1990 Directoire clergé 43

Charité pastorale

43 Manifestation de la charité du Christ

La charité pastorale constitue le principe intérieur et dynamique qui unifie les activités multiples et diverses de la pastorale du prêtre. Dans le contexte socio-culturel et religieux ou il vit, elle est l'instrument indispensable pour porter les hommes à la vie de la Grâce.
Informée par une telle charité, l'activité ministérielle doit être une manifestation de la charité du Christ. Ainsi, le prêtre saura exprimer les attitudes et le comportement du Seigneur jusqu'au don total de soi en faveur du troupeau qui lui a été confié.(127)
Assimiler la charité pastorale du Christ pour en faire la vie de sa vie est un but qui exige du prêtre des efforts et des sacrifices continuels. Cette charité n'apparaît pas fortuitement, elle ne connaît pas de repos ni ne peut être atteinte une fois pour toutes. Le ministre du Christ se sentira toujours et partout obligé à vivre et à témoigner de cette réalité, même si en raison de l'âge, il est déchargé de responsabilités pastorales concrètes.

(127) Cf. CONC. CUM. VAT. II, Décr. Presbyterorum Ordinis,
PO 14 JEAN-PAUL II, Exhort. ap. post-synodale Pastores dabo vobis, PDV 23: l.c., 691-694.



44 Fonctionnalisme

Aujourd'hui, la charité pastorale court spécialement le risque d'être vidée de son sens par ce qu'on pourrait appeler le fonctionnalisme. Il n'est pas rare en effet, de constater aussi chez certains prêtres l'influence d'une mentalité qui tend à tord à réduire le sacerdoce ministériel aux seuls aspects fonctionnels. "Faire" le prêtre, rendre des services particuliers et garantir quelques prestations serait toute la raison de l'existence sacerdotale. Cette conception réductrice de l'identité et du ministère sacerdotal risque de mener la vie des prêtres vers un vide souvent compensé par des formes de vie non conformes à leur ministère.
Le prêtre, qui se sait ministre du Christ et de son Epouse, trouvera dans la prière, dans l'étude et dans la lecture spirituelle, la force nécessaire pour vaincre également ce danger.(128)

(128) Cf.
CIC 279



Prédication de la Parole

45 Fidélité à la Parole

Le Christ a confié aux Apôtres et à l'Eglise la mission de prêcher la Bonne Nouvelle à tous les hommes.
Transmettre la foi c'est dévoiler, annoncer et approfondir la vocation chrétienne; c'est-à-dire l'appel que Dieu adresse à chaque homme en lui manifestant le mystère du salut, et en même temps la place qu'il lui revient d'occuper en relation avec ce mystère, comme fils d'adoption dans le Fils.(129) Ce double aspect est exprimé de manière synthétique dans le Symbole de la Foi, qui est l'une des expressions les plus autorisées de la foi par laquelle l'Eglise a toujours répondu à l'appel de Dieu.(130)
Deux exigences se présentent au ministère du prêtre, comme les deux côtés d'une monnaie. En premier lieu, vient le caractère missionnaire de la transmission de la foi. Le ministère de la parole ne peut être séparé ou éloigné de la vie des hommes; au contraire, il doit faire directement référence au sens de la vie de l'homme, de tout homme, et donc entrer dans les problèmes les plus aigus qui se posent à la conscience humaine.
D'autre part, il y a une exigence d'authenticité, de conformité avec la foi de l'Eglise, gardienne de la vérité sur Dieu et sur l'homme. Cette réalité doit être vécue avec un grand sens des responsabilités et la conscience qu'il s'agit d'une question de la plus haute importance, puisque sont en jeu la vie de l'homme et le sens de son existence.
Pour que le ministère de la parole soit fructueux, et en tenant compte de ce contexte, le prêtre donnera la primauté au témoignage de vie qui fait découvrir la puissance de l'amour de Dieu et rend persuasive sa parole. Il fera place, en outre, à la prédication explicite du mystère du Christ aux croyants, non-croyants et non-chrétiens; à la catéchèse, qui est l'exposition ordonnée et organique de la doctrine de l'Eglise; à l'application de la vérité révélée à la solution des cas concrets. (131)
La conscience de la nécessité absolue de "demeurer" fidèlement ancré à la Parole de Dieu et à la Tradition pour être vraiment des disciples et pour connaître la vérité (cf.
Jn 8,31-32) a toujours accompagné l'histoire de la spiritualité sacerdotale. Cette idée a été reprise avec autorité par le Concile Oecuménique Vatican II.(132)
Dans la société contemporaine marquée par le matérialisme théorique et pratique, par le subjectivisme et l'esprit de contradiction, il est d'autant plus nécessaire que l'Evangile soit présenté comme "la puissance de Dieu pour sauver ceux qui croient" (Rm 1,16). Les prêtres, se souvenant que "la foi naît de la prédication, et la prédication, à son tour, se fonde sur la Parole du Christ" (Ibid Rm 10,17), emploieront toutes leurs énergies pour correspondre à cette mission qui est primordiale dans leur ministère. Ils sont en effet non seulement des témoins mais aussi des messagers et des propagateurs de la foi.(133)
Ce ministère vécu dans la communion hiérarchique les habilite à annoncer avec autorité la foi catholique et à témoigner officiellement de la foi de l'Eglise. Le Peuple de Dieu en effet, "est rassemblé d'abord par la Parole du Dieu vivant qu'il convient d'attendre tout spécialement de la bouche des prêtres".(134)
Pour être authentique, la Parole doit être transmise "sans astuce et sans falsification, mais en manifestant la vérité face à Dieu" (2Co 4,2) . Le prêtre évitera avec une maturité responsable de contrefaire, réduire, déformer ou édulcorer le contenu du message divin. Sa tâche en effet, "n'est pas d'enseigner sa propre sagesse, mais la parole de Dieu, et d'inviter tous les hommes avec insistance à la conversion et à la sainteté" (135)
Par conséquent, la prédication ne peut se réduire à la communication d'idées personnelles, au témoignage de sa propre expérience, à des explications de caractère psychologique, (136) sociologique ou philanthropique. Elle ne peut pas non plus, céder excessivement à l'attrait de la rhétorique, si fréquente dans la communication de masse. Il s'agit d'annoncer une Parole dont on ne peut disposer à son gré, puisqu'elle a été confiée à l'Eglise pour qu'elle la garde, la médite et la transmette fidèlement (137)

