1970 PGLH 33


Chapitre II

LA SANCTIFICATION DE LA JOURNÉE


LES DIFFÉRENTES HEURES LITURGIQUES


I. L'introduction à tout l'office

34 Habituellement, tout l'office est introduit par l'invitatoire. Celui-ci consiste dans le verset: " Seigneur, ouvre mes lèvres. Et ma bouche publiera ta louange ", et dans le psaume 94, par lequel, chaque jour, les fidèles sont invités à chanter les louanges de Dieu et à écouter sa voix, et conviés à attendre le " repos du Seigneur ". Cependant, si l'on y trouve avantage, on peut utiliser le psaume 99, le psaume 66, ou le psaume 23, à la place du psaume 94. Il est préférable de dire le psaume invitatoire, comme cela est indiqué en son lieu, sous le mode responsorial, c'est-à-dire avec son antienne, qui est proposée d'emblée et tout de suite répétée, pour être ensuite reprise après chaque strophe.

35 L'invitatoire se place au début de tout le cycle de la prière quotidienne, c'est-à-dire en tête de l'office du matin ou de l'office de lecture, suivant que c'est l'un ou l'autre de ces actes liturgiques qui inaugure la journée. On peut cependant, si on le juge opportun, omettre le psaume invitatoire quand il devrait se placer avant l'office du matin.

36 La façon de varier les antiennes de l'invitatoire selon la diversité des jours liturgiques est chaque fois indiquée en son lieu.

II. Offices du matin et du soir

37 " Les laudes, comme prières du matin, et les vêpres, comme prières du soir, qui, d'après la vénérable tradition de l'Eglise universelle, constituent les deux pôles de l'office quotidien, doivent être tenues pour les Heures principales et elles doivent être célébrées en conséquence. "

38 Les laudes matinales sont destinées à sanctifier les heures du matin et sont organisées en conséquence, comme on le voit par bon nombre de leurs éléments. Leur caractère matinal est très bien exprimé par ces paroles de saint Basile le Grand: " Louange du matin, pour consacrer à Dieu les premiers mouvements de notre âme et de notre esprit, pour que nous n'entreprenions rien avant de nous être réjouis à la pensée de Dieu, selon ce qui est écrit: 'Je me suis souvenu de Dieu et j'y ai pris mes délices' (Ps 76,4), et pour que nos corps, de même, ne se mettent pas au travail avant que nous ayons accompli ce qui est écrit: 'Je dirigerai vers toi ma prière, Seigneur; au matin tu exauceras ma voix; au matin je me tiendrai devant toi et je te verrai' (Ps 5,4-5) . " De plus, cette Heure, qu'on dit au moment où revient la nouvelle lumière du jour, évoque la résurrection du Seigneur Jésus qui est " la lumière véritable, éclairant tous les hommes " (Jn 1,9) et " le soleil de justice " (Mi 3,20), " le soleil levant qui vient d'en haut " (Lc 1,78). On comprend donc bien la recommandation de saint Cyprien: " Le matin, il faut prier, afin que la résurrection du Seigneur soit célébrée par une prière matinale . "

39 L'office du soir est célébré dans la soirée, quand le jour baisse déjà, " afin de rendre grâce pour ce qui, en ce jour, nous a été donné, ou pour ce que nous avons fait de bien ". De plus, la prière que nous faisons monter " comme l'encens en présence du Seigneur " et dans laquelle " l'élévation de nos mains " devient comme " le sacrifice du soir " constitue un rappel de la rédemption. Ce sacrifice " peut cependant être compris dans un sens encore plus sacré, comme le véritable sacrifice du soir, soit en tant qu'il est transmis par le Seigneur, notre Sauveur, aux Apôtres lors de la Cène, quand il inaugurait ainsi les mystères saints et sacrés de l'Eglise; soit comme le sacrifice du soir qu'il a offert au Père le jour suivant, c'est-à-dire à la fin des temps, par l'élévation de ses mains, pour le salut du monde entier ". Enfin, pour diriger notre espérance vers la lumière qui ne connaît pas de crépuscule, " nous prions et demandons que la lumière revienne sur nous, nous demandons l'avènement du Christ qui doit nous apporter la grâce de la lumière éternelle ". A cette heure-là nous unissons notre voix à celle des Eglises d'Orient en invoquant la " Joyeuse lumière de la sainte gloire du Père céleste et éternel, le bienheureux Jésus Christ; parvenus au coucher du soleil, en voyant la lumière du soir, nous chantons Dieu, Père, Fils et Esprit Saint... ".

