Le procès de Jeanne d'Arc - Neuvième interrogatoire secret.

Lettre de trois gentilshommes angevins adressée le jour du

sacre à la reine de France


Nos souveraines et très redoubtées dames, plaise vous sçavoir que yer le roy arriva en ceste ville de Rains, au quel il a trouvé toute et pleine obéissance. Aujourd'hui a esté sacré et couronné; et a esté moult belle chose avoir le beau mystère, car il a esté auxi solempnel et accaustré de toutes les besongnes y appartenans, auxi bien et si convenablement pour faire la chose, tant en abis royaux et autres choses à ce nécessaires, comme s'il eust mandé un an auparavant; et y a eu autant de gens que c'est là chose infinie à escrire, et auxi la grande joye que chacun en avait.

Messeigneurs le duc d'Alençon, le comte de Clermont, le comte de Vendosme, les seigneurs de Lavai et de La Trémoille, y ont esté en abis royaux, et monseigneur d'Alençon a fait le roy chevalier, et les dessusditz représentaient les pairs de France; monseigneur d'Albret a tenu l'espée durant ledit mystère devant le roy; et pour les pairs de l'Église y étaient avec leurs croces et mitres messeigneurs de Rains et de Chalons, qui sont pairs; et en lieu des autres, les évêques de Séez et d'Orléans et deux autres prélas, et mondit seigneur de Rains y a fait ledit mystere et sacre qui lui appartient.

Pour aller querir la sainte ampolle en l'abaye de Saint Remy et pour l'apporter en l'église de notre-Daine, où a esté fait le sacre, furent ordonnez le mareschal de Bossac, les seigneurs de Rays, Graville et l'admirai, avec


leurs quatre bannières que chacun portait en sa main, armez de toutes pièces et à cheval, bien accompagnez pour conduire l'abbé dudit lieu, qui apportoit ladite ampalle; et entrèrent à cheval dans ladite grande église et descendirent à l'entrée du choeur, et en cet estat l'ont rendue après le service en ladite abaye; lequel service a duré depuis neuf heures jusqu'à deux heures. Et à l'heure où le roy fut sacré, et auxi quand l'on lui assist la couronne sur la tête, tout homme cria: Noël!! et trompettes sonnèrent en telle manière qu'il semblait que les voultes de l'église se deussent fendre.

Et durant ledit mystère, la Pucelle s'est tousjours tenue joignant le roy, tenant son étendard en la main. Et était moult belle chose de voir les belles manières que tenait le roy et auxi la Pucelle. Et Dieu sache si vous y avez esté souhaitées.

Demain s'en doibt partir le roy tenant son chemin vers Paris. La Pucelle ne fait doubte qu'elle ne mette Paris en obéissance.

Nos souveraines et redoubtées dames, nous prions le benoist Saint-Esprit qu'il vous donne bonne vie et longue.

Escript à Rains, ce dimanche XVIIe de juillet.

Vostres humbles et obéissants serviteurs

BEAUVEAU, MOREAL, LUSSÉ.


TRENTE-UNIÈME SÉANCE DU PROCÈS


DIMANCHE DE LA. PASSION, 18 MARS.

Les écritures du procès sont communiquées aux assesseurs à la fin de l'es étudier et examiner.


TRENTE-DEUXIÈME SÉANCE


JEUDI 22 MARS.

On décide qu'il sera rédigé un résumé par articles.

TRENTE-TROISIÈME SÉANCE


SAMEDI 24 MARS.

Dans la prison de Jeanne, en présence de l'évêque, du vice-inquisiteur et six assesseurs, le greffier Guillaume Manchon donne lecture en langue française à Jeanne du registre des interrogatoires et réponses.

Pendant ladite lecture Jeanne dit que son surnom était d'Arc ou Rommée et que dans son pays les filles portaient le nom de leur mère. Elle ajouta qu'on lût tout de suite les demandes et les réponses, et que ce qui serait lu sans contradiction de sa part elle le tenait pour vrai et confessé.

Sur l'article de prendre l'habit de femme, elle dit:

«Donnez-moi une robe de femme pour aller chez ma mère, et je m'en habillerai». Elle dit cela pour être mise dehors, et qu'une fois dehors elle aviserait à ce qu'elle aurait à faire.

Finalement, après lecture elle confessa qu'elle croyait avoir dit tout ce qui venait d'être lu, sans y contredire,


TRENTE-QUATRIÈME SÉANCE


DIMANCHE 25 MARS.

