1993 Thesaurus - PAUL CLAUDEL


AUGUSTE COMTE



Il n'y a point de liberté de conscience en astronomie, en physique, en chimie...
AUGUSTE COMTE

Le "saint problème humain" consiste à "instituer" de manière "habituelle" la "prépondérance" de la "sociabilité sur la personnalité".
AUGUSTE COMTE

Toute consistance est interdite aux sentiments qui ne sont point assistés par des convictions.
AUGUSTE COMTE

L'empire nécessaire des générations antérieures.
AUGUSTE COMTE

Où chacun prétend enseigner et personne ne veut apprendre.
AUGUSTE COMTE, sur l'état révolutionnaire

Depuis trente ans que je tiens la plume philosophique j'ai toujours représenté la souveraineté du peuple comme une mystification oppressive et l'égalité comme un ignoble mensonge.
AUGUSTE COMTE

La vraie logique se définit le concours normal des sentiments, des images et des signes pour nous inspirer les conceptions qui conviennent à nos besoins moraux, intellectuels et physiques.
AUGUSTE COMTE

Aux Etats-Unis la désorganisation spirituelle a été poussée plus que partout ailleurs.
AUGUSTE COMTE


Le Moyen-Âge a été pour l'Europe l'ère de l'unité, qui sera détruite au XVIème siècle par la Réforme.
AUGUSTE COMTE

Nos lecteurs savent que la grande crise politique et morale des sociétés actuelles tient, en dernière analyse, à l'anarchie intellectuelle.
AUGUSTE COMTE

Rien ne saurait être plus irrationnel que la moderne institution française, si étrangement qualifiée de "normale" par un naïf orgueil métaphysique, où l'on se propose directement d'enseigner dogmatiquement l'art même de l'enseignement, sans être nullement choqué du cercle profondément vicieux qui résulte d'une pareille prétention.
AUGUSTE COMTE

La formule sacrée des positivistes : L'Amour pour principe, l'Ordre pour base, et le Progrès pour tous.
AUGUSTE COMTE, !

Les femmes, surtout les illettrées, peuvent assez comprendre la prépondérance que mérite la culture habituelle du coeur, tant comprimée par la grossière activité, théorique et pratique, qui domine l'Occident moderne.
AUGUSTE COMTE

Nul n'est moins disposé à tolérer l'égoïsme qu'un égoïste, qui partout lui suscite d'intraitables concurrents.
AUGUSTE COMTE

Aucune société ne peut durer si les inférieurs ne respectent pas leurs supérieurs.
AUGUSTE COMTE

Toute l'histoire de l'humanité se condense nécessairement dans celle de la religion. La loi générale du mouvement humain consiste, sous un aspect quelconque, en ce que l'homme devient de plus en plus religieux.
AUGUSTE COMTE


La décadence inévitable des doctrines religieuses a laissé sans appui la partie généreuse du coeur humain, et tout s'est réduit à la plus abjecte individualité.
AUGUSTE COMTE

Ni l'individu, ni l'espèce ne sont destinés à consumer leur vie dans une activité stérilement raisonneuse en dissertant continuellement sur la "conduite qu'ils doivent tenir". C'est à l'activité qu'est appelée essentiellement la masse des hommes... Or, les meilleures impulsions sont habituellement insuffisantes pour diriger la conduite privée ou publique, quand elle reste toujours dépourvue des convictions destinées à prévenir ou à corriger ces déviations.
Toute consistance est interdite aux sentiments qui ne sont point assistés par des convictions.
AUGUSTE COMTE

La rose ne peut pas se passer du fumier, mais le fumier se passe très bien de la rose.
AUGUSTE COMTE, sur la dépendance à sens unique

... Il faut un dogme, un dogme aimé. Et, pour être présentées aux imaginations, pour retentir dans les coeurs, ces convictions exigent un ensemble de pratiques habituelles. Le dogme appelle un culte. A cette condition seulement la religion sera complète, et la religion est indispensable à toute morale qui veut être pratiquée et vécue. Sans religion, point de morale efficace et vivante : or, il nous faut une morale pour mettre fin à l'anarchie des sentiments, comme il a fallu une classification des sciences pour mettre fin à l'anarchie des esprits
CHARLES MAURRAS, évoquant et reprenant Auguste Comte

Nous dépendons de nos prédécesseurs. Ce qui pense en nous, avant nous, c'est le langage humain, qui est, non notre oeuvre personnelle, mais l'oeuvre de l'humanité, c'est aussi la raison humaine, qui nous a précédés, qui nous entoure et nous devance; c'est la civilisation humaine, dans laquelle un apport personnel, si puissant qu'il soit, n'est jamais qu'une molécule d'une énergie infime dans la goutte d'eau ajoutée par nos contemporains au courant de ce vaste fleuve.
CHARLES MAURRAS, évoquant et reprenant Auguste Comte


