cf. Mt 5,3-12
(68) Cf. Mt 5,1-7,29
(69) Cf. Mt 13,11
(70) Cf. Mt 18,1-35
(71) Cf. Mt 24,1-25,46
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Cette première partie entend définir le caractère propre de la catéchèse.
Le premier chapitre porte sur la structure théologique; il rappelle brièvement le concept de Révélation exposé dans le Document conciliaire Dei Verbum. Il précise la manière de concevoir le ministère de la Parole. Les concepts de parole de Dieu, Evangile, Royaume de Dieu et Tradition, présents dans la Constitution dogmatique, fondent le sens de la catéchèse. Avec eux, le concept d'évangélisation devient un repère obligé pour la catéchèse. Sa dynamique et ses éléments sont exposés avec une précision nouvelle et approfondie dans l'Exhortation Apostolique Evangelii Nuntiandi.
Le deuxième chapitre situe la catéchèse dans le cadre de l'évangélisation et la met en relation avec les autres formes du ministère de la parole de Dieu. Grâce à ce rapport, on découvre plus facilement le caractère propre de la catéchèse.
Le troisième chapitre analyse plus directement la catéchèse en tant que telle: sa nature ecclésiale, sa finalité contraignante de communion avec Jésus-Christ, ses devoirs, l'esprit catéchuménal qui l'anime.
La conception que l'on a de la catéchèse conditionne profondément la sélection et l'organisation de ses contenus (cognitifs, expérimentaux, comportementaux), en précise les destinataires et définit la pédagogie requise pour en atteindre les objectifs.
Le terme " catéchèse " a subi une évolution sémantique durant les vingt siècles d'histoire de l'Eglise. En ce directoire la conception de la catéchèse s'inspire des documents du magistère pontifical post-conciliaire, et surtout d'Evangelii nuntiandi, Catechesi tradendae et Redemptoris missio.
" Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ, qui nous a bénis par toutes sortes de bénédictions spirituelles, aux cieux, dans le Christ. Il nous a fait connaître le mystère de sa volonté, ce dessein bienveillant qu'il avait formé en lui par avance, pour le réaliser quand les temps seraient accomplis: ramener toutes choses sous un seul Chef, le Christ " (Ep 1,3-10) .
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" Dieu, qui crée et conserve toute chose par son Verbe, offre aux hommes, dans les choses créées, un perpétuel témoignage de lui-même ".(72) L'homme est, par nature et vocation " capable de Dieu "; il peut donc, quand il écoute le message de la Création, parvenir à la certitude que Dieu, cause et fin de tout, existe et peut se révéler à l'homme.
La constitution Dei Verbum du Concile Vatican II a décrit la Révélation comme l'acte par lequel Dieu se manifeste personnellement aux hommes. Dieu se montre, en effet, comme celui qui veut se communiquer lui-même, en rendant la personne humaine participante à sa nature divine.(73) Il réalise ainsi son dessein d'amour.
" Il a plu à Dieu dans sa sagesse et sa bonté de se révéler lui-même aux hommes et de faire connaître le mystère de sa volonté. pour les inviter et les admettre à partager sa propre vie ".(74)
Notes:
(72) DV 3
(73) Cf. 2P 1,4 CEC 51-52
(74) DV 2
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Ce dessein providentiel (75) du Père, pleinement révélé en Jésus-Christ, se réalise par la force de l'Esprit Saint.
Il comprend:
- La révélation de Dieu, de sa " vérité profonde ",(76) de son " secret ",(77) de la vraie vocation et dignité de la personne humaine; (78)
- l'offre du salut à tous les hommes, comme don de la grâce et de la miséricorde de Dieu,(79) qui implique la délivrance du mal, du péché, de la mort; (80)
- l'appel définitif à rassembler, dans la famille de Dieu, tous les fils dispersés, réalisant ainsi l'union fraternelle des hommes.(81)
Notes:
(75) Cf. Ep 1,9
(76) DV 2
(77) EN 11
(78) Cf. GS 22.
(79) Cf. Ep 2,8 EN 27
(80) Cf. EN 9
(81) Cf. Jn 11,52 AGD 2 AGD 3a.