A la demande formulée plusieurs fois par Jeanne et renouvelée la veille d'ouïr la messe en raison de la solennité des Rameaux, l'évêque et ses assesseurs apposent l'obligation de revêtir l'habit de femme tel que le partent les femmes du lieu de sa naissance. Jeanne réitère sa demande d'entendre la messe avec ses vêtements d'homme et de recevoir l'eucharistie le jour de Pâques. A trois objurgations nouvelles elle répond qu'elle ne peut quitter encore l'habit d'homme. «Il lui fut dit enfin qu'elle se consultât avec ses voix pour se remettre en femme, afin de pouvoir communier à Pâques. R. Qu'elle ne communiera pas en cette condition. Elle prie qu'on la laisse entendre la messe dans l'habit qu'elle porte, cet habit ne changeant pas son âme et n'ayant rien de contraire à l'Eglise».


PROCÈS ORDINAIRE

JUGEMENT ET MONITIONS


LUNDI 26 MARS.

Il est décidé que le lendemain commencera le procès ordinaire suivant le procès préparatoire.

MARDI 27 MARS.

Le promoteur Jean d'Estivet expose son réquisitoire et remet au tribunal l'acte d'accusation. La requête est mise en délibération aussitôt en présence de Jeanne.

L'évêque offre ensuite à ladite Jeanne de lui désigner et attribuer un conseil.

«A quoi ladite Jehanne répondit: Premièrement de ce que [vous m'] admonnestez [pour] mon bien et de notre foi, je vous mercye et à toute la compagnie aussi. Quant au conseil que me offrés, aussi je vous mercye, mais je n'ay point de intencion de me départir du conseil de Notre-Seigneur. Quant au sèrement que voulés que je face, je suis preste de jurer dire vérité de tout ce qui touchera vostre procès. Et elle jura en touchant les saints évangiles.»

Maître Thamas de Courcelles commence l'exposé des


articles ou lecture de l'acte d'accusation, en français. Cette lecture occupe les Séances du mardi 27 et du mercredi 28 mars. Il requiert que par l'évêque et le vice-inquisiteur «ladite Jeanne soit prononcée et déclarée sorcière et sortilège, devineresse, fausse prophétesse, invocatrice et conjuratrice des malins esprits, superstitieuse, impliquée et adonnée aux arts magiques, mal sentant dans et de notre foi catholique, schismatique en l'article [du droit canon] Unam sanctam 1 et plusieurs autres; douteuse, déviée, sacrilège, idolâtre, apostate de la foi; maldisante et malfaisante, blasphématrice envers Dieu et ses saints; séditieuse, perturbatrice et impéditive de la paix, excitatrice aux guerres, cruellement avide de sang humain et incitatrice à le répandre; abandonnant sans vergogne toute décence et convenance de son sexe, usurpant impudemment un habit difforme et l'état d'homme d'armes; par ces motifs et autres, abominable à Dieu et aux hommes; prévaricatrice des lois divine, naturelle, et de la discipline de l'Eglise; séductrice de princes et de populaires, en permettant et consentant, au mépris et dédain de Dieu, qu'elle fust vénérée et adorée; en donnant ses mains et ses vêtements à baiser; usurpatrice du culte et des honneurs divins; hérétique ou du moins véhémentement suspecte d'hérésie; et que sur et pour ces faits, conformément aux sanctions divines canoniques, elle soit punie et corrigée».

Nous ne pouvons reproduire cet acte d'accusation qui n'est qu'un perpétuel mensonge. Les réponses de Jeanne s'y trouvent travesties avec une impudence qui confond.

1. Il s'agit d'une décrétale de Boniface VIII. Elle fait partie des «Extravagantes».


Nous allons en citer un passage pris au début. Qu'on se rappelle l'interrogatoire public du 24 février et les dépositions des témoins dont nous l'avons fait suivre, on verra alors ce que devient la cause présentée par le promoteur.

«Item ladite Jeanne avait coutume de fréquenter ces arbre et fontaine [de Domremy] et souvent de nuit; quelquefois de jour, principalement aux heures des offices, afin d'y être seule; elle a pris part à des rondes qui s'opéraient en dansant à l'entour; ensuite elle appendait aux branches de l'arbre des guirlandes formées de diverses herbes et fleurs, en disant et chantant auparavant, ainsi qu'après, certains poèmes et chansons, accompagnés d'invocations, sortilèges et de maléfices; desquelles guirlandes le lendemain matin il ne se retrouvait plus rien».

Devant cette explosion d'inepties, Jeanne répond tranquillement «qu'elle s'en réfère à sa réponse précédente [qu'elle n'en a jamais rien su ni rien fait]; quant au reste de ce qui est contenu audit article, nie».

Nous ferons comme Jeanne, nous écarterons ce ramas dans lequel la niaiserie le dispute à l'impudence, et nous ne relèverons que quelques réponses qui ajoutent une lumière au procès et à la psychologie de la jeune fille.

Requise de dire le Credo. R. Demandez à mon confesseur à qui je l'ai dit.

