1998 Vie des Diacres 46
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L'ordination sacrée confère au diacre, à travers des dons sacramentels spécifiques, une participation spéciale à la consécration et à la mission de Celui qui s'est fait serviteur du Père par la rédemption de l'homme ; elle l'introduit, d'une façon nouvelle et particulière, dans le mystère du Christ, de l'Eglise et du salut de tous les hommes. C'est pourquoi la vie spirituelle du diacre doit approfondir et développer cette triple relation, selon les principes d'une spiritualité communautaire par laquelle on s'attache à témoigner que l'Eglise est, par nature, une communion.
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La relation au Christ, qui a pris la condition de serviteur par amour pour le Père et pour ses frères les hommes, est la première et la plus fondamentale des relations. (187) En vertu de son ordination, le diacre est véritablement appelé à agir en conformité au Christ Serviteur.
(187) Cf. Jean-Paul II, Allocution (16 mars 1985) : Insegnamenti, VIII, (1985)(1985), p. 649 ; Exhort. apost. post-synodale Pastores dabo vobis (25 mars 1992); PDV 21: AAS (1992), pp. 661 ; 688.
Le Fils éternel de Dieu " s'est dépouillé lui-même en prenant la condition de serviteur " (Ph 2,7) et Il a vécu cette condition dans l'obéissance au Père (cf. Jn 4,34) et dans l'humble service de ses frères (cf. Jn 13,4-15). En tant que serviteur du Père dans l'oeuvre de rédemption des hommes, le Christ devient le chemin, la vérité et la vie de chaque diacre dans l'Eglise.
Toute l'activité ministérielle n'aura de sens que si elle contribue à mieux faire connaître, aimer et suivre le Christ dans sa diaconie. Il est donc nécessaire que les diacres s'emploient à conformer leur vie à Jésus-Christ qui, par son obéissance au Père " jusqu'à la mort, et la mort sur la croix " (Ph 2,8), a racheté l'humanité.
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L'Eglise est inséparablement associée à cette relation fondamentale. (188) Le Christ l'aime, il la purifie, il la nourrit et il prend soin d'elle (cf. Ep 5,25-29). Le diacre ne pourrait vivre fidèlement sa configuration au Christ sans partager son amour de l'Eglise : " Pour elle, il ne peut que nourrir un profond attachement, étant donné sa mission et son institution divine ". (189)
(188) Cf. Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Pastores dabo vobis PDV 16 : l.c., p. 681.
(189) Jean-Paul II, Catéchèse lors de l'audience générale (20 octobre 1993) : Insegnamenti XVI, (1993), p. 1055.
Le rite de l'ordination met en relief le lien qui s'établit entre l'évêque et le diacre : seul l'évêque impose les mains à celui qui a été choisi, en appelant sur lui l'effusion de l'Esprit Saint. Chaque diacre trouve donc la référence de son ministère dans la communion hiérarchique avec son évêque. (190)
(190) Cf. Paul VI, Lettre apost. Sacrum Diaconatus Ordinem, V, 23 : l.c., p. 702.
L'ordination diaconale souligne encore un autre aspect ecclésial: le diacre reçoit une participation ministérielle à la diaconie du Christ, par laquelle le Peuple de Dieu, guidé par le Successeur de Pierre et par les autres évêques en communion avec lui, avec la coopération des prêtres, poursuit l'oeuvre de la Rédemption des hommes. Le diacre est donc appelé à nourrir son esprit et son ministère par un amour ardent et actif de l'Eglise, et par un désir sincère d'être en communion avec le Saint-Père, avec son évêque et avec les prêtres de son diocèse.
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Il ne faut pas perdre de vue enfin que la diaconie du Christ est destinée à l'homme, à tout homme (191) qui dans son esprit et dans son corps porte la marque du péché, mais qui est appelé à la communion avec Dieu. " Car Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais ait la vie éternelle " (Jn 3,16). Le Christ s'est fait le serviteur de ce dessein d'amour en prenant notre chair ; et l'Eglise est dans l'histoire l'instrument et le signe de cette diaconie.
(191) Cf. Jean-Paul II, Encycl. Redemptor hominis (4 mars 1979), RH 13-17 : AAS 71 (1979), pp. 282-300.
Ainsi, en vertu du sacrement, le diacre est destiné à servir ses frères, qui ont besoin du salut. Et si, dans le Christ Serviteur, dans ses paroles et ses actes, l'homme peut découvrir en plénitude l'amour déployé par le Père pour le sauver, il doit pouvoir trouver aussi cette charité dans la vie du diacre. La tâche essentielle de la vie spirituelle du diacre sera d'imiter toujours davantage l'amour du Christ pour l'homme, qui dépasse les limites de toute idéologie humaine.