Il est indigne des grands coeurs de répandre le trouble qu'ils ressentent.
CLOTILDE DE VAUX, proche d'Auguste Comte




GUSTAVE FLAUBERT



il m'est doux de songer que je servirai un jour à faire croître des tulipes.
GUSTAVE FLAUBERT

Quans la peuple ne croira plus à l'Immaculée conception, il croira aux tables tournantes.
GUSTAVE FLAUBERT

Paganisme, christianisme, muflisme, telles sont les trois grandes évolutions de l'humanité. Il est désagréable de se trouver dans la dernière.
GUSTAVE FLAUBERT

Tout le rêve de la démocratie est d'élever le prolétaire au niveau de bêtise du bourgeois. Le rêve est en partie accompli.
GUSTAVE FLAUBERT

Quand tout le monde pourra lire le "Petit Journal" et le "Figaro", on ne lira pas autre chose, puisque le bourgeois, le monsieur riche ne lit rien de plus. La presse est une école d'abrutissement, parce qu'elle dispense de penser. Le premier remède serait d'en finir avec le suffrage universel, la honte de l'esprit humain.
GUSTAVE FLAUBERT

On ne risque de corrompre personne quand on aspire à la grandeur.
GUSTAVE FLAUBERT

Oui, la bêtise consiste à vouloir conclure. Cette rage est une des manies les plus funestes et les plus stériles qui appartiennent à l'humanité...
Nous sommes un fil et nous voulons voir la trame... Contentons-nous du tableau, c'est aussi bon...
Nous voulons escalader le ciel : eh bien, élargissons d'abord notre esprit et notre coeur.
GUSTAVE FLAUBERT


Voilà la vraie immoralité : l'ignorance et la bêtise; le diable n'est pas autre chose. Il se nomme Légion.
GUSTAVE FLAUBERT

On ne se rencontre qu'en se heurtant, et chacun, portant dans ses mains ses entrailles déchirées, accuse l'autre qui ramasse les siennes.
GUSTAVE FLAUBERT

Il faut, si l'on veut vivre, renoncer à avoir une idée nette de quoi que ce soit. L'humanité est "ainsi", il ne s'agit pas de la changer, mais de la connaître.
GUSTAVE FLAUBERT

il y a tant de gens dont la joie est si immonde et l'idéal si borné, que nous devons bénir notre malheur, s'il nous fait plus dignes.
GUSTAVE FLAUBERT

Quelle nécropole que le coeur humain ! Pourquoi aller aux cimetières ?
Ouvrons nos souvenirs, que de tombeaux !
GUSTAVE FLAUBERT

Il faut écrire pour soi, avant tout. C'est la seule chance de faire beau.
GUSTAVE FLAUBERT

Les appétits matériels les plus furieux se formulent "insciemment" par des élans d'idéalisme, de même que les extravagances charnelles les plus immondes sont engendrées par le désir pur de l'impossible, l'aspiration éthérée de la souveraine joie.
GUSTAVE FLAUBERT

Le style est autant "sous" les mots que "dans" les mots. C'est autant l'âme que la chair d'une oeuvre.
GUSTAVE FLAUBERT

Son "Ecrasons l'infâme" me fait l'effet d'un cri de croisade. Toute son intelligence était une machine de guerre.
GUSTAVE FLAUBERT, sur le mot de Voltaire


Les bourgeois ne se doutent guère que nous leur servons notre coeur.
La race des gladiateurs n'est pas morte, tout artiste en est un.
Il amuse le public avec ses agonies.
GUSTAVE FLAUBERT

C'est de mes principes qu'il ne faut pas "s'écrire".
Un romancier, selon moi, n'a pas le droit de dire son avis sur les choses de ce monde. Il doit, dans sa vocation, imiter Dieu dans la sienne, c'est-à-dire faire et se taire...
L'auteur dans son oeuvre doit être comme Dieu dans l'univers, présent partout et visible nulle part; invisible et tout-puissant; qu'on le sente partout, mais qu'on ne le voie pas.
L'art étant une seconde nature, le créateur de cette nature là doit agir par des procédés analogues...
GUSTAVE FLAUBERT

La grande moralité de ce règne-ci sera de prouver que le suffrage universel est aussi bête que le droit divin.
GUSTAVE FLAUBERT

Le dénigrement de ceux que nous aimons, toujours nous en détache quelque peu. Il ne faut pas toucher aux idoles : la dorure en reste aux mains.
GUSTAVE FLAUBERT

Chaque notaire porte en soi les débris d'un poète.
GUSTAVE FLAUBERT

Rien n'est humiliant comme de voir les sots réussir dans les entreprises où l'on échoue.
GUSTAVE FLAUBERT