Ladite Jeanne attribue à Dieu, à ses anges et à ses saints, des prescriptions qui sont contraires à l'honnêteté féminine, prohibées par la loi divine, abominables à Dieu et aux hommes et interdites par les sanctions ecclésias-



tiques sous peine d'excommunication; comme de revêtir des habits d'homme courts, brefs et dissolus, tant en vêtement de dessous et chausses, que autres. D'après le même précepte, elle a mis quelquefois des vêtements somptueux et pompeux, d'étoffes précieuses et drap d'or, de fourrures, et non seulement elle s'est habillée de robes courtes (huques), mais aussi de tabards (paletots flottants) et de robes fendues de chaque côté. Il est notaire qu'elle fut prise portant une huque de drap d'or ouverte de chaque côté, coiffée de chapeaux ou bonnets d'hommes; les cheveux tondus en rond à la manière des, hommes; généralement et au mépris de la vergogne de son sexe, et non seulement elle s'est habillée d'une manière qui blessait toute pudeur féminine, mais même celle qui convient à des hommes bien morigénés; elle a usé de tous les affublements et vêtements par lesquels se distinguent les hommes les plus dissolus; et cela en portant aussi des armes invasives... R. «Vous en estes assés respondus.»

TRENTE-NEUVIÈME SÉANCE


SAMEDI SAINT, 31 MARS.

[Interrogatoire dans la prison sur divers points touchant lesquels Jeanne avait différé de répondre.]

1. Interrogée s'elle se veult rapporter au jugement de l'Eglise qui est en terre, de tout ce qu'elle a dit on fait, soit bien ou mal, spécialement des cas, crimes et délia que on lui impute, et de tout ce qui touche son procès,


R. Que de ce que on lui demande elle s'en raportera à l'Eglise militante, pourvu que elle ne lui commande chose impossible à faire. Elle appelle ce qu'elle répute impossible, c'est que les fais qu'elle a diz et fais, déclairez au procès des visions et révélacions qu'elle les a faictes de par Dieu, et ne les révoquera pour quelque chose; et de ce que Notre Sire lui a fait faire et commandé et commandera, et ne le lesra pour homme qui vive, et lui serait impossible de les révoquer. Et en cas que l'Eglise lui vouldroit faire faire autre chose au contraire des commandements qu'elle dit à lui fait, elle ne le ferait pour quelque chose.

Interrogée si l'Eglise militant lui dit que ses revelacions sont illusions ou choses dyaboliques, au supersticions, ou mauvaises choses, elle s'en raportera à l'Eglise, R. Qu'elle raportera à Notre Seigneur, duquel elle fera toujours le commandement, et qu'elle sait bien que ce qui est contenu en son procès, qu'il est venu par le commandement de Dieu; et ce qu'elle a affermé [au]dit procès avoir fait du commandement de Dieu, lui serait impossible faire le contraire. Et en cas que l'Eglise militante lui commanderait faire le contraire, elle ne s'en rapporterait à homme du monde, fors à Notre Seigneur, qu'elle ne fit tousjours son bon commandement.

Interrogée s'elle croist point qu'elle soit subjecte à l'Eglise qui est en tout, c'est assavoir à notre saint père le pape, cardinaulx, arcevesques, évesques et autres prélas d'Eglise, R. Que ouil, notre Sire premier servi.

Interrogée s'elle a commandement de ses voix qu'elle se submecte point à l'Eglise militant, qui est en terre, ni au jugement d'icelie, R. Qu'elle ne respond chose qu'elle prengne en sa tête, mais ce qu'elle respand,


c'est du commandement d'cette; et ne commande point qu'elle ne obéisse à l'Eglise, notre Sire premier servi.

Interrogée si à Beaurevoir et Arras, on ailleurs, elle a point eu de limes, respond «Se on en a trouvé sur moy, je ne vous ay autre chose à respondre.»

Cela fait, nous nous sommes retirés.

SÉANCES 40e, 41e ET 42e


2, 3, 4 AVRIL 1431.

Il est fait un résumé de l'accusation sous forme de douze articles qui comprennent sommairement et compendieusement beaucoup des dits et assertions de l'accusée.

QUARANTE-TROISIÈME SÉANCE


5 AVRIL 1431.

Les douze articles destinés à servir de base aux consultations et à la condamnation sont transmis aux consulteurs, mais non à l'accusée. Certains commandements qu'on avait jugé convenable d'y introduire furent omis, ainsi qu'il ressort d'une pièce produite par le greffier Manchon au procès de réhabilitation, laquelle pièce contient les corrections et additions proposées.

