1993 Veritatis Splendor 16
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La réponse rappelant les commandements ne satisfait pas le jeune homme qui interroge Jésus : " Tout cela, je l'ai observé ; que me manque-t-il encore ? " Mt 19,20. Il n'est pas facile de dire avec bonne conscience " tout cela, je l'ai observé ", si l'on comprend à peine la portée effective des exigences contenues dans la Loi de Dieu. Cependant, s'il lui est possible de donner une réponse semblable, s'il a aussi suivi l'idéal moral avec sérieux et avec générosité depuis son enfance, le jeune homme riche sait qu'il est encore loin du but ; face à la personne de Jésus, il saisit que quelque chose lui manque encore. C'est en fonction de cette prise de conscience d'insuffisance que Jésus s'adresse à lui dans sa dernière réponse : en saisissant la nostalgie d'une plénitude qui dépasse l'interprétation légaliste des commandements, le bon Maître invite le jeune homme à entrer dans le chemin de la perfection : " Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes et donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans les cieux ; puis viens, suis-moi " Mt 19,21.
Comme on l'a fait pour la partie précédente de la réponse de Jésus, celle-ci doit être lue et interprétée dans le cadre de tout le message moral de l'Evangile et, spécialement, dans le cadre du Discours sur la Montagne, des Béatitudes Mt 5,3-12, dont la première est précisément la béatitude des pauvres, des " pauvres en esprit ", comme le précise saint Matthieu Mt 5,3, ou encore des humbles. Dans ce sens, on peut dire que les Béatitudes font aussi partie de l'espace ouvert par la réponse que Jésus donne à la question du jeune homme : " Que dois-je faire de bon pour obtenir la vie éternelle ? ". En effet, chaque béatitude promet précisément, selon une perspective particulière, ce " bien " qui ouvre l'homme à la vie éternelle, et plus encore qui est la vie éternelle elle-même.
Les Béatitudes n'ont pas comme objet propre des normes particulières de comportement, mais elles évoquent des attitudes et des dispositions fondamentales de l'existence, et, donc, ne coïncident pas exactement avec les commandements. D'autre part, il n'y a pas de séparation ou d'opposition entre les béatitudes et les commandements : les uns et les autres se réfèrent au bien et à la vie éternelle. Le Discours sur la Montagne commence par la proclamation des Béatitudes, mais renferme aussi la référence aux commandements Mt 5,20-48. En même temps, ce Discours montre l'ouverture et l'orientation des commandements vers la perfection qui est celle des Béatitudes. Celles-ci sont, avant tout, des promesses, dont découlent aussi, de manière indirecte, des indications normatives pour la vie morale. Dans leur profondeur originelle, elles sont une sorte d'autoportrait du Christ et, précisément pour cela, elles sont des invitations à le suivre et à vivre en communion avec lui (26).
(26) Cf. CEC 1717.
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Nous ne savons pas dans quelle mesure le jeune homme de l'Evangile avait compris le contenu profond et exigeant de la première réponse donnée par Jésus : " Si tu veux entrer dans la vie, observe les commandements " ; cependant, il est certain que l'engagement manifesté par le jeune homme à respecter toutes les exigences morales des commandements constitue le terrain indispensable dans lequel peut germer et mûrir le désir de la perfection, c'est-à-dire de réaliser ce qu'ils signifient et de l'accomplir en suivant le Christ. Le dialogue entre Jésus et le jeune homme nous aide à saisir les conditions de la croissance morale de l'homme appelé à la perfection : le jeune homme, qui a observé tous les commandements, se montre incapable de faire par ses seules forces le pas suivant. Pour le faire, il faut une liberté humaine mûre : " Si tu veux ", et le don divin de la grâce : " Viens, suis-moi ".
La perfection exige la maturité dans le don de soi, à quoi est appelée la liberté de l'homme. Jésus indique au jeune homme les commandements comme condition première et imprescriptible pour avoir la vie éternelle ; l'abandon de tout ce que possède le jeune homme et la suite du Seigneur prennent en revanche le caractère d'une proposition : " Si tu veux ". La parole de Jésus révèle la dynamique particulière de la croissance de la liberté vers sa maturité et, en même temps, manifeste le rapport fondamental de la liberté avec la Loi divine. La liberté de l'homme et la Loi de Dieu ne s'opposent pas, mais, au contraire, s'appellent mutuellement.