A ceux qui désirent être admis à la formation diaconale, on demande " un esprit naturellement enclin à servir la hiérarchie sacrée et la communauté chrétienne " : (192) il ne faut pas l'entendre " au sens d'une simple spontanéité des dispositions naturelles (...) Il s'agit d'une propension de la nature animée par la grâce, avec un esprit de service qui conforme le comportement humain à celui du Christ. Le sacrement du diaconat développe cette propension : il rend le sujet plus intimement participant à l'esprit de service du Christ, il pénètre sa volonté par une grâce spéciale, il fait en sorte que le diacre, dans tout son comportement, soit animé d'une propension nouvelle au service de ses frères ". (193)
(192) Paul VI, Lettre apost. Sacrum Diaconatus Ordinem, II, 8: l.c., p. 700.
(193) Jean-Paul II, Catéchèse lors de l'audience générale (20 octobre 1993), n. : Insegnamenti, XVI, (1993), p. 1054.
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Les relations précédemment évoquées font apparaître la primauté de la vie spirituelle. Le diacre doit donc se rappeler que vivre la diaconie du Seigneur dépasse toute capacité naturelle ; il lui faut donc correspondre, en pleine conscience et en toute liberté, à cet appel du Christ : " Demeurez en moi, comme moi en vous. De même que le sarment ne peut de lui-même porter du fruit s'il ne demeure pas sur la vigne, ainsi vous non plus, si vous ne demeurez pas en moi " (Jn 15,4).
Suivre le Christ dans le ministère diaconal est une aventure fascinante mais ardue : elle est remplie de satisfactions et de fruits, mais parfois, elle fait aussi traverser les difficultés et les peines des vrais disciples du Seigneur Jésus Christ. Pour réussir, le diacre a besoin de demeurer avec le Christ, pour que ce soit Lui qui porte la responsabilité de son ministère ; il a besoin de réserver la première place à la vie spirituelle, de vivre généreusement la diaconie, de concilier son ministère et ses obligations familiales ù s'il est marié ù ou professionnelles, de façon à adhèrer toujours davantage à la personne et à la mission du Christ Serviteur.
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L'accomplissement fidèle et inlassable du ministère, dans une unité de vie raisonnée et sans cesse à rechercher, est sans aucun doute la source première du progrès dans la vie spirituelle. (194) Accompli de manière exemplaire, loin de s'opposer à la vie spirituelle, le ministère contribue au développement des vertus théologales, il accroît le propos de se donner au service de ses frères et il favorise la communion hiérarchique. Avec les adaptations nécessaires, ce qui est dit des prêtres vaut aussi pour les diacres : " Ils sont ordonnés à la perfection de la vie par les actions sacrées quotidiennes elles-mêmes, comme aussi par leur ministère tout entier (...). Quant à la sainteté, (...) elle contribue beaucoup à rendre fructueux le ministère qu'ils accomplissent ". (195)
(194) Cf. Conc. Oecum. Vat. II, Décr. Presbyterorum Ordinis, PO 14-15 CIC 276nº 2.
(195) Conc. Oecum. Vat. II, Décr. Presbyterorum ordinis, PO 12
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Le diacre aura toujours présent à l'esprit l'exhortation de la liturgie d'ordination : " Recevez l'Evangile du Christ, que vous avez la mission d'annoncer. Soyez attentif à croire à la Parole que vous lirez, à enseigner ce que vous aurez cru, à vivre ce que vous aurez enseigné ". (196)
(196) Pontificale Romanum - De ordinatione Episcopi, presbyterorum et diaconorum, n. 210 : éd. cit., p. 125.
Pour proclamer la Parole de Dieu dignement et avec fruit, le diacre doit " par une lecture sacrée assidue et par une étude approfondie, s'attacher aux Ecritures, de peur qu'il ne devienne "un vain prédicateur de la Parole de Dieu au-dehors, lui qui ne l'écouterait pas au-dedans de lui", (197) alors qu'il doit faire part aux fidèles qui lui sont confiés, spécialement au cours de la sainte liturgie, des richesses sans mesure de la Parole divine ". (198)
(197) S. Augustin, Serm. 179, : PL 38, 966.