ARTICLE I. - Et d'abord une femme dit et affirme que, lorsqu'elle avait treize ans ou environ, elle a vu de ses yeux corporels saint Michel qui la consolait et quelque


fois saint Gabriel, lesquels tous deux lui apparurent en effigie corporelle, Quelquefois aussi elle vit une grande multitude d'anges. Depuis, saintes Catherine et Marguerite se sont fait voir corporellement à cette femme. Elle les voit chaque jour, entend leurs voix, les a embrassées et baisées, les touchant sensiblement et corporellement. Elle a vu les têtes des anges et saintes; d'autres parties de leur personne, ou de leurs vêtements, elle n'a rien voulu dire. Lesdites saintes lui ont plusieurs fois parlé près d'une fontaine, située près d'un grand arbre, appelé communément l'arbre des fées. La renommée court au sujet de ces arbres et fontaine que les dames fées les hantent et que des fiévreux y vont, quoique ce soit profane, pour recouvrer la santé. Là et ailleurs elle a révéré lesdites saintes et leur a fait révérence.

De plus, elle dit que ces saintes apparaissent et se montrent à elle couronnées de couronnes très belles et précieuses. Depuis ce moment, et à plusieurs reprises, elles disent à cette femme, par ordre de Dieu, qu'il lui fallait se rendre auprès d'un prince séculier, promettant que par la main de cette femme et de son assistance ledit prince recouvrerait à force d'armes un grand domaine temporel, ainsi que sa glaire mondaine, et aurait victoire de ses adversaires; que ce prince la recevrait et lui donnerait à cet effet un commandement militaire. Elles lui prescrivirent, de la part de Dieu, de s'habiller en homme, ce qu'elle a fait et continue si persévéramment qu'elle a déclaré aimer mieux mourir que de quitter cet habit. Elle a fait cette déclaration tantôt pure et simple, tantôt en ajoutant: à moins d'un exprès commandement de Dieu. Elle a également préféré être privée des sacrements et de l'office divin en temps prescrit par l'Eglise,


plutôt que de quitter l'habit d'homme et prendre celui de femme. Ces saintes l'auraient également favorisée pour s'éloigner, âgée de dix-sept ans, de la maison paternelle, à l'insu et contre le gré de ses parents, pour se mêler aux gens d'armes, vivant avec eux de jour et de nuit, sans avoir jamais, ou rarement, aucune femme auprès d'elle.

Les mêmes saintes lui ont dit et prescrit beaucoup d'autres choses, pour lesquelles elle se dit envoyée par Dieu et par l'Eglise triomphante, l'Église victorieuse des saints qui jouissent déjà de la béatitude, auxquels elle, soumet toutes ses louables actions. Quant à l'Eglise, elle a différé et refusé de s'y soumettre, elle, ses dits et faits quoiqu'elle ait été impérativement avertie et requise; disant qu'il lui était impossible de faire le contraire de ce qu'elle a affirmé dans son procès, par ordre de Dieu, et qu'elle ne s'en rapportera à la détermination ou jugement d'aucun être vivant. Elles lui ont, dit-elle, révélé qu'elle obtiendra la glaire des bienheureux avec le salut de son Lime, si elle garde sa virginité, qu'elle leur a vouée la première fois qu'elle les a vues et entendues.

ARTICLE II. - Item elle dit que son prince a été instruit par un signe, de sa mission. Ce signe fut que saint Michel s'approcha dudit prince, en compagnie d'une multitude d'anges, les uns couronnés, les autres ailés, ainsi que saintes Catherine et Marguerite. L'ange et cette femme marchaient ensemble sur terre par les chemins, les escaliers et la chambre, tout le long du parcours, suivis des autres anges ou saintes. Un ange remit audit prince la couronne très précieuse d'or, et s'inclina devant lui en faisant révérence. Une fois elle a dit que lors de cette réception merveilleuse son prince était seul, ayant seule-


ment de la compagnie à quelque distance; une autre fois, à ce qu'elle croit, un archevêque reçut le signe ou couronne et le transmit audit prince en présence et à la vue de divers seigneurs laïques.

ARTICLE IV. - Item elle a reconnu et constaté que celui qui la visite est saint Michel, par le bon conseil, le réconfort, la banne doctrine qu'il lui donne et fait; aussi parce qu'il se nomme et dit: «Je suis saint Michel.» Semblablement, elle connaît distinctement l'une et l'autre saintes Catherine et Marguerite, parce qu'elles se nomment et la saluent. C'est pourquoi elle croit en saint Michel qui lui apparaît ainsi. Elle écrit que les paroles dudit saint sont bonnes et vraies, comme elle croit que Notre-Seigneur Jésus-Christ a souffert et est mort pour notre rédemption.

ARTICLE V. - Item elle dit et affirme qu'elle est sûre, de certains événements futurs et pleinement contingents, qu'ils arriveront, comme elle est certaine de ce qu'elle voit actuellement devant elle. Elle se vante d'avoir et avoir eu connaissance de choses cachées, par les révélations verbales de ses voix: par exemple, qu'elle sera délivrée des prisons et que les Français feront en sa compagnie un fait plus beau qu'il n'a jamais été fait par toute la chrétienté. Elle a connu par révélation, sans autre instruction, des gens quelle n'avait jamais vus; elle a révélé et manifesté une épée cachée.