Les passions s'étiolent quand on les dépayse.
GUSTAVE FLAUBERT

Il y a des hommes n'ayant pour mission parmi les autres que de servir d'intermédiaires; on les franchit comme des ponts, et l'on va plus loin.
GUSTAVE FLAUBERT


Il y a un moment, dans les séparations, où la personne aimée n'est déjà plus avec nous.
GUSTAVE FLAUBERT

Si l'individu ne peut rien savoir, pourquoi tous les individus en sauraientils davantage ? Une erreur, fût-elle vieille de cent mille ans, par cela même qu'elle est vieille ne constitue pas la vérité ! La foule invariablement suit la routine...
Reste la morale. C'est faire descendre Dieu au niveau de l'utile, comme si nos besoins étaient la mesure de l'Absolu !
GUSTAVE FLAUBERT

Le néo-catholicisme d'une part et le socialisme de l'autre ont abêti la France. Tout se meut entre l'Immaculée Conception et les gamelles ouvrières.
GUSTAVE FLAUBERT

Le rêve du socialisme, n'est-ce pas de pouvoir faire asseoir l'humanité monstrueuse d'obésité, dans une niche toute peinte de jaune comme dans les gares de chemins de fer, et qu'elle soit là à se dandiner sur son siège, ivre, béate, les yeux clos, digérant son déjeuner, attendant le dîner en faisant sous elle.
GUSTAVE FLAUBERT

Je suis convaincu que nous entrons dans un monde hideux où les gens comme nous n'aurons plus leur raison d'être. On sera utilitaire et militaire, économe, petit, pauvre, abject.
GUSTAVE FLAUBERT

Quand on ne regarde la vérité que de profil ou de trois quarts, on la voit toujours mal. Il y a peu de gens qui savent la contempler de face.
GUSTAVE FLAUBERT

Il ne faut pas toujours croire que le sentiment soit tout. Dans les arts, il n'est rien sans la forme.
GUSTAVE FLAUBERT


Pour qui voit les choses avec quelque attention, on "retrouve" encore bien plus qu'on ne trouve..
GUSTAVE FLAUBERT

Pour établir quelque chose de durable, il faut une base fixe; l'avenir nous tourmente et le passé nous retient. Voilà pourquoi le présent nous échappe.
GUSTAVE FLAUBERT

La bêtise est quelque chose d'inébranlable, rien ne l'attaque sans se briser contre elle; elle est de la nature du granit, dure et résistante...
Nous ne souffrons que d'une chose : la bêtise. Mais elle est formidable et universelle.
GUSTAVE FLAUBERT

L'idéal de l'Etat, selon les socialistes, n'est-il pas une espèce de vaste monstre absorbant en lui toute action individuelle, toute personnalité, toute pensée et qui dirigera tout, fera tout ? Une tyrannie sacerdotale est au fond de ces coeurs étroits..
GUSTAVE FLAUBERT

On n'écrit pas avec son coeur, mais avec sa tête.
GUSTAVE FLAUBERT

Le génie, c'est Dieu qui le donne, mais le talent nous regarde.
GUSTAVE FLAUBERT

A mesure que l'humanité se perfectionne, l'homme se dégrade; quand tout ne sera plus qu'une combinaison économique d'intérêts bien contre-balancés, à quoi servira la vertu ? Quand la nature sera tellement esclave qu'elle aura perdu ses formes originales, où sera la plastique.
GUSTAVE FLAUBERT

La fraternité est une des plus belles inventions de l'hypocrisie sociale.
On crie contre les Jésuites. O candeur ! nous en sommes tous.
GUSTAVE FLAUBERT


J'aime les gens tranchants et énergumènes, on ne fait rien de grand sans le fanatisme... Le fanatisme est la foi, la foi même, la foi ardente, celle qui fait des oeuvres et agit...
GUSTAVE FLAUBERT

Nous sommes tous enfoncés au même niveau, dans une médiocrité commune.
L'égalité sociale a passé dans l'esprit, on fait des livres pour tout le monde, de l'art pour tout le monde, de la science pour tout le monde, comme on construit des chemins de fer et des chauffoirs publics.
L'humanité a la rage de l'abaissement moral, et je lui en veux de ce que je fais partie d'elle.
GUSTAVE FLAUBERT

Tout ce qu'on invente est vrai... Et puis, arrivé à un certain endroit, on ne se trompe plus quant à tout ce qui est de l'âme; ma pauvre "Bovary", sans doute, souffre et pleure dans vingt villages de France à la fois, à cette heure même.
GUSTAVE FLAUBERT