Le disciple du Christ sait que sa vocation est une vocation à la liberté. " Vous, en effet, mes frères, vous avez été appelés à la liberté " proclame avec joie et avec fierté l'Apôtre Paul. Cependant, il précise aussitôt : " Que cette liberté ne donne pas prétexte à satisfaire la chair ; mais par la charité mettez vous au service les uns des autres " Ga 5,13. La fermeté avec laquelle l'Apôtre s'oppose à celui qui croit en sa propre justification par la Loi n'a rien à voir avec la " libération " de l'homme par les préceptes, qui sont, à l'inverse, au service de la pratique de l'amour : " Celui qui aime autrui a de ce fait accompli la loi. En effet, le précepte : Tu ne commettras pas d'adultère, tu ne tueras pas, tu ne voleras pas, tu ne convoiteras pas, et tous les autres se résument dans cette formule : Tu aimeras ton prochain comme toi-même " Rm 13,8-9. Après avoir parlé de l'observance des commandements comme de la première liberté imparfaite, saint Augustin poursuit ainsi : " Pourquoi, demande quelqu'un, n'est-ce pas la liberté parfaite ? Parce que je vois dans mes membres une autre loi qui s'élève contre la loi de mon esprit ( ). C'est une liberté partielle et un esclavage partiel ; ce n'est pas encore la liberté totale, la pure liberté, la pleine liberté parce que ce n'est pas encore l'éternité. La faiblesse pèse en effet sur nous en partie et nous avons reçu une part de liberté. Tout ce que nous avons commis de péché auparavant a été effacé par le baptême. Parce que l'iniquité a été entièrement effacée, est-ce qu'il n'est resté aucune faiblesse ? S'il n'en était pas resté, nous serions sans péché dans cette vie. Mais qui oserait le prétendre si ce n'est l'orgueilleux, si ce n'est celui qui est indigne de la miséricorde du Libérateur ? Du fait, par conséquent, qu'il nous est resté une certaine faiblesse, j'ose dire que, dans la mesure où nous servons Dieu, nous sommes libres et que, dans la mesure où nous servons la loi du péché, nous sommes encore esclaves " (27).
(27) In Iohannis Evangelium Tractatus, 41, 10 : CCL 36, 363.
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Celui qui vit " selon la chair " ressent la Loi de Dieu comme un poids, et même comme une négation ou, en tout cas, comme une restriction de sa propre liberté. Inversement, celui qui est animé par l'amour, qui se laisse " mener par l'Esprit " Ga 5,16 et désire servir les autres trouve dans la Loi de Dieu la voie fondamentale et nécessaire pour pratiquer l'amour librement choisi et vécu. Bien plus, il saisit l'urgence intérieure - une vraie " nécessité ", et non pas une contrainte - de ne pas s'en tenir aux exigences minimales de la Loi, mais de les vivre dans leur " plénitude ". C'est un chemin encore incertain et fragile tant que nous sommes sur la terre, mais rendu possible par la grâce qui nous donne de posséder la pleine liberté des fils de Dieu Rm 8,21 et donc de répondre par la vie morale à notre sublime vocation : être " fils dans le Fils ".
Cette vocation à l'amour parfait n'est pas réservée à un groupe de personnes. L'invitation " va, vends ce que tu possèdes et donne- le aux pauvres ", avec la promesse " tu auras un trésor dans les cieux ", s'adresse à tous, parce qu'il s'agit d'une radicalisation du commandement de l'amour du prochain, comme l'invitation " viens, suis-moi " est la nouvelle forme concrète du commandement de l'amour de Dieu. Les commandements et l'invitation de Jésus au jeune homme riche sont au service d'une unique et indivisible charité qui tend spontanément à la perfection dont Dieu seul est la mesure : " Vous donc, vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait " Mt 5,48. Dans l'Evangile de Luc, Jésus explicite la portée de cette perfection
" Montrez-vous miséricordieux comme votre Père est miséricordieux " Lc 6,36.
(Mt 19,21)
19 La voie et, en même temps, le contenu de cette perfection consistent dans la suite du Christ, dans le fait de suivre Jésus après avoir renoncé à ses biens particuliers et à soi-même. C'est précisément la conclusion du dialogue entre Jésus et le jeune homme : " Puis viens, suis-moi " Mt 19,21. La merveilleuse profondeur de cette invitation sera pleinement perçue par les disciples après la résurrection du Christ, quand l'Esprit Saint les introduira dans la vérité tout entière Jn 16,13.