ARTICLE V. - Item elle dit et affirme que du commandement de Dieu et de son bon plaisir elle a pris, porté, continuellement porte et revêt habit d'homme. Depuis elle a dit: que Dieu lui ayant ordonné de porter l'habit d'homme, il lui fallait avoir robe courte, chaperon, gippon, braies et chausses à aiguillettes, cheveux coupés


en rond au-dessus des oreilles, ne gardant rien de son sexe que ce que la nature lui a donné. Dans cet habit elle a reçu plusieurs fois l'Eucharistie. Elle a refusé de le quitter comme il est dit ci-dessus. Elle a ajouté que si elle retournait en habit d'homme et armée comme avant sa prise, ce serait le plus grand des biens qui pût advenir au -royaume de France; que pour rien au monde elle ne s'engagerait à ne pas le faire, obéissant à Dieu et à ses ordres.

ARTICLE VI. - Item elle confesse et affirme qu'elle a fait écrire beaucoup de lettres, dont quelques-unes portaient ces noms Jhesus Maria, avec le signe de la croix, Quelquefois elle mettait une croix et alors elle ne voulait pas que l'on fît ce que mandait la dépêche. En d'autres elle dit qu'elle ferait tuer ceux qui n'obéiraient pas, et que «l'on verrait aux coups de quel côté est le droit divin du ciel». Souvent elle dit qu'elle n'a rien fait que par révélation et ordre de Dieu,

ARTICLE VII. - Item elle dit et confesse que, à l'âge de dix-sept ans environ, elle, spontanément et par révélation, alla trouver un écuyer qu'elle n'avait jamais vu; quittant ainsi la maison paternelle contre la volonté de ses parents qui demeurèrent presque fous à la première nouvelle de son départ. Elle le requit de la conduire ou faire conduire, au prince susdit. L'écuyer, capitaine alors, lui donna sur sa demande un costume masculin, ainsi qu'une épée, et la fit conduire par un chevalier, son écuyer et quatre compagnons d'armes. Arrivés devant le prince, elle lui dit qu'elle voulait guerroyer contre ses adversaires. Elle lui promit de le mettre en grande domination, qu'elle vaincrait ses ennemis et qu'elle était envoyée du ciel. La prévenue affirme qu'en agissant ainsi elle a bien fait et par révélation divine.


ARTICLE VIII. - Item dit et confesse que elle-même, personne ne la contraignant ni forçant, se précipita d'une tour très haute, préférant mourir plutôt que de se voir livrée aux mains de ses adversaires et que de survivre à la destruction de Compiègne. Dit aussi qu'elle ne put se soustraire à cette action; et cependant saintes Catherine et Marguerite susdites le lui avaient défendu, et elle dit que c'est grand péché de les offenser. Mais elle sait bien, dit-elle, que ce péché lui a été remis depuis qu'elle s'en est confessée. Elle dit en avoir eu révélation.

ARTICLE IX. - Item que lesdites saintes lui promirent de la conduire au paradis, si elle conservait bien la virginité qu'elle leur a vouée, tant de corps que d'âme. Elle en est aussi sûre que si elle était déjà dans la gloire des bienheureux. Elle ne pense pas avoir fait acte de péché mortel, car, à son avis, si elle y était, saintes Catherine et Marguerite ne la visiteraient pas comme elles font chaque jour.

ARTICLE X. - Item que Dieu aime certains [princes] déterminés et nommés encore errants, et les aime plus qu'il n'aime ladite femme. Elle le sait par révélation desdites saintes, qui lui parlent français et non anglais, n'étant pas du parti de ces derniers. Depuis qu'elle a su par révélation que ses voix étaient pour le prince susdit, elle n'a pas aimé les Bourguignons.

ARTICLE XI. - Item qu'elle a plusieurs fais fait révérence aux voix et esprits susdits, qu'elle appelle Michel, Gabriel, Catherine et Marguerite, se découvrant la tête, fléchissant les genoux, baisant la terre sous leurs pas, leur vouant sa virginité, quelquefois embrassant, baisant Catherine et Marguerite. Elle les a touchées sensiblement et corporellement, leur a demandé conseil et


secours, les a invoquées; quoique non invoquées, elles la visitent souvent. A acquiescé et obéi à leurs conseils et commandements, et cela dès le principe, sans demander Conseil à quiconque, tel que père, mère, curé, prélat au autre ecclésiastique. Néanmoins, croit fermement que sesdites révélations viennent de Dieu et par son ordre. Elle le croit aussi fermement que la foi et que Notre-Seigneur Jésus-Christ a souffert et est mort pour nous; ajoutant que si un malin esprit lui apparaissait, qui feignît être saint Michel, elle saurait bien discerner s'il est saint Michel, ou non. Dit que sans être contrainte ou requise aucunement, elle a juré à saintes Catherine et Marguerite, qui lui apparaissent, qu'elle ne révélerait pas le signe de la couronne à donner au prince vers qui elle était envoyée. A la fin ajoute: à mains de permission de le faire.

