Homéliaire patristique 210

29 juin - Saints Pierre et Paul, apôtres

210

Évangile de la veille au soir

211 Évangile de Jésus Christ selon saint Jean (Jn 21,15-19)

Après le repas au bord du lac, Jésus ressuscité dit à Simon-Pierre: "Simon, fils de Jean, m'aimes-tu plus que ceux-ci?" Il lui répond: "Oui, Seigneur, je t'aime bien, tu le sais." Jésus lui dit: "Sois le berger de mes agneaux."

Homélie

La mort de saint Pierre

Traité de Théodoret de Cyr (+ 466)

Traité sur la chanté 31, 12-13, SC 257, 288-292

Saint Pierre fut consolé en entendant Jésus lui prédire sa mort comme un témoignage de charité. Les Apôtres présents apprirent que son reniement relevait de l'économie de Dieu et de sa miséricorde, non de l'intention profonde de Pierre. Notre Sauveur et Seigneur avait lui-même suggéré cette interprétation quand il avait dit: Simon, Simon, Satan vous a réclamés pour vous passer au crible comme le froment. Mais j'ai prié pour toi, afin que ta foi ne sombre pas. Mais toi, quand tu seras revenu, affermis tes frères (Lc 22,31-32).

De même, veut-il dire, que je te soutiens quand tu es secoué en tous sens, de même toi, deviens aussi un soutien pour ceux de tes frères qui sont troublés, et accorde-leur un peu de la protection dont tu bénéficies. Ne pousse pas ceux qui sont en train de glisser, mais redresse-les dans le danger. Je permets que tu butes, mais je t'empêcherai de tomber, afin que tu m'aides à maintenir debout ceux qui sont secoués.

Ainsi, cette grande colonne qu'était saint Pierre a soutenu le monde agité et n'a pas permis qu'il s'effondre complètement, mais il l'a redressé, il l'a rendu plus solide. Chargé de paître les brebis de Dieu, il a supporté d'être injurié pour elles, et sous les coups il était rempli de joie. En sortant du Grand Conseil hostile, il se réjouissait avec ses compagnons d'avoir été digne de subir ces humiliations pour le nom du Maître (Ac 5,41).

Jeté en prison, il était content et tout heureux. Lorsque, sous Néron, il fut condamné à mourir en croix pour le Crucifié, il priait les bourreaux de ne pas le clouer sur la croix de la même façon que le Maître, mais en sens inverse, par crainte, semble-t-il, que l'identité de la Passion lui valût, chez les ignorants, une vénération égale.

C'est pourquoi il supplia qu'on le clouât les mains en bas et les pieds en haut. Il avait appris, en effet, à choisir la dernière place non seulement dans l'honneur, mais aussi dans la honte. Et s'il avait pu mourir ainsi dix fois, cinquante fois, il l'eût accepté avec grande joie, parce qu'il brûlait du désir de Dieu. C'est ainsi que saint Paul s'écriait parfois: Tous les jours je suis exposé à la mort, aussi vrai, frères, que vous êtes mon orgueil dans le Christ Jésus (1Co 15,31). Et parfois: Je suis crucifié avec le Christ; je vis, mais ce n'est plus moi, c'est le Christ qui vit en moi (Ga 2,20).

Prière

Que la prière des saints Apôtres Pierre et Paul vienne à notre aide, Seigneur: c'est par eux que ton Église a reçu les premiers bienfaits de ta grâce; qu'ils nous obtiennent maintenant les secours nécessaires à notre salut. Par Jésus Christ.

ou bien


Évangile du jour

212 Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (Mt 16,13-19)

Jésus était venu dans la région de Césarée-de-Philippe, et il demandait à ses disciples: "Le Fils de l'homme, qui est-il, d'après ce que disent les hommes?"

Homélie

La foi de Pierre

Traité de saint Hilaire (+ 367) sur la Trinité

La Trinité, livre 6, 36-37; CCL 62, 239-242.

Croire que Jésus est Fils de Dieu de nom et pas de nature, n'est pas la foi évangélique et apostolique. Car si ce nom désignait l'adoption sans que pour autant le Christ soit le Fils venu de Dieu, je me pose cette question: "Pourquoi le bienheureux Simon, fils de Yonas, a-t-il proclamé: Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant (Mt 16,16)? Est-ce parce qu'il a pu, comme tout le monde, naître fils de Dieu par le sacrement qui nous régénère?"

Si le Christ était fils de Dieu en fonction du nom qu'on lui attribue, je demande: "Qu'est-ce qui a été révélé à Pierre, non par la chair et le sang, mais par le Père qui est aux cieux? Une croyance partagée par tous a-t-elle quelque mérite? Et faut-il glorifier la révélation d'une chose que tout le monde connaît? Si le Christ était fils par adoption, pourquoi la confession de Pierre lui vaudrait-elle d'être appelé bienheureux, alors qu'il n'aurait reconnu au Fils qu'une qualité commune à tous les saints?"