(198) Conc. Oecum. Vat. II, Const. dogm. Dei Verbum, DV 25 cf. Paul VI, Lettre apost. Sacrum Diaconatus Ordinem, VI, 26, : l.c., p. 703 ; CIC 276nº 2.
Sous la conduite de ceux qui dans l'Eglise sont les maîtres authentiques de la vérité divine et catholique, (199) il devra en outre approfondir cette Parole pour en éprouver l'attrait et la puissance salvifique (cf. Rm 1,16). Sa sainteté se fonde sur sa consécration et sa mission également en ce qui concerne la Parole: il prendra conscience d'en être le ministre. Comme membre de la hiérarchie, ses actes et ses déclarations engagent l'Eglise : il est donc essentiel pour sa charité pastorale qu'il vérifie l'authenticité de ce qu'il enseigne, sa communion effective et explicite avec le Souverain Pontife, avec l'ordre épiscopal et avec son évêque, non seulement en ce qui concerne le symbole de la foi, mais aussi l'enseignement du Magistère ordinaire et la discipline, dans l'esprit de la profession de foi qu'il prononce avant l'ordination et du serment de fidélité. (200) Car " la force et la puissance que recèle la Parole de Dieu sont si grandes qu'elles constituent, pour l'Eglise, son point d'appui et sa vigueur et, pour les enfants de l'Eglise, la force de leur foi, la nourriture de leur âme, la source pure et permanente de leur vie spirituelle ". (201) Plus le diacre fréquentera la Parole de Dieu, plus il aura envie de la communiquer à ses frères. Dans l'Ecriture, c'est Dieu qui parle à l'homme, (202) dans la prédication le ministre sacré favorise cette rencontre de salut. Il se consacrera donc avec un soin tout particulier à la prédication inlassable de la Parole, afin que les fidèles n'en soient pas privés à cause de l'ignorance ou de la paresse du ministre ; il sera intimement persuadé que l'exercice du ministère de la Parole ne se réduit pas à la prédication.
(199) Cf. Conc. Oecum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, LG 25.
(200) Cf. CIC 833 Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Professio fidei et iusiurandum fidelitatis in suscipiendo officio nomine Ecclesia exercendo : AAS 81 (1989), pp. 104-106 ; 1169.
(201) Conc. Oecum. Vat. II, Const. dogm. Dei Verbum, DV 21
(202) Cf. Conc. Oecum. Vat. II, Const. Sacrosanctum Concilium, SC 7
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De même, quand il baptise, quand il distribue le Corps et le Sang du Seigneur ou quand il sert dans la célébration des autres sacrements et des sacramentaux, le diacre réalise son identité dans la vie de l'Eglise : il est ministre du Corps du Christ, corps mystique et corps ecclésial ; il se rappellera que, vécues dans la foi et le respect, ces actions de l'Eglise contribuent à sa croissance spirituelle et à l'édification de la communauté chrétienne. (203)
(203) Cf. ibid
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Dans leur vie spirituelle, les diacres accorderont toute l'importance qu'ils méritent aux sacrements de la grâce, qui " ont pour fin de sanctifier les hommes, d'édifier le Corps du Christ, enfin de rendre culte à Dieu ". (204)
(204) Ibid., SC 59.
Ils participeront surtout, avec une foi particulière, à la célébration quotidienne du sacrifice eucharistique, (205) en exerçant si possible leur propre munus liturgique ; ils ne se lasseront pas d'adorer le Seigneur présent dans le Sacrement, (206) puisque l'Eucharistie, source et sommet de toute l'évangélisation, " contient tout le trésor spirituel de l'Eglise ". (207) Elle sera pour eux une véritable rencontre du Christ, qui, par amour de l'homme, s'est fait victime expiatoire, nourriture de vie éternelle, et ami compatissant à toute souffrance.
(205) Cf. CIC 276nº 2 ; Paul VI, Lettre apost. Sacrum Diaconatus Ordinem, VI, 26, : l.c., p. 703.
(206) Cf. Paul VI, Lettre apost. Sacrum Diaconatus Ordinem, VI, 26, : l.c., p. 703.
(207) Conc. Oecum. Vat. II, Décr. Presbyterorum Ordinis, PO 5.
Conscients de leur faiblesse et confiants dans la miséricorde divine, ils auront régulièrement recours au sacrement de la réconciliation : (208) le pécheur y rencontre le Christ rédempteur, il y reçoit le pardon de ses fautes et se trouve entraîné vers la plénitude de la charité.
(208) Cf. CIC 276nº 2 ; cf. Paul VI, Lettre apost. Sacrum Diaconatus Ordinem, VI, 26, : l.c., p. 703.
