Homéliaire patristique 48

8e dimanche du temps ordinaire A

48 Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (
Mt 6,24-34)

Comme les disciples s'étaient rassemblés autour de Jésus, sur la montagne, il leur disait: "Aucun homme ne peut servir deux maîtres: ou bien il détestera l'un et aimera l'autre, ou bien il s'attachera à l'un et méprisera l'autre."

Homélie

La hiérarchie des valeurs

Homélie de saint Jean Chrysostome (+ 407)

Catéchèses baptismales, 8, 19-20.23-25; SC 50, 257-260.

Si vraiment nous donnons la première place aux réalités spirituelles, nous n'aurons pas à nous préoccuper des biens matériels, car Dieu, dans sa bonté, nous les procurera en abondance. Si, au contraire, nous veillons uniquement à nos intérêts temporels sans prendre soin de notre vie spirituelle, le souci constant des choses terrestres nous conduira à négliger notre âme. Nous perdrons alors les biens spirituels et n'en retirerons aucun avantage matériel.

Ne renversons donc pas, je vous en prie, l'ordre des choses. Connaissant la bonté de notre Maître, nous lui ferons confiance en tout et ne nous laisserons pas accabler par les soucis de cette vie. Sans aucun doute, celui qui, par son amour, nous a amenés du néant à l'être nous fera encore plus sûrement bénéficier à l'avenir de toute sa providence. Votre Père céleste sait que vous avez besoin de tout cela (Mt 6,32) avant même que vous l'ayez demandé (Mt 6,8).

Jésus veut donc que nous soyons libres de tout souci temporel et que nous nous consacrions totalement aux oeuvres spirituelles. "Cherchez donc, nous dit-il, les biens spirituels et je pourvoirai moi-même amplement à tous vos besoins matériels. <> Regardez les oiseaux du ciel, ils ne font ni semailles ni moisson, ils ne font pas de réserves dans des greniers, et votre Père céleste les nourrit (Mt 6,26).

Autrement dit: "Si je prends un tel soin des oiseaux sans raison et que je leur procure tout ce dont ils ont besoin, sans semailles ni labour, je veillerai d'autant mieux sur vous, qui êtes doués de raison, pourvu que vous choisissiez de préférer le spirituel au charnel. Puisque je les ai créés pour vous, ainsi que tous les autres êtres, et que j'en prends tant de soin, de quelle sollicitude ne vous jugerai-je pas dignes, vous pour qui j'ai fait tout cela?"

Mettons donc notre confiance, je vous en prie, en la promesse de Dieu et dirigeons toutes nos pensées vers les désirs spirituels. Considérons tout le reste comme secondaire par rapport à la jouissance des biens futurs. <>

Puissions-nous tous les obtenir par la grâce et l'amour de notre Seigneur Jésus Christ, à qui soient, avec le Père et le Saint-Esprit, gloire, puissance, honneur, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Amen.

Prière

Fais que les événements du monde, Seigneur, se déroulent dans la paix, selon ton dessein, et que ton peuple connaisse la joie de te servir sans inquiétude. Par Jésus Christ.

ou bien

Dieu, Créateur du monde, tu as vêtu de splendeur les lis des champs pour qu'ils soient le signe de ta sollicitude. Ranime en nous la foi en ta bonté et, malgré les soucis de la vie, fais-nous chercher d'abord le Royaume et sa justice. Par Jésus Christ.


9e dimanche du temps ordinaire A

49 Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (
Mt 7,21-27)

Comme les disciples s'étaient rassemblés autour de Jésus, sur la montagne, il leur disait: "Il ne suffit pas de me dire: 'Seigneur, Seigneur!'pour entrer dans le Royaume des cieux; mais il faut faire la volonté de mon Père qui est aux cieux."

Homélie

Bâtir sa vie sur la parole de Dieu

Homélie de Philoxène de Mabboug (+ 523)

Homélie 1, 4-8; version remaniée de SC 44, 27-31

Tout homme qui écoute ce que je dis là et le met en pratique est comparable à un homme prévoyant qui a bâti sa maison sur le roc. La pluie est tombée, les torrents ont dévalé, la tempête a soufflé et s'est abatt ue sur cette maison; la maison ne s'est pas écroulée, car elle était fondée sur le roc (Mt 7,24-25).

Il faut donc, selon ce que dit notre Maître, que nous nous appliquions non seulement à écouter la parole de Dieu, mais encore à nous y conformer. <> L'écoute de la loi est une bonne chose, car elle nous incite aux actions vertueuses. Nous avons raison de lire et de méditer les Écritures, car c'est ainsi que nous purifions l'intime de notre âme des pensées mauvaises.