Or, la foi de l'Apôtre s'est avancée au-delà des limites de l'intelligence humaine. Nul doute qu'il eût souvent entendu cette parole: Qui vous accueille m'accueille; et qui m'accueille accueille celui qui m'a envoyé (Mt 10,40). Ainsi, Pierre savait déjà que le Christ était envoyé. Et celui qu'il savait être envoyé, il l'avait entendu déclarer: Tout m'a été confié par mon Père; personne ne connaît le Fils, sinon le Père, et personne ne connaît le Père, sinon le Fils (Mt 11,27). Qu'est-ce que le Père a révélé alors à Pierre, et qui lui valut la gloire de voir sa confession appelée bienheureuse? Est-ce qu'il ne connaissait pas les noms du Père et du Fils? Il les avait entendus fréquemment.

Mais il dit une parole qu'aucune voix humaine n'avait encore prononcée: Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant (Mt 16,16). En vérité, alors même que le Christ demeurant dans la chair s'était déjà déclaré Fils de Dieu, l'Apôtre fut alors le premier à reconnaître dans la foi que la nature divine est en lui. Si Jésus, en effet, a loué Pierre, ce n'est pas uniquement pour l'avoi r honoré par sa profession de foi, mais aussi pour avoir reconnu son mystère, car l'Apôtre n'a pas seulement confessé le Christ, mais il l'a aussi proclamé Fils de Dieu. Pour l'honorer, il lui eût certainement suffi de confesser: Tu es le Christ. Il eût pourtant été inutile de l'appeler Christ sans le proclamer Fils de Dieu. De fait, en disant: Tu es, Pierre a clairement déclaré la perfection et le caractère unique de la vraie nature du Fils. Et en disant: Celui-ci est mon Fils (Mt 17,5), le Père a révélé à Pierre qu'il devait proclamer: Tu es le Fils de Dieu. Car la parole Celui-ci est est l'indication donnée par celui qui révèle, tandis que l'adhésion donnée par celui qui confesse sa foi s'exprime par la réponse: Tu es.

L'Église est donc bâtie sur la pierre de cette confession. Mais un esprit de chair et de sang ne peut découvrir le sens de cette profession de foi. Appeler le Christ Fils de Dieu et, de plus, croire qu'il l'est, est un mystère qui ne peut être révélé que par Dieu. Ou alors, serait-ce le nom divin qui aurait été révélé à Pierre plutôt que la filiation de nature? Pour ce qui est du nom, Pierre avait déjà souvent entendu le Seigneur se proclamer Fils de Dieu. Sur quoi porte donc cette glorieuse révélation? Elle concerne certainement la nature et pas le nom, qui avait déjà été souvent proclamé.

Cette foi est le fondement de l'Église. Grâce à cette foi, la puissance de la Mort (Mt 16,18) ne pourra rien contre l'Eglise. Cette foi possède les clefs du Royaume des cieux et ce qui a été délié ou lié par elle sur la terre, est délié et lié dans les cieux. Cette foi est le don de la révélation du Père. Elle ne déclare pas mensongèrement que le Christ a été créé de rien, mais elle le proclame Fils de Dieu selon la nature qui lui est propre.

O délire impie d'un esprit qui s'égare misérablement! Il ne reconnaît pas en Pierre, vieillard proclamé bienheureux, le témoin de la foi, le témoin pour qui le Christ a prié le Père afin que sa foi ne défaille pas (cf. Lc 22,32) dans la tentation.

Au Christ qui le lui demandait, Pierre a réaffirmé son amour pour Dieu, et il s'est affligé de se voir encore mis à l'épreuve comme quelqu'un qui doute et qui hésite, et d'être interrogé une troisième fois. Et ainsi purifié de ses trois tentations, il a mérité de s'entendre dire trois fois par le Seigneur: Sois le berger de mes brebis (Jn 21,17). Alors que tous les Apôtres gardaient le silence, il a reconnu, grâce à une révélation du Père, que le Christ est le Fils de Dieu. Et sa bienheureuse confession de foi lui a valu une gloire suréminente, au-delà de ce que peut concevoir la faible nature humaine.

ou bien

La foi de Pierre, base de l'Église

Homélie de Théophane Cérameus (9e ou 12e siècle)

Homélie 55; PG 132, 960-965.

Et vous, que dites-vous? Pour vous, qui suis-je? (Mt 16,15). Il est vrai, dit Jésus, que l'opinion de la foule à mon sujet est très divisée et changeante, mais vous qui me connaissez depuis si longtemps, quelle idée vous êtes-vous formée en voyant mes oeuvres?

Déconcertés, les disciples ne savent alors que répondre; certains, peut-être, ne sont pas sûrs de ce qu'ils pensent, d'autres craignent de paraître irréfléchis. Mais Pierre, le plus éminent des disciples, se fait l'interprète de tous ses compagnons. <> Instruit par le Père de la haute origine du Fils unique, il prononce ces paroles pleines de sens divin: Tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant (Mt 16,16).