On s'étonne des mystiques, mais le secret est là : leur amour, à la manière des torrents, n'avait qu'un seul lit, étroit, profond, en pente, et c'est pour cela qu'il emportait tout.
GUSTAVE FLAUBERT

La "personnalité sentimentale" sera ce qui plus tard fera passer pour puérile et un peu niaise une bonne partie de la littérature contemporaine.
Que de sentiment, que de sentiments ! que de tendresses, que de larmes !
Il n'y aura jamais eu de si braves gens. Il faut avoir avant tout du sang dans les phrases et non de la lymphe...
La fable des deux pigeons m'a toujours plus ému que tout Lamartine, et ce "n'est pas le sujet"; mais si La Fontaine avait dépensé d'abord sa faculté aimante dans l'exposition de ses sentiments personnels, lui en serait-il resté suffisamment pour peindre l'amitié des deux oiseaux ? Prenons garde de dépenser en petite monnaie nos pièces d'or.
GUSTAVE FLAUBERT


Quand on ne peut pas entraîner la société derrière soi, on se met à la remorque comme les chevaux du roulier lorsqu'il s'agit de descendre une côte : alors la machine en mouvement vous emporte, c'est un moyen d'avancer.
On est servi par les passions du jour et par la sympathie des envieux.
C'est là le secret des grands succès et des petits aussi.
GUSTAVE FLAUBERT

Le malheur de la vie se passe à dire : "il est trop tôt", puis : "il est trop tard".
GUSTAVE FLAUBERT

Je porte une haine aigüe et perpétuelle a quiconque taille un arbre pour l'embellir, châtre un cheval pour l'affaiblir, à tous ceux qui coupent les oreilles ou la queue des chiens, à tous ceux qui font des paons avec des ifs, des sphères et des pyramides avec du buis; à tous ceux qui restaurent, badigeonnent, corrigent, aux éditeurs d'expurgata, aux chastes voileurs de nudités profanes, aux arrangeurs d'abrégés et de raccourcis; à tous ceux qui rasent quoi que ce soit pour lui mettre une perruque, et qui, féroces dans leur pédantisme, impitoyables dans leur ineptie, s'en vont amputant la nature, ce bel art du bon Dieu, et crachant sur l'art, cette autre nature que l'homme porte en lui...
GUSTAVE FLAUBERT

Je parie que, dans cinquante ans seulement, les mots : "Problème social, moralisation des masses, progrès, démocratie" seront passés à l'état de "rengaine" et apparaîtront aussi grotesques que ceux de : "sensibilité, nature, préjugés et doux liens du coeur", si fort à la mode à la fin du dix-huitième siècle.
GUSTAVE FLAUBERT



DICTIONNAIRE DES IDEES RECUES



Il y a à parier que toute idée publique, toute convention reçue, est une sottise, car elle a convenu au plus grand nombre.
FLAUBERT, citant Chamfort