40 On doit donc faire grand cas des offices du matin et du soir comme étant la prière de la communauté chrétienne. Leur célébration publique ou commune doit être favorisée, surtout chez ceux qui vivent en communauté. Elle doit même être conseillée aux fidèles qui ne peuvent pas participer à la célébration commune.

41 Les offices du matin et du soir commencent par le verset d'introduction: " Dieu, viens à mon aide. Seigneur, à notre secours ", que suit le " Gloire au Père " avec " Au Dieu qui est... " et " Alléluia " (qu'on omet en Carême). Mais tout cela est supprimé à l'office du matin quand celui-ci commence par l'invitatoire.

42 Aussitôt après, on chante ou on dit l'hymne qui convient. Le rôle de l'hymne est de donner à chaque Heure ou à chaque fête sa tonalité propre, et de rendre plus facile et plus joyeuse l'entrée dans la prière, surtout quand la célébration se fait avec le peuple.

43 Après l'hymne, vient la psalmodie, conformément aux nn. 121-125 . La psalmodie de l'office du matin comprend un psaume approprié au matin, puis un cantique de l'Ancien Testament et un deuxième psaume, qui est, selon la tradition de l'Eglise, un psaume de louange. La psalmodie de l'office du soir est constituée de deux psaumes (ou de deux sections d'un psaume trop long) appropriés à cette heure et à une célébration avec le peuple, et d'un cantique tiré des épîtres ou de l'Apocalypse.

44 La psalmodie achevée, on fait une lecture, soit brève, soit relativement longue.

45 La lecture brève est choisie suivant le jour, le temps ou la fête. Elle doit être lue et écoutée comme une véritable proclamation de la parole de Dieu, qui propose avec force quelque sentence sacrée, et qui met en lumière des paroles brèves auxquelles on risque de ne pas faire attention au cours d'une lecture continue des Ecritures. La lecture brève change chaque jour dans le cycle de la psalmodie.

46 Cependant, au gré du célébrant, et surtout quand il y a participation du peuple, on peut choisir une lecture biblique plus longue, tirée soit de l'office de lecture, soit des textes lus à la messe, choisie surtout parmi celles qui n'ont pu avoir lieu pour différents motifs. Rien n'empêche non plus de choisir parfois une autre lecture, mieux adaptée, en tenant compte de ce qui est dit sous les nn. 248-249 , 251 .

47 Lorsque la célébration se fait avec le peuple, on peut y ajouter, quand cela semble indiqué, une brève homélie pour faire mieux comprendre cette lecture.

48 Après la lecture ou après l'homélie, si on le juge bon, on peut observer un temps de silence.

49 Pour répondre à la parole de Dieu, un chant responsorial ou répons bref est proposé, qu'on peut omettre si on le juge bon. On peut cependant le remplacer par d'autres chants répondant à la même fonction et appartenant au même genre, du moment qu'ils sont dûment approuvés pour cet usage par la Conférence épiscopale.

50 On dit ensuite solennellement, avec son antienne, le cantique évangélique, c'est-à-dire le matin le cantique de Zacharie, le Benedictus, et le soir le cantique de la Bienheureuse Vierge Marie, le Magnificat. Ces cantiques, maintenus par l'usage séculaire et populaire de l'Eglise romaine, expriment la louange de la rédemption et l'action de grâce. L'antienne de Benedictus et celle de Magnificat est suggérée par la nature du jour, du temps ou de la fête.

51 Le cantique terminé, le matin on dit des prières pour consacrer à Dieu la journée et le travail, et le soir des intercessions (cf. nn. 179 à 193 ).

52 Après ces prières ou intercessions, le " Notre Père " est dit par tous.

53 Le " Notre Père " est suivi par l'oraison de conclusion, qu'on trouve au psautier pour les féries ordinaires et au propre pour les autres jours.

54 Enfin, si la présidence est exercée par un prêtre ou un diacre, c'est celui-ci qui congédie le peuple par la salutation " Le Seigneur soit avec vous " et la bénédiction comme à la messe, suivie par l'invitation " Allez dans la paix du Christ " et la réponse " Nous rendons grâce à Dieu ". Autrement, la célébration s'achève par " Que le Seigneur nous bénisse, etc. ".