Cette révélation vient vraiment du Père céleste, non de la chair et du sang. Considère, en effet, combien la doctrine théologique cachée dans cette seule phrase est profonde. Car le Seigneur avait demandé: Le Fils de l'homme, qui est-il, d'après ce que disent les hommes? (Mt 16,13). Il avait fait mention du Fils de l'homme pour montrer sa nature humaine. Mais Pierre, sachant qu'il était à la f ois fils d'homme et Fils de Dieu, une personne unique formée de deux natures sans confusion, s'est élancé en esprit vers la nature divine. <>

Considère encore l'exactitude de cette doctrine théologique. Car il peut se trouver de nombreux messies, de nombreux fils et de nombreux dieux, mais il n'y a qu'un Messie, Fils de Dieu, par nature et véritable. C'est la raison pour laquelle il n'a pas dit: "Tu es messie, fils d'un dieu", mais: Tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant! Il a, en effet, joint l'article à chaque terme pour montrer d'une manière plus éclatante le caractère exceptionnel de cette essence bienheureuse et de cette nature simple. Voilà pourquoi il a mérité d'être appelé bienheureux par le Seigneur.

Que lui dit donc le Sauveur? Heureux es-tu, Simon, fils de Yonas (Mt 16,17). Pour quelle raison, en le déclarant bienheureux, fait-il mention de son père et le nomme-t-il fils de Yonas? Il veut dire à peu près: "De même que, par ta nature, tu es fils de Yonas, ton père, de même, de par ma nature et selon mon essence, je suis le Fils de Dieu le Père." Ou plutôt il l'appelle ainsi, parce que, comme il va le dire, cette révélation ne lui vient pas de la chair et du sang, mais de son Père qui est aux cieux. Elle lui vient aussi par l'Esprit Saint, ce qui fait qu'il le nomme Fils de l'Esprit, car Yonas signifie "colombe". <>

Et moi, je te déclare: Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église (Mt 16,18). Toi, qui es Pierre, tu deviendras le rocher de la foi du Verbe, et l'assise sur laquelle l'Église sera établie, et l'origine première de la construction spirituelle. Car sur cette proclamation par laquelle tu m'as reconnu à la fois Fils de Dieu et fils d'homme, se dresseront les fondations de l'Église. Oui, sur la base ainsi posée, s'élèvera en toute sûreté l'édifice de toutes les autres vérités de la foi. <>

Je te donnerai les clefs du Royaume des cieux (Mt 16,19). Jésus ne dit pas: "Je te donne en ce moment", mais: Je te donnerai. Il prédit ainsi le temps qui suivra la résurrection, quand il lui donnera aussi la grâce de l'Esprit Saint, et le pouvoir de lier et de délier, et quand il le placera à la tête du troupeau des brebis douées de raison.

Mais de quelles clefs parle-t-il? Et de quelles portes nomme-t-il Pierre le gardien? Le Christ lui-même est la porte, car il a dit: Moi, je suis la porte (Jn 10,9). Et la clef de cette porte est la foi que le Christ confie au chef des Apôtres. <>

Il donne donc les clefs à Pierre et à ceux qui viendront après lui, pour que les hérétiques ne puissent franchir la porte du Royaume des cieux ni entrer par elle, mais pour que les fidèles la franchissent facilement. Ainsi sera confirmée la parole du Seigneur: Personne, à moins de naître de l'eau et de l'Esprit, ne peut entrer dans le Royaume des cieux (Jn 3,5).

Prière

Seigneur, tu nous as donné ce jour de sainte joie pour fêter les bienheureux Apôtres Pierre et Paul; accorde à ton Église une fidélité parfaite à leur enseignement, puisqu'elle reçut par eux la première annonce de la foi. Par Jésus Christ.


11 juillet dans l'Ordre bénédictin: solennité - Saint Benoît

213 Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc (
Jn 10,17-30)

Jésus se mettait en route quand un homme accourut vers lui, se mit à ses genoux et lui demanda: "Bon Maître, que dois-je faire pour avoir en héritage la vie éternelle?"

Homélie

Tout quitter pour suivre le Christ

Homélie de saint Pierre Damien (+ 1072)

Sermon 9, PL 144, 549-553

Voilà que nous avons tout quitté pour te suivre (Mt 19,27). Quelles paroles solennelles! C'est une grande promesse, c'est une oeuvre sainte et digne de bénédiction de tout quitter et de suivre le Christ. Ces paroles ont entraîné des hommes et des femmes à la pauvreté volontaire, elles ont fait naître les monastères, elles ont rempli les cloîtres et les forêts d'i nnombrables moines et ermites. L'Église se réfère à cette parole quand elle chante: Pour me conduire selon ta parole, j'ai gardé le chemin prescrit (ps 16,4).