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Dans les engagements caritatifs que l'évêque lui aura confiés, le diacre se laissera toujours conduire par l'amour du Christ pour tous les hommes, et non par ses intérêts personnels ou par les idéologies qui contredisent l'universalité du salut ou nient la vocation transcendante de l'homme. Que le diacre se souvienne aussi que la diaconie de la charité conduit nécessairement à promouvoir la communion à l'intérieur de l'Eglise particulière. La charité est, en effet, l'âme de la communion ecclésiale. Le diacre s'investira pour favoriser la fraternité, la coopération avec les prêtres et la communion sincère avec l'évêque.
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Que les diacres sachent toujours, quels que soient le contexte et les circonstances, demeurer fidèles au précepte du Seigneur : " Veillez et priez sans cesse, pour pouvoir échapper à tout ce qui doit arriver et comparaître devant le Fils de l'homme " (Lc 21,36 cf. Ph 4,6-7)
La prière est ce dialogue personnel avec Dieu ou leur seront conférées la lumière et la force nécessaires pour suivre Jésus-Christ et pour servir leurs frères dans leurs diverses vicissitudes. Forts de cette certitude, que les diacres cherchent à se laisser modeler par les diverses formes de prière : la célébration de la Liturgie des Heures, selon les modalités établies par la conférence des Evêques, (209) caractérise toute leur vie de prière ; en tant que ministres, ils intercèdent pour toute l'Eglise. Cette prière se prolonge dans la lectio divina, l'oraison mentale assidue, la participation aux retraites spirituelles selon les dispositions du droit particulier. (210)
(209) Cf. CIC 276n 2-3.
(210) Cf. ibid., CIC 276nº 2, 4.
Les diacres auront également à coeur la vertu de pénitence et les autres moyens de sanctification, qui aident tant à rencontrer Dieu personnellement. (211)
(211) Cf. ibid., CIC 276nº 2, 5.
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Pour le diacre, participer au mystère du Christ Serviteur oriente nécessairement le coeur vers l'Eglise et vers celle qui en est la Mère très sainte. On ne peut en effet séparer le Christ de l'Eglise, qui est son Corps. La réalité de l'union avec la Tête suscitera un véritable amour pour le Corps. Et cet amour permettra au diacre de collaborer efficacement à la construction de l'Eglise, en se consacrant aux devoirs de son ministère, dans la fraternité et la communion hiérarchique avec son évêque et le presbytérium. Toute l'Eglise doit être dans le coeur du diacre : l'Eglise universelle, qui trouve en la personne du Pape, en tant que successeur de Pierre, le principe et le fondement perpétuel et visible de son unité ; (212) l'Eglise particulière, qui " adhérant à son pasteur et par lui rassemblée dans le Saint-Esprit grâce à l'Evangile et à l'Eucharistie (...) (rend) vraiment présente et agissante l'Eglise du Christ, une, sainte, catholique et apostolique ". (213)
(212) Cf. Conc. Oecum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, LG 23.
(213) Conc. Oecum. Vat. II, Décr. Christus Dominus, CD 11 CIC 369
L'amour du Christ et de l'Eglise est étroitement lié à celui pour la Vierge Marie, l'humble servante du Seigneur, qui, au titre unique et admirable de " mère ", a été l'associée généreuse de la diaconie de son divin Fils (cf. Jn 19,25-27). L'amour pour la Mère du Seigneur, fondé sur la foi, exprimé dans la prière quotidienne du chapelet, l'imitation de ses vertus et le fait de s'en remettre à elle avec confiance, donnera leur sens à des manifestations de vraie dévotion filiale. (214)
(214) Cf. CIC 276nº 2, 5 ; Paul VI, Lettre apost. Sacrum Diaconatus Ordinem, VI, 26, 4 : l.c., p. 703.
Chaque diacre aura les yeux tournés vers Marie, avec respect et dans une profonde affection ; car " la Vierge Mère a été parmi toutes les créatures celle qui aura le mieux vécu la pleine vérité de la vocation : personne n'a répondu avec autant d'amour à l'immense amour de Dieu ". (215) Cet amour particulier envers la Vierge servante du Seigneur, né de la Parole et totalement enraciné dans la Parole, deviendra une imitation de sa vie. Ce sera une façon d'introduire dans l'Eglise cette dimension mariale si proche de la vocation du diacre. (216)
(215) Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Pastores dabo vobis, PDV 36, ou le Pape cite la Propositio 5 des Pères synodaux : l.c., p. 718.