III. L'office de lecture

55 L'office de lecture a pour but de proposer au peuple de Dieu, et surtout à ceux qui sont consacrés au Seigneur d'une manière particulière, une riche méditation de la Sainte Ecriture ainsi que les plus belles pages des auteurs spirituels. Car, bien que les lectures faites tous les jours à la messe constituent aujourd'hui un cycle plus abondant de textes scripturaires, le trésor de révélation et de tradition contenu dans l'office de lecture sera d'un grand profit spirituel. Ce sont avant tout les prêtres qui doivent chercher ces richesses afin de pouvoir dispenser à tous la parole de Dieu qu'ils ont reçue, et " nourrir le peuple de Dieu " de leur enseignement.

56 Et comme la prière des fidèles " doit aller de pair avec la lecture de la Sainte Ecriture, pour que s'établisse le dialogue entre Dieu et l'homme ", car " nous lui parlons quand nous prions, mais nous l'écoutons quand nous lisons les oracles divins ", l'office de lecture comporte également des psaumes, une hymne, une oraison et d'autres formules; il présente le caractère d'une véritable prière.

57 L'office de lecture, selon la Constitution du deuxième Concile du Vatican sur la liturgie, " bien qu'il garde, dans la célébration chorale, son caractère de louange nocturne, sera adapté de telle sorte qu'il puisse être dit à n'importe quelle heure du jour, et il comportera un moins grand nombre de psaumes, et des lectures plus étendues ".

58 Ceux qui doivent, en vertu de leur statut particulier, et ceux qui, d'une façon très louable, veulent garder à cet office son caractère de louange nocturne, qu'ils le disent la nuit ou très tôt avant l'office du matin, choisiront une hymne dans la série destinée à cet usage pour le Temps ordinaire. En outre, pour les dimanches et certaines fêtes et solennités, on tiendra compte de ce qui est dit des vigiles aux nn. 70 à 73 .

59 Cette disposition étant respectée, l'office de lecture peut être dit à n'importe quelle heure du jour et même de la nuit précédente, après l'office du soir.

60 Si l'office de lecture se dit avant l'office du matin, on le fait précéder de l'invitatoire, comme il est indiqué ci-dessus (nn. 34 à 36 ). Autrement, on commence par le verset " Dieu, viens à mon aide ", avec " Gloire au Père ", " Au Dieu qui est " et, en dehors du Carême, " Alléluia ".

61 On dit ensuite l'hymne, choisie dans le Temps ordinaire, ou bien dans la série nocturne, comme il est indiqué ci-dessus au n. 58 , ou bien dans la série diurne, suivant ce que demande la vérité du moment où l'on célèbre.

62 Vient ensuite la psalmodie, qui comporte trois psaumes (ou sections de psaumes si les psaumes occurrents sont trop longs). Pendant le Triduum pascal, aux jours des octaves de Pâques et de Noël, ainsi qu'aux solennités et aux fêtes, il y a des psaumes propres, avec leurs antiennes propres. En revanche, aux dimanches et aux féries, les psaumes avec leurs antiennes sont pris dans le cycle ordinaire du psautier. On les prend de même au cycle ordinaire du psautier pour la mémoire des saints, à moins qu'il n'y ait des psaumes et des antiennes propres, comme il est expliqué aux nn. 218 et ss.

63 Entre la psalmodie et les lectures, on dit habituellement un verset qui fait passer, dans la prière, de la récitation des psaumes à l'audition des lectures.

64 On fait deux lectures: la première est biblique, la seconde est tirée des écrits des Pères ou des écrivains ecclésiastiques; ou encore elle est hagiographique.

65 Après chaque lecture, on dit un répons (cf. nn. 169 à 172 ).

66 Habituellement, il faut prendre la lecture biblique qui se trouve dans le propre du temps, suivant les règles qui seront données ci-dessous aux nn. 140 à 155 . Aux solennités et aux fêtes, en revanche, la lecture biblique est prise dans le propre ou le commun.