C'est une grande chose, en vérité, de tout quitter, mais une plus grande, de suivre le Christ car, comme nous l'apprenons dans les livres, beaucoup ont tout quitté mais n'ont pas suivi le Christ. Suivre le Christ est notre tâche, c'est notre travail, en cela consiste l'essentiel du salut de l'homme, mais nous ne pouvons suivre le Christ si nous n'abandonnons pas tout. Car il s'élance en conquérant joyeux (ps 18,6) et nul, s'il est chargé d'un fardeau, ne peut le suivre.

Voilà, dit Pierre, que nous avons tout quitté (Mt 19,27), non seulement les biens de ce monde, mais aussi les désirs de notre âme. Car il n'a pas tout abandonné, celui qui reste attaché ne fût-ce qu'à lui-même. Bien plus, cela ne sert à rien d'avoir abandonné tout le reste à l'exception de soi-même, car il n'y a pas pour l'homme de fardeau plus lourd que le moi. Quel tyran est plus cruel, quel maître plus impitoyable pour l'homme que sa volonté propre? <> Par conséquent, il faut que nous abandonnions nos possessions et notre volonté propre, si nous voulons suivre celui qui n'avait pas d'endroit où reposer la tête (Lc 9,58) et qui est venu non pour faire sa volonté, mais pour faire la volonté de celui qui l'a envoyé (Jn 6,38).

Il faut donc que nous quittions tout pour suivre le Christ seul, que nous nous efforcions de plaire au Christ seul, que nous nous attachions à sa bienveillante volonté avec un soin vigilant. Car il est certain qu'aussitôt nous connaîtrons par expérience ce que la Vérité promet à quiconque abandonne tout et marche à sa suite: Il recevra le centuple, dit-elle, et il aura en héritage la vie éternelle (Mt 19,29). Le don du centuple nous est, en effet, un réconfort pour la marche, et la possession de la vie éternelle fera notre bonheur pour toujours dans la patrie céleste.

Mais quel est ce centuple? Simplement, les consolations de l'Esprit doux comme le miel, ses visites et ses premiers fruits. C'est le témoignage de notre conscience, c'est l'heureuse et très joyeuse attente des justes, c'est la mémoire de la surabondante bonté de Dieu, c'est aussi, en vérité, l'immensité de sa douceur. Ceux qui ont fait l'expérience de ces dons n'ont pas besoin qu'on leur en parle, et qui pourrait les décrire avec de simples mots à ceux qui ne l'ont pas faite? <>

Mais c'est à notre père et maître saint Benoît que la teneur de cet évangile peut le mieux s'appliquer dans sa totalité. Abandonnant dès l'enfance le monde et son éclat, il se mit à poursuivre très rapidement le Christ lancé dans sa course, et il n'eut de cesse qu'il ne l'ait rejoint. <> Que son intercession nous obtienne le réconfort en cette vie et la possession de la vie éternelle, par la grâce de celui qui est venu pour que nous ayons la vie et que nous

l'ayons en abondance, Jésus Christ notre Seigneur, qui est béni dans les siècles! Amen.

Prière

Dieu qui as fait de saint Benoît un maître spirituel pour ceux qui apprennent à te servir, permets, nous t'en prions, que sans rien préférer à ton amour, nous avancions d'un coeur libre sur les chemins de tes commandements. Par Jésus Christ.


6 août - Transfiguration du Seigneur

214

Évangile de l'année A

215 Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (Mt 17,1-9)

Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean son frère, et il les emmène à l'écart sur une haute montagne. Il fut transfiguré devant eux; son visage devint brillant comme le soleil, et ses vêtements, blancs comme la lumière.

Homélie

La Transfiguration annonce la Résurrection

Homélie de saint Augustin (+ 430)

Sermon 78, 2-6; PL 38, 490-493

Le Seigneur Jésus devint brillant comme le soleil, et ses vêtements, blancs comme la neige, et Moïse et Elle s'entretenaient avec lui (cf. Mt 17,2-3).

Témoin de ce spectacle, Pierre, en homme qu'il était, eut des pensées humaines. Il dit: Seigneur, il nous est bon d'être ici! Las de vivre au milieu de la foule, il avait trouvé la solitude sur la montagne, où son âme se nourrissait du Christ. Pourquoi quitter ce lieu pour aller vers les fatigues et les peines, puisqu'il brûlait pour Dieu d'un saint amour et, par le fait même, sanctifiait sa vie? Il voulait ce bonheur pour lui, si bien qu'il ajouta: Si tu le veux, faisons ici trois tentes, une pour toi, une pour Moïse et une pour Elle (Mt 17,4).

Le Seigneur ne répondit rien à cela, et pourtant Pierre obtint une réponse. En effet, tandis qu'il parlait, une nuée lumineuse apparut et les couvrit de son ombre. Pierre désirait trois tentes: la réponse ve nue du ciel montra que nous n'en avons qu'une, que l'esprit humain voulait pourtant diviser. Le Verbe de Dieu est le Christ, le Verbe de Dieu est dans la Loi, le Verbe de Dieu est dans les Prophètes. Pourquoi, Pierre, cherches-tu à le diviser? Tu devrais plutôt unir. Tu demandes trois tentes: comprends qu'il n'y en a qu'une.