Jésus lui-même prend l'initiative et invite à le suivre. L'appel est adressé avant tout à ceux auxquels il confie une mission particulière, à commencer par les Douze ; mais il apparaît aussi clairement qu'être disciple du Christ est la condition de tout croyant Ac 6,1. De ce fait, suivre le Christ est le fondement essentiel et original de la morale chrétienne : comme le peuple d'Israël suivait Dieu qui le conduisait dans le désert vers la Terre promise Ex 13,21, de même le disciple doit suivre Jésus vers lequel le Père lui-même l'attire Jn 6,44.
Il ne s'agit pas seulement ici de se mettre à l'écoute d'un enseignement et d'accueillir dans l'obéissance un commandement ; plus radicalement, il s'agit d'adhérer à la personne même de Jésus, de partager sa vie et sa destinée, de participer à son obéissance libre et amoureuse à la volonté du Père. En suivant, par la réponse de la foi, celui qui est la Sagesse faite chair, le disciple de Jésus devient vraiment disciple de Dieu Jn 6,45. En effet, Jésus est la lumière du monde, la lumière de la vie Jn 8,12 ; il est le pasteur qui guide et nourrit les brebis Jn 10,11-16 ; il est le chemin, la vérité et la vie Jn 14,6 ; il est celui qui conduit au Père, de telle sorte que le voir, lui le Fils, c'est voir le Père Jn 14,6-10. Par conséquent, imiter le Fils, " l'image du Dieu invisible " Col 1,15, signifie imiter le Père.
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Jésus demande de le suivre et de l'imiter sur le chemin de l'amour, d'un amour qui se donne totalement aux frères par amour pour Dieu : " Voici quel est mon commandement : vous aimer les uns les autres comme je vous ai aimés " Jn 15,12. Ce " comme " exige l'imitation de Jésus, de son amour, dont le lavement des pieds est le signe : " Si donc je vous ai lavé les pieds, moi le Seigneur et le Maître, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. Car c'est un exemple que je vous ai donné, pour que vous fassiez, vous aussi, comme moi j'ai fait pour vous " Jn 13,14-15. L'agir de Jésus et sa parole, ses actions et ses préceptes constituent la règle morale de la vie chrétienne. En effet, ses actions et, de manière particulière, sa Passion et sa mort en Croix sont la révélation vivante de son amour pour le Père et pour les hommes. Cet amour, Jésus demande qu'il soit imité par ceux qui le suivent. C'est le commandement " nouveau ":
" Je vous donne un commandement nouveau : vous aimer les uns les autres ; comme je vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres. À ceci, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l'amour les uns pour les autres " Jn 13,34-35.
Ce " comme " indique aussi la mesure avec laquelle Jésus a aimé et avec laquelle ses disciples doivent s'aimer entre eux. Après avoir dit : " Voici quel est mon commandement : vous aimer les uns les autres comme je vous ai aimés " Jn 15,12, Jésus poursuit en révélant le don sacrificiel de sa vie sur la Croix, témoignage d'un amour " jusqu'à la fin " Jn 13,1 : " Nul n'a plus grand amour que celui-ci : donner sa vie pour ses amis " Jn 15,13.
En appelant le jeune homme à le suivre sur le chemin de la perfection, Jésus lui demande de vivre parfaitement le commandement de l'amour, " son " commandement : entrer dans le mouvement de son don total, imiter et revivre l'amour même du " bon " Maître, de celui qui a aimé " jusqu'à la fin ". C'est ce que Jésus demande à tout homme qui veut se mettre à sa suite : " Si quelqu'un veut venir à ma suite, qu'il se renie lui-même, qu'il se charge de sa croix, et qu'il me suive " Mt 16,24.
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Suivre le Christ ne peut pas être une imitation extérieure, parce que cela concerne l'homme dans son intériorité profonde. Être disciple de Jésus veut dire être rendu conforme à Celui qui s'est fait serviteur jusqu'au don de lui-même sur la Croix Ph 2,5-8. Par la foi, le Christ habite dans le coeur du croyant Ep 3,17, et ainsi le disciple est assimilé à son Seigneur et lui est configuré. C'est le fruit de la grâce, de la présence agissante de l'Esprit Saint en nous.