67 La seconde lecture avec son répons est prise soit dans le livre de la Liturgie des Heures, soit dans le lectionnaire facultatif dont il est question ci-dessous au n. 161 . C'est ordinairement celle que présente le propre du temps. Mais aux solennités et aux fêtes, on utilise une lecture propre, qui est hagiographique; à son défaut, on prend la seconde lecture dans le commun des saints correspondant. De même, pour la mémoire des saints dont la célébration n'est pas empêchée, la lecture hagiographique est prise à la place de la seconde lecture occurrente (cf. nn. 166 , 235 ).

68 Aux dimanches en dehors du Carême, aux jours dans les octaves de Pâques et de Noël, aux solennités et aux fêtes, après la seconde lecture et son répons, on dit l'hymne " A toi Dieu " (Te Deum), que l'on omet, en revanche, aux mémoires et aux féries. La dernière partie de cette hymne, du verset " Sauve ton peuple " jusqu'à la fin, peut être omise à volonté.

69 L'office de lecture se termine par l'oraison propre et, au moins dans la célébration commune, par l'acclamation " Bénissons le Seigneur. - Nous rendons grâce à Dieu. "

IV. Les vigiles

70 La vigile pascale est célébrée par toute l'Eglise telle qu'elle est décrite dans les différents livres liturgiques. " La vigile de cette nuit est si grande, dit saint Augustin, qu'elle seule peut revendiquer comme propre ce nom qui lui est commun avec les autres . " " Nous la passons à veiller, cette nuit au cours de laquelle le Seigneur est ressuscité... et a inauguré pour nous, dans sa chair, la vie... qui ne connaît ni mort ni sommeil...; ainsi donc, celui dont nous chantons la résurrection en prolongeant un peu plus notre veillée, nous accordera de régner avec lui dans une vie sans fin . "

71 Comme à la veillée de Pâques, on a pris l'habitude dans diverses églises de commencer par une vigile diverses solennités, notamment, en premier lieu, la Nativité du Seigneur et le jour de la Pentecôte. Cette coutume doit être conservée et encouragée, suivant l'usage propre à chaque Eglise. Là où existe éventuellement l'habitude de rehausser par une vigile d'autres solennités ou des pèlerinages, on observera les règles générales données pour les célébrations de la parole de Dieu.

72 Les Pères et les auteurs spirituels ont très souvent exhorté les fidèles, et surtout ceux qui mènent la vie contemplative, à la prière nocturne qui traduit et stimule l'attente du Seigneur qui reviendra: " Au milieu de la nuit, un cri se fit entendre: voici l'époux qui vient, sortez à sa rencontre " (Mt 25,6); " Veillez donc, car vous ne savez quand viendra le maître de la maison, le soir, à minuit, au chant du coq ou le matin, de peur que, s'il vient à l'improviste, il ne vous trouve endormis " (Mc 13,35). Ils sont donc dignes d'éloge, tous ceux qui conservent à l'office de lecture son caractère nocturne.

73 En outre, puisque dans le rite romain, en tenant compte surtout des besoins de ceux qui se dévouent aux travaux de l'apostolat, l'office de lecture doit rester toujours aussi bref, ceux qui désirent prolonger, suivant la tradition, la célébration de la vigile du dimanche, des solennités et des fêtes procéderont de la manière suivante. On célébrera d'abord l'office de lecture tel qu'il est donné dans le livre de la Liturgie des Heures, jusqu'aux lectures inclusivement. Mais après les deux lectures et avant l'hymne " A toi, Dieu " (Te Deum), on ajoutera les cantiques indiqués à cet effet dans l'appendice du livre en question. Puis, on lira l'Evangile, suivi, s'il y a lieu, d'une homélie, après quoi on chantera l'hymne " A toi, Dieu " et on dira l'oraison. Pour les solennités et les fêtes, on prendra l'Evangile dans le lectionnaire de la messe et, pour les dimanches, dans la série de lectures sur le mystère pascal, qui est indiquée en appendice du livre de la Liturgie des Heures.

V. Tierce, sexte et none, ou l'Heure médiane

74 En vertu d'une très ancienne tradition, les chrétiens ont l'habitude de prier, par dévotion privée, à divers moments de la journée, même au milieu du travail, pour imiter l'Eglise apostolique; cette tradition s'est traduite par des célébrations diverses au cours des âges.

75 L'usage liturgique, en Occident comme en Orient, a retenu tierce, sexte et none, surtout à cause du lien qui rattache à ces Heures la mémoire de la passion du Seigneur et celle de la première propagation de l'Evangile.