Au moment donc où la nuée les enveloppa tous, et forma pour ainsi dire une seule tente au-dessus d'eux, une voix en sortit et ils entendirent ces paroles: Celui-ci est mon Fils bien-aimé.

Moïse était là, Élie aussi était là, mais la voix ne dit point: "Ceux-ci sont mes fils bien-aimés." Car autre chose est d'être le Fils unique; autre chose, des enfants adoptifs. Celui que la voix révélait est celui dont la Loi et les Prophètes se glorifiaient. Celui-ci, disait-elle, est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai mis tout mon amour; écoutez-le (Mt 17,5). Car vous l'avez écouté dans les Prophètes, vous l'avez écouté dans la Loi, et où ne l'avez-vous pas entendu? A ces mots, les disciples tombèrent à terre.

Ceci nous fait déjà comprendre que le Royaume de Dieu est présent dans l'Église. Le Seigneur était là, la Loi et les Prophètes étaient là. Mais le Seigneur y était comme Seigneur. La Loi était représentée par Moïse, la Prophétie par Élie. Mais tous deux se trouvaient là comme serviteurs et ministres. Ils étaient comme des récipients, le Seigneur comme la source. Moïse et les Prophètes parlaient et écrivaient, mais c'était lui qui les remplissait des paroles qu'ils répandaient.

Alors le Seigneur tendit la main et remit ses disciples debout. Puis ils ne virent plus que Jésus seul (Mt 17,8). <> En tombant à terre, les Apôtres symbolisent notre mort, car il a été dit à la chair: Tu es poussière et tu retourneras à la poussière (Gn 3,19). Mais, en les relevant, le Seigneur symbolise la résurrection. Et, après la résurrection, à quoi te sert la Loi? A quoi te sert la Prophétie? Dès lors Élie disparaît, et Moïse disparaît. Ce qui te reste, c'est: Au commencement était le Verbe, et le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu (Jn 1,1). Le Verbe te reste pour que Dieu soit tout en tous (1Co 15,28). <>

Descends, Pierre. Tu désirais te reposer sur la montagne <>. Voici que le Seigneur lui-même te dit: "Descends pour peiner et servir en ce monde, pour être méprisé et crucifié en ce monde." La vie est descendue pour être mise à mort, le pain est descendu pour endurer la faim, la voie est descendue pour se fatiguer sur le chemin, la source est descendue pour endurer la soif, et toi, tu refuses de souffrir? Ne cherche pas ton profit. Pratique la charité, annonce la vérité. Tu parviendras alors à l'immortalité, et, avec elle, tu trouveras la paix.


Évangile de l'année B

216 Évangile de Jésus Christ selon saint Marc (Mc 9,2-10)

Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean, et les emmène, eux seuls, à l'écart sur une haute montagne. Et il fut transfiguré devant eux. Ses vêtements devinrent resplendissants, d'une blancheur telle que personne sur terre ne peut obtenir une blancheur pareille.

Homélie

Le Fils bien-aimé du Père

Homélie de saint Jean de Damas (+ vers 744)

Homélie sur la Transfiguration du Seigneur, 16-18; PG 96, 572-573.

Voici qu'une nuée lumineuse les couvrit de son ombre (Mt 17,5), et les disciples furent saisis d'une crainte glus grande en voyant Jésus le Sauveur, avec Moïse et Élie dans la nuée.

Jadis, il est vrai, quand Moïse vit Dieu, il entra dans la divine nuée, donnant ainsi à entendre que la Loi était une ombre. Écoute ce que dit saint Paul: La Loi, en effet, n'avait que l'ombre des biens à venir, non la réalité même (He 10,1). Israël, en ce temps-là, n'avait pas pu fixer les yeux sur la gloire passagère du visage de Moïse (2Co 3,7). Mais nous, le visage découvert, nous reflétons la gloire du Seigneur et nous sommes transformés d'une gloire en une gloire plus grande, par l'action du Seigneur qui est Esprit (2Co 3,18).

Aussi la nuée qui couvrit les disciples de son ombre n'était-elle pas remplie de ténèbres - car elle ne les menaçait pas - mais de lumière. En effet, le mystère resté caché depuis les siècles et les générations a été révélé (Col 1,26) et la gloire perpétuelle et éternelle est manifestée. Voilà pourquoi Moïse et Élie, aux côtés du Sauveur, personnifiaient la Loi et les Prophètes. Celui qu'annonçaient la Loi et les Prophètes, c'est, en vérité, Jésus, le dispensateur de la vie. <>

Et une voix sortit de la nuée, qui disait: "Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai mis tout mon amour; écoutez-le!" (Mt 17,5).