Mais lire, écouter et méditer assidûment la parole de Dieu sans la mettre en pratique, est une faute que l'Esprit de Dieu a condamnée à l'avance. <> Il a même interdit à celui qui se trouve dans de telles dispositions de prendre le livre saint dans ses mains impures. Mais à l'impie, Dieu déclare: "Qu'as-tu à réciter mes lois, à garder mon alliance à la bouche, toi qui n'aimes pas les reproches et rejettes loin de toi mes paroles?" (ps 49,16-17). <>

Celui qui lit assidûment les Écritures sans les mettre en pratique, trouve son accusation dans sa lecture; il mérite une condamnation d'autant plus grave qu'il méprise et dédaigne chaque jour ce qu'il entend chaque jour. Il est comme un mort, un cadavre sans âme. Des milliers de trompettes et de cors peuvent bien sonner aux oreilles d'un mort, il ne les entendra pas. De même, l'âme qui est morte dans le péché, le coeur qui a perdu le souvenir de Dieu, n'entend pas le son ni les cris des paroles divines, et la trompette de la parole spirituelle ne l'impressionne pas: cette âme est plongée dans le sommeil de la mort et le trouve agréable. <>

Il faut donc que le disciple de Dieu porte ancré dans son âme le souvenir de son Maître, Jésus Christ, et qu'il pense à lui jour et nuit. Il lui faut apprendre par où il commencera, comment et où il construira les pièces de son bâtiment et comment il l'achèvera. C'est ainsi qu'il évitera d'être ridiculisé par tous les passants, comme notre Seigneur l'a dit de celui qui a commencé à bâtir une tour et n'a pas pu l'achever. <>

Selon la parole de Paul, les fondations sont déjà posées: ces fondations, c'est Jésus Christ, notre Dieu. <> Si sur ces fondations on bâtit avec de l'or, de l'argent ou de la belle pierre, avec du bois, de la terre ou du chaume, le travail de chacun sera mis en pleine lumière, car le feu le fera connaître, et permettra d'apprécier la qualité du travail de chacun (cf. 1Co 3,12-13).

Ce sont les vertus et les beautés de la justice que Paul a comparées à l'or, à l'argent et à la belle pierre: la foi est comme l'or; la tempérance, le jeûne, la sobriété et les autres bonnes actions sont comme l'argent; l'amour, la paix, l'espérance, les pensées pures et saintes, sont comme les belles pierres, ainsi que l'intelligence spirituelle qui contemple Dieu et la grandeur de son être,

et garde le silence, en tremblant devant les mystères divins que nul ne peut comprendre ni exprimer.

Prière

Seigneur notre Père, nous en appelons à ta providence qui jamais ne se trompe en ses desseins: tout ce qui fait du mal, écarte-le, et donne-nous ce qui peut nous aider. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur, oserons-nous encore t'appeler ainsi, après ce que tu nous dis de tes exigences et ce que nous savons de nos infidélités? N'écoute que ta tendresse; exauce ceux qui te supplient et rends leur vie conforme à ce que leurs lèvres proclament. Toi qui règnes.


10e dimanche du temps ordinaire A

50 Evangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (
Mt 9,9-13)

Jésus, sortant de Capharnaum, vit un homme, du nom de Matthieu, assis à son bureau de publicain. Il lui dit: "Suis-moi." L'homme se leva et le suivit.

Homélie

Jésus est venu appeler les faibles et les pécheurs

Homélie de saint Augustin (+ 430)

Homélies sur les psaumes, ps 58, 1, 7, CCL 39, 733-734.

Il y a des hommes forts <> qui mettent leur confiance dans leur propre justice. Cette sorte de force a empêché les Juifs de passer par le trou de l'aiguille. Ils prétendaient, en effet, être justes par eux-mêmes, et, se considérant comme des gens bien portants, ils ont refusé le remède et ont mis à mort le médecin lui-même. Aussi bien, ce ne sont pas ces hommes forts que le Seigneur est venu appeler, mais les faibles, puisqu'il a dit: Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades. <> Je suis venu appeler non pas les justes, mais les pécheurs, en vue du repentir (Mt 9,12-13).

Ils étaient forts, ceux qui récriminaient contre les disciples du Christ parce que leur Maître fréquentait les faibles et mangeait avec eux. Pourquoi donc, leur disaient-ils, votre maître mange-t-il avec les publicains et les pécheurs (Mt 9,11)?