(129) Cf. CONC. CUM . VAT. II, Const. dogm. Dei Verbum, DV 5 CEC 1-2 CEC 142
(130) Cf. Catéchisme de l'Eglise Catholique, CEC 150-152 CEC 185-187
(131) Cf. JEAN-PAUL II, Catéchèse de l'Audience Générale du 21 avril 1993, n. 6: "L'Osservatore Romano", 22 avril 1993.
(132) Cf. CONC. CUM . VAT. II, Const. dogm. Dei Verbum, DV 25
(133) Cf. CIC 757 CIC 762 CIC 776
(134) CONC. CUM. VAT. II, Décr. Presbyterorum Ordinis PO 4
(135) Ibid.cf. JEAN-PAUL II, Exhort. ap. post-synodale Pastores dabo vobis, PDV 26: l.c., 697-700.
(136) Cf. JEAN-PAUL II, Catéchèse de l'Audience Générale du 21 avril 1993: "L'Osservatore Romano", 22 avril 1993.
(137) Cf. CONC. CUM. VAT. II, Const. dogm. Dei Verbum, DV 10 JEAN-PAUL II, Catéchèse de l'Audience Générale du 21 avril 1993: "L'Osservatore Romano", 22 avril 1993.



46 Parole et vie

Pour le prêtre, la conscience de sa mission de prédicateur de l'Evangile devra toujours davantage se concrétiser pastoralement. il pourra ainsi vivifier à la lumière de la Parole de Dieu les situations et les milieux divers ou il exerce son ministère.
Pour être efficace et crédible, il est important que le prêtre dans la perspective de la foi et de son ministère connaisse, avec un sens critique constructif, les idéologies, le langage, les débats culturels, les idées courantes diffusés par les moyens de communication et qui conditionnent en grande partie les mentalités.
Stimulé par l'Apôtre qui s'écrie: "Malheur à moi si je ne prêchais pas l'Evangile!" (
1Co 9,16), il saura utiliser tous les moyens de transmission que les sciences et la technique moderne lui offrent.
Certainement, tout ne dépend pas de ces moyens ou des capacités humaines: la grâce divine peut produire son effet indépendamment de l'oeuvre des hommes. Mais dans le plan de Dieu, la prédication de la Parole est normalement la voie privilégiée pour la transmission de la foi et la mission évangélisatrice.
A cause de tant d'hommes qui, aujourd'hui, sont éloignés ou à l'écart de l'annonce du Christ, le prêtre vivra comme particulièrement urgente et actuelle cette interrogation angoissée: "Comment pourront-ils croire sans en avoir entendu parler? Et comment pourront-ils en entendre parler s'il n'y a personne qui prêche?" (Rm 10,14).
Pour répondre à ces interrogations, il sentira personnellement le devoir d'écouter particulièrement la Sainte Ecriture grâce à l'étude d'une saine exégèse surtout patristique, et grâce à la méditation selon les diverses méthodes éprouvées par la tradition spirituelle de l'Eglise, de manière à en obtenir une compréhension pleine d'amour.(138) Dans ce but, le prêtre ressentira le devoir de réserver une attention particulière à la préparation lointaine ou prochaine de ses homélies liturgiques, à leur contenu, à l'équilibre entre la théorie et la pratique, à la pédagogie et à la technique d'exposition, mais aussi à une diction qui convienne à la dignité du sermon et de ses destinataires.(139)

(138) Cf. S. THOMAS D'AQUIN, Summa Theologiae I 43,5.
(139) Cf. CIC 769



47 Parole et catéchèse

La catéchèse est une partie importante de cette mission évangélisatrice parce qu'elle est instrument privilégié de l'enseignement et de la maturation de la foi. (140)
Le prêtre, en tant que collaborateur et mandataire de l'évêque, a la responsabilité d'animer, de coordonner et de diriger l'activité catéchétique de la communauté qui lui est confiée. Il est important qu'il sache intégrer cette activité dans un projet organique d'évangélisation garantissant surtout la communion de la catéchèse de sa communauté avec la personne de l'évêque, avec l'Eglise particulière et avec l'Eglise universelle.(141)
En particulier, il saura susciter une responsabilité juste et opportune, une collaboration dans la catéchèse, tant parmi les membres des Instituts de Vie consacrée et des Sociétés de vie apostolique, que des fidèles laïcs,(142) adéquatement préparés, et manifestera à tous sa reconnaissance et son estime pour cette tâche catéchétique.
Il prendra particulièrement soin de la formation initiale et permanente des catéchistes, des associations et des mouvements. Dans la mesure du possible, le prêtre devra être le catéchiste des catéchistes, formant avec ces derniers une véritable communauté de disciples du Seigneur, qui puisse servir de référence pour les élèves du catéchisme.
Maître (143) et éducateur de la foi,(144) le prêtre prendra soin que la catéchèse occupe une place privilégiée dans l'éducation chrétienne au sein de la famille, dans l'enseignement religieux, dans la formation des mouvements apostoliques, etc. Il se préoccupera également que la catéchèse soit dirigée à toutes les catégories de fidèles, enfants et jeunes, adolescents, adultes, personnes âgées. En outre, il saura transmettre l'enseignement catéchétique en faisant usage de tous les moyens pédagogiques et des moyens de communication pouvant servir à ce que les fidèles, de façon adaptée à leurs caractéristiques, leur capacité, leur âge et leurs conditions de vie, soient en mesure d'apprendre de façon plus parfaite la doctrine chrétienne et de la traduire en pratique plus convenablement.(145)
A cette fin, le prêtre ne manquera pas d'avoir comme principal point de référence le Catéchisme de l'Eglise Catholique. Ce texte, en effet, constitue une norme sûre et authentique de l'enseignement de l'Eglise.(146)