76 Le deuxième Concile du Vatican a décidé que l'on garderait au choeur les petites Heures de tierce, sexte et none . L'usage liturgique de dire ces trois Heures doit être conservé, sauf droit particulier, par ceux qui mènent la vie contemplative; et même il est recommandé à tous, surtout à ceux qui font une retraite spirituelle ou participent à une réunion de pastorale.

77 Mais, en dehors du choeur, le droit particulier étant sauf, il est permis de choisir une seule de ces trois Heures, accordée au moment de la journée, de sorte que soit conservée la tradition d'une prière au milieu du travail de chaque jour. Quant à ceux qui n'acquittent pas les trois Heures, ils doivent en célébrer au moins une, de façon à maintenir la tradition de prier dans la journée, au milieu du travail.

78 L'ordonnance de tierce, sexte et none est donc établie de façon à tenir compte à la fois de ceux qui disent une seule Heure, ou " Heure médiane ", et de ceux qui ont l'obligation ou le désir de les dire toutes trois.

79 Tierce, sexte et none, ou l'Heure médiane, commencent par le verset d'introduction: " Dieu, viens à mon aide ", avec " Gloire au Père ", " Au Dieu qui est " et " Alléluia " (qu'on omet en Carême). On dit ensuite l'hymne qui convient à l'Heure. Vient alors la psalmodie, puis la lecture brève, suivie du verset. Chaque Heure se termine par l'oraison et, au moins dans la célébration commune, par l'acclamation " Bénissons le Seigneur. - Nous rendons grâce à Dieu ".

80 Pour chaque Heure sont proposées des hymnes et des oraisons différentes, qui peuvent convenir à la vérité du temps selon la tradition, et qui peuvent le mieux assurer la sanctification de la journée; c'est pourquoi celui qui dit une seule Heure doit choisir les éléments qui conviennent à cette Heure-là. Les lectures brèves et les oraisons varient, en outre, selon la nature du jour, du temps ou de la fête.

81 On propose une double psalmodie: une psalmodie courante et une psalmodie complémentaire. Celui qui dit une seule Heure prendra la psalmodie courante. Celui, en revanche, qui dit plusieurs petites Heures prendra pour l'une d'elles la psalmodie courante, pour les autres la psalmodie complémentaire.

82 La psalmodie courante est constituée par trois psaumes (ou sections de psaumes s'il s'agit de psaumes trop longs) tirés du texte du psautier, dits avec leurs antiennes, à moins que ce ne soit indiqué autrement en son lieu. Aux solennités, au Triduum pascal et aux jours dans l'octave de Pâques, on utilise des antiennes propres avec trois psaumes à choisir dans la psalmodie complémentaire, à moins qu'on ne doive employer des psaumes spéciaux ou que la célébration de la solennité ne tombe un dimanche; en ce cas on prend les psaumes au dimanche de la première semaine.

83 La psalmodie complémentaire comprend des groupes de trois psaumes, choisis habituellement parmi les psaumes appelés " graduels ".

VI. Complies

84 Complies est la dernière prière du jour, à faire avant le repos de la nuit, même après minuit le cas échéant.

85 Complies commence, comme les autres Heures, par le verset " Dieu, viens à mon aide " avec " Gloire au Père ", " Au Dieu qui est " et " Alléluia " (qu'on omet en Carême).

86 Ensuite, il est très louable de faire un examen de conscience; dans la célébration commune, celui-ci se fait en silence ou s'insère dans un acte pénitentiel suivant les formules du Missel romain.

87 Ensuite on dit l'hymne appropriée.

88 La psalmodie comprend, le dimanche, après les premières vêpres, les psaumes 4 et 133, et après les secondes vêpres, le psaume 90. Pour les autres jours, les psaumes ont été choisis de façon à stimuler surtout la confiance en Dieu; mais il est permis de leur substituer les psaumes du dimanche, principalement pour la commodité de ceux qui voudraient dire complies de mémoire.

89 Après la psalmodie, on fait la lecture brève, que suit le répons " En tes mains, Seigneur " (In manus tuas). Ensuite on dit, avec son antienne, le cantique évangélique " Maintenant, ô Maître Souverain " (Nunc dimittis), qui est en quelque sorte le sommet de toute cette Heure liturgique.