ARTICLE XII. - Item que si l'Eglise lui commandait d'agir contre le précepte qu'elle dit avoir reçu de Dieu, elle ne le ferait pas pour chose quelconque, affirmant que ses actes incriminés sont l'oeuvre de Dieu et qu'il lui serait impossible de faire le contraire. Elle ne veut s'en référer là-dessus à la détermination de l'Eglise militante ni d'aucun homme du monde, mais seulement à Notre-Seigneur Dieu, dont elle accomplira toujours les préceptes, principalement en ce qui concerne ces révélations et les actes qui lui ont été ainsi inspirés. Dit qu'elle n'a pas pris sur sa tête ces réponses, mais par les préceptes de ses voix et par leurs révélations. Lui a été cependant plusieurs fais déclaré par les juges et autres présents l'article Unam sanctam Ecclesiam catholicam, en lui exprimant que tout fidèle accomplissant le voyage d'ici-bas est tenu d'y obéir, de soumettre ses faits et dits à


l'Eglise militante, principalement en matière de foi et qui touche à la doctrine sacrée, ainsi qu'aux sanctions de l'Eglise.


QUARANTE-QUATRIÈME SÉANCE

JEUDI 12 AVRIL 1431.

Sur les douze articles précités ont délibéré en la chapelle du logis épiscopal les seize docteurs et six bacheliers en théologie dont les noms suivent: Erard Ermengard président, Jean Beaupère, Guillaume Lebouchier, Jean de Touraine, Nicolas Midi, P. de Miget, prieur de Longueville, M. du Quesnoy,J. deNibat, P. deHoudenc, J. Lefèvre ou Fabri, P. Maurice, Guill. Théraade, G. Feuillet, Richard Dupré et Jean Charpentiers, docteurs; - G. Haiton, N. Coppequesne, Is. de la Pierre, Th. de Courcelles, bachéliers; - Raoul Sauvage, licencié; -N. Loyseleur, maître ès arts.

Les susdits ont délibéré ce qui suit:

«Nous disons que, ayant diligemment considéré, conféré et pesé la qualité de la personne, ses dits, faits, apparitions, la fin, la cause, leurs circonstances, et tout ce qui est contenu dans les documents communiqués, il est à penser que ces apparitions et révélations qu'elle se vante et affirme avoir eues de Dieu, par les anges et les saintes, n'ont pas eu lieu comme il vient d'être dit, mais que ce sont bien plutôt des fictions d'invention humaine en procédant du malin esprit; qu'elle n'a pas eu des signes suffisants pour y croire et savoir; qu'il y


a dans ces articles des mensonges fabriqués; des invraisemblances légèrement admises par cette femme; des divinations superstitieuses; des actes scandaleux et irréligieux; des dires téméraires, présomptueux, pleins de jactance; blasphèmes envers Dieu et les saints

impiété envers les parents; quelques-uns non conformes au précepte d'aimer son prochain; idolâtrie ou au moins fiction erronée; propositions schismatiques de l'unité, de l'autorité et du pouvoir de l'Eglise; malsonnantes et véhémentement suspectes d'hérésie.

«En croyant que ses apparitions sont saints Michel, Catherine et Marguerite, en croyant que leurs dits et faits sont bans comme elle croit en la foi chrétienne, elle mérite d'être tenue pour suspecte d'errer en la foi, car si elle entend que les articles de la foi ne sont pas plus sûrs que ses visions, elle erre en la foi. Dire aussi, comme dans les articles V et I, qu'en ne recevant pas les sacrements, etc., elle a bien fait, c'est blasphémer Dieu et errer en la foi».

La délibération des docteurs sert de base à celles d'autres gens d'Eglise dont les adhésions se succèdent à partir du 13avril.

Denis Gastinel, chanoine, estime que «l'inculpée est infectée, suspecte en la foi,, véhémentement erronée,. schismatique, hérétique, entachée de doctrine perverse, contraire aux bannes moeurs, à la décision de l'Eglise, aux conciles généraux, saints canons, lais civiles, humaines ou politiques; séditieuse, injurieuse à Dieu, à l'Eglise et à tous. les fidèles;... Si elle s'amende... la prévenue doit être abandonnée au bras séculier pour expier son crime. Si elle abjure, qu'il lui soit accordé le bénéfice de l'absolution; et, selon la coutume, qu'elle soit renfermée


en prison, nourrie du pain de douleur et de l'eau d'angoisse pour pleurer ses fautes et ne plus les commettre.»