Incorporé au Christ, le chrétien devient membre de son Corps qui est l'Eglise 1Co 12,13 1Co 12,27. Sous l'impulsion de l'Esprit, le Baptême configure radicalement le fidèle au Christ, dans le mystère pascal de la mort et de la résurrection ; il le " revêt " du Christ Ga 3,27 : " Réjouissons-nous et rendons grâce, s'exclame saint Augustin en s'adressant aux baptisés, nous sommes devenus non seulement chrétiens, mais le Christ. (..) Soyez étonnés et joyeux. Nous sommes devenus le Christ ! " (28). Mort au péché, le baptisé reçoit la vie nouvelle Rm 6,3-11 : vivant pour Dieu dans le Christ Jésus, il est appelé à marcher selon l'Esprit et à en manifester les fruits dans sa vie Ga 5,16-25. Et la participation à l'Eucharistie, sacrement de la Nouvelle Alliance 1Co 11,23-29, est le plus haut degré de l'assimilation au Christ, source de " vie éternelle " Jn 6,51-58, principe et force du don total de soi, dont Jésus, selon le témoignage transmis par Paul, demande de faire mémoire dans la célébration et dans la vie : " Chaque fois en effet que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous annoncez la mort du Seigneur jusqu'à ce qu'il vienne " 1Co 11,26.
(28) In Iohannis Evangelium Tractatus, 21, 8 : CCL 36, 216.
Mt 19,26
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Amère est la conclusion du dialogue entre Jésus et le jeune homme riche : " Entendant cette parole, le jeune homme s'en alla contristé, car il avait de grands biens " Mt 19,22. Non seulement le riche, mais encore les disciples eux-mêmes sont effrayés par l'appel de Jésus à le suivre, appel dont les exigences dépassent les aspirations et les forces humaines : " Entendant cela, les disciples restèrent tout interdits : " Qui donc peut être sauvé ? " disaient-ils " Mt 19,25. Mais le Maître renvoie à la puissance de Dieu : " Pour les hommes, c'est impossible, mais pour Dieu tout est possible " Mt 19,26.
Dans ce même chapitre de l'Evangile de Matthieu Mt 19,3-10, lorsqu'il interprète la Loi mosaïque sur le mariage, Jésus refuse le droit à la répudiation, en invoquant le " principe " le plus ancien et le plus autorisé par rapport à la Loi de Moïse ; le dessein premier de Dieu sur l'homme est un dessein auquel l'homme est devenu non conforme à la suite du péché : " C'est en raison de votre dureté de coeur que Moïse vous a permis de répudier vos femmes, mais dès l'origine il n'en fut pas ainsi " Mt 19,8. Le rappel du " principe " effraie les disciples qui commentent en ces termes : " Si telle est la condition de l'homme envers la femme, il vaut mieux ne pas se marier " Mt 19,10. En se référant de manière spécifique au charisme du célibat " à cause du Royaume des cieux " Mt 19,12, tout en énonçant une règle générale, Jésus renvoie à la nouvelle et surprenante possibilité offerte à l'homme par la grâce de Dieu : " Il leur dit : " Tous ne comprennent pas ce langage, mais ceux-là à qui c'est donné " " Mt 19,11.
L'homme ne peut pas imiter et revivre l'amour du Christ par ses seules forces. Il devient capable de cet amour seulement en vertu d'un don de Dieu. De même que le Seigneur Jésus reçoit l'amour de son Père, il le communique à son tour gratuitement à ses disciples : " Comme le Père m'a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez en mon amour " Jn 15,9. Le don du Christ, c'est son Esprit, dont le premier " fruit " Ga 5,22 est la charité : " L'amour de Dieu a été répandu dans nos coeurs par le Saint-Esprit qui nous fut donné " Rm 5,5. Saint Augustin s'interroge : " Est-ce l'amour qui fait observer les commandements, ou bien est- ce l'observance des commandements qui fait naître l'amour ? ". Et il répond : " Mais qui doute que l'amour précède l'observance ? De fait, celui qui n'aime pas n'a pas de raison d'observer les commandements " (29).
(29) Ibid., 82, 3 : CCL 36, 533.