(216) Cf. Jean-Paul II, Allocution à la Curie romaine (22 déc. 1987) : AAS 80 (1988), pp. 1025-1034 ; Lettre apost. Mulieris dignitatem, (15 août 1988) MD 27 : AAS 80 (1988), p. 1718.
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Enfin, la direction spirituelle régulière sera pour le diacre d'une très grande utilité. L'expérience montre tous les bienfaits qui peuvent être retirés d'un dialogue sincère et humble avec un directeur sage, non seulement pour résoudre les doutes et les problèmes inévitables de la vie, mais pour réaliser le discernement nécessaire et pour parvenir à une meilleure connaissance de soi, afin de suivre enfin le Christ dans une fidélité grandissante.
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A la différence de ce qui est demandé pour le presbytérat, on peut admettre au diaconat permanent d'abord des hommes célibataires, mais aussi des hommes qui vivent dans le sacrement du mariage, ainsi que des veufs. (217)
(217) Cf. Conc. Oecum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, LG 29.
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L'Eglise reconnaît avec gratitude le magnifique don du célibat que Dieu accorde à certains de ses membres. Sous des formes variées, tant en Orient qu'en Occident, elle l'a lié au ministère ordonné, auquel il est toujours remarquablement approprié. (218) Elle sait bien que ce charisme, accepté et vécu par amour du Royaume des Cieux (cf. Mt 19,12), oriente toute la personne du diacre vers le Christ qui, dans la virginité, se consacra lui-même pour servir le Père et conduire les hommes à la plénitude du Royaume. Aimer Dieu et servir ses frères par ce choix de totalité, loin de s'opposer au développement personnel du diacre, le favorise, car la charité est la véritable perfection de tout homme. Or dans le célibat, l'amour se présente comme signe d'une consécration totale au Christ, dans un coeur sans partage, dans une plus libre consécration au service de Dieu et des hommes ; (219) ceci justement parce que le choix du célibat ne signifie pas le mépris du mariage, ni une fuite du monde, mais plutôt une façon privilégiée de servir les hommes et le monde.
(218) " His rationibus in mysteriis Christi Eiusque missione fundatis, cOelibatus... omnibus ad Ordinem sacrum promovendis lege impositum est " : Conc. Oecum. Vat. II, Décr. Presbyterorum ordinis, PO 16 cf. CIC 247 CIC 277 CIC 1037.
(219) Cf. CIC 277 ; Conc. Oecum. Vat. II, Décret sur la formation des prêtres Optatam totius, OT 10
Les hommes de notre temps, si souvent plongés dans l'éphémère, sont très sensibles au témoignage de ceux qui proclament l'éternité par leur propre vie. Les diacres ne se priveront pas de donner ce témoignage à leurs frères, par la fidélité à leur célibat, afin de les inciter à chercher les valeurs qui manifestent la vocation de l'homme à la transcendance. " Le célibat "en vue du Royaume" n'est pas seulement un signe eschatologique, mais il a aussi une grande signification sociale, dans la vie présente, pour le service du peuple de Dieu ". (220)
(220) Jean-Paul II, Lettre aux Prêtres pour le Jeudi Saint Novo incipiente (8 avril 1979), n. 8 : AAS 71 (1979), p. 408.
Pour mieux conserver durant toute leur vie le don qu'ils ont reçu de Dieu, pour le bien de l'Eglise entière, les diacres ne s'appuieront pas de manière excessive sur leurs propres forces, mais garderont toujours un esprit d'humble prudence et de vigilance, se rappelant que " l'esprit est prompt mais la chair est faible " (Mt 26,41). Ils seront aussi fidèles à la vie de prière et aux devoirs du ministère.
Envers les personnes dont la familiarité pourrait compromettre leur chasteté ou provoquer le scandale, ils se comporteront avec prudence. (221)
(221) Cf. CIC 277nº 2.
Enfin, ils seront conscients que la société pluraliste actuelle les oblige à un discernement attentif dans l'usage des médias.
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Le sacrement du mariage, qui sanctifie l'amour des conjoints et le rend signe efficace de l'amour par lequel le Christ se donne à l'Eglise (cf. Ep 5,25), est aussi un don de Dieu et doit nourrir la vie spirituelle du diacre marié. Puisque la vie conjugale et familiale, et le travail professionnel, réduisent inévitablement le temps que l'on peut consacrer au ministère, il faut un engagement particulier pour atteindre l'unité de vie nécessaire, y compris à travers la prière commune. Dans le mariage, l'amour prend la forme d'un don interpersonnel, d'une fidélité mutuelle, source de vie nouvelle, soutien dans les moments de joie et d'épreuves ; en un mot, l'amour se fait service. Vécu dans la foi, ce " service familial " est pour les autres fidèles un exemple d'amour dans le Christ, et le diacre marié doit le mettre à profit pour stimuler sa diaconie dans l'Eglise.