Tels sont les mots du Père sortis de la nuée de l'Esprit: "Celui-ci est mon Fils bien-aimé, lui qui est homme et apparaît tel. Hier, il s'est fait homme, a vécu humblement parmi vous, et maintenant son visage resplendit. Celui-ci est mon Fils bien-aimé, lui qui est avant les siècles. Il est le Fils unique de l'Unique. Hors du temps et éternellement il procède de moi, le Père. Il n'a pas accédé après moi à l'existence, mais, de toute éternité, il est de moi, en moi et avec moi." <>

C'est par la bienveillance du Père que son Fils unique, son Verbe, s'est fait chair. C'est par sa bienveillance que le Père a accompli, dans son Fils unique, le salut du monde entier. C'est la bienveillance du Père qui a fait l'union de toutes choses en son Fils unique. Car l'homme est par nature un petit monde, portant en lui-même l'union entre toute essence visible et invisible, du fait qu'il est à la fois l'une et l'autre. Vraiment, il a plu au Maître de toutes choses, au Créateur qui gouverne l'univers, d'unir en son Fils unique et consubstantiel la divinité et l'humanité, et, par celle-ci, toute créature, pour que Dieu soit tout en tous (1Co 15,28).

"Celui-ci est mon Fils bien-aimé, le resplendissement de ma gloire, l'empreinte de ma substance (cf. He 1,3), par qui aussi j'ai créé les anges, par qui le ciel a été affermi, et la terre établie. Il porte l'univers par sa parole toute-puissante et par le souffle de sa bouche, c'est-à-dire l'Esprit qui guide et donne la vie."

"Écoutez-le, car celui qui le reçoit, me reçoit, moi qui l'ai envoyé, non en vertu de mon souverain pouvoir, mais à la façon d'un père. En tant qu'homme, en effet, il est envoyé, mais en tant que Dieu, il demeure en moi, et moi en lui. Celui qui n'honore pas mon Fils unique et bien-aimé, ne m'honore pas, moi, le Père, qui l'ai envoyé. Ecoutez-le, car il a les paroles de la vie éternelle."


Évangile de l'année C

217 Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 9,28-36)

Jésus prit avec lui Pierre, Jean et Jacques, et il alla sur la montagne pour prier. Pendant qu'il priait, son visage apparut tout autre, ses vêtements devinrent d'une blancheur éclatante.

Homélie

Dans la lumière de Dieu

Homélie de Grégoire Palamas (+ 1359)

Homélie 34; PG 151, 429-432

Prenant avec lui uniquement Pierre, Jacques et Jean, Jésus les emmena à l'écart, sur une haute montagne, et il fut transfiguré devant eux (Mt 17,1-2), c'est-à-dire sous leurs yeux. "Que signifie: 'Il fut transfiguré"?", demande Chrysostome, le théologien. Cela veut dire qu'il laissa entrevoir, comme il le jugea bon, un peu de sa divinité, et qu'il montra à ses disciples Dieu habitant en lui. Pendant qu'il priait, dit saint Luc, son aspect changea (Lc 9,29), tandis que saint Matthieu écrit: Il devint brillant comme le soleil (Mt 17,2).

Il dit comme le soleil, non pour que nous concevions cette lumière comme une chose sensible <>, mais il veut nous faire comprendre ceci: ce que le soleil est pour ceux qui vivent selon les sens, et qui voient par les sens, le Christ l'est, dans sa nature divine, pour ceux qui vivent selon l'Esprit et voient dans l'Esprit. Dans la vision divine, ceux qui so nt semblables à Dieu n'ont nul besoin d'une autre lumière que lui, car, pour ceux qui sont dans l'éternité, il n'est pas d'autre lumière que lui. Pourquoi, en effet, auraient-ils besoin d'une deuxième lumière, alors qu'ils ont la lumière primordiale?

Or, pendant qu'il priait, il resplendit ainsi et révéla, d'une manière indescriptible, en présence des prophètes les plus éminents, cette lumière mystérieuse aux disciples qu'il avait choisis. Il nous montre ainsi que cette vision bienheureuse est le fruit de la prière. Et il nous apprend que ceux qui sont proches de Dieu par la vertu et lui sont unis en esprit parviennent à la vision de cette splendeur. Celle-ci s'offre aux regards de tous ceux qui tendent sans cesse vers Dieu, par la pratique exacte des bonnes oeuvres et la prière sincère. Car, comme le dit saint Jean Chrysostome , "seul celui dont l'esprit a été purifié peut contempler la beauté véritable et très désirable qui entoure la bienheureuse nature divine. " En contemplant ses rayons et ses beautés, il en reçoit une part, pour ainsi dire un rayon de lumière éclatante, qui fait briller son propre regard.