Ah! vous, les forts, qui n'avez pas besoin de médecin! Votre force ne vient pas de la santé mais de la folie. <> Dieu nous garde d'imiter ces hommes forts! Car on peut craindre de tout homme qu'il ne veuille les imiter. Mais le Maître de l'humilité, qui a partagé notre faiblesse et nous a rendus participants de sa divinité, est descendu du ciel pour nous montrer le chemin et être lui-même notre chemin. Surtout il a bien voulu nous laisser l'exemple de son humilité. Voilà pourquoi il n'a pas dédaigné d'être baptisé par son serviteur, afin de nous apprendre à confesser nos péchés, à nous humilier pour devenir forts et à faire nôtre cette parole de l'Apôtre: Lorsque je suis faible, c'est alors que je suis fort (2Co 12,10). <>

Quant à ceux qui se sont flattés d'être forts, qui ont, en d'autres termes, prétendu être justes par leur propre vertu, ils ont buté contre la pierre d'achoppement (Rm 9,32). Ils ont pris l'Agneau pour un bouc; et parce qu'ils l'ont mis à mort comme un bouc, ils n'ont pas mérité d'être rachetés par l'Agneau.

Ce sont donc ces hommes forts qui se sont jetés sur le Christ en se vantant de leur justice. Écoutez ce que disaient ces hommes forts! Des gens de Jérusalem chargèrent un jour des gardes d'aller arrêter le Chr ist. Or, ceux-ci n'osèrent se saisir de lui. <> A ceux qui leur demandaient pourquoi ils n'avaient pas pu l'arrêter, les gardes répliquèrent: Jamais un homme n'a parlé comme cet homme. Alors ces hommes forts déclarèrent: Parmi les pharisiens et les scribes y en a-t-il un seul qui ait cru en lui? Il n'y a que ce peuple qui ne sait rien de la Loi (Jn 7,45-49).

Ils s'étaient mis au-dessus de la foule des faibles qui accourait vers le médecin. Pourquoi? Simplement parce qu'ils étaient forts. Et, ce qui est plus grave, ils ont aussi, en faisant usage de leur force, attiré à eux toute cette foule. Puis ils ont tué le médecin de tous les hommes. Mais lui, dans sa mort, a préparé pour tous les malades un remède avec son sang.

Prière

Seigneur, source de tout bien, réponds sans te lasser à notre appel: inspire-nous ce qui est juste, aide-nous à l'accomplir. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur notre Dieu, quand ton Fils est venu chez les hommes, il n'a pas appelé les justes mais les pécheurs. Ôte de notre coeur la suffisance. En nous découvrant notre faiblesse, avive en nous le besoin de ta présence et fais-nous désirer la guérison que tu es seul à pouvoir donner. Par Jésus Christ.


11e dimanche du temps ordinaire A

51 Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (
Mt 9,36-10,8)

Jésus, voyant les foules, eut pitié d'elles parce qu'elles étaient fatiguées et abattues comme des brebis sans berger. Il dit à ses disciples: "La moisson est abondante, et les ouvriers peu nombreux."

Homélie

La moisson évangélique

Homélie de saint Jean Chrysostome (+ 407)

Homélie sur la moisson abondante, 10, 2-3; PG 63, 519-521.

Tous les travaux de l'agriculteur aboutissent naturellement à la moisson. Comment donc, dis-moi, le Christ a-t-il appelé une oeuvre qui en était encore à ses débuts une moisson? L'idolâtrie régnait sur toute la terre. <> Partout, la fornication, l'adultère, la débauche, la cupidité, le vol, les guerres. <> La terre était emplie de tant de maux! Aucune semence n'y avait encore été jetée. Les épines, les chardons et les mauvaises herbes, qui recouvraient le sol, n'avaient pas encore été arrachés. Aucune charrue n'avait encore été tirée, aucun sillon tracé.

Comment donc Jésus peut-il dire que la moisson est abondante? Oui, comment donne-t-il ce nom à l'Évangile dans de telles circonstances juste avant d'envoyer ses Apôtres partout dans ce monde? Ils sont probablement bouleversés et déconcertés, ils doivent se faire ces réflexions: "Comment pourrons-nous même ouvrir la bouche, nous tenir debout, discuter, paraître devant tant de milliers d'hommes? Nous, les Onze, comment corrigerons-nous tous les habitants de la terre? Saurons-nous, ignorants, aborder des savants; nous, qui sommes dépouillés, des hommes armés; nous, des subordonnés, des autorités? Nous qui ne connaissons qu'une langue, arriverons-nous à discuter dans tant de dialectes, avec les peuples barbares qui parlent des langues étrangères? Qui nous supportera sans même comprendre notre langue?"