. Actrices - La perte des fils de famille. Avalent des millions, finissent à l'hôpital. . Agriculture - Manque de bras. . Albion - Toujours précédé de "perfide". . Allemands - Ce n'est pas étonnant qu'ils nous aient battus, nous n'étions pas prêts ! . Ambition - Toujours précédé de "folle", quand elle n'est pas "noble". . Anglais - Tous riches. . Antéchrist - Voltaire. . Architectes - Tous imbéciles. Oubient toujours l'escalier des maisons. . Argent - Cause de tout le mal. . Artistes - Gagnent des sommes folles, mais les jettent par les fenêtres. . Badigeon - Dans les églises. Tonner contre. . Banquet - La plus franche cordialité ne cesse d'y régner. . Banquiers - Tous riches. . Basilique - Est toujours imposante. . Bayadères - Toutes les femmes de l'Orient sont des bayadères. . Bibliothèque - Toujours en avoir une chez soi, principalement quand on habite la campagne. . Bouchers - Sont terribles en temps de révolution. . Braconniers - Auteurs de tous les crimes commis dans les campagnes. . Bretons - Tous braves gens, mais entêtés. . Budget - Jamais en équilibre. . Cachet - Toujours suivi de "tout particulier". . Cachot - La paille y est toujours humide. Toujours "affreux", on n'en a pas encore rencontré de délicieux. . Cadeau - "Le cadeau n'est rien, c'est l'intention." . Calvitie - Toujours précoce. . Campagne - Les gens de la campagne meilleurs que ceux des villes; envier leur sort. A la campagne, tout est permis... . Carême - Au fond n'est qu'une mesure hygiénique. . Catholicisme - Son influence sur les arts. . Cavalerie - Plus noble que l'infanterie. . Cavernes - Habitation ordinaire des voleurs. . Célibataires - Se préparent une triste vieillesse. . Cercle - On doit toujours faire partie d'un cercle. . Certificat - Est toujours favorable. . Chaleur - Toujours insupportable. . Chambre à coucher - Dans un vieux château : Henri IV y a toujours passé une nuit. . Chartreux - Passent leur temps à faire de la chartreuse, à creuser leur tombe et à dire : "Frère, il faut mourir." . Chat - Les chats sont traîtres. . Château fort - A toujours subi un siège sous Philippe-Auguste. . Chien - Spécialement créé pour sauver la vie de son maître. . Christianisme - A affranchi les esclaves. . Comètes - Rire des gens qui en avaient peur. . Concert - Passe-temps comme il faut. . Concession - N'en jamais faire, elles ont perdu Louis XVI. . Conjuré - Les conjurés ont toujours la manie de s'inscrire sur une liste. . Conversation - La politique et la religion doivent en être exclues. . Courtisane - Est un mal nécessaire. Sauvegarde de nos filles et de nos soeurs. Sont toujours des filles du peuple débauchées par des bourgeois riches. . Couteau - S'appelle "poignard" quand il a servi à commettre un crime. . Créole - Vit dans un hamac. . Critique - Toujours éminent. Est censé tout connaître, tout savoir, avoir tout lu, tout vu. . Croisades - Ont été bienfaisantes pour le commerce de Venise. . Cygne - Chante avant de mourir. . Cymbale - Toujours "retentissante". . Cyprès - Ne pousse que dans les cimetières. . Décoration - ( de la légion d'honneur ) Quand on l'obtient, toujours dire qu'on ne l'a pas demandée. . Défaite - S'essuie. . Déicide - S'indigner contre, bien que le crime ne soit pas fréquent. . Dessert - Les gens vertueux le méprisent. . Devoirs - Les exiger de la part des autres, s'en affranchir. . Dévouement - Se plaindre de ce que les autres en manquent. "Nous sommes bien inférieurs au chien, sous ce rapport !" . Dictionnaire - En rire. N'est fait que pour les ignorants. . Diderot - Toujours suivi de d'Alembert. . Dieu - Voltaire lui-même l'a dit : "Si Dieu n'existait pas, il faudrait l'inventer." . Diligences - Regretter le temps des diligences. . Diplomate - Un diplomate est toujours fin et pénétrant. . Docteur - Toujours précédé de "bon". . Doctrinaires - Les mépriser. . Domestiques - Tous voleurs. . Dommages et intérêts - En demander toujours. . Douleur - A toujours un résultat favorable. La véritable est toujours contenue. . Doute - Pire que la négation. . Echafaud - S'arranger quand on y monte pour prononcer quelques mots éloquents avant de mourir. . Echecs - ( Jeu des ) Tous les grands capitaines y étaient forts. . Ecole - ( Polytehnique ) Dire simplement "l'école" fait accroire qu'on y a été. . Egoïsme - Se plaindre de celui des autres et ne pas s'apercevoir du sien. . Enceinte - Fait bien dans les discours officiels : "Messieurs, dans cette enceinte..." . Enterrement - A propos du défunt : "Et dire que je dînais avec lui il y a huit jours !" . Enthousiasme - Toujours "impossible à décrire"; et pendant deux colonnes le journal ne parle que de ça. . Entracte - Toujours trop long. . Epée - Regretter le temps où l'on en portait. . Epicure - Le mépriser. . Epoque - ( la nôtre ) Tonner contre elle. L'appeler époque de transition, de décadence. . Escroc - Est toujours du grand monde. . Eté - Toujours exceptionnel; qu'il soit chaud ou froid, sec ou humide. . Etrusques - Tous les vases anciens sont étrusques. . Evidence - Vous aveugle, quand elle ne crève pas les yeux. . Exception - Dites qu'elle "confirme la règle"; ne vous risquez pas à expliquer comment. . Exercice - Toujours conseiller d'en faire. . Extirper - ce verbe ne s'emploie que pour les hérésies et les cors aux pieds. . Fabrique - Voisinage dangereux. . Facture - Toujours trop élevée. . Faubourgs - Terribles dans les révolutions. . Faute - "C'est pire qu'un crime, c'est une faute" (Talleyrand ). "Il ne vous reste plus de fautes à commettre" ( Thiers ). Ces deux phrases doivent être articulées avec profondeur. . Félicitations - Sont toujours "sincères", "empressées", "cordiales"... . Félicité - Est toujours "parfaite". . Femmes de chambre - Plus jolies que leurs maîtresses. Connaissent tous leurs secrets et les trahissent. Toujours déshonorées par le fils de la maison. . Féodalité - N'en avoir aucune idée précise, mais tonner contre. . Ferme - Est toujours suivi de "comme un roc". Être ferme dans ses principes. . Fermé - Toujours précédé de "hermétiquement". . Feu - Le feu purifie tout. . Fondement - Toutes les nouvelles en manquent. . Forçats - Ont toujours une figure patibulaire. . Force - Toujours "herculéenne". . Francs-Tireurs - Plus