C'est pourquoi le visage de Moïse fut aussi glorifié pendant qu'il s'entretenait avec Dieu (cf. Ex 34,29). Pensez-y: Moïse ne fut-il pas aussi transfiguré, une fois monté sur la montagne, et n'est-ce pas qu'il vit la gloire du Seigneur? Mais il subit la transfiguration et n'en fut pas l'auteur. <>

Notre Seigneur Jésus Christ, lui, possédait cette splendeur par nature. Dès lors, il n'avait même pas besoin de prier pour faire resplendir son corps de lumière divine. Mais il a indiqué aux saints par quel moyen ils recevraient la splendeur de Dieu et comment ils en auraient la vision. Car dans le Royaume de leur Père les justes resplendiront comme le soleil (Mt 13,43). Ainsi, devenus tout entiers lumière divine, et en tant qu'enfants de la lumière divine, ils verront le Christ éminemment rayonnant de lumière ineffable et divine. La gloire qui émane naturellement de

sa divinité s'est manifestée sur le Thabor, également partagée par son corps, à cause de l'unité de sa personne. C'est donc aussi par une telle lumière que son visage devint brillant comme le soleil (Mt 17,2).

Prière

Seigneur, dans la transfiguration de ton Christ, tu as confirmé par le témoignage de Moïse et d'Élie la vérité des mystères de la foi, et tu as annoncé notre merveilleuse adoption; accorde-nous d'écouter la voix de ton Fils bien-aimé, afin de pouvoir un jour partager avec lui son héritage. Lui qui règne.


15 août - Assomption de la Vierge Marie

218

Évangile du jour

219 Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 1,39-56)

En ces jours-là, Marie se mit en route rapidement vers une ville de la montagne de Judée. Elle entra dans la maison de Zacharie et salua Elisabeth.

Homélie

au choix

Celle qui nous précède

Homélie de saint Bernard (+ 1153) pour l'Assomption

Sermon 1 pour l'Assomption de la bienheureuse Marie, Opéra, éd J leclercq et H rochais, vol 5, Rome, 1968, 228-231

En montant aujourd'hui dans les cieux, la Vierge glorieuse a certainement beaucoup ajouté à la joie des citoyens du ciel et les a remplis d'allégresse. C'est elle, en effet, qui par sa salutation fit tressaillir de joie un enfant encore enfermé dans le sein de sa mère. L'âme d'un enfant qui n'était pas encore né s'est fondue de bonheur à la voix de Marie. Comment, dès lors, pourrions-nous imaginer ce que fut la jubilation des bienheureux quand ils eurent le bonheur d'entendre sa voix, de contempler son visage et de jouir de sa présence bénie?

Et pour nous, mes bien-aimés, à quelle fête son assomption ne donne-t-elle pas lieu? Quelle joie et quel bonheur ne nous procure-t-elle pas? La présence de Marie a fait resplendir la terre entière, si bien que maintenant la patrie céleste elle-même, illuminée des rayons de cette lampe virginale, brille d'un éclat plus vif. C'est donc avec raison que les actions de grâce et les chants de louange (Is 51,3) retentissent dans les cieux. Ne pensez-vous pas pourtant que nous avons plus de motifs de gémir que d'applaudir? Car nous ne pouvons manquer ici-bas de pleurer le départ de Marie dans la mesure même où le ciel se réjouit de sa présence.

Cessons toutefois de nous lamenter puisque la cité que nous avons ici-bas n'est pas définitive (He 13,14) et que nous aspirons au contraire à celle où la bienheureuse Marie fait aujourd'hui son entrée. Si nous devons un jour être comptés parmi ses habitants, il est vraiment juste que, même dans notre exil, même au bord des fleuves de Babylone, nous nous souvenions (Ps 136,1) de la cité céleste, nous prenions part à sa joie et participions à son allégresse. Nous aspirons surtout à rejoindre celle qui remplit aujourd'hui de sa joie, comme d'un torrent, la ville de Dieu (cf. ps 45,5), au point que nous en recevions quelques gouttes tombant sur la terre.

Oui, notre Reine nous a précédés et le glorieux accueil qui lui est fait nous engage, nous, ses serviteurs confiants, à suivre Notre Dame en nous écriant: Entraîne-nous après toi, courons: tes parfums ont une odeur suave (Ct 1,3-4)! Notre exil a envoyé en avant une avocate qui, en sa qualité de Mère de notre juge et de Mère de la miséricorde, consacrera ses prières efficaces à la cause de notre salut.

Aujourd'hui notre terre a envoyé un don précieux au ciel pour que d'heureux liens d'amitié unissent les hommes à Dieu, la terre au ciel, la petitesse à la

grandeur, grâce aux présents échangés. Car c'est au ciel que le fruit sublime de la terre est monté, au ciel d'où descendent les dons excellents, les dons parfaits (cf. Jc 1,17). La Vierge bénie, élevée dans les hauteurs, dispensera donc à son tour des dons aux hommes (cf. Ep 4,8). Pourquoi ne le ferait-elle pas, puisque le pouvoir ne lui en fera pas défaut, ni la volonté? Elle est la reine des cieux, une reine compatissante, pour tout dire, elle est la Mère du Fils unique de Dieu. Il n'y a rien, en effet, qui puisse mieux nous faire comprendre l'étendue de sa puissance et de sa bonté, à moins que l'on ne croie pas que le Fils de Dieu honore sa Mère. Pourrait-on d'ailleurs douter vraiment que les entrailles de Marie se soient remplies de sentiments de charité, alors que la Charité même, venue de Dieu, y est demeurée corporellement pendant neuf mois? <>