Jésus ne veut pas que de pareils raisonnements les plongent dans le désarroi. Aussi appelle-t-il l'Évangile une moisson. C'est comme s'il leur disait: "Tout est préparé, toutes les dispositions ont été prises. Je vous envoie récolter le grain mûr, vous pourrez semer et moissonner le même jour. "

Quand l'agriculteur sort de chez lui pour aller faire la moisson, il déborde de joie et resplendit de bonheur. Il n'envisage ni les peines ni les difficultés qu'il pourra rencontrer. Ayant en tête la moisson qui va lui revenir, il court, se hâte de faire la récolte annuelle. Absolument rien ne peut le retenir, l'empêcher ou le faire douter de l'avenir: ni pluie, ni grêle, ni sécheresse, ni légions de sauterelles malfaisantes. Ceux qui s'apprêtent à moissonner ne connaissent pas ces inquiétudes, si bien qu'ils se mettent au travail en dansant et en bondissant de joie.

Vous devez être comme eux et aller par toute la terre avec une joie beaucoup plus grande encore. C'est la moisson qui l'emporte. La moisson que vous avez à faire est très facile, elle vous attend sur des champs tout préparés. Le seul effort qui vous est demandé est de parler. Prêtez-moi votre langue, dit le Christ, et vous verrez le grain mûr entrer dans les greniers du roi. Aussi les envoie-t-il ensuite en leur disant: Moi, je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde (Mt 28,20).

Prière

Dieu tout-puissant, force de ceux qui espèrent en toi, sois favorable à nos appels; puisque l'homme est fragile et que sans toi il ne peut rien, donne-nous toujours le secours de ta grâce; ainsi nous pourrons, e n observant tes commandements, vouloir et agir de manière à répondre à ton amour. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur notre Maître, tu as eu pitié de ton peuple délaissé par ses chefs. Suscite aujourd'hui pour ta moisson des ouvriers en plus grand nombre, afin que soit proclamée partout ta Bonne Nouvelle et manifestée ta volonté de soulager toute détresse. Par Jésus Christ.


12e dimanche du temps ordinaire A

52 Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (
Mt 10,26-33)

Jésus disait aux douze Apôtres: "Ne craignez pas les hommes; tout ce qui est voilé sera dévoilé, tout ce qui est caché sera connu."

Homélie

Les membres du Christ souffrant

Homélie de saint Augustin (+ 430)

Homélies sur les psaumes, ps 69, 1; CCL 39, 930-931.

Grâces soient rendues au grain de froment, car il a consenti à mourir pour se multiplier. Grâces soient rendues au Fils unique de Dieu, notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ, qui n'a pas jugé indigne de subir notre mort, pour nous rendre dignes de partager sa vie. Voyez comme il était seul avant de faire ce passage! Aussi avait-il dit dans le psaume: Seul, moi, je passerai (Ps 140,10). Il y avait néanmoins une si grande fécondité dans ce grain solitaire qu'il a pu en produire une multitude d'autres. Quand nous célébrons l'anniversaire des martyrs, nous exultons à la pensée que tant de grains ont imité sa passion!

Vous le savez, et nous vous l'avons répété bien des fois, ses membres si nombreux sont unis sous une seule tête, notre Sauveur même, par le lien de l'amour et de la paix. Ils ne forment qu'un seul homme et leur voix se fait entendre souvent dans les psaumes comme la voix d'un seul. Et la voix de cet homme crie vers Dieu comme si c'était leurs voix à tous, car tous ne font qu'un en lui.

Écoutons donc cette voix nous dire les souffrances des martyrs et les furieuses tempêtes de haine qui se sont abattues sur eux en ce monde. Ils pouvaient craindre non pas tant d'y laisser la vie du corps qu'ils auraient à abandonner un jour, mais surtout d'y perdre la foi. N'allaient-ils pas, s'ils cédaient aux atroces souffrances infligées par leurs persécuteurs ou aux attraits de la vie d'ici-bas, laisser s'échapper le fruit des promesses divines?

Dieu les a libérés de toute peur par sa parole et aussi par son exemple. Par sa parole, en leur disant: Ne craignez pas ceux qui tuent le corps, mais ne peuvent tuer l'âme (Mt 10,28). Par son exemple, en pratiquant ce que ses discours enseignaient. Ainsi, il n'a pas voulu se soustraire aux mains qui l'ont flagellé, ni échapper à ceux qui l'ont souffleté, couvert de crachats, couronné d'épines et fait mourir sur la croix. Alors qu'il n'était nullement obligé de les endurer, il n'a voulu se dérober à aucun de ces supplices, à cause de ceux à qui ces souffrances étaient nécessaires. Il a fait de sa personne un remède pour les malades.