terribles que l'ennemi. . Froid - Plus sain que la chaleur. . Fusiller - Plus noble que guillotiner. Joie de l'individu à qui on accorde cette faveur. . Gaieté - Toujours accompagné de "folle". . Gamin - Toujours suivi "de Paris". . Giberne - Etui pour bâton de maréchal de France. . Gloire - N'est qu'un peu de fumée. . Gothique - Style d'architecture portant plus à la religion que les autres. . Grenier - On y est bien à vingt ans. . Gymnastique - On ne saurait trop en faire. . Habitude - Il faut toujours ajouter : "est une seconde nature". Avec de l'habitude on peut jouer du violon comme Paganini. . Hachisch - Ne pas confondre avec "hachis" qui se fait avec de la viande, et qui ne provoque aucune extase voluptueuse. . Hébreu - Est hébreu tout ce qu'on ne comprend pas. . Hérode - Être vieux comme Hérode. . Hiatus - Ne pas le tolérer. . Hiver - Toujours exceptionnel. Est plus sain que les autres saisons. . Momère - Célèbre par sa façon de rire : un rire homérique. . Homo - "Ecce homo !" en voyant entrer l'individu qu'on attend. . Hostilité - Les hostilités sont comme les huîtres, on les ouvre. "Les hostilités sont ouvertes !" il semble qu'il n'y a plus qu'à se mettre à table. . Hussard - Toujours précédé de "gentil" ou de "fringant". Il plaît aux dames. . Hypothèse - Souvent "dangereuse", toujours "hardie". . Idéal - Tout à fait inutile. . Illusions - Affecter d'en avoir eu beaucoup; se plaindre de ce qu'on les a perdues. . Imagination - Toujours vive. S'en défier. La dénigrer chez les autres. . Immoralité - Ce mot bien prononcé rehausse celui qui l'emploie. . Impératrices - Toutes belles. . Impie - Tonner contre. . Imprimerie - Découverte merveilleuse. A fait plus de mal que de bien. . Incapacité - Est toujours "notoire". . Injure - Doit toujours se laver dans du sang. Injure mortelle. . Innovation - Toujours dangereuse. . Inscription - Toujours cunéiforme. . Instinct - Supplée à l'intelligence. . Intégrité - Appartient surtout à la magistrature. . Intrigue - Seule manière de parvenir. Mène à tout. . Inventeurs - Meurent tous à l'hôpital. Un autre profite de leur découverte, ce n'est pas juste. . Italiens - Tous musiciens, traîtres. . Ivresse - Toujours précédé de "folle". . Jalousie - Toujours suivi de "effrénée". Passion terrible. . Jeune homme - Toujours farceur. Il doit l'être. S'étonner quand il ne l'est pas. . Journaux - Ne pouvoir s'en passer, mais tonner contre. . Justice - Ne jamais s'en inquiéter. . Lac - Avoir une femme près de soi, quand on se promène dessus. . Laconisme - Langue qu'on ne parle plus. . Lion - Plus généreux que le tigre. . Lumière - Toujours dire "Fiat lux !" quand on allume une bougie. . Lynx - Animal célèbre par son oeil. . Macadam - A supprimé les révolutions : plus moyen de faire des barricades. . Manteau - Toujours "couleur de muraille", pour les équipées galantes. . Matérialisme - Prononcer ce mot avec horreur en appuyant sur chaque syllabe. . Martyrs - Tous les premiers chrétiens l'ont été. . Maxime - Une maxime n'est jamais neuve, mais elle est toujours consolante. . Médecine - S'en moquer quand on se porte bien. . Mémoire - Se plaindre de la sienne, et même se vanter de ne pas en avoir.
Mais rugir si on vous dit que vous n'avez pas de jugement. . Ministre - Dernier terme de la gloire humaine. . Minuit - Limite du labeur et des plaisirs honnêtes. Tout ce que l'on fait au-delà est immoral. . Missionnaires - Sont tous mangés ou crucifiés. . Musique - Fait penser à un tas de choses - Adoucit les moeurs.
Ex. "La Marseillaise". . Navigateur - Toujours "hardi". . Nerveux - Se dit chaque fois qu'on ne comprend rien à une maladie, cette explication satisfait l'auditeur. . Noblesse - La mépriser et l'envier. . Oasis - Auberge dans le désert. . Obus - Servent à faire des pendules et des encriers. . Oméga - Deuxième lettre de l'alphabet grec, puisqu'on dit toujours l'alpha et l'oméga. . Oraison - Tout discours de Bossuet. . Orientaliste - Homme qui a beaucoup voyagé. . Original - On doit appeler "original" celui qui refuse de plier devant les banalités et les idées reçues. Rire de lui prouve toujours une grande supériorité d'esprit. Manière de passer pour... . Ouvrier - Toujours honnête, quand il ne fait pas d'émeute. . Pauvres - S'en occuper tient lieu de toutes les vertus. . Penser - Pénible. . Pitié - Toujours s'en garder. . Place - Toujours en demander une. . Pourpre - Mot plus noble que rouge. . Pratique - Supérieure à la théorie. . Principes - Toujours indiscutables; on ne peut en dire ni la nature ni le nombre, n'importe, sont sacrés. . Professeur - Toujours savant. . Progrès - Toujours malentendu et trop hâtif. . Propriété - Une des bases de la société. Plus sacrée que la religion. . Providence - Que deviendrions-nous sans elle ? . Radeau - Toujours suivi ( de ) "de la Méduse". . Reconnaissance - N'a pas besoin d'être exprimée. . Régence - On ne faisait que souper. . Religion ( La ) - Fait partie des bases de la société. "La religion de nos pères" doit se dire avec onction. . Rime - Ne s'accorde jamais avec la raison. . Sacerdoce - L'art est un sacerdoce, la médecine aussi, le journalisme, le notariat - et généralement toutes les professions. . Sacrilège - C'est un sacrilège d'abattre un bel arbre. . Salutations - Toujours "empressées". . Sbire - S'emploie par les républicains farouches pour désigner les agents de police. . Stoïcisme - Est impossible. . Stuart ( Marie ) - S'apitoyer sur son sort. . Temps - Eternel sujet de conversation. Toujours s'en plaindre. . Terre - Dire les "quatre coins de la terre" puisqu'elle est ronde. . Traitement - Toujours "facile à suivre, même en voyage". . Ukase - Chaque fois que paraît un décret trop autoritaire, il faut l'appeler un "ukase"; ça vexe le gouvernement. . Université - "Alma mater." . Valse - S'indigner contre. . Veillées - Celles de la campagne sont morales. . Vieillard - A propos d'une inondation, d'un orage, etc., les vieillards du pays ne se rappellent jamais en avoir vu un semblable. . Visage - "Miroir de l'âme", alors il y a des gens qui ont l'âme bien laide. . Voyageur - Toujours "intrépide". Toujours précédé de "Messieurs", en style de chemin de fer. "Messieurs les voyageurs." . Yvetot - Voir Yvetot et mourir.