(140) Cf. JEAN-PAUL II, Exhort. apost. Catechesi Tradendae ( 16 octobre 1979), 18: AAS 71 (1979), 1291-1292.
(141) Cf.
CIC 768
(142) Cf. CIC 776
(143) Cf. CONC. CUM. VAT. II, Décr. Presbyterorum Ordinis, PO 9
(144) Cf. ibid, PO 6
(145) Cf. CIC 779
(146) Cf. JEAN-PAUL II, Const. ap. Fidei Depositum (11 octobre 1992), .



Le sacrement de l'Eucharistie

48 Le mystère eucharistique

Si le service de la Parole est l'élément fondamental du ministère du prêtre, le coeur et le centre vital en est constitué sans aucun doute par l'Eucharistie qui est surtout la présence réelle dans le temps de l'unique et éternel sacrifice du Christ.(147)
Mémorial sacramentel de la mort et de la résurrection du Christ, représentation réelle et efficace de l'unique Sacrifice rédempteur, source et sommet de la vie chrétienne et de toute évangélisation,(148) l'Eucharistie est principe, moyen et fin du ministère sacerdotal, puisque "tous les ministères ecclésiaux et les tâches apostoliques sont étroitement liés à l'Eucharistie et ordonnés à elle".(149) Consacré pour perpétuer le Saint Sacrifice, le prêtre manifeste ainsi de la manière la plus évidente son identité.
En effet, il existe une connexion intime entre la centralité de l'Eucharistie, la charité pastorale et l'unité de vie du prêtre.(150) Dans cette connexion il trouve les indications décisives pour l'itinéraire de sainteté auquel il est spécifiquement appelé.
Puisque le ministre prête au Christ, Prêtre Souverain et Eternel, son intelligence, sa volonté, sa voix et ses mains afin qu'à travers son ministère, Il puisse offrir au Père le sacrifice sacramentel de la rédemption, il devra aussi faire siennes les dispositions du Maître et, comme Lui, vivre comme don pour ses frères. Il devra par conséquent apprendre à s'unir intimement à l'offrande, déposant sur l'autel du sacrifice sa vie entière, comme signe de l'amour gratuit et prévenant de Dieu.

(147) Cf. JEAN-PAUL II, Catéchèse de l'Audience Genérale du 12 mai 1993, n. 3: "L'Osservatore Romano", 14 mai 1993.
(148) Cf. CONC. CUM. VAT. II, Décr. Presbyterorum Ordinis,
PO 5
(149) Ibid
(150) Cf. ibid PO 5 PO 13 S. JUSTIN, Apologia I, 67: PG 6, 429-432; S. AUGUSTIN, In Iohannis Evangelium Tractatus, 26, 13-15: CCL 36, 266-268



49 Célébration de l'Eucharistie

Il est nécessaire de rappeler la valeur irremplaçable qu'a pour le prêtre la célébration quotidienne de la Messe,(151) même sans le concours des fidèles. Il la vivra comme le moment central de sa journée et de son ministère quotidien, fruit d'un désir sincère et occasion d'une rencontre profonde et efficace avec le Christ. Il mettra le plus grand soin à la célébrer avec piété et à y appliquer son esprit et son coeur.
Dans une culture toujours plus sensible à la communication par les signes et par l'image, le prêtre réservera une attention adéquate à tout ce qui peut rehausser la dignité et le caractère sacré de la célébration eucharistique. Il est important dans cette célébration de soigner spécialement la conformité et la propreté du lieu, l'architecture de l'autel et du tabernacle,(152) la noblesse des vases sacrés et des ornements,(153) du chant,(154) de la musique,(155) le silence sacré,(156) etc. Tous ces éléments peuvent contribuer à une meilleure participation au Sacrifice eucharistique. En effet, une attention insuffisante portée aux aspects symboliques de la liturgie, et plus encore, la négligence et la précipitation, la superficialité et le désordre en vident le sens et affaiblissent sa fonction d'accroissement de la foi.(157) Celui qui célèbre mal manifeste la faiblesse de sa foi et n'éduque pas les autres à la foi. En revanche, bien célébrer constitue une première et importante catéchèse sur le Saint Sacrifice.
Ainsi le prêtre, tout en mettant au service de la célébration eucharistique ses capacités pour la rendre vivante avec la participation de tous les fidèles, doit s'attacher au rite établi dans les livres liturgiques approuvés par l'autorité compétente, sans ajouter, enlever ou modifier quoi que ce soit.(158)
Tous les Ordinaires, les Supérieurs des Instituts de vie consacrée, les Modérateurs des sociétés de vie apostolique ont le grave devoir, en plus de donner l'exemple, de veiller à ce que les normes liturgiques concernant la célébration de l'Eucharistie soient partout fidèlement observées.
Les prêtres qui célèbrent ou concélebrent sont tenus de se revêtir des ornements sacrés prescrits par les rubriques. (159)

(151) Cf.
CIC 904
(152) Cf. CONC. CUM. VAT. II, Const. Sacrosanctum Concilium SC 128
(153) Cf. ibid SC 122-124
(154) Cf. ibid SC 112 SC 114 SC 116
(155) Cf. ibid SC 120
(156) Cf. ibid SC 30
(157) Cf. CIC 899,3
(158) Cf. CONC. CUM. VAT. II, Const. Sacrosanctum Concilium SC 22 CIC 846
(159) Cf. CIC 929 Missale Romanum Institutio generalis, nn. 81; 298; S. CONGREGATION POUR LES SACREMENTS ET CULTE DIVIN, Instruction Liturgicae instaurationes (5 septembre 1970), 8c: AAS 62 (1970), 701.