90 On dit l'oraison finale indiquée dans le psautier.

91 Après l'oraison, on dit, même quand on est seul, la bénédiction " Que le Seigneur... " (Noctem quietam).

92 On dit ensuite l'une des antiennes de la Sainte Vierge. Pendant le Temps pascal, ce sera toujours Regina caeli. En plus des antiennes données dans le livre de la Liturgie des Heures, d'autres peuvent être approuvées par les Conférences épiscopales .

VII. Comment rattacher, s'il y a lieu,les Heures de l'office à la messe, ou entre elles

93 Dans certains cas particuliers, si les circonstances le demandent, on peut établir, dans la célébration publique ou commune, une liaison plus étroite entre la messe et une Heure de l'office, selon les règles qui suivent, pourvu que la messe et l'Heure en question relèvent du même office. On prendra garde cependant à ce que ce ne soit pas au détriment de l'intérêt pastoral des fidèles, surtout le dimanche.

94 Quand on célèbre l'office du matin, au choeur ou en commun, immédiatement avant la messe, on pourra commencer la célébration par le verset d'introduction et l'hymne des laudes surtout les jours de férie, ou bien par le chant et la procession d'entrée, puis la salutation du célébrant, surtout les jours de fête. On omet donc, suivant le cas, un des deux rites de début. On poursuit par la psalmodie de l'Heure, dite de la manière habituelle, jusqu'à la lecture brève exclusivement. Après la psalmodie, en omettant l'acte pénitentiel et le Kyrie, on dit le Gloria, selon les rubriques, et le célébrant dit l'oraison de la messe. Suit la liturgie de la Parole à la manière habituelle. La prière universelle se fait à l'endroit et suivant la formule usités pour la messe. Cependant, les jours de férie, à la messe matinale, on peut remplacer le formulaire quotidien de la prière universelle par les prières de l'office du matin. Après la communion accompagnée de son chant propre, on chante le Benedictus avec son antienne; ensuite on dit la prière de la postcommunion et le reste comme d'habitude.

95 Si la messe est immédiatement précédée par la célébration publique d'une Heure médiane, c'est-à-dire tierce, sexte ou none, selon que le requiert la vérité des Heures, la célébration pourra commencer, de la même façon, soit par le verset d'introduction et l'hymne de l'Heure en question, surtout les jours de férie, soit par le chant et la procession d'entrée et la salutation du célébrant, surtout les jours de fête, en omettant, suivant le cas, un des deux rites de début. On enchaîne ensuite la psalmodie de l'Heure, dite de la manière habituelle, jusqu'à la lecture brève exclusivement. Après la psalmodie, en omettant l'acte pénitentiel et, si on le juge bon, le Kyrie, on dit le Gloria, selon les rubriques, et le célébrant dit la collecte de la messe.

96 De la même façon que l'office du matin, l'office du soir peut être rattaché à la messe qu'il précède immédiatement. Cependant, les premières vêpres des solennités, des dimanches ou des fêtes du Seigneur qui tombent un dimanche, ne peuvent se célébrer qu'une fois terminée la messe du jour précédent ou du samedi.

97 Quand l'Heure médiane, c'est-à-dire tierce, sexte ou none, ou l'office du soir suit la messe, celle-ci est célébrée de la façon habituelle jusqu'à la postcommunion inclusivement. Lorsque la postcommunion est dite, on commence immédiatement la psalmodie de l'Heure. A l'Heure médiane, lorsque la psalmodie est achevée, on omet la lecture brève, et on dit tout de suite l'oraison et la formule de renvoi, comme à la messe. Quand il s'agit de l'office du soir, lorsque la psalmodie est achevée, on omet la lecture, on dit tout de suite le Magnificat avec son antienne, puis, en omettant les prières et l'oraison dominicale, on dit l'oraison conclusive et on bénit le peuple.

98 A l'exception de la nuit de Noël, la jonction de la messe avec l'office de lecture est, en règle générale, exclue, car la messe a son propre cycle de lectures qu'il convient de garder distinct de celui de l'office. Si toutefois, dans quelques cas exceptionnels, il faut procéder ainsi, alors, aussitôt après la seconde lecture de l'office et son répons, en omettant le reste on commence la messe par le Gloria, si on doit le dire; autrement on la commence par la collecte.