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Pour se révéler à la personne humaine, Dieu, dans son immensité, a recours à une pédagogie: (82) il se sert d'événements et de paroles humaines pour communiquer son dessein; il le fait progressivement et par étapes,(83) pour mieux se rapprocher des hommes. Dieu agit en effet en sorte que les hommes parviennent à la connaissance de son dessein de salut à travers les événements de l'histoire du salut et les paroles inspirées qui les accompagnent et les expliquent.
" Cette économie de la Révélation comprend des événements et des paroles intimement unis entre eux, de sorte que
- les oeuvres réalisées par Dieu dans l'histoire du salut, attestent et corroborent et la doctrine et le sens indiqué par les paroles,
- tandis que les paroles publient les oeuvres et éclairent le mystère qu'elles contiennent ".(84)
Notes:
(82) Cf. DV 15 CTR 58 ChL 61; CEC 53 CEC 122 S. Irénée de Lyon, Adversus haereses, III, 20, 2: SCh 211, 389-393. Voir infra la Partie III chap. 1.
(83) CEC 54-64
(84) DV 2
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L'évangélisation, qui transmet au monde la Révélation, s'accomplit également par des oeuvres et des paroles. Elle est, à la fois, témoignage et annonce, parole et sacrement, enseignement et engagement.
De son côté, la catéchèse transmet les faits et les paroles de la Révélation: elle doit les proclamer et les raconter et, en même temps, éclairer les mystères profonds qu'ils renferment. D'autre part, la catéchèse fait mémoire non seulement des merveilles réalisées par Dieu dans le passé, mais, à l'aide de la Révélation qui est source de lumière pour la personne humaine, elle interprète les signes des temps et la vie présente des hommes et des femmes, puisque c'est en eux que s'accomplit le dessein de Dieu pour le salut du monde.(85)
Notes:
(85) Cf. DGC (1971) 11b.
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Dieu s'est révélé progressivement aux hommes, par l'intermédiaire des prophètes et des événements salvifiques, jusqu'à l'accomplissement de sa Révélation par l'envoi de son propre Fils: (86)
" Jésus-Christ, par toute sa présence et par la manifestation qu'il fait de lui-même en paroles et en oeuvres, par signes et miracles, et plus particulièrement par sa mort et par sa résurrection glorieuse d'entre les morts, par l'envoi, enfin, de l'Esprit de vérité, achève en la complétant la révélation ".(87)
Jésus-Christ n'est pas seulement le plus grand des prophètes, il est le Fils éternel de Dieu fait homme, et, par conséquent, l'événement ultime vers lequel convergent tous les événements de l'histoire du Salut.(88) Il est, en effet, " la Parole unique, parfaite et indépassable du Père ".(89)
Notes:
(86) Cf. He 1,1-2
(87) DV 4
(88) Cf. Lc 24,27
(89) CEC 65 Saint Jn de la Croix s'exprime ainsi: " Il nous a tout dit à la fois et d'un seul coup en cette seule Parole ": Montée du Carmel, 2MC 22; cf. Liturgie des Heures I, Office des lectures du lundi de la deuxième semaine d'Avent.
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Le ministère de la Parole doit mettre en évidence cette caractéristique admirable, propre à l'économie de la Révélation: le Fils de Dieu entre dans l'histoire des hommes, assume la vie et la mort humaines et réalise l'Alliance Nouvelle et définitive entre Dieu et les hommes. Le rôle propre de la catéchèse est de montrer qui est Jésus-Christ - sa vie et son mystère -, et de présenter la foi chrétienne comme marche à la suite de sa Personne.(90) La catéchèse doit donc partir toujours des Evangiles, " coeur de toutes les Ecritures en tant qu'ils constituent le témoignage par excellence sur la vie et sur l'enseignement du Verbe Incarné, notre Sauveur ".(91)
Le fait que Jésus-Christ soit la plénitude de la Révélation est le fondement du " christocentrisme " (92) de la catéchèse: le mystère du Christ, dans le message révélé, n'est pas un élément ajouté à tant d'autres, mais le centre à partir duquel tous les autres éléments reçoivent leur hiérarchie et leur lumière.
La transmission de la Révélation par l'Eglise, oeuvre de l'Esprit Saint
Notes:
(90) Cf. CTR 5 CEC 520 CEC 2053.