Qui pourra raconter la génération (cf. Is 53,8) du Christ et l'assomption de Marie? Elle est comblée dans les cieux d'une gloire d'autant plus singulière qu'elle a obtenu sur la terre une grâce plus insigne que toutes les autres femmes. Si personne n'a vu de ses yeux ni entendu de ses oreilles, si le coeur de l'homme n'a pas imaginé ce que Dieu a préparé pour ceux qui l'aiment (1Co 2,9), qui pourra dire ce qu'il a préparé pour celle qui l'a engendré et qui l'aime, c'est certain, plus que tous?

Pleinement heureuse, mille fois heureuse est Marie, soit qu'elle reçoive le Sauveur, soit qu'il la reçoive. Dans l'un et l'autre cas, la dignité et la virginité de cette Mère sont admirables, et la faveur dont la majesté divine l'honore mérite nos louanges.

ou bien

La Vierge associée au triomphe de son Fils

Homélie de Nicolas Cabasilas (+ après 1388) sur la Dormition de la Mère de Dieu

Homélies mariales byzantines, PO 19, 390-391

Il fallait que la Vierge fût associée au Fils en tout ce qui regarde notre salut. De même qu'elle lui fit partager sa chair et son sang et qu'elle fut, en retour, gratifiée de ses bienfaits, de même elle eut part à toutes ses souffrances et à toutes ses peines. Il fut attaché à la croix et eut le côté percé par la lance. Elle eut le coeur transpercé par une épée, comme le divin Syméon l'avait annoncé. <>

La première, elle fut rendue conforme à la mort du Sauveur par une mort semblable à la sienne. C'est pourquoi, avant tous les autres, elle eut part à la résurrection. En effet, après que le Fils eut brisé la tyrannie de l'enfer, elle eut le bonheur de le voir ressuscité et de recevoir sa salutation, et elle l'accompagna autant qu'elle le put, jusqu'à son départ vers le ciel. Après son ascension, elle prit la place que le Sauveur avait laissée libre parmi ses Apôtres et ses autres disciples, ajoutant ainsi aux bienfaits que Dieu avait dispensés à l'humanité celui de compléter ce qui manquait au Christ (Col 1,24) beaucoup mieux que quiconque. Cela ne convenait-il pas à sa mère plus qu'à tout autre?

Mais il fallait que cette âme très sainte se détache de ce corps très sacré. Elle l'a quitté et s'est unie à l'âme du Fils, elle, une lumière créée, à la lumière primordiale. Et son corps, après être resté quelque temps sur la terre, a été lui aussi emporté au ciel. Il fallait, en effet, qu'il emprunte tous les chemins que le Sauveur avait parcourus, qu'il resplend isse pour les vivants et les morts, qu'il sanctifie en toutes choses la nature et qu'il reçoive ensuite la place qui lui convenait. Le tombeau l'a donc abrité quelque temps, puis le ciel a recueilli cette terre nouvelle, ce corps spirituel, ce trésor de notre vie, plus digne que les anges, plus saint que les archanges. Et le trône fut rendu au roi, le paradis à l'arbre de vie, le monde à la lumière, l'arbre à son fruit, la Mère au Fils: elle en était parfaitement digne puisqu'elle l'avait engendré.

Qui, ô bienheureuse, trouvera les mots capables d'égaler ta justice et les bienfaits que tu as reçus du Seigneur, et ceux que tu as prodigués à toute l'humanité? Quand bien même, comme dirait saint Paul, il parlerait les langues des hommes et des anges (1Co 13,1). Je pense que c'est aussi une part du bonheur éternel réservé

aux justes, que de connaître tes privilèges et de les publier aussi bien que tu le mérites. Car cela fait partie également des choses que l'oeil n'a pas vues, que l'oreille n'a pas entendues (1Co 2,9) et que, selon saint Jean, l'immortel, le monde lui-même ne pourrait comprendre (Jn 21,25). Tes merveilles ne peuvent resplendir que dans ce théâtre, ce ciel nouveau et cette terre nouvelle (Ap 21,1), où luit le soleil de justice, que les ténèbres ne suivent ni ne précèdent. Tes merveilles, le Seigneur lui-même les proclame tandis que les anges applaudissent.

Prière

Dieu éternel et tout-puissant, toi qui as fait monter jusqu'à la gloire du ciel, avec son âme et son corps, Marie, la Vierge immaculée, mère de ton Fils, fais que nous demeurions attentifs aux choses d'en haut pour obtenir de partager sa gloire. Par Jésus Christ.



Homéliaire patristique 210