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" La loi de l'Esprit qui donne la vie dans le Christ Jésus t'a affranchi de la loi du péché et de la mort " Rm 8,2. Par ces paroles, l'Apôtre nous amène à considérer, dans la perspective de l'histoire du salut qui s'accomplit dans le Christ, le rapport entre la Loi " ancienne " et la grâce " Loi nouvelle ". Il reconnaît le rôle pédagogique de la Loi qui, en permettant à l'homme pécheur de prendre la mesure de son impuissance et en lui ôtant la prétention de l'autosuffisance, l'ouvre à la supplication et à l'accueil de la " vie dans l'Esprit ". Il n'est possible de pratiquer les commandements de Dieu que dans cette vie nouvelle. C'est par la foi au Christ, en effet, que nous sommes rendus justes Rm 3,28 : la " justice " que la Loi exige, mais ne peut donner à personne, tout croyant la trouve manifestée et donnée par le Seigneur Jésus. Saint Augustin synthétise encore, de manière tout aussi admirable, la dialectique paulinienne de la Loi et de la grâce : " La Loi a donc été donnée pour que l'on demande la grâce ; la grâce a été donnée pour que l'on remplisse les obligations de la Loi " (30).
(30) De spiritu et littera, 19, 34 : CSEL 60, 187.
L'amour et la vie selon l'Evangile ne peuvent pas être envisagés avant tout sous la forme du précepte, car ce qu'ils requièrent va au-delà des forces humaines. Ils ne peuvent être vécus que comme le fruit d'un don de Dieu qui guérit et transforme le coeur de l'homme par la grâce : " Car la Loi fut donnée par Moïse ; la grâce et la vérité sont venues par Jésus Christ " Jn 1,17. De ce fait, la promesse de la vie éternelle est liée au don de la grâce, et le don de l'Esprit que nous avons reçu constitue déjà " les arrhes de notre héritage " Ep 1,14.
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Ainsi se révèle l'aspect authentique et original du commandement de l'amour, et de la perfection à laquelle il est ordonné ; il s'agit d'une possibilité offerte à l'homme exclusivement par la grâce, par le don de Dieu, par son amour. D'autre part, cette conscience d'avoir reçu ce don, de posséder en Jésus Christ l'amour de Dieu, fait naître et soutient la réponse responsable d'un amour total envers Dieu et entre les frères, comme le rappelle avec insistance l'Apôtre Jean dans sa première Lettre : " Bien-aimés, aimons-nous les uns les autres, puisque l'amour est de Dieu et que quiconque aime est né de Dieu et connaît Dieu. Celui qui n'aime pas n'a pas connu Dieu, car Dieu est Amour (..). Bien-aimés, si Dieu nous a aimés ainsi, nous devons, nous aussi, nous aimer les uns les autres (..). Quant à nous, aimons, puisque lui nous a aimés le premier " 1Jn 4,7-8 1Jn 4,11 1Jn 4,19.
Ce lien inséparable entre la grâce du Seigneur et la liberté de l'homme, entre le don et le devoir, a été exprimé en termes simples et profonds par saint Augustin qui prie ainsi : " Da quod iubes et iube quod vis " (donne ce que tu commandes et commande ce que tu veux) (31).
(31) Confessions, X, 29, 40 : CCL 27, 176 ; cf. De gratia et libero arbitrio, XV : PL 44, 899.
Le don ne diminue pas mais renforce l'exigence morale de l'amour : " Or voici son commandement : croire au nom de son Fils Jésus Christ et nous aimer les uns les autres comme il nous en a donné le commandement " 1Jn 3,23. On ne peut " demeurer " dans l'amour qu'à condition d'observer les commandements, comme l'affirme Jésus : " Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez en mon amour, comme moi j'ai gardé les commandements de mon Père et je demeure dans son amour " Jn 15,10.