(91) CEC 125 qui cite DV 18
(92) CTR 5 Le thème du christocentrisme est affronté avec plus de détails dans " Finalités de la catéchèse: la communion avec Jésus-Christ " (Partie I, ch. 3), et dans " Le christocentrisme du message évangélique " (Partie II, ch. 1).
42
La Révélation de Dieu, qui culmine en Jésus-Christ, est destinée à toute l'humanité: " Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité " (1Tm 2,4) . En vertu de cette volonté universelle de salut, Dieu a fait en sorte que la Révélation soit transmise à tous les peuples et à toutes les générations, et qu'elle demeure toujours intègre.(93)
Notes:
(93) Cf. DV 7
43
Pour accomplir le dessein de Dieu, Jésus-Christ a institué l'Eglise sur le fondement des apôtres et, leur envoyant l'Esprit du Père, il leur a ordonné de prêcher l'Evangile dans le monde entier. Les apôtres, par des paroles, des oeuvres et des écrits, ont accompli fidèlement ce mandat.(94)
Cette Tradition apostolique se poursuit dans l'Eglise et par l'Eglise. Et l'Eglise toute entière, pasteurs et fidèles, veille à sa conservation et à sa transmission. Dans l'Eglise, l'Evangile conserve, en effet, son intégrité et demeure vivant: les disciples de Jésus-Christ le contemplent et le méditent sans cesse, le vivent au quotidien et l'annoncent dans la mission. L'Esprit Saint ne cesse de féconder l'Eglise quand elle vit l'Evangile; il la fait grandir continuellement dans la compréhension de l'Evangile, la pousse et la soutient dans la tâche de l'annoncer à toute la terre.(95)
Notes:
(94) Cf. DV 7.
(95) Cf. DV 8 cf. CEC 75-79
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La conservation intègre de la Révélation, parole de Dieu contenue dans la Tradition et dans l'Ecriture, ainsi que sa transmission continue, jouissent d'une garantie d'authenticité. Le Magistère de l'Eglise, soutenue par l'Esprit Saint et doté du " charisme de vérité ", a la charge d'" interpréter de façon authentique la Parole de Dieu ".(96)
. L'Eglise, " sacrement universel de salut ",(97) mue par le Saint-Esprit, transmet la Révélation à travers l'Evangélisation: elle annonce la Bonne Nouvelle du dessein de salut du Père et, dans les sacrements, communique les dons divins.
A Dieu qui se révèle est due l'obéissance de la foi, en vertu de laquelle l'homme adhère librement à " l'Evangile de la grâce de Dieu " (Ac 20,24) , avec plein assentiment de l'intelligence et de la volonté. Guidé par la foi, don de l'Esprit, l'homme parvient à contempler et goûter le Dieu d'amour qui dans le Christ a révélé les richesses de sa gloire.(98)
Notes:
(96) DV 10 cf. CEC 85-87
(97) LG 48 AGD 1 GS 45 cf. CCC 774-776.
(98) Cf. Col 1,26
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L'Eglise " existe pour évangéliser ", (100) c'est-à-dire " pour porter la Bonne Nouvelle à toutes les couches de l'humanité et, sous son influence, transformer de l'intérieur et rendre nouvelle l'humanité elle-même ". (101) Le mandat missionnaire de Jésus revêt divers aspects intimement liés entre eux: " annoncez " (Mc 16,15), " faites des disciples et enseignez ", (102) " soyez mes témoins ", (103) " baptisez ", (104) " faites ceci en mémoire de moi " (Lc 22,19), " aimez-vous les uns les autres " ( Jn 15,12). Annonce, témoignage, enseignement, sacrements, amour du prochain, faire des disciples: autant d'aspects qui sont des chemins et des moyens pour la transmission de l'unique Evangile et constituent les éléments de l'évangélisation.
Certains revêtent une telle importance que l'on a parfois tendance à les identifier avec l'action évangélisatrice. Cependant, " aucune définition partielle et fragmentaire ne donne raison de la réalité riche, complexe et dynamique qu'est l'évangélisation ". (105) On court le risque de l'appauvrir, de la mutiler même. Or, elle doit développer " sa totalité " (106) et incorporer sa bipolarité propre: témoignage et annonce, (107) parole et sacrement, (108) changement intérieur et transformation sociale. (109) Les agents de l'évangélisation doivent savoir agir avec une " vision globale " (110) de l'évangélisation et l'identifier avec l'ensemble de la mission de l'Eglise. (111)
Notes:
(99) Dans Dei verbum (DV 2-5) et dans le Catéchisme de l'Eglise catholique (CEC 50-175),on parle de la foi comme réponse à la Révélation. Ici, pour des motifs catéchistiques et pastoraux, on a préféré lier la foi plus à l'évangélisation qu'à la révélation, que cette dernière, du fait, rejoint l'homme normalement à travers la mission évangélisatrice de l'Eglise.