GUSTAVE FLAUBERT, Le dictionnaire des idées reçues, fin


Une demande pécuniaire, de toutes les bourrasques qui tombent sur l'amour, est la plus froide et la plus déracinante...
Le charme de la nouveauté, peu à peu tombant comme un vêtement, laissait voir à nu l'éternelle monotonie de la passion, qui a toujours les mêmes formes et le même langage...
Il ne faut pas toucher aux idoles : la dorure en reste aux mains...
Le plus médiocre libertin a rêvé des sultanes; chaque notaire porte en soi les débris d'un poète.
GUSTAVE FLAUBERT, Madame Bovary


Il tournait dans son désir, comme un prisonnier dans son cachot...
Les passions s'étiolent quand on les dépayse...
Il reste toujours dans la conscience quelque chose des sophismes qu'on y a versés; elle en garde l'arrière-goût, comme d'une liqueur mauvaise...
Il y a des hommes n'ayant pour mission parmi les autres que de servir d'intermédiaires; on les franchit comme des ponts, et l'on va plus loin...
La plupart des hommes qui étaient là avaient servi, au moins, quatre gouvernements; et ils auraient vendu la France ou le genre humain, pour garantir leur fortune, s'épargner un malaise, un embarras, ou même par simple bassesse, adoration instinctive de la force...
Les coeurs des femmes sont comme ces petits meubles à secret, pleins de tiroirs emboîtés les uns dans les autres; on se donne du mal, on se casse les ongles, et on trouve au fond quelque fleur desséchée, des brins de poussière - ou le vide !
GUSTAVE FLAUBERT, L'éducation sentimentale


Pour que la matière ait tant de pouvoir, il faut qu'elle contienne un esprit. L'âme des dieux est attachée à ses images...