Le diacre marié doit percevoir particulièrement qu'il a la responsabilité d'offrir le témoignage évident de la sainteté du mariage et de la famille. Plus le diacre et son épouse grandiront dans l'amour mutuel, plus forte sera leur donation envers leurs enfants et plus significatif sera leur exemple pour la communauté chrétienne. " L'enrichissement et l'approfondissement de l'amour-sacrifice réciproque entre mari et femme est peut-être l'implication la plus significative que la femme du diacre puisse avoir dans le ministère public de son mari dans l'Eglise ". (222) Cet amour grandit grâce à la vertu de chasteté, qui fleurit toujours ù y compris à travers l'exercice de la paternité responsable ù dans l'apprentissage du respect pour le conjoint et dans la pratique d'une certaine continence. Cette vertu favorise une maturité de donation qui se traduit rapidement dans le ministère : elle permet d'échaper aux attitudes possessives, à l'idolâtrie de la réussite professionnelle et à l'incapacité d'organiser son temps ; elle favorise au contraire des relations personnelles authentiques, la délicatesse, la capacité à donner à chaque chose la place qui lui revient.
(222) Jean-Paul II, Allocution aux diacres permanents des U.S.A. à Detroit (19 septembre 1987), n. 5 : Insegnamenti, X, (1987)(1987), p. 658.
Des initiatives opportunes seront prises pour faire croître dans toute la famille le sens du ministère diaconal. La femme du diacre, qui a donné son consentement au choix de son mari, (223) devra être aidée et soutenue pour vivre son rôle avec joie et discrétion, pour pouvoir apprécier tout ce qui concerne l'Eglise, et en particulier les engagements confiés à son mari. Pour cette raison, il est bon qu'elle soit informée des activités de son mari, évitant cependant tout envahissement indu : de façon à établir et mettre en place un rapport équilibré et harmonieux entre la vie familiale, professionnelle et ecclésiale. Les enfants du diacre également, s'ils sont bien préparés, pourront apprécier le choix de leur père et s'engager avec un intérêt particulier dans l'apostolat et dans un témoignage de vie cohérent.
(223) Cf. CIC 1031nº 2.
En conclusion, la famille du diacre marié, comme d'ailleurs toute famille chrétienne, est invitée à prendre une part active et responsable à la mission de l'Eglise dans la situation du monde actuel. " Le diacre et sa femme doivent être un exemple de la fidélité et de l'indissolubilité du mariage chrétien, face au monde qui exprime son besoin de tels signes. Affrontant avec un esprit de foi les défis de la vie conjugale et les exigences de la vie quotidienne, ils renforcent la vie familiale, non seulement dans la communauté ecclésiale, mais aussi dans toute la société. Ils montreront aussi comment les obligations familiales, professionnelles, pastorales peuvent être harmonisées au service de la mission de l'Eglise. Les diacres, leurs femmes et leurs enfants peuvent beaucoup encourager tous ceux qui travaillent à promouvoir la vie de famille ". (224)
(224) Jean-Paul II, Allocution aux diacres permanents des U.S.A. à Detroit (19 septembre 1987), n. 5 : Insegnamenti, X, (1987)(1987), pp. 658-659.
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Il faut réfléchir sur la situation qui résulte de la mort de l'épouse d'un diacre. C'est un moment de l'existence qui doit être vécu dans la foi et dans l'espérance chrétiennes. Le veuvage ne doit pas anéantir le dévouement pour les enfants, s'il y en a ; il ne doit pas non plus conduire à une tristesse sans espérance. Cette étape de la vie, aussi douloureuse qu'elle puisse être, est un appel à la purification intérieure, une incitation à croître dans la charité, dans le service des siens et de tous les membres de l'Eglise. C'est aussi un appel à grandir dans l'espérance, puisque l'accomplissement fidèle du ministère est un chemin pour rejoindre dans la gloire du Père le Christ et ceux que nous aimons.