50 Adoration eucharistique

La centralité de l'Eucharistie devra apparaître non seulement dans une célébration vivante et digne du Sacrifice, mais aussi dans l'adoration fréquente du Saint Sacrement, pour que le prêtre apparaisse aussi comme le modèle de la communauté par sa dévotion eucharistique et sa méditation assidue faite, chaque fois que cela lui sera possible, devant le Seigneur présent dans le tabernacle. Il est souhaitable que les prêtres chargés de guider des communautés consacrent de longs moments à l'adoration communautaire, et qu'ils réservent au Saint Sacrement de l'autel, également en dehors de la Messe, plus d'attentions et d'honneurs qu'à n'importe quel autre rite ou geste. "La foi et l'amour envers l'Eucharistie ne peuvent permettre que la présence du Christ dans le Tabernacle demeure solitaire".(160)
Un moment privilégié d'adoration eucharistique peut être la célébration de la Liturgie des Heures, qui constitue un véritable prolongement, durant la journée, du sacrifice de louange et d'action de grâces qui a dans la Sainte Messe son centre et sa source sacramentelle. La Liturgie des Heures dans laquelle le prêtre uni au Christ est la voix de l'Eglise pour le monde entier, sera célébrée, en communauté quand il est possible et sous les formes opportunes, de façon à être "l'interprète et le véhicule de la voix universelle qui chante la gloire de Dieu et demande le salut de l'homme".(161) Les Chapitres de chanoines réserveront une solennité exemplaire à cette célébration. On devra toujours éviter, dans la célébration communautaire ou individuelle, qu'elle soit réduite à un pur "devoir" exécuté mécaniquement, une simple lecture faite avec précipitation sans prêter l'attention due au sens du texte.

(160) JEAN-PAUL II, Catéchèse de l'Audience Générale du 9 juin 1993, n. 6: "L'Osservatore Romano", 10 juin 1993; cf. Exhort. ap. post-synodale Pastores dabo vobis,
PDV 48: l.c., 744; S. CONGREGATION DES RITES, Instr. Eucharisticum Mysterium (25 mai 1967), 50: AAS 59 (1967), 539-573; Catéchisme de l'Eglise Catholique CEC 1418
(161) JEAN-PAUL II, Catéchèse de l'Audience Générale du juin juin 1993, n. 5: "L'Osservatore Romano", juin juin 1993; cf. CONC. CUM. VAT. II, Const. Sacrosanctum Concilium, SC 99-100



Le sacrement de la pénitence

51 Ministre de la réconciliation

L'Esprit-Saint est le don de la résurrection fait aux Apôtres, en vue de la rémission des péchés: "Recevez l'Esprit-Saint; les péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez, ils seront retenus à ceux à qui vous les retiendrez" (
Jn 20,21-23). Le Christ a confié l'oeuvre de la réconciliation de l'homme avec Dieu exclusivement à ses Apôtres et à ceux qui leur succèdent dans cette même mission. Ainsi, les prêtres par volonté du Christ sont les seuls ministres du Sacrement de la Réconciliation. (162) Comme le Christ, ils sont envoyés pour appeler les pécheurs à la conversion et les ramener au Père grâce au tribunal de la miséricorde.
La Réconciliation sacramentelle rétablit l'amitié avec Dieu le Père et avec tous ses fils dans sa famille qu'est l'Eglise. Celle-ci s'en trouve rajeunie et édifiée dans toutes ses dimensions: universelle, diocésaine, paroissiale. (163)
Malgré la triste constatation de la perte du sens du péché, qui est largement présente dans la culture de notre temps, le prêtre doit pratiquer avec joie et générosité le ministère de la formation des consciences, du pardon et de la paix.
Il est donc nécessaire qu'il sache s'identifier dans un certain sens avec ce sacrement et, assumant l'attitude du Christ, qu'il sache se pencher avec miséricorde, comme le bon samaritain, sur l'humanité blessée. Il fera alors apparaître la nouveauté chrétienne de la dimension médicinale de la Pénitence, qui sert à la guérison et au pardon.(164)

(162) Cf. CONC. ECUM. DE TRENTE, Sess. VI, de iustificatione, c. 14; sess. XIV, de poenitentia, c. 1, 2, 5-7; can. 10; sess. XXIII, de ordine c. 1: DS 1542-1543 DS 1668-1672 DS 1679-1688 CONC. CUM. VAT. II, Décr. Presbyterorum Ordinis, PO 2 PO 5 CIC 965
(163) Cf. Catéchisme de l'Eglise Catholique, CEC 1443-1445
(164) Cf. CIC 966 CIC 978 CIC 981 JEAN-PAUL II, Discours à la Pénitencerie Apostolique (27 mars 1993): "L'Osservatore Romano" 28 mars 1993.