La variété des causes est la volonté de Dieu.
GUSTAVE FLAUBERT, La tentation de saint Antoine



Les ouvrages dont les titres étaient pour eux inintelligibles leur semblaient contenir un mystère...
Et n'ayant plus d'idées, ils eurent plus de souffrance...
Si l'individu ne peut rien savoir, pourquoi tous les individus en sauraientils davantage ?...
La foule invariablement suit la routine. C'est au contraire, le petit nombre qui mène le progrès...
Le spiritisme pose en dogme l'amélioration fatale de notre espèce.
La terre deviendra un jour le ciel, et c'est pourquoi cette doctrine charmait l'instituteur.
Sans être catholique, elle se réclame de saint Augustin et de saint Louis.
Allan-Kardec publie même des fragments dictés par eux et qui sont au niveau des opinions contemporaines. Elle est pratique, bienfaisante, et nous révèle, comme le télescope, les mondes supérieurs.
Les esprits, après la mort et dans l'extase, y sont transportés. Mais quelquefois ils descendent sur notre globe, où ils font craquer les meubles.
Parfait, dit Bouvard; mais le monde supprimé, les preuves manqueront pour l'existence de Dieu.
GUSTAVE FLAUBERT, Bouvard et Pécuchet

La femme, cette fleur..., a une mission importante à remplir sur la terre.
Elle est destinée à être la compagne de l'homme.
GUSTAVE FLAUBERT, Le sottisier de Bouvard et Pécuchet




ANDRE FROSSARD



Heureux pour qui la pensée ne s'achève pas dans la pensée mais dans l'adoration.
ANDRE FROSSARD

N'oublions pas que la Foi n'est pas un système ni une idéologie, mais une personne.
ANDRE FROSSARD

L'homme est un animal qui se nourrit de transcendance, qui prend son inspiration et sa respiration dans l'infini.
ANDRE FROSSARD

C'est un aviateur qui est entré à la Trappe après avoir déposé sa bombe; ceux qui la lui avaient fournie ne l'ont même pas accompagné jusqu'à la porte du couvent.
ANDRE FROSSARD, sur Hiroshima et Nagasaki



36 PREUVES DE L'EXISTENCE DU DIABLE



Ils ( certains chrétiens ) sont persuadés que le meilleur moyen de combattre une erreur est encore de la partager.

L'Histoire a un sens et il est interdit à quiconque de s'en écarter.
Je ne vous donnerai pas le chiffre des victimes entassées au pied de ce BAAL des temps modernes pour hâter l'avénement des lendemains qui chanteront, s'ils leur reste de la voix...

Vos théologiens continuèrent à s'adonner aux délices de la recherche pure, qui consiste à ne rien trouver après avoir tout remis en question.

S'il faut absolument vous perdre en quelqu'un, que ce soit en vous-même; la psychanalyse est là pour vous y aider.

Vous parlez... tout le temps de vos problèmes de communication... mais ils vont être résolus de la manière la plus radicale qui soit, en ce sens que vous n'aurez bientôt plus rien à communiquer.

Vous vous possédez vous-même en faisant de votre propre personne le sujet permanent de votre considération...

A l'intérieur du parti lui-même, les tendances se haissent avec persévérance et minutie. Elles s'enverraient volontiers à l'échafaud... si les caractères étaient à la hauteur des sentiments.

Depuis que vous ne craignez plus l'enfer, vous avez peur de tout, et surtout de vous-mêmes. Vous n'avez pas tort.

Un Dreyfus innocent n'intéresserait personne.
Vos moralistes ne prendraient fait et cause pour un nouveau Dreyfus que s'il avait dûment trahi, de manière évidente et comme par-devant notaire.


Les coupables seuls étant innocents, il s'ensuit que les innocents sont coupables, et d'autant plus gravement qu'ils sont plus désarmés.

La drogue est un bon moyen de fuir le monde par la tangente, sans aller nulle part.

La religion est l'opium du peuple, disait Karl Marx.
C'était un autre temps, la proposition est à renverser : l'opium est devenu la religion du peuple.

Consommer pour produire, et non produire pour consommer, telle est la loi que je vous impose.

Dans la philosophie que je vous ai enseignée, la connaissance précède logiquement l'amour, et comme l'on n'en finit pas de connaître, on a tout le temps d'aimer; rien ne presse.

Une société qui est à elle-même sa propre fin est une société virtuellement totalitaire.

Dans votre monde rebâti à l'endroit les premiers seront les premiers, et que les derniers ne se fassent pas d'illusions, ils resteront les derniers.

Il ne vous viendrait même plus à l'esprit d'attendre des étages supérieurs de la société autre chose que des ordres, assortis d'un juste dédain.

Un mot de votre Jean-Paul Sartre rend parfaitement compte de l'état présent de votre spiritualité : "L'enfer, c'est les autres."

Si Satan était effectivement le prince de ce monde, comme le dit l'Ecriture, que se passerait-il ?
Il se passerait ce qui se passe; Est-il meilleure preuve ?

Je commence à m'ennuyer sur cette planète, où vous tombez avant que je ne vous pousse.


ANDRE FROSSARD, 36 preuves de l'existence du diable, fin




1993 Thesaurus - PAUL CLAUDEL