En résumant ce qui est au coeur du message moral de Jésus et de la prédication des Apôtres, et en reprenant dans une admirable synthèse la grande tradition des Pères d'Orient et d'Occident - de saint Augustin en particulier (32) -, saint Thomas a pu écrire que la Loi nouvelle est la grâce de l'Esprit Saint donné par la foi au Christ (33). Les commandements extérieurs, dont l'Evangile parle aussi, prédisposent à cette grâce ou en déploient les effets dans la vie. De fait, la Loi nouvelle ne se contente pas de dire ce qui doit se faire, mais elle donne aussi la force de " faire la vérité " Jn 3,21. Dans le même sens, saint Jean Chrysostome a fait observer que la Loi nouvelle fut promulguée précisément quand l'Esprit Saint est venu du ciel le jour de la Pentecôte et que les Apôtres " ne descendirent pas de la montagne en portant, comme Moïse, des tables de pierre dans leurs mains, mais qu'ils s'en retournaient en portant l'Esprit Saint dans leurs coeurs, devenus par sa grâce une loi vivante et un livre vivant " (34).
(32) Cf. De spiritu et littera, 21, 36 ; 26,46 : CSEL 60, 189-190 ; 200-201 (33) Cf. Somme théologique, I-II 106,1, concl. et ad 2. (34) In Matthaeum, hom. I, 1 : PG 57, 15.
Rm 12,2
Mt 28,20
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Le dialogue entre Jésus et le jeune homme riche se poursuit, d'une certaine manière, dans toutes les périodes de l'histoire, et encore aujourd'hui. La question " Maître, que dois-je faire de bon pour obtenir la vie éternelle ? " naît dans le coeur de tout homme, et c'est toujours le Christ, et lui seul, qui donne la réponse intégrale et finale. Le Maître, qui enseigne les commandements de Dieu, qui invite à sa suite et qui accorde la grâce pour une vie nouvelle, est toujours présent et agissant au milieu de nous, selon sa promesse : " Et voici que je suis avec vous pour toujours jusqu'à la fin du monde " Mt 28,20. La présence du Christ aux hommes de tous les temps se réalise dans son corps qui est l'Eglise. Pour cela, le Seigneur a promis à ses disciples l'Esprit Saint, qui leur " rappellerait " et leur ferait comprendre ses commandements Jn 14,26 et qui serait le principe et la source d'une vie nouvelle dans le monde Jn 3,5-8 Rm 8,1-13.
Données par Dieu dans l'Ancienne Alliance et parvenues à leur perfection dans la Nouvelle et Eternelle Alliance, en la personne même du Fils de Dieu fait homme, les prescriptions morales doivent être fidèlement conservées et actualisées en permanence dans les différentes cultures tout au long de l'histoire. La charge de leur interprétation a été confiée par Jésus aux Apôtres et à leurs successeurs, assistés spécialement par l'Esprit de vérité : " Qui vous écoute m'écoute " Lc 10,16. Avec la lumière et avec la force de l'Esprit, les Apôtres ont accompli la mission de prêcher l'Evangile et de montrer la " voie " du Seigneur Ac 18,25, en enseignant avant tout à suivre et à imiter le Christ : " Pour moi, vivre, c'est le Christ " Ph 1,21.
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Dans la catéchèse morale des Apôtres, parallèlement aux exhortations et aux indications relatives au contexte historique et culturel, se trouve un enseignement éthique avec des normes précises de comportement. Cela apparaît aussi dans leurs Lettres, qui contiennent l'interprétation, guidée par l'Esprit Saint, des préceptes du Seigneur à vivre dans les différentes situations culturelles Rm 12-15 1Co 11-14 Ga 5-6 Ep 4-6 Col 3-4 1P 1 Jc 1. Aux débuts de l'Eglise, chargés de la prédication évangélique, les Apôtres ont veillé sur la rectitude de la conduite des chrétiens (35), en vertu de leur responsabilité pastorale, comme ils ont veillé également sur la pureté de la foi et sur la transmission des dons divins par les sacrements (36). Les premiers chrétiens, issus du peuple juif ou d'autres nations, se différenciaient des païens non seulement par leur foi et par leur liturgie, mais aussi par le témoignage de leur conduite morale, inspirée par la Loi nouvelle (37). En effet, l'Eglise est en même temps communion de foi et de vie ; sa norme est " la foi opérant par la charité " Ga 5,6.
(35) Cf. s. Irénée, Adversus haereses, IV, 26, 2-5 : SC 100/2, p. 718-729. (36) Cf. s. Justin, Apologie, I, 66 : PG 6, 427-430. (37) Cf. 1P 2,12 1P 3,17 ; Didachée, II, 2 : SC 248, p. 148-149 ; Clément d'Alexandrie, Le Pédagogue, I, 10 ; II, 10 : PG, 8, 355- 364 ; 497-536 : SC 70, p. 268-279 ; SC 108, p. 165-219 ; Tertullien, Apologétique, IX, 8 : CSEL, 69, 24.