52 Dévouement au ministère de la Réconciliation

Tant en raison de son office (165) que de son Ordination sacramentelle, le prêtre devra dédier son temps et son énergie à écouter les confessions des fidèles qui, comme le montre l'expérience, vont volontiers recevoir ce Sacrement là ou ils savent trouver des prêtres disponibles. Cela est valable partout mais surtout pour les églises des zones les plus fréquentées et pour les sanctuaires, pour lesquels on peut organiser une collaboration fraternelle et responsable avec les prêtres religieux ou âgés.
Chaque prêtre s'en tiendra à la norme ecclésiale qui défend et promeut la valeur de la confession individuelle et de l'accusation personnelle et intègre de ses péchés, dans un dialogue direct avec le confesseur,(166) réservant l'usage de la confession et de l'absolution collective aux seuls cas extraordinaires prévus par les dispositions en vigueur, et dans les conditions requises.(167) Le confesseur saura ainsi éclairer la conscience du pénitent avec quelques mots qui, tout brefs qu'ils soient, devront être appropriés à sa situation concrète, de façon à favoriser une orientation personnelle renouvelée vers la conversion et à influencer en profondeur son chemin spirituel, également à travers l'imposition d'une satisfaction opportune.(168)
Dans tous les cas, le prêtre saura maintenir la célébration de la Réconciliation au niveau sacramentel en surmontant le danger de la réduire à une activité purement psychologique ou simplement formelle.
Cela se manifestera entre autre dans la façon de vivre fidèlement la discipline en vigueur sur le lieu et le siège de la confession.(169)

(165) Cf.
CIC 986
(166) Cf. ibid, CIC 960 JEAN-PAUL II, Encycl. Redemptor hominis, RH 20: AAS 71 (1979), 309-316.
(167) Cf. CIC 961-963 PAUL VI, Allocution (20 mars 1978), AAS 70 (1978), 328-332; JEAN-PAUL II, Allocution (30 janvier 1981): AAS 73 (1981), 201 -204; Exhort. ap. post-synodale Reconciliatio et Poenitentia, (décembre décembre 1984), RP 33: AAS 77 (1985), 269-271
(168) Cf. CIC 978 CIC 981
(169) Cf. ibid, CIC 964


53 Nécessité de se confesser

Comme tout bon fidèle, le prêtre a lui aussi besoin de confesser ses péchés et ses faiblesses. Il est le premier à savoir que la pratique de ce sacrement affermit dans la foi et la charité envers Dieu et envers le prochain.
Pour se trouver dans les meilleures conditions de montrer avec efficacité la beauté de la Pénitence, il est indispensable que le ministre du sacrement offre un témoignage personnel en précédant les autres fidèles dans l'expérience du pardon. Cette expérience constitue par ailleurs la première condition pour la revalorisation pastorale du sacrement de la réconciliation. En ce sens, il est bon que les fidèles sachent et voient que leurs prêtres eux aussi se confessent avec régularité: (170) "Toute la vie du prêtre subit un déclin inévitable si lui-même, par négligence ou pour tout autre motif, ne recourt pas de façon régulière et avec une foi et une piété authentiques au sacrement de Pénitence. Chez un prêtre qui ne se confesserait plus ou se confesserait mal, son être sacerdotal et son action sacerdotale s'en ressentiraient vite, et la communauté elle-même dont il est le pasteur ne manquerait pas de s'en rendre compte".(171)

(170) Cf. ibid,
CIC 276 CONC. CUM. VAT. II, Décr. Presbyterorum Ordinis, PO 18.
(171) JEAN-PAUL II, Exhort. ap. post-synodale Reconciliatio et Poenitentia, (décembre décembre 1984), RP 31: AAS 77 (1985), 266; Exhort. ap. Post-synodale Pastores dabo vobis, PDV 26: l.c., 699.


54 Direction spirituelle pour soi et les autres

Parallèlement au sacrement de la Réconciliation, le prêtre ne manquera pas d'exercer le ministère de la direction spirituelle. La redécouverte et la diffusion de cette pratique, vécue aussi hors de l'administration du sacrement de la Pénitence, est un grand bienfait pour l'Eglise dans le temps présent.(172) L'attitude généreuse et active des prêtres au moment de la pratiquer constitue une occasion importante pour reconnaître et pour soutenir les vocations au sacerdoce et aux différentes formes de vie consacrée.
Pour contribuer à l'amélioration de leur spiritualité, il est nécessaire que les prêtres pratiquent eux-mêmes la direction spirituelle. En remettant dans les mains d'un sage confrère la formation de leur âme, ils mûriront dès le début de leur ministère dans la conscience de l'importance de ne pas marcher seul sur les chemins de la vie spirituelle et de l'engagement pastoral. En faisant usage de ce moyen de formation efficace, si bien expérimenté dans l'Eglise, les prêtres bénéficieront d'une liberté entière dans le choix de la personne qui doit les guider.

(172) Cf. JEAN-PAUL II, Exhort. ap. post-sinodale Reconciliatio et Poenitentia, (décembre décembre 1984),
RP 32: AAS 77 (1985), 267-269.



Guide de la communauté

55 Prêtre pour la communauté

Le prêtre est aussi appelé à se confronter avec les exigences typiques d'un autre aspect de son ministère: il s'agit du soin de la vitalité de la communauté qui lui est confiée, ce qu'il traduira surtout par le témoignage de la charité.
Pasteur de la communauté, le prêtre vit et existe pour elle; c'est pour elle qu'il prie, étudie, travaille et se sacrifie; c'est pour elle qu'il est disposé à donner sa vie, l'aimant comme le Christ, lui dispensant tout son amour et toute son estime,(173) se dépensant de toutes ses forces et sans limite de temps pour la rendre à l'image de l'Eglise Epouse du Christ, toujours plus belle et plus digne de la complaisance du Père et de l'amour du Saint-Esprit.
Cette dimension sponsale de la vie du prêtre comme pasteur lui fera guider sa communauté dans un service total à tous et à chacun de ses membres, illuminant leur conscience avec la lumière de la vérité révélée, protégeant avec autorité l'authenticité évangélique de la vie chrétienne, corrigeant les erreurs, pardonnant, soignant les blessures, consolant les affligés, et promouvant la fraternité.(174)
Cet ensemble d'attentions délicates et complexes, en plus d'offrir un témoignage de charité toujours plus transparent et efficace, manifestera aussi la profonde communion qui doit se réaliser entre le prêtre et sa communauté, comme un prolongement et une actualisation de la communion avec Dieu, le Christ et l'Eglise.(175)