Mais il faut reconnaître que cet événement introduit, dans la vie de la famille, une situation nouvelle qui influe sur les rapports humains et qui amène souvent des difficultés économiques. Le diacre devenu veuf devra donc être aidé avec une grande charité : il doit discerner et accepter cette nouvelle situation personnelle, il ne doit négliger ni son devoir d'éduquer les enfants éventuels, ni les nouveaux besoins de sa famille.
Plus spécialement, le diacre veuf devra être aidé à garder la continence parfaite et perpétuelle à laquelle il est tenu, (225) et à comprendre les profondes raisons ecclésiales qui rendent impossible son remariage (cf. 1Tm 3,12), en conformité avec la discipline constante de l'Eglise d'Orient comme de celle d'Occident. (226) Un dévouement plus intense aux autres dans le ministère, pour l'amour de Dieu, peut aider à y parvenir ; l'aide fraternelle des autres ministres et des fidèles, ainsi que la proximité de l'évêque, seront d'un grand réconfort.
(225) Cf. CIC 277nº 1.
(226) Cf. Paul VI, Lettre apost. Sacrum Diaconatus Ordinem, III, 16 : l.c., p. 701 ; Lettre apost. Ad pascendum (15 août 1972), VI : AAS 64 (1972), p. 539 ; CIC 1087 Les exceptions éventuelles sont réglées par la Lettre circulaire de la Congrégation pour le Culte divin et la Discipline des Sacrements aux Ordinaires diocésains et aux Supérieurs généraux des Instituts de vie consacrée et des Sociétés de vie apostolique, N. 26397 (6 juin 1997), n. 8.
Si c'est la femme du diacre qui reste veuve, que les ministres et les fidèles ne la laissent jamais seule face à ses besoins, selon ce qui sera possible.
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La formation permanente des diacres est une exigence humaine qui prolonge l'appel surnaturel à servir l'Eglise de façon ministérielle et la formation initiale au ministère, à tel point qu'il faut considérer ces deux moments de formation comme un unique parcours de vie chrétienne et diaconale. (227) " A celui qui reçoit le diaconat, s'impose l'obligation de la formation doctrinale permanente, pour compléter et actualiser sans cesse le patrimoine reçu avant l'ordination ", (228) de sorte que la vocation " au " diaconat continue et s'exprime à nouveau comme vocation " dans " le diaconat, à travers le renouvellement périodique du " Oui, je le veux " prononcé à l'ordination.
(227) Cf. Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Pastores dabo vobis, PDV 42
(228) Jean-Paul II, Catéchèse lors de l'audience générale (20 octobre 1993), n. 4 : Insegnamenti, XVI, (1993)(1993), p. 1056.
Cette formation doit donc être considérée ù tant par l'Eglise qui la dispense que par les diacres qui en bénéficient ù comme un droit-devoir mutuel, fondé sur la vérité de l'engagement vocationnel assumé.
Les évêques et les diacres ne peuvent négliger cette obligation d'avoir toujours à proposer et à recevoir la formation intégrale appropriée.
Les normes de l'Eglise (229) rappellent constamment les caractéristiques de cette formation permanente : obligatoire, globale, interdisciplinaire, profonde, scientifique et orientée vers la vie apostolique ; elles sont encore plus nécessaires si la formation initiale ne s'est pas déroulée selon le modèle ordinaire.
(229) Cf. Paul VI, Lettre apost. Sacrum Diaconatus Ordinem, II, 8-10 ; III, 14-15 : l.c., pp. 699-701 ; Lettre apost. Ad pascendum, VII : l.c., p. 540 ; CIC 236 CIC 1027 CIC 1032nº 3.
Cette formation présente les traits de la " fidélité " au Christ et à l'Eglise, et de la " conversion continue ", fruit de la grâce sacramentelle vécue dans le dynamisme de la charité pastorale propre à chaque expression du ministère ordonné. Elle apparaît comme un choix fondamental, qui a besoin de s'affirmer et de s'exprimer à nouveau au fil des années de diaconat permanent, à travers une longue suite de réponses cohérentes, enracinées et vivifiées par le " oui " initial. (230)
(230) Cf. Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Pastores dabo vobis, PDV 70 : l.c., p. 780.
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Si on s'inspire de la prière d'ordination, la formation permanente se fonde sur la nécessité pour le diacre d'aimer le Christ de façon à l'imiter (" En imitant ainsi ton Fils Jésus ") ; elle tend à le confirmer dans une fidélité totale au ministère (" qu'ils soient fortifiés pour remplir fidèlement leur ministère ") ; elle est une invitation à suivre le Christ Serviteur dans la radicalité et la loyauté (" Fais croître en eux les vertus évangéliques... une charité sincère ... qu'ils prennent soin... qu'ils s'efforcent d'être dociles ... par l'exemple de leur conduite, qu'ils soient un modèle pour le peuple saint ").