99 Si l'office de lecture est dit immédiatement avant une autre Heure de l'office, on peut placer avant le début de l'office de lecture l'hymne propre à l'Heure en question; ensuite, à la fin de l'office de lecture, on omet l'oraison et la conclusion, tandis qu'à l'Heure qui suit on omet le verset d'introduction avec le " Gloire au Père ".



Chapitre III

LES DIVERS ELEMENTS DE LA LITURGIE DES HEURES


I. Les psaumes et leur relation avec la prière chrétienne

100 Dans la Liturgie des Heures, l'Eglise prie en grande partie avec ces chants magnifiques composés, sous l'inspiration de l'Esprit Saint, par les auteurs sacrés de l'Ancien Testament. De leur origine, en effet, ces poèmes tiennent la vertu d'élever à Dieu l'esprit des hommes, d'éveiller en eux des sentiments religieux et saints, de les aider admirablement à rendre grâce dans les circonstances heureuses, et de leur apporter consolation et force d'âme dans l'adversité.

101 Cependant, les psaumes ne font qu'esquisser la plénitude des temps qui est apparue dans le Christ Seigneur et dans laquelle la prière de l'Eglise puise sa force. Il n'est donc pas étonnant si, tous les chrétiens étant d'accord pour estimer hautement les psaumes, telle ou telle difficulté surgit parfois lorsqu'on essaie de s'approprier dans la prière ces poèmes vénérables.

102 Mais l'Esprit Saint, sous l'inspiration duquel les psalmistes ont chanté, vient toujours avec sa grâce au secours des croyants qui chantent ces poèmes avec bonne volonté. En outre, il est nécessaire que, chacun selon ses forces, " ils se procurent une connaissance plus abondante de la Bible, et principalement des psaumes ", et qu'ils comprennent comment, par quelle méthode, ils peuvent bien prier en les récitant.

103 Les psaumes ne sont pas des textes à lire, ni des prières en prose, mais des poèmes de louange. Bien qu'ils aient pu quelquefois avoir été utilisés sous forme de lecture, cependant, c'est à juste titre, en raison de leur genre littéraire, qu'ils sont appelés en hébreu Tehillim, c'est-à-dire " cantiques de louange ", et en grec psalmoi, c'est-à-dire " cantiques à chanter au son du psaltérion ". En effet, tous les psaumes possèdent un caractère musical qui détermine la manière dont il convient de les chanter. C'est pourquoi, même si le psaume est dit sans être chanté, et même dans la solitude et en silence, cette récitation doit être commandée par son caractère musical: sans doute il présente un texte à notre esprit, mais il tend davantage à toucher les coeurs de ceux qui psalmodient et de ceux qui écoutent, voire de ceux qui jouent " sur le psaltérion et la cithare ".

104 Celui qui sait vraiment psalmodier parcourt donc les versets en les méditant l'un après l'autre; il est toujours prêt dans son coeur à y répondre comme le veut l'Esprit, qui a inspiré le psalmiste et inspirera aussi ceux qui sont prêts à recevoir sa grâce. C'est pourquoi la psalmodie, tout en exigeant le respect qui convient à la majesté de Dieu, doit se dérouler dans la joie du coeur et la douceur de l'amour, ainsi qu'il convient à la poésie sacrée et au chant divin, mais surtout à la liberté des enfants de Dieu.

105 Sans doute, nous pouvons souvent prier avec facilité et ferveur sur les paroles du psaume, en rendant grâce et en glorifiant Dieu dans l'allégresse, ou bien en le suppliant du fond de nos angoisses. Cependant d'autres fois - surtout si le psaume ne s'adresse pas immédiatement à Dieu - une difficulté peut surgir. Le psalmiste en effet, justement parce qu'il est poète, s'adresse souvent au peuple, par exemple en rappelant l'histoire d'Israël; parfois il interpelle d'autres créatures, sans excepter celles qui sont dépourvues de raison. Il fait parler Dieu et les hommes, voire, comme dans le psaume 2, les ennemis de Dieu. On voit par là que le psaume ne prie pas de la même manière qu'une prière ou une collecte composée par l'Eglise. En outre, ce qui s'accorde avec la nature poétique et musicale des psaumes, c'est qu'ils ne s'adressent pas nécessairement à Dieu, mais qu'ils sont chantés devant Dieu, comme nous en avertit saint Benoît: " Considérons donc comment il faut être sous le regard de la Divinité et de ses anges, et tenons-nous dans la psalmodie de façon que notre âme soit accordée à notre voix . "

106 Celui qui psalmodie ouvre son coeur aux sentiments dont les psaumes sont animés, chacun selon son genre littéraire, que ce soit le genre de lamentation, de confiance, d'action de grâce, ou qu'il y ait d'autres genres, soulignés à juste titre par les exégètes.