(173) Cf. JEAN-PAUL II, Exhort. ap. post-synodale Pastores dabo vobis,
PDV 22-23: l.c., 690-694; Lett. (15 août 1988) Mulieris dignitatem MD 26: AAS 80 (1988), 1715-1716.
(174) Cf. CONC. CUM. VAT. II, Décr. Presbyterorum Ordinis, PO 6 CIC 529
(175) S. JEAN CHRYSOSTOME, De sacerdotio, III, 6: PG, 48, 643-644: "la naissance spirituelle des âmes est le privilège des prêtres: ils les font naître à la vie de la grâce par le baptême; grâce à eux nous nous revêtons du Christ, nous sommes ensevelis avec le Fils de Dieu, et nous devenons membres de cette bienheureuse tête. (cf. Rm 6,1 Ga 3,27). Nous devons donc non seulement les respecter plus que les princes et que les rois, mais aussi les vénérer plus que nos parents. Ceux-ci en effet nous ont engendrés par le sang et la volonté de la chair (cf. Jn 1,13); ceux-là en revanche nous font naître comme fils de Dieu; ils sont les instruments de notre régénération bienheureuse, de notre liberté et de notre adoption dans l'ordre de la grâce".


56 Sentire cum Ecclesia

Pour être un bon guide de son peuple, le prêtre sera aussi attentif à reconnaître les signes des temps: depuis les plus vastes qui touchent l'Eglise universelle et son cheminement dans l'histoire des hommes, jusqu'aux signes les plus proches de la situation concrète de sa communauté.
Ce discernement requiert une mise à jour constante et pertinente dans l'étude des problèmes théologiques et pastoraux, l'exercice d'une sage réflexion sur les données sociales, culturelles et scientifiques qui caractérisent son époque.
Dans l'accomplissement de leur ministère, les prêtres sauront traduire cette exigence par l'attitude constante et sincère du sentire cum Ecclesia, pour qu'ils travaillent toujours en communion avec le Pape, avec les évêques, avec leurs autres confrères dans le sacerdoce, tout comme avec les fidèles consacrés par la profession des conseils évangéliques et avec les fidèles laïcs.
Dans l'exercice de leur activité, les prêtres ne manqueront pas non plus de rechercher, selon les formes légitimes et en tenant compte des capacités de chacun, la coopération des fidèles consacrés et des fidèles laïcs.



Le célibat sacerdotal

57 Ferme volonté de l'Eglise

Convaincue des profondes motivations théologiques et pastorales qui soutiennent le rapport entre célibat et sacerdoce, éclairée par le témoignage qui en confirme encore aujourd'hui, malgré des cas douloureux, la validité spirituelle et évangélique dans tant de vies sacerdotales, l'Eglise a réaffirmé durant le Concile Vatican II et dans le magistère pontifical postérieur sa "ferme volonté de maintenir la loi qui exige le célibat perpétuel librement choisi pour les candidats à l'ordination sacerdotale dans le rite latin" (176)
Le célibat en effet est un don que l'Eglise a reçu et sur lequel elle veut veiller, convaincue qu'il est un bien pour elle-même et pour le monde.

(176) JEAN-PAUL II, Exhort. ap. post-synodale Pastores dabo vobis,
PDV 29: l.c., 704; cf. CONC. CUM. VAT. II, Décr. Presbyterorum Ordinis, PO 16 PAUL VI, Encycl. Sacerdotalis coelibatus (24 juin 1967), 14: AAS 59 (1967), 662; CIC 277



58 Motifs théologiques et spirituels du célibat

Comme toute valeur évangélique, le célibat consacré doit être lui aussi vécu comme une nouveauté libératrice, comme un témoignage particulier de radicalisme à la suite du Christ et comme signe de la réalité eschatologique. "Tous ne comprennent pas ce langage, mais ceux à qui c'est donné. Il y a, en effet, des eunuques qui sont nés ainsi du sein de leur mère, il y a des eunuques qui le sont devenus par l'action des hommes, et il y a des eunuques qui se sont rendus tels à cause du Royaume des Cieux. Celui qui peut comprendre, qu'il comprenne!" (
Mt 19,10-12). (177)
Pour vivre avec amour et avec générosité le don reçu, il est particulièrement important que le prêtre comprenne dès la formation au séminaire les motifs théologiques et spirituels de la discipline ecclésiastique sur le célibat.(178) Le célibat, en tant que don et charisme particulier de Dieu, requiert l'observance de la continence parfaite et perpétuelle pour le Royaume des cieux, afin que les ministres sacrés puissent adhérer plus facilement au Christ avec un coeur sans partage et se dédier plus librement au service de Dieu et des hommes.(179) Avant même la volonté du sujet exprimée par sa disponibilité, la discipline ecclésiastique manifeste la volonté de l'Eglise et trouve sa raison ultime dans le lien étroit qui existe entre le célibat et l'ordination sacrée, qui configure le prêtre à Jésus-Christ Tête et Epoux de l'Eglise.(180)
La lettre aux Ephésiens (cf. Ep 5,25-27) établit un strict rapport entre l'oblation sacerdotale du Christ (cf Ep 5,25) et la sanctification de l'Eglise (cf. Ep 5,26) qui est aimée d'un amour sponsal. Inséré sacramentellement dans ce sacerdoce d'amour exclusif du Christ pour l'Eglise son Epouse fidèle, par son engagement au célibat, le prêtre exprime cet amour qui alors devient source féconde d'efficacité pastorale.
Le célibat par conséquent n'est pas un élément qui influence de l'extérieur le ministère sacerdotal; il ne peut pas être non plus simplement considéré comme une institution imposée par loi, entre autres raisons parce que celui qui reçoit le sacrement de l'Ordre s'y engage en pleine conscience et liberté,(181) après une préparation de plusieurs années, accompagnée d'une réflexion profonde et d'une prière assidue. Parvenu à la ferme conviction que le Christ lui concède ce don pour le bien de l'Eglise et le service des autres, le prêtre assume le célibat pour toute sa vie, en renforçant cette volonté dans la promesse déjà prononcée durant le rite de l'ordination diaconale.(182)
Pour toutes ces raisons, la loi ecclésiastique d'une part confirme le charisme du célibat en montrant combien il est intimement lié au ministère sacré dans sa double dimension de relation avec le Christ et avec l'Eglise, et d'autre part protège la liberté de celui qui le reçoit.(183) Aussi le prêtre, consacré au Christ de manière nouvelle et privilégiée,(184) doit être conscient qu'il a reçu un don confirmé par un lien juridique précis qui l'oblige moralement à l'observer. Ce lien, assumé librement, a un caractère théologal, puisqu'il est un signe de ce lien sponsal qui se réalise dans l'ordination sacramentelle. A travers lui, le prêtre acquiert cette paternité spirituelle mais réelle, qui a une dimension universelle et qui se concrétise particulièrement vis-à-vis de la communauté qui lui est confiée.(185)