(100) EN 14
(101) EN 18
(102) Cf. Mt 28,19-20
(103) Cf. Ac 1,8
(104) Cf. Mt 28,19
(105) EN 17
(106) EN 28
(107) Cf. EN 22.
(108) Cf. EN 47.
(109) Cf. EN 18
(110) EN 24.
(111) Cf. EN 14
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L'Eglise, bien qu'elle contienne en elle-même la plénitude des moyens de salut, oeuvre de façon graduelle. (112) Le décret conciliaire Ad Gentes a bien expliqué la dynamique du processus d'évangélisation: témoignage chrétien, dialogue et présence de la charité (11-12), annonce de l'évangile et appel à la conversion (13), catéchuménat et initiation chrétienne (14), formation de la communauté chrétienne par le moyen des sacrements et des ministères (15-18). (113) C'est le dynamisme de l'implantation et de l'édification de l'Eglise.
Notes:
(112) Cf. AGD 6.
(113) Dans le dynamisme de l'évangélisation il faut distinguer les " situations initiales " (initia), les " développements progressifs " (gradus) et la situation de maturité: " à chaque condition ou état doivent correspondre des actes propres " (AGD 6) .
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C'est pourquoi, l'évangélisation doit être conçue comme le processus par lequel l'Eglise, animée par l'Esprit, annonce et diffuse l'Evangile dans le monde entier:
- l'Eglise, animée par la charité, imprègne et transforme tout l'ordre temporel, en assumant et en renouvelant les cultures; (114)
- elle témoigne (115) parmi les peuples de la nouvelle manière d'être et de vivre qui caractérise les chrétiens;
- elle proclame explicitement l'Evangile, au moyen de la " première annonce ", (116) en appelant à la conversion; (117)
- elle initie à la foi et à la vie chrétienne, par la " catéchèse " (118) et les " sacrements d'initiation ", (119) ceux qui se convertissent à Jésus-Christ, ou ceux qui recommencent à marcher à sa suite, en incorporant les uns et les autres dans la communauté chrétienne; (120)
- elle développe sans arrêt le don de la communion (121) chez les fidèles, par l'éducation permanente de la foi (homélies, autres formes du ministère de la Parole), les sacrements et l'exercice de la charité;
- elle ne cesse de promouvoir la mission, (122) en envoyant tous les disciples du Christ annoncer l'Evangile, en paroles et en oeuvres, dans le monde entier.
Notes:
(114) Cf. EN 18-20 cf. RMA 52-54 AGD 11-12 AGD 22.
(115) Cf. EN 21 EN 41 RMA 42-43 AGD 11
(116) EN 51 EN 52 EN 53 cf. CTR 18 CTR 19 CTR 21 CTR 25 RMA 44
(117) Cf. AGD 13 EN 10 EN 23 CTR 19 RMA 46
(118) EN 22 CTR 18 cf. AGD 14 cf. RMA 47
(119) AGD 14 CEC 1212 cf. CEC 1229-1233
(120) Cf. EN 23 CTR 24 RMA 48-49 AGD 15
(121) Cf. Chl 18.
(122) Cf. ChL 32 qui montre le lien intime entre " communion " et " mission ".
49
Le processus d'évangélisation (123) est, par conséquent, organisé en étapes ou " moments essentiels ": (124) l'activité missionnaire pour les non-croyants et pour ceux qui vivent dans l'indifférence religieuse; l'activité catéchistique d'initiation pour ceux qui choisissent l'Evangile et pour ceux qui ont besoin de compléter ou de restructurer leur initiation; et l'action pastorale pour les fidèles chrétiens ayant déjà atteint la maturité au sein de la communauté chrétienne. (125) Ces moments ne constituent pas des étapes définitives: ils sont à reprendre, si nécessaire, puisqu'ils apporteront la nourriture évangélique la plus adaptée à la croissance spirituelle de chaque personne ou de la communauté elle-même.