Jean Basset, chanoine, official de Rouen, adresse une consultation tout à fait normande: «Je n'ai que peu ou rien à dire sur une matière si grande en la foi, si ardue, si difficile, surtout en ce qui touche les révélations. Toutefois, sauf protestation, et sous votre correction, voici ce que je crois devoir dire:

«Sur les révélations, ce que dit cette femme est divinement passible; mais comme elle n'en justifie pas par miracles avérés ni par le témoignage de la sainte Ecriture, elle ne doit pas être crue.»

Le reste est à l'avenant.

Gilles, abbé de Fécamp. «Vous désirez avoir ma délibération. Mais après tant et de tels docteurs, que leurs pareils ne sont peut-être pas trouvables dans l'univers, que peut concevoir mon ignorance ou mon élocution inérudite enfanter? A peu près rien. Je m'arrête donc avec eux tous en tout; j'adhère à leurs délibérations, en y ajoutant mes protestations et soumissions préalables et accoutumées.»


QUARANTE-CINQUIÈME SÉANCE

MERCREDI 13 AVRIL 1431.

J. Guesdon, dominicain.., s'associe aux théologiens réunis au logis de l'évêque.

Jean Maugier, chanoine, qualifie l'opinion des mêmes théologiens «bonne, juste, sainte, plausible, conforme


aux sacrés canons, aux sanctions canoniques, aux sentences de nos docteurs».

Jean Brullot, chanoine et chantre, «attendu les motifs qui le doivent rattacher à l'opinion de mes maîtres et supérieurs unanimes et nombreux», attendu quelques autres raisons assurément de moindre prix, acquiesce à l'opinion des théologiens.

Nicolas de Vendères, archidiacre d'Eu. «Dis et tiens que messeigneurs et maîtres ont bien, pieusement et doucement procédé.»

Gilles Deschamps, chanoine; Nicolas Caval, chanoine; Robert Barbier, chanoine; Jean Alépée, chanoine; Jean Hulot de Châtillon, chanoine; Jean de Bonesque, aumônier de l'abbaye de Fécamp; Jéan Guarin, chanoine; le vénérable chapitre de l'Eglise de Rouen; Aubert Morel et Jean du Chemin, avocats de la cour de l'officialité de Rouen; onze avocats de la cour de Rouen; Philibert de Montjeu, évêque de Cautances; Zanon de Castiglione, évêque de Lisieux; Nicolas, abbé de Jumièges; Guillaume, abbé de Cormeilles, et plusieurs autres font preuve de la même servilité et réclament des peines ou moins sévères.

Toutes ces consultations se placent entre le 13 avril et le 13 mai. Deux d'entre elles méritent une particulière attention: c'est d'abord celle de Philibert de Montjeu, évêque de Coutances, qui écrit ce qui suit: «Après de si grands docteurs consultés, je réponds à la requête de Votre Paternité en vous donnant, du moins mal que je puis, mon sentiment, en m'abstenant de qualifier chaque point, afin qu'il ne semble pas que je veuille en remontrer à Minerve.

«Assurément, je pense que cette femme a un esprit


subtil, enclin au mal, agité par un instinct diabolique et vide de la grâce de l'Esprit saint. Témoin saint Grégoire, et si l'on considère les dires de cette femme, il y a deux signes qui attestent la présence de la grâce, et dont manque évidemment cette femme... Si elle révoque ce qu'elle doit révoquer, il faut la conserver sous bonne garde jusqu'à ce que sa correction et amendement soient bien manifestés. Si elle refuse, il faut la traiter en hérétique opiniâtre.»

L'évêque de Lisieux, un Milanais ayant nom Zanoni, répond en ces termes: «Je ne vois pas dans l'inculpée les signes ou indices d'une admirable sainteté, ni d'une vie exemplaire... Je dis que, attendu la basse condition de la personne, attendu ses assertions ou propos pleins de fatuité ou de folies présomptueuses, la forme et le made de ses visions, etc., il est à présumer que de deux choses l'une: ou ce sont illusions et fallaces des démons, qui dans les bois se déguisent en anges et entre temps s'affublent des apparences et ressemblances de diverses personnes: ou ce ne sont que mensonges, inventés et fabriqués à dessein pour duper les rudes et les ignorants.»


QUARANTE-SIXIÈME SÉANCE

18 AVRIL 1431,

Le 18, nous, juges, accompagnés de M. Guillaume Boucher, Jacques de Touraine, Maurice du Quénoy, Nicolas Midi, Guillaume Adelie et Guillaume Hecton, flous sommes transportés dans la chambre où Jeanne était détenue.


En présence de ces personnes, nous, évêque susdit, nous nous adressâmes à ladite Jeanne, qui alors se disait malade. Nous lui dîmes que ces docteurs et maîtres venaient à elle familièrement et charitablement, la visiter, dans sa maladie, pour la réconforter et la consoler.