Aucune déchirure ne doit briser l'harmonie entre la foi et la vie: l'unité de l'Eglise est blessée non seulement par les chrétiens qui refusent ou déforment la vérité de la foi, mais encore par ceux qui méconnaissent les obligations morales auxquelles l'Evangile les appelle 1Co 5,9-13. Avec fermeté, les Apôtres ont refusé toute dissociation entre l'engagement intérieur et les gestes qui l'expriment et le confirment 1Jn 2,3-6.
Et depuis les temps apostoliques, les Pasteurs de l'Eglise ont dénoncé clairement les manières d'agir de ceux qui étaient des fauteurs de division par leurs enseignements et par leurs comportements (38).
(38) Cf. s. Ignace d'Antioche, Aux Magnésiens, VI, 1-2 : SC 10 bis, p. 82-85 ; s. Irénée, Adversus haereses, IV, 33, 1.6.7 : SC 100/2, p. 802-805 ; 814-815 ; 816-819.
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Dans l'unité de l'Eglise, promouvoir et garder la foi et la vie morale, c'est la tâche confiée par Jésus aux Apôtres Mt 28,19-20, tâche qui se poursuit dans le ministère de leurs successeurs. C'est ce que l'on retrouve dans la Tradition vivante, par laquelle, comme l'enseigne le Concile Vatican II, " l'Eglise perpétue dans sa doctrine, sa vie et son culte, et elle transmet à chaque génération, tout ce qu'elle est elle-même, tout ce qu'elle croit. Cette Tradition qui vient des Apôtres se poursuit dans l'Eglise, sous l'assistance du Saint-Esprit " (39). Dans l'Esprit, l'Eglise accueille et transmet l'Ecriture comme témoignage des " grandes choses " que Dieu opère dans l'histoire Lc 1,49 ; elle confesse par la bouche des Pères et des Docteurs la vérité du Verbe incarné ; elle met en pratique les préceptes et la charité dans la vie des saints et des saintes et dans le sacrifice des martyrs ; elle célèbre l'espérance dans la liturgie ; par cette Tradition, les chrétiens reçoivent " la voix vivante de l'Evangile " (40), comme expression fidèle de la sagesse et de la volonté divines.
(39) DV 8. (40) DV 8.
À l'intérieur de la Tradition, avec l'assistance de l'Esprit Saint, se développe l'interprétation authentique de la Loi du Seigneur. L'Esprit, qui est à l'origine de la Révélation, des commandements et des enseignements de Jésus, veille à ce qu'ils soient gardés saintement, exposés fidèlement et appliqués correctement dans tous les temps et dans toutes les situations. Une telle " actualisation " des commandements est le signe et le résultat d'une profonde intelligence de la Révélation et d'une bonne compréhension, à la lumière de la foi, des nouvelles situations historiques et culturelles. Cependant, elle ne peut que confirmer la validité permanente de la Révélation et s'inscrire dans le sillage de l'interprétation qu'en donne la grande Tradition de l'Eglise par son enseignement et par sa vie, Tradition dont témoignent la doctrine des Pères, la vie des saints, la liturgie de l'Eglise et l'enseignement du Magistère.
En particulier, comme l'affirme le Concile, " la charge d'interpréter de façon authentique la parole de Dieu, écrite ou transmise, a été confiée au seul Magistère vivant de l'Eglise dont l'autorité s'exerce au nom de Jésus Christ " (41). Ainsi l'Eglise, dans sa vie et dans son enseignement, se présente comme " colonne et support de la vérité " 1Tm 3,15, et aussi de la vérité dans l'agir moral. En effet, " il appartient à l'Eglise d'annoncer en tout temps et en tout lieu les principes de la morale, même en ce qui concerne l'ordre social, ainsi que de porter un jugement sur toute réalité humaine, dans la mesure où l'exigent les droits fondamentaux de la personne humaine ou le salut des âmes " (42).
(41) DV 10. (42) CIC 747n2.
Précisément sur les questions qui font l'objet aujourd'hui du débat moral et autour desquelles se sont développées de nouvelles tendances et de nouvelles théories, le Magistère, dans la fidélité à Jésus Christ et dans la continuité de la Tradition de l'Eglise, estime qu'il est de son devoir urgent de proposer son discernement et son enseignement, afin d'aider l'homme sur le chemin vers la vérité et vers la liberté.