Notes:
(123) Cf. EN 24
(124) CTR 18
(125) Cf. AGD 6 RMA 33 RMA 48.
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Le ministère de la Parole (126) est un élément fondamental de l'évangélisation. La présence chrétienne parmi les différents groupes humains et le témoignage de vie ont besoin d'être clarifiés et justifiés par l'annonce explicite de Jésus-Christ, le Seigneur. " Il n'y a pas d'évangélisation vraie si le nom, l'enseignement, la vie, les promesses, le Règne, le mystère de Jésus de Nazareth, Fils de Dieu ne sont pas annoncés ". (127) Même ceux qui sont déjà des disciples du Christ ont besoin d'être sans cesse nourris de la Parole de Dieu pour grandir dans leur vie chrétienne. (128)
Le ministère de la Parole, dans l'évangélisation, transmet la Révélation par l'Eglise, en utilisant des " paroles " humaines. Mais celles-ci sont toujours référées aux " oeuvres ": à celles que Dieu a accomplies et continue d'accomplir, surtout dans la liturgie; au témoignage de vie des chrétiens; à l'oeuvre de transformation que ceux-ci, avec tant d'hommes de bonne volonté, réalisent dans le monde. Cette parole humaine de l'Eglise est le moyen dont se sert l'Esprit Saint pour poursuivre le dialogue avec l'humanité. Il est en effet l'agent principal du ministère de la Parole, celui par qui " la voix vivante de l'Evangile retentit dans l'Eglise et, par l'Eglise, dans le monde ". (129)
Il y a " bien des manières " (130) d'exercer le ministère de la Parole. Au temps des Apôtres, (131) déjà, dans son désir d'offrir la Parole de Dieu de la façon la mieux adaptée, l'Eglise a réalisé ce ministère sous de nombreuses formes. (132) Celles-ci servent toutes à véhiculer ces fonctions de base que le ministère de la Parole est appelé à remplir.
Notes:
(126) Cf. Ac 6,4 Le ministère de la Parole divine est exercé dans l'Eglise par:
- les ministres ordonnés (cf. CIC 756-757);
- les membres d'instituts de vie consacrée, en raison de leur consécration à Dieu (cf. CIC 758);
- les fidèles laïcs, en raison de leur baptême et de leur confirmation (cf. CIC 759).
" Quant au mot ministère (servitium), il faut souligner que seule une constante référence à l'unique source que constitue le ministère du Christ. permet, dans une certaine mesure, d'appliquer aussi aux fidèles laïcs le terme de ministère sans ambiguïté. Dans ce sens originel, il exprime simplement le travail par lequel les membres de l'Eglise prolongent, en son sein et pour le monde, " la mission et le ministère du Christ " (cf. LG 34) . Quand, au contraire, le terme est spécifié dans le rapport et la comparaison entre les divers munera et officia, il convient alors d'avertir clairement que c'est seulement en vertu de l'ordination sacrée qu'il acquiert cette plénitude et cette univocité de sens que la Tradition lui a toujours attribué " (Jean-Paul II, Allocution au Symposium sur la " Participation des fidèles laïcs au ministère presbytéral ", n. 4: L'Osservatore Romano (23 avril 1994)
(127) EN 22 cf. EN 51-53
(128) Cf. EN 42-45 EN 54-57
(129) DV 8.
(130) PO 4 cf. CD 13c.
(131) On trouve des formes très diverses de ce ministère unique dans le Nouveau Testament: " annonce ", " enseignement ", " exhortation " . la variété des expressions est remarquable.
(132) Les modalités à travers lesquelles est canalisé l'unique ministère de la Parole ne sont pas, en réalité, intrinsèques au message chrétien. Il s'agit plutôt d'accentuations, de tonalités, de développements plus ou moins explicites, adaptés aux situations de foi de chaque personne et de chaque groupe humain dans le contexte où ils vivent.
51
Les principales fonctions du ministère de la Parole sont les suivantes:
- Convocation et appel à la foi
C'est la fonction que l'on déduit immédiatement du mandat missionnaire de Jésus. Elle se réalise par la " première annonce ", adressée aux non-croyants: ceux qui ont choisi de ne pas croire, les baptisés qui vivent en marge de la vie chrétienne, ceux qui appartiennent à d'autres religions. (133) L'éveil religieux des enfants, dans les familles chrétiennes, est aussi une forme très importante de cette tâche.