(177) Cf. JEAN-PAUL II, Encycl. Veritatis splendor (6 août 1993), VS 22: AAS 85 1993), 1151.
(178) Cf. CONC. CUM. VAT. II, Décr. Optatam Totius OT 10 CIC 247 CONGREGATION POUR L'EDUCATION CATHOLIQUE Ratio Fundamentalis Institutionis Sacerdotalis (19 mars 1985), 48 Orientations éducatives pour la formation au célibat sacerdotal (11 avril 1974), n. 16.
(179) Cf. CONC. CUM. VAT. II, Décr. Presbyterorum Ordinis, PO 16 JEAN-PAUL II, Lettre aux prêtres à l'occasion du Jeudi-Saint 1979 Novo incipiente (8 avril 1979), 8: AAS 71 (1979), 405-409; Exhort. ap. post-synodale Pastores dabo vobis PDV 29: l.c., 703-705; CIC 277
(180) Cf. CONC. CUM. VAT. II, Décr. Presbyterorum Ordinis, PO 16 PAUL VI, Encycl. Sacerdotalis coelibatus (24 juin 1967) 14: AAS 59 (1967), 662.
(181) Cf. CONC. CUM. VAT. II, Décr. Presbyterorum Ordinis PO 16 CIC 1036 CIC 1037
(182) Cf. Pontificale Romanum - De ordinatione Episcopi, Presbyterorum et Diaconorum chap. III, n. 228, Ed. typica altera, 1990, p. 134; JEAN-PAUL II, Lettre aux prêtres à l'occasion du Jeudi-Saint 1979 Novo incipiente (8 avril 1979), 9: AAS 71 (1979), 409-411
(183) Cf. SYNODE DES EVEQUES, Document Ultimus temporibus (30 novembre 1971), II, I, 4c: AAS 63 (1971), 916-917.
(184) Cf. CONC. CUM. VAT. II, Décr. Presbyterorum Ordinis, PO 16.
(185) Cf. ibid



59 Exemple de Jésus

Le célibat est alors un don de soi "en" Jésus Christ et "avec" Jésus-Christ à son Eglise, et exprime le service du prêtre à l'Eglise "dans" et "avec" le Seigneur. (186)
On resterait dans un état de permanente immaturité si le célibat était vécu comme un "tribut qu'on paie au Seigneur" pour accéder aux Ordres sacrés et non plus comme "un don qu'on reçoit de sa miséricorde",(187) comme un choix de la liberté et comme l'acceptation joyeuse d'une vocation particulière d'amour pour Dieu et pour les hommes.
Le Seigneur donne ici l'exemple, lui qui, allant à contre-courant de ce que l'on peut considérer comme la culture dominante de son temps, a choisi librement de vivre le célibat. A sa suite, les disciples ont "tout" laissé pour accomplir leur mission (
Lc 18,28-30) .
Pour cette raison l'Eglise, depuis l'époque apostolique, a voulu conserver le don de la continence perpétuelle des clercs, et s'est orientée vers la solution de choisir les candidats à l'Ordre sacré parmi les célibataires (cf. 2Th 2,15 1Co 7,5 1Co 9,5 1Tm 3,2-12 1Tm 5,9 Tt 1,6-8) .(188)

(186) Cf. JEAN-PAUL II, Exhort. ap. post-synodale Pastores dabo vobis, PDV 29: l.c., 703-705.
(187) S. CONGREGATION POUR L'EDUCATION CATHOLIQUE, Orientations éducatives pour la formation au célibat sacerdotal (11 avril 1974), n. 16.
(188) Pour l'interprétation de ces texte, cf. CONC. D'ELVIRE, (a. 302-305) can. 27; 33: BRUNS HERM., Canones Apostolorum et Conciliorum saec. IV-VII, II, 5-6; CONC. DE NEOCESAREE (a. 314), can. 1: Pont. Commissio ad redingendum Orientalis, IX, I/2, 74-82; CONC. CUM. NICEE (a.(a. 325), can. 3: Conc. cum. Decr., 6; SYNODE ROMAIN (a. 386): Concilia Africae a. 345-525, CCL 149, (in CONC. DE TELEPTE), 58-63; CONC. DE CARTHAGE (a. 390): Ibid 13,133 ss.; CONC. IN TRULLO (a. 691), can. 3, 6, 12, 13, 26, 30, 48: Pont. Commissio ad redigendum Orientalis, IX, I/1, 125-186; SIRICE, décrétale Directa (a. 386): PL 13, 1131-1147; INNOCENT Ier, lett. Dominus inter (a. 405): BRUNS cit. 274-277. S. LEON GRAND, lettre a Rusticus (a. 456): PL 54, 1191; EUSEBE DE CESAREE, Demonstratio Evangelica , 1, 9: PG 22, 82 (78-83); EPIPHANE DE SALAMINE, Panarion, PG 41, 868, 1024; Expositio Fidei, PG 42, 822-826.