Les martyrs ont donc souffert, mais ils auraient sans doute renoncé s'ils n'avaient pas eu toujours auprès d'eux celui qui a dit: Et moi, je suis avec vous jusqu'à la fin du monde (Mt 28,20).

Prière

Fais-nous vivre à tout moment, Seigneur, dans l'amour et le respect de ton saint nom, toi qui ne cesses jamais de guider ceux que tu enracines solidement dans ton amour. Par Jésus Christ.

ou bien

Dieu notre force, libère-nous de la crainte qui nous empêche de proclamer sur les toits ce que tu nous dis au creux de l'oreille. Puisque nous avons plus de prix à tes yeux que tous les moineaux du monde, protège-nous et affermis notre foi. Alors nous pourrons, avec courage, nous prononcer pour toi devant les hommes afin que se prononce en notre faveur Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur. Lui qui règne.


13e dimanche du temps ordinaire A

53 Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (
Mt 10,37-42)

Jésus disait aux douze Apôtres: "Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n'est pas digne de moi."

Homélie

Perdre sa vie pour le Christ, c'est la gagner

Homélie de saint Hilaire de Poitiers (+ 367)

Le Seigneur, ayant commandé à ses Apôtres de quitter ce qu'ils avaient de plus cher dans le monde, ajouta: Celui qui ne prend pas sa croix et ne me suit pas, n'est pas digne de moi (Mt 10,38); car ceux qui appartiennent au Christ ont crucifié leur corps avec ses péchés et ses convoitises (cf. Ga 5,24). Nul n'est digne du Christ s'il ne porte pas sa croix, par laquelle nous partag eons la passion, la mort, la sépulture et la résurrection du Seigneur. Nul n'est digne de lui s'il ne suit pas le Seigneur afin de vivre de la nouveauté de l'Esprit dans ce mystère de foi.

Qui veut garder sa vie pour soi la perdra; qui perdra sa vie à cause de moi la gardera (Mt 10,39). Comprenons que, par la puissance du Verbe et le rejet des fautes passées, ce que la vie gagne se transformera en mort, et ce qu'elle perd en salut. Il faut donc assumer la mort dans une vie nouvelle et clouer ses péchés à la croix du Seigneur; il faut sauvegarder la liberté de proclamer glorieusement la foi en répondant aux persécuteurs par le mépris des choses présentes; et il faut refuser tout gain funeste à l'âme. Nous devons savoir que personne n'a de droit sur notre âme, et que le bénéfice de l'immortalité s'acquiert moyennant le préjudice subi dans cette courte vie.

Qui vous accueille, m'accueille; et qui m'accueille, accueille celui qui m'a envoyé (Mt 10,40). Le Christ prodigue à tous les hommes l'amour de la doctri ne et son attachement aux commandements. Après avoir signalé le danger que couraient ceux qui n'accueillaient pas les Apôtres, en demandant à ceux-ci de secouer la poussière de leurs pieds en témoignage contre eux, il loue le mérite de ceux qui les accueillent. Leur récompense sera plus grande que pour un service escompté. Puis il nous apprend qu'il a aussi un rôle de médiateur si bien que, lorsque nous recevons le Christ, Dieu se répand en nous par lui, parce qu'il est sorti de Dieu.

Et ainsi, celui qui reçoit les Apôtres, reçoit le Christ. Or, celui qui reçoit le Christ, reçoit Dieu son Père, car dans les Apôtres il ne reçoit rien d'autre que ce qui est dans le Christ, et il n'y a rien d'autre dans le Christ que ce qui est en Dieu. Et en raison de cet enchaînement de grâces, recevoir les Apôtres n'est pas autre chose que recevoir Dieu, puisque le Christ habite en eux et que Dieu habite dans le Christ.

Prière

Tu as voulu, Seigneur, qu'en recevant ta grâce nous devenions des fils de lumière; ne permets pas que l'erreur nous plonge dans la nuit, mais accorde-nous d'être toujours rayonnants de ta vérité. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur, toi qui es meilleur qu'un père et plus tendre qu'une mère, fais que nous t'aimions par-dessus tout et que, puisant à la source de ton amour, nous sachions désaltérer tous ceux qui cherchent auprès de nous réconfort et soutien. Par Jésus Christ.