La formation permanente a donc " son fondement propre et sa raison particulière dans le dynamisme même de l'ordination reçue " (231) et elle se nourrit avant tout de l'Eucharistie, condensé du mystère chrétien, source inépuisable de toute énergie spirituelle. Le diacre peut aussi s'appliquer, en quelque sorte, l'exhortation de l'apôtre Paul à Timothée : " Je t'invite à raviver le don spirituel que Dieu a déposé en toi " (2Tm 1,6 cf. ). Les exigences théologiques de l'appel à une mission singulière de service ecclésial réclament du diacre un amour croissant pour l'Eglise et pour ses frères, que manifeste l'accomplissement fidèle de ses tâches et de ses fonctions propres. Choisi par Dieu pour être saint en servant l'Eglise et tous les hommes, le diacre doit grandir dans la conscience de son caractère ministériel, de façon continue et équilibrée, responsable, zélée et toujours joyeuse.
(231) Ibid., PDV 70 : l.c., p. 779.
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Le diacre est le premier responsable et le premier acteur de sa formation permanente. Pour lui, elle est avant tout un processus perpétuel de conversion, qui concerne son être en tant que diacre, c'est-à-dire toute sa personne consacrée par le sacrement de l'Ordre et mise au service de l'Eglise, pour en développer toutes les capacités ; ainsi, il peut vivre pleinement les dons ministériels reçus, à chaque instant de sa vie, dans toutes les conditions de son existence et dans les diverses responsabilités que lui confère l'évêque. (232)
(232) Cf. ibid., PDV 76 PDV 79 : l.c., pp. 793 ; 796.
La sollicitude de l'Eglise pour la formation permanente des diacres serait donc inefficace si chacun d'eux ne s'y engageait pas. Cette formation ne peut donc être réduite à des cours, des journées d'étude, etc., mais elle demande que chaque diacre, conscient de cette nécessité, s'intéresse à la cultiver avec un esprit de saine initiative. Que le diacre prenne soin de lire des ouvrages choisis selon des critères d'Eglise, qu'il ne manque pas de suivre quelque périodique dont la fidélité au magistère est éprouvée, et qu'il ne néglige pas la méditation quotidienne. Se former toujours plus pour servir toujours mieux est une part importante du service qui lui est demandé.
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Pour l'évêque, (233) comme aussi pour les prêtres coopérateurs de l'ordre épiscopal, qui portent la responsabilité et la charge de sa réalisation, la formation permanente revient à aider les diacres à " répondre généreusement à l'engagement que requiert la dignité et la responsabilité que Dieu leur a confiées par le sacrement de l'Ordre, à conserver, à défendre et à développer leur identité et leur vocation spécifique, à se sanctifier et à sanctifier les autres dans l'exercice de leur ministère ". (234)
(233) Cf. Conc. Oecum. Vat. II, Décr. Christus Dominus, CD 15 Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Pastores dabo vobis, PDV 79 : l.c., p. 797.
(234) Congrégation pour le Clergé, Directoire pour le ministère et la vie des prêtres Tota Ecclesia (31 janvier 1994), n. 71 : ed. cit., p. 73.
Les perspectives du diacre et de l'évêque sont complémentaires et s'appellent mutuellement en tant qu'elles se fondent, avec l'aide des dons surnaturels, dans l'unité intérieure de la personne.
L'aide que les formateurs sont appelés à offrir sera d'autant plus efficace qu'elle répondra mieux aux besoins personnels de chaque diacre, parce que chacun vit son ministère dans l'Eglise comme une personne unique et dans des conditions qui lui sont propres.
L'accompagnement personnalisé fera également ressentir aux diacres l'amour avec lequel notre mère l'Eglise a le souci de leur engagement à vivre fidèlement la grâce du sacrement. Il est donc de la plus haute importance que les diacres aient la possibilité de choisir un directeur spirituel approuvé par l'évêque, avec lequel s'entretenir régulièrement et fréquemment.
Par ailleurs, toute la communauté diocésaine est, à sa manière, impliquée dans la formation des diacres, (235) et plus particulièrement le curé ù ou un autre prêtre désigné pour cela ù qui apportera son soutien avec une sollicitude fraternelle.
(235) Cf. Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Pastores dabo vobis, PDV 78 : l.c., p. 795.
1998 Vie des Diacres 46