Nous lui rappelâmes ensuite que, par diverses et plusieurs fois, elle avait été interrogée solennellement, sous la grave prévention qui lui est imputée par-devant de notables clercs.

Item que plusieurs de ses dits et faits avaient semblé défectueux.

Item: attendu qu'elle ne saurait, étant ignorante et illettrée, connaître et discerner touchant certains articles à elle imputés s'ils sont contraires à notre foi, sainte doctrine et approbation des docteurs de l'Eglise, ces clercs offraient de lui donner bon et salutaire conseil, pour s'en instruire; qu'elle voulût donc aviser de recevoir et choisir quelqu'un ou quelques-uns des assistants pour se conseiller dans sa conduite, et que si elle ne le faisait, que messeigneurs les juges lui en délégueraient pour la conseiller et réduire.

Item qu'ils offraient à cet effet de hi donner pour conseils quelques docteurs en théologie, droit canon et civil.

Item il lui fut dit que si elle ne voulait recevoir conseil, et se conduire par le conseil de l'Eglise, elle serait en très grand péril.

R. Il me semble, vu la maladie que j'ay, que je suis en grant péril de mort. Et se ainsi est que Dieu vueille faire son plaisir de may, je vous requier avec confession, et mon saulveur aussi, et d'être ensevelie en la terre saincte. .


Ad ce lui fut dit Se vouloiés (si vous vouliez) avoir les droictures et sacremens de l'Eglise, il faudrait que vous feissiez comme les bons catholiques dayvent faire, et vous submessiés (soumissiez) à saincte Eglise. R. Je ne vous en sçaroye maintenant autre chose dire.

Item. lui fut dit que, tant plus se crainct de sa vie pour la maladie, tant plus se devroit amender sa vie; et ne aurait pas les droiz de l'Eglise. R. Se le corps meurt en prison, je me actend que le faciez mectre en terre saincte; se ne l'y faictes mectre, je m'en actend à Notre Seigneur.

Item lui fut [dit] que autre fois elle avait dit en son procès que s'elle avait fait ou dit quelque chose qui fust contre notre foi chrétienne, ordonnée de Notre Seigneur, qu'elle ne [le] vouldroit point soustenir. R. «Je m'en actend à la responce que j'en ay faicte et à Notre-Seigneur.»

Item, lui fut faicte interrogacion, pour ce qu'elle dit avoir eu plusieurs fois révélacions de par Dieu, par saint Michiel, sainctes Katherine et Marguerite; se il venait aucune bonne créature qui affirmast avoir eu révélacian de par Dieu, to'uchant le fait d'elle, s'elle le croirait. R. Qu'il n'y a crestien au monde qui venist devers elle, qui se deist (dit) avoir eu révélacion, qu'elle ne sceust (sait) s'il disait vray ou non; et le sçarait par sninctes Katherine et Marguerite.

Interrogée si elle ymagine point que Dieu puisse révéler chose à une bonne créature, qui lui soit incongneue:

R. Il est bon à savoir que ouil; mais je n'en croiroye homme ne femme se je n'avoye aucun signe.

Interrogée s'elle croit que la saincte Escripture soit révélée de Dieu, R. s Vous le sçavés bien; et est bon à savoir que ouil»


Item fut sommée, exhortée et requise de prendre le bon conseil des clercs et notables docteurs, et le croire pour le salut de son âme.

Sa dernière réponse, ( interroguée si elle se soumettait elle et ses actions à notre saincte mère l'Eglise), fut à savoir: «Quelque chose qui m'en doive advenir, je n'en ferai ou dirai autre chose; car j'en ai dit devant au procès.» Et ce ainsi fait, les vénérables docteurs là présents, c'est à savoir maîtres Guillaume le Bouchier, Maurice du Quesnay, Jacques de Touraine, Guillaume Adeije et Gérard Feuillet, l'exhortèrent instamment pour qu'elle voulût se soumettre à notre sainte mère l'Eglise et ce en alléguant de nombreux exemples et autorités de la sainte Ecriture; et, entre autres exhortations, maître Nicolas Midi allégua en français le chapitre 18 de saint Mathieu, si ton frère, etc. Ce à quai Jeanne répondit qu'elle étoit bonne chrétienne et vouloit mourir telle.

Interragués, puisqu'elle requiert que l'Eglise lui baille son Créateur s'elle se vouldroit submectre à l'Eglise et on lui promectroit bailler, R. Qui de celle submission, elle n'en respondra autre chose qu'elle a fait; et qu'elle ayme Dieu, le sert et est banne chrétienne, et vouldroit aidier et soutenir saincte Eglise de tout son povoir.

Interrogée s'elle vouldroit point qui en ordonnast une belle et notable procession pour la réduire en bon estat, s'elle n'y est, R. Qu'elle veult très bien que l'Eglise et les catholiques prient pour elle.



Le procès de Jeanne d'Arc - Neuvième interrogatoire secret.