14e dimanche du temps ordinaire A

54 Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (
Mt 11,25-30)

En ce temps-là, Jésus prit la parole: "Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange: ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l'as révélé aux tout petits."

Homélie

Le Maître doux et humble de coeur

Homélie de saint Jean Chrysostome (+ 407)

Homélie sur la mémoire de saint Bassus, 2, PG 50, 721-722.

Le Christ est pour nous, aujourd'hui encore, un maître plein de douceur et d'amour. Il ne cesse jamais de prendre soin de notre salut. Il le déclare nettement dans l'Évangile, comme nous venons de le lire: Venez à moi, devenez mes disciples, car je suis doux et humble de coeur (Mt 11,28-29). Qu'elle est grande, la bienveillance du Créateur! Comment la créature n'est-elle pas saisie de stupeur? Venez à moi, devenez mes disciples, le Maître est venu consoler ses serviteurs déchus.

Voyez comme il agit. Il se montre compatissant pour le pécheur qui mérite pourtant ses rigueurs. La race de ceux qui déchaînent sa colère devrait être anéantie, mais il adresse aux hommes coupables des paroles pleines de douceur: Venez à moi, devenez mes disciples, car je suis doux et humble de coeur. Dieu est humble, l'homme, orgueilleux. Le juge se montre clément, le criminel, arrogant. L'artisan fait entendre des paroles d'humilité, l'argile discourt à la manière d'un roi. Venez à moi, devenez mes disciples, car je suis doux et humble de coeur. <> Il n'apporte pas le fouet pour frapper, mais le remède pour guérir.

Songez donc à son ineffable bonté. Allez-vous refuser votre amour au Maître qui jamais ne frappe et votre admiration au juge qui implore pour le coupable? Ses paroles si simples ne peuvent vous laisser insensibles: Je suis le Créateur et j'aime mon oeuvre. Je suis le statuaire et je prends soin de celui que j'ai formé. Si je ne voulais me soucier que de ma dignité, je ne relèverais pas l'homme déchu. Si je ne traitais pas sa maladie incurable avec des remèdes appropriés, jamais il ne pourrait recouvrer la santé. Si je ne le réconfortais pas, il mourrait. Si je ne faisais que le menacer, il périrait. Il gît sur le sol, mais je vais lui administrer les onguents de la bonté. Plein de compassion, je m'incline profondément pour le relever de sa chute. Celui qui se tient debout ne saurait relever un homme couché par terre sans se pencher pour lui tendre la main. Venez à moi, devenez mes disciples, car je suis doux et humble de coeur.

Je ne fais point étalage de paroles, vous pouvez m'examiner sur mes oeuvres. Vous serez persuadés que je suis doux et humble de coeur, si vous pensez à mon origine. Voyez quelle est ma nature. Songez à ma dignité. Adorez ma bienveillance pour vous. Comparez le séjour d'où je suis venu avec le lieu où je vous parle. Le ciel est mon trône, et je m'entretiens avec vous sur la terre! On me glorifie dans les hauteurs célestes, mais ma longue patience retient ma colère, car je suis doux et humble de coeur.

Prière

Dieu qui as relevé le monde par les abaissements de ton Fils, donne à tes fidèles une joie sainte: tu les as tirés de l'esclavage du péché; fais-leur connaître le bonheur impérissable. Par Jésus Christ.

ou bien

Père, Seigneur du ciel et de la terre, nous proclamons ta louange: par ton Fils, tu t'es manifesté aux tout-petits comme un Dieu plein de douceur et de tendresse. Ne cesse pas de te révéler à ceux qui te cherchent, et, à tous les hommes qui peinent sous le poids du fardeau, accorde le repos. Par Jésus Christ.


15e dimanche du temps ordinaire A

55 Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (
Mt 13,1-23)

Ce jour-là, Jésus était sorti de la maison, et il était assis au bord du lac. <> Il dit beaucoup de choses en paraboles: "Voici que le semeur est sorti pour semer."

Homélie

Que la Parole porte son fruit en vous!

Homélie de saint Grégoire le Grand (+ 604)

Homélies sur l'Évangile, 1, 15, 1-24, PL 76, 1131-1133

Le texte de saint Grégoire, que l'homéliaire propose comme commentaire de l'évangile de Matthieu, explique en fait la parabole telle qu'elle est rapportée dans l'évangile de Luc (8,4-15).