60 Difficultés et objections

Dans le climat culturel actuel, souvent marqué par une vision de l'homme privée du sens des valeurs et surtout incapable de donner un sens total, positif et libérateur à la sexualité humaine, on pose souvent la question de la valeur et de la signification du célibat sacerdotal ou, tout au moins, de l'opportunité d'affirmer son lien étroit et sa profonde harmonie avec le sacerdoce ministériel.
Au long des siècles, les difficultés et les objections ont toujours accompagné le choix de l'Eglise Latine et de certaines Eglises Orientales de ne conférer le sacerdoce ministériel qu'à des hommes ayant reçu de Dieu le don de la chasteté dans le célibat. La discipline des autres Eglises Orientales qui admettent le sacerdoce d'hommes mariés n'est pas opposée à celle de l'Eglise Latine. Ces mêmes Eglises en effet exigent le célibat pour les Evêques. De plus, elles n'acceptent pas le mariage des prêtres ni les noces successives des ministres veufs. Il s'agit toujours et seulement de l'ordination d'hommes déjà mariés.
Les difficultés que certains opposent encore aujourd'hui,(189) s'appuient souvent sur de faux prétextes, comme par exemple l'accusation de spiritualisme désincarné ou l'affirmation suivant laquelle la continence impliquerait méfiance ou mépris vis-à-vis de la sexualité. D'autres encore partent de cas difficiles et douloureux, ou généralisent des cas particuliers. On oublie en revanche le témoignage offert par l'immense majorité des prêtres qui vivent leur célibat dans la liberté intérieure, appuyés sur de profondes motivations évangéliques, dans la fécondité spirituelle et dans un horizon de fidélité convaincue et joyeuse à leur vocation et à leur mission.
Il est clair que pour garantir et pour conserver ce don dans un climat d'équilibre serein et de progrès spirituel, toutes les mesures doivent être prises qui éloignent le prêtre des difficultés possibles.(190)
Il est par conséquent nécessaire que les prêtres se comportent avec la prudence requise dans leurs relations avec les personnes dont la familiarité peut mettre en danger la fidélité au don ou susciter le scandale des fidèles. (191) Dans les cas particuliers, il faudra se soumettre au jugement de l'Evêque qui a l'obligation de donner des normes précises dans ce domaine.(192)
De plus, les prêtres ne manqueront pas de suivre les règles d'ascèse éprouvées par l'expérience de l'Eglise et qui sont encore plus requises dans les circonstances actuelles. Pour cela, ils éviteront avec prudence les lieux, les spectacles et les lectures qui constituent un obstacle à l'observance de la chasteté dans le célibat.(193) Vis-à-vis des moyens de communication sociale, les prêtres, que ce soit comme acteurs ou comme utilisateurs, observeront la discrétion nécessaire et éviteront tout ce qui pourrait nuire à leur vocation.
Dans un climat de permissivité sexuelle exacerbée, pour protéger avec amour le don reçu, c'est dans la communion avec le Christ et avec l'Eglise, dans la dévotion à la Bienheureuse Vierge Marie et la considération de l'exemple des prêtres saints de tous les temps, qu'ils trouveront la force nécessaire pour vaincre les difficultés sur leur chemin, et pour agir avec cette maturité qui les rend crédibles vis-à-vis du monde.(194)

(189) Cf. JEAN-PAUL II, Lettre à tous les prêtres de l'Eglise à l'occasion du Jeudi-Saint 1993 (8 avril 1993): AAS 85 (1993), 880-883; pour d'ultérieurs approfondissements, cf. Solo per amore, riflessioni sul celibato sacerdotale, sous la direction de la Congrégation pour le Clergé, Ed. Paoline, 1993; Identità e missione del Sacerdote, sous la direction de G. PITTAU-C. SEPE, Ed. Città Nuova 1994.
(190) S. JEAN CHRYSOSTOME, De Sacerdotio, VI, 2: PG 48, 679: "L âme du prêtre doit être plus pure que les rayons du soleil, pour que le Saint-Esprit ne l'abandonne pas et pour qu'il puisse dire: ce n'est plus moi qui vit, c'est le Christ qui vit en moi (
Ga 2,20) . Les anachorètes dans le désert, loin de la ville, des lieux de rencontres et de leur agitation, jouissant pleinement du port et du beau temps, n'osent pas mettre leur confiance dans la sécurité de leur vie, mais prennent de nombreuses précautions, se protégeant de toute part et prenant soins de tout faire et de tout dire avec diligence, pour pouvoir se présenter à Dieu dans la confiance d'une pureté intacte, autant qu'il est possible aux facultés humaines: quelle force et quelle violence seront donc nécessaires au prêtre, pour soustraire son âme à toute tache et en conserver intacte la beauté spirituelle? Il a certainement besoin d'une pureté plus grande que le moine. Et cependant, lui qui en a plus besoin, est exposé à des occasions inévitables plus fréquentes, qui pourraient le contaminer si, avec une sobriété et une vigilance soutenues, il ne rendait pas son âme inaccessible à toutes ces embûches".
(191) Cf. CIC 277
(192) Cf. ibid, CIC 277
(193) Cf. CONC. CUM. VAT. II, Décr. Presbyterorum Ordinis, PO 16.
(194) Cf. PAUL VI, Encycl. Sacerdotalis coelibatus (24 juin 1967), 78-81: AAS 59 (1967), 688-689; JEAN-PAUL II, Exhort. ap. post-synodale Pastores dabo vobis, PDV 29: l.c., 703-705




1990 Directoire clergé 43