- L'initiation
Ceux qui, mus par la grâce, décident de suivre Jésus sont " introduits dans la vie de la foi, de la liturgie et de la charité du Peuple de Dieu ". (134) L'Eglise réalise cette fonction, fondamentalement, par la catéchèse, en lien étroit avec les sacrements d'initiation, qu'ils aient été reçus ou qu'ils soient encore à recevoir. Parmi les formes importantes: la catéchèse des adultes non-baptisés dans le catéchuménat; la catéchèse des adultes baptisés qui souhaitent revenir à la foi, ou de ceux qui ont besoin de compléter leur initiation; la catéchèse des enfants et des jeunes qui a, de par elle-même un caractère d'initiation. De même, l'éducation chrétienne au sein de la famille et l'enseignement de la religion à l'école exercent une fonction d'initiation.
- L'éducation permanente de la foi
En diverses régions elle est appelée aussi " catéchèse permanente ". (135)
Elle s'adresse aux chrétiens initiés aux éléments de base, qui ont besoin de nourrir et de mûrir sans cesse leur foi, tout au long de leur vie. Cette fonction se réalise sous des formes très variées: " systématiques ou occasionnelles, individuelles ou communautaires, organisées ou spontanées, etc. ". (136)
- La fonction liturgique
Le ministère de la Parole a également une fonction liturgique car, lorsqu'il est exercé dans une action sacrée, il en est partie intégrante. (137) Il s'exprime éminemment à travers l'homélie. Les interventions et les exhortations au cours des célébrations de la Parole en constituent d'autres formes. Il faut aussi mentionner la préparation immédiate aux divers sacrements, aux célébrations sacramentelles, et surtout à la participation des fidèles à l'eucharistie, comme une forme première de l'éducation à la foi.
- La fonction théologique
Elle a pour but de développer l'intelligence de la foi en se plaçant dans la dynamique de la " fides quaerens intellectum ", c'est-à-dire de la foi qui cherche à comprendre. (138) Pour accomplir cette fonction, la théologie doit entrer en contact et dialoguer avec les courants philosophiques de pensée, avec les humanismes qui marquent la culture et avec les sciences humaines. Elle s'articule sous diverses formes qui favorisent " l'exposé systématique et l'étude scientifique des vérités de la foi ". (139)
Notes:
(133) Cf. EN 51-53
(134) AGD 14
(135) Des raisons diverses rendent légitimes les expressions " éducation permanente de la foi " ou " catéchèse permanente ", à condition de ne pas relativiser le caractère prioritaire, fondamental, structurant et spécifique de la catéchèse, comprise comme initiation de base. L'expression " éducation permanente de la foi " ne se répandit dans l'activité catéchistique à partir du Concile Vatican II, que pour indiquer un second degré de catéchèse, qui suit la catéchèse d'initiation, et non pas l'activité catéchistique dans sa totalité. Voir comment cette distinction entre formation de base et formation permanente est entendue, au sujet de la formation des prêtres: Jean-Paul II, Exhortation apostolique post-synodale Pastores Dabo Vobis,chapitres V et VI, notamment le n. PDV 71: AAS 84 (1992), pp. 729ss.; 778ss.; 782-783.
(136) DGC (1971) 19d.
(137) Cf. SC 35 CEC 1154
(138) Cf. Congrégation pour la doctrine de la foi, Instruction Donum veritatis sur la vocation ecclésiale du théologien (24 mai 1990), n. 6: AAS 82 (1990), p. 1552.
(139) DGC (1971) 17; cf.
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Les formes importantes du ministère de la Parole sont: la première annonce ou prédication missionnaire; la catéchèse pré et post-baptismale; la forme liturgique et la forme théologique. Il arrive souvent que ces formes - pour des raisons pastorales -, doivent assumer plus d'une fonction. La catéchèse, par exemple, en même temps que sa fonction d'initiation, doit accomplir fréquemment des tâches missionnaires. L'homélie elle-même, selon les circonstances, devrait remplir la tâche de convocation et d'initiation organique.
1997 Directoire pour la catechèse 29