L'évangile que vous venez d'entendre n'appelle pas d'explication, mais une recommandation. En effet, la Vérité elle-même en a fourni une explication que la faiblesse humaine ne se hasarde pas à discuter. Cependant, en rapport avec l'explication qu'en donne le Seigneur, vous devez examiner avec attention le point suivant: si je vous avais dit que la semence représente la parole, le champ le monde, les oiseaux les démons, et les épines les richesses, vous auriez peut-être, dans le secret de votre coeur, hésité à me croire. Aussi bien le Seigneur a-t-il daigné expliquer lui-même ce qu'il venait de dire, pour que vou s soyez capables de rechercher également la signification des paroles qu'il n'a pas voulu expliquer lui-même. <>

Qui donc m'aurait cru si j'avais avancé que les épines figurent les richesses, d'autant plus que les premières sont acérées et les secondes agréables. Les richesses sont pourtant bien des épines, puisque les soucis qu'elles entraînent avec elles déchirent l'âme de leurs pointes et, après l'avoir poussée au péché, la laissent couverte de sang, comme par une blessure. D'après un autre évangéliste qui rapporte la même parabole, le Seigneur ne les appelle pas richesses mais, avec raison, richesses trompeuses (cf. Mt 13,22). Elles le sont, en effet, puisqu'elles ne peuvent demeurer longtemps en notre possession et qu'elles ne font pas disparaître la pauvreté de notre âme.

Car les seules vraies richesses sont celles qui nous enrichissent de vertus. Aussi, frères bien-aimés, si vous désirez vous enrichir, aimez les vraies richesses. Si vous cherchez à parvenir au sommet de l'honneur véritable, avancez-vous vers le Royaume céleste. Si vous affectionnez la gloire que procure un rang élevé, hâtez-vous de vous enrôler dans la céleste cour des anges.

Après avoir écouté les paroles du Seigneur, retenez-les dans votre âme, car la parole de Dieu est la nourriture de l'âme. La parole que l'on écoute sans la conserver dans les profondeurs de la mémoire, ressemble à une nourriture avalée, puis rejetée par un estomac malade. Aussi bien, celui qui ne garde pas les aliments n'a absolument aucun espoir de vivre. Si donc, après avoir reçu la nourriture de la sainte exhortation, vous ne gardez pas en mémoire les paroles de vie, qui sont les aliments de la justice, craignez le péril de la mort éternelle. <>

Veillez dès lors à ce que la parole que vous avez reçue résonne au fond de votre coeur et y demeure. Prenez garde que la semence ne tombe le long du chemin, de crainte que l'Esprit mauvais ne vienne enlever la parole de votre mémoire. Prenez garde que le sol pierreux ne reçoive la semence et ne produise une bonne action dépourvue des racines de la persévérance. Beaucoup, en effet, se réjouissent en entendant la parole, et se disposent à entreprendre de bonnes oeuvres. Mais à peine les épreuves ont-elles commencé à les assaillir qu'ils renoncent à ce qu'ils avaient entrepris. A insi, le sol pierreux a manqué d'eau, si bien que le germe de la graine n'est pas parvenu à donner le fruit de la persévérance.

Mais la bonne terre donne du fruit par la patience: entendons par là que nos bonnes oeuvres ne peuvent avoir aucune valeur si en outre nous ne supportons pas patiemment les désagréments que nous cause notre prochain. D'ailleurs, plus nous avançons vers la perfection, plus nous avons à endurer de souffrances ici-bas. En effet, une fois que notre âme a abandonné l'amour du monde présent, l'hostilité de ce monde grandit. Voilà pourquoi nous en voyons beaucoup peiner sous un lourd fardeau, alors que leurs oeuvres sont bonnes. Ils ont, il est vrai, déjà renoncé aux convoitises terrestres, et pourtant ils sont affligés de très cruelles épreuves. Mais, selon la parole du Seigneur, ils portent du fruit par leur constance (Lc 8,15), en supportant humblement ces épreuves, si bien qu'après avoir souffert, ils seront invités à entrer dans la paix du ciel.

Prière

Dieu qui montres aux égarés la lumière de ta vérité pour qu'ils puissent reprendre le bon chemin, donne à tous ceux qui se déclarent chrétiens de rejeter ce qui est indigne de ce nom, et de rechercher ce qui lui fait honneur. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur, Dieu de vie, tu as envoyé ton Fils pour semer en nous ta parole. Ôte de notre coeur les pierres qui le rendent stérile, fais de nous une bonne terre, assez profonde pour que croisse le germe que tu as déposé, et qu'il rende cent pour un. Par Jésus Christ.