107 En s'appliquant au sens littéral des psaumes, celui qui les chante s'attache à leur importance pour la vie humaine des croyants. Il est certain, en effet, que chaque psaume a été composé dans des circonstances particulières, que les titres qui les précédent dans le psautier hébraïque cherchent à évoquer. Mais quoi qu'il en soit de son origine historique, chaque psaume a un sens littéral que, même à notre époque, nous ne pouvons pas négliger. Et bien que ces poèmes soient nés en Orient il y a de nombreux siècles, ils expriment bien les douleurs et l'espérance, la misère et la confiance des hommes de toute époque et de toute région, et, surtout, ils chantent la foi en Dieu, ainsi que la révélation et la rédemption.

108 Celui qui psalmodie dans la Liturgie des Heures ne psalmodie pas tellement en son propre nom qu'au nom de tout le Corps du Christ, et même en tenant la place du Christ lui-même. Si l'on se rappelle cela, les difficultés disparaissent, au cas où l'on s'aperçoit que les sentiments intimes, tandis que l'on psalmodie, sont en désaccord avec les sentiments exprimés par le psaume; par exemple, si étant accablé de tristesse, on rencontre un psaume de jubilation, ou bien, dans le succès, un psaume de lamentation. Dans la prière purement privée, il est facile d'éviter cet inconvénient, car on est libre de choisir un psaume accordé à ses sentiments. Mais dans l'office divin, on ne psalmodie pas à titre privé: c'est au nom de l'Eglise que le cycle officiel des psaumes est pratiqué même par celui qui dit une Heure en étant seul. Celui qui psalmodie au nom de l'Eglise peut toujours trouver un motif de joie ou de tristesse car, en ce sens aussi, se vérifie la parole de l'Apôtre: " Joyeux avec ceux qui sont joyeux, pleurant avec ceux qui pleurent " (Rm 12,15); et ainsi la fragilité humaine, blessée par l'amour de soi, est guérie à ce niveau de charité où l'âme s'accorde avec la voix chez celui qui psalmodie .

109 Celui qui psalmodie au nom de l'Eglise doit s'attacher au sens plénier des psaumes, surtout à leur sens messianique, car c'est à cause de lui que l'Eglise a adopté le psautier. Ce sens messianique a été pleinement manifesté dans le Nouveau Testament, et même il a été clairement exprimé par le Christ Seigneur lorsque celui-ci disait aux Apôtres: " Il fallait que s'accomplisse tout ce qui a été écrit de moi dans la Loi de Moïse, les prophètes et les psaumes " (Lc 24,44). Un exemple bien connu de ce fait est le dialogue, chez saint Matthieu, au sujet du Messie, fils de David et son Seigneur , où le psaume 109 s'entend du Messie. En continuant dans cette voie, les Pères de l'Eglise ont reçu et expliqué tout le psautier comme une prophétie concernant le Christ et l'Eglise; et c'est pour cette raison que les psaumes ont été choisis pour la liturgie. Bien que parfois on ait admis certaines interprétations artificielles, en général les Pères aussi bien que la liturgie ont entendu légitimement dans les psaumes le Christ criant vers son Père, ou le Père parlant avec son Fils; ils y reconnaissaient même la voix de l'Eglise, des Apôtres ou des martyrs. Cette méthode d'interprétation a fleuri encore au moyen âge: en effet, dans beaucoup de psautiers manuscrits du moyen âge, on proposait aux utilisateurs des psaumes un sens christologique indiqué dans le titre de chacun. L'interprétation christologique ne s'est jamais restreinte aux psaumes considérés comme messianiques, mais elle s'étend à beaucoup d'autres; pour certains ce sont de simples appropriations, mais recommandées par la tradition de l'Eglise. Surtout pour la psalmodie des jours de fête, les psaumes ont été choisis pour un motif christologique, et c'est pour le mettre en lumière que l'on propose souvent des antiennes tirées des psaumes eux-mêmes.


1970 PGLH 33