16e dimanche du temps ordinaire A

56 Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (
Mt 13,24-43)

Jésus proposa cette parabole à la foule: "Le Royaume des cieux est comparable à un homme qui a semé du bon grain dans son champ."

Homélie

Soyons le blé, non l'ivraie

Homélie de Grégoire Palamas (+ 1359)

Homélie 27; PG 151, 345-348.352-353.

Le Royaume des cieux est comparable à un homme qui a semé du bon grain dans son champ. Or, pendant que les gens dormaient, son ennemi survint; il sema de l'ivraie au milieu du blé et s'en alla.

Et le Seigneur ajoute: L'ivraie, ce sont les fils du Mauvais. Puisqu'ils accomplissent les mêmes oeuvres que lui, ils portent, en effet, son empreinte et demeurent ses rejetons et ses fils adoptifs. Et le temps fixé pour la moisson, c'est la fin de ce monde. Car, cette moisson qui a commencé il y a bien longtemps et s'effectue aujourd'hui encore par la mort, parviendra alors à son total achèvement. Et les moissonneurs, ce sont les anges. Ceux-ci, en effet, sont les serviteurs du Roi des cieux, et ils le seront surtout à cette heure-là. De même, dit Jésus, qu'on enlève l'ivraie pour la jeter au feu, ainsi en sera-t-il à la fin de ce monde. Le Fils de l'homme, qui est aussi le Fils du Père, du Très-Haut, enverra donc ses anges et ils enlèveront de son Royaume tous ceux qui font tomber les autres. <>

Ainsi, les serviteurs du Seigneur, autrement dit les anges de Dieu, s'aperçurent qu'il y avait de l'ivraie dans le champ, c'est-à-dire que les impies et les méchants étaient mêlés aux bons et vivaient avec eux, même dans l'Église du Christ. Ils dirent au Seigneur: Veux-tu que nous allions enlever l'ivraie?, en d'autres termes: "que nous étions ces gens de la terre en les faisant mourir"? Mais le Christ leur répondit: Non, de peur qu'en enlevant l'ivraie, vous n'arrachiez le blé en même temps.

Si les anges avaient ainsi enlevé l'ivraie, s'ils avaient frappé à mort les méchants pour les séparer des justes, comment auraient-ils donc pu déraciner aussi le blé, c'est-à-dire les bons? Beaucoup d'impies et de pécheurs, vivant avec les gens pieux et les justes, en arrivent avec le temps à se repentir et à se convertir; ils se mettent à l'école de la piété et de la vertu, et cessent d'être de l'ivraie pour devenir du blé. Ainsi les anges risquaient-ils, s'ils saisissaient de force ces hommes avant qu'ils pussent se repentir, de déraciner le blé en enlevant l'ivraie. De plus il s'est trouvé souvent des hommes de bonne volonté parmi les enfants et les descendants des méchants. Voilà pourquoi Celui qui connaît toutes choses avant qu'elles ne soient n'a pas permis d'arracher l'ivraie avant le temps fixé. Au temps de la moisson, a-t-il dit, je dirai aux moissonneurs: Enlevez d'abord l'ivraie, liez-la en bottes pour la brûler; quant au blé, rentrez-le dans mon grenier. <>

Aussi celui qui veut être sauvé du châtiment sans fin, et veut hériter du Royaume éternel de Dieu, ne doit-il pas être l'ivraie <>, mais le blé. Qu'il s'abstienne de toute parole vaine ou méchante, qu'il exerce les vertus contraires à ces vices et produise les fruits de la pénitence! C'est ainsi, en effet, qu'il deviendra digne du grenier céleste, qu'il sera appelé fils du Père, le Très-Haut, et que, tout joyeux et resplendissant de la gloire divine, il entrera comme héritier dans son Royaume.

Puissions-nous tous y parvenir par la grâce et l'amour de notre Seigneur Jésus Christ. A lui, la gloire avec son Père éternel et l'Esprit très saint, bon et vivifiant, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Amen.

Prière

Sois favorable à tes fidèles, Seigneur, et multiplie les dons de ta grâce: entretiens en eux la foi, l'espérance et la charité, pour qu'ils soient toujours attentifs à garder tes commandements. Par Jésus Christ.

ou bien

Dieu dont la patience est sans mesure, tu acceptes que ton champ produise de l'ivraie à côté du bon grain, car tu respectes ceux que tu as créés libres. Donne-nous d'imiter ta patience, de supporter les imperfections de nos frères et de mettre à profit ce temps de grâce pour grandir dans ton amour. Par Jésus Christ.



Homéliaire patristique 48