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En méditant le dialogue entre Jésus et le jeune homme riche, nous avons pu saisir le contenu essentiel de la Révélation de l'Ancien et du Nouveau Testament à propos de l'agir moral. Il comprend : la soumission de l'homme et de son agir à Dieu, Celui qui " seul est le Bon " ; le rapport entre le bien moral des actes humains et la vie éternelle ; la marche à la suite du Christ, qui ouvre à l'homme la perspective de l'amour parfait ; et, enfin, le don de l'Esprit Saint, source et soutien de la vie morale de la " créature nouvelle " 2Co 5,17.
Dans sa réflexion morale, l'Eglise a toujours tenu compte des paroles que Jésus a adressées au jeune homme riche. L'Ecriture Sainte, en effet, reste la source vive et féconde de la doctrine morale de l'Eglise, comme l'a rappelé le Concile Vatican II : " L'Evangile (..) (est) la source de toute vérité salutaire et de toute règle morale " (43). L'Eglise a gardé fidèlement ce qu'enseigne la Parole de Dieu, non seulement sur les vérités à croire mais encore sur l'agir moral, c'est-à-dire l'agir qui plaît à Dieu 1Th 4,1, accomplissant un développement doctrinal analogue à celui qui s'est produit dans le domaine des vérités de la foi. Assistée de l'Esprit Saint qui la conduit vers la vérité tout entière Jn 16,13, l'Eglise n'a cessé, et ne peut jamais cesser, de scruter " le mystère du Verbe incarné ", dans lequel " s'éclaire vraiment le mystère de l'homme " (44).
(43) DV 7. (44) GS 22.
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La réflexion morale de l'Eglise, toujours menée sous la lumière du Christ, le " Bon Maître ", s'est déroulée aussi dans la forme spécifique de la science théologique appelée " théologie morale ", science qui accueille et interroge la Révélation divine et en même temps répond aux exigences de la raison humaine. La théologie morale est une réflexion sur la " moralité ", c'est-à-dire le caractère bon ou mauvais des actes humains et de la personne qui les pose, et, en ce sens, elle concerne tous les hommes ; mais c'est aussi une " théologie ", car elle reconnaît le principe et la fin de l'agir moral en Celui qui " seul est le Bon " et qui, en se donnant à l'homme dans le Christ, lui offre la béatitude de la vie divine. Le Concile Vatican II a invité les spécialistes à s'appliquer, " avec un soin particulier à perfectionner la théologie morale dont la présentation scientifique, plus nourrie de la doctrine de la Sainte Ecriture, mettra en lumière la grandeur de la vocation des fidèles dans le Christ et leur obligation de porter du fruit dans la charité pour la vie du monde " (45). Le même Concile a invité les théologiens, " tout en respectant les méthodes et les règles propres aux sciences théologiques (..) à chercher la manière toujours plus adaptée pour communiquer la doctrine aux hommes de leur temps : car autre chose est le dépôt même ou les vérités de la foi, autre chose la façon selon laquelle ces vérités sont exprimées, à condition toutefois d'en sauvegarder le sens et la signification " (46). De là l'invitation suivante, qui s'applique à tous les fidèles mais qui s'adresse particulièrement aux théologiens : " Que les croyants vivent donc en très étroite union avec les autres hommes de leur temps et qu'ils s'efforcent de comprendre à fond leurs façons de penser et de sentir, telles qu'elles s'expriment par la culture " (47).
(45) OT 16. (46) GS 62. (47) GS 62.
Les efforts de nombreux théologiens, soutenus par les encouragements du Concile, ont déjà porté leurs fruits, par des réflexions intéressantes et utiles sur les vérités de la foi qu'il faut croire et appliquer dans la vie, présentées sous des formes qui répondent davantage à la sensibilité et aux interrogations des hommes de notre temps. L'Eglise, et en particulier les évêques, auxquels Jésus Christ a confié avant tout le ministère d'enseignement, accueillent ces efforts avec gratitude et encouragent les théologiens à poursuivre leur labeur, animés par une profonde et authentique " crainte du Seigneur, principe de savoir " Pr 1,7.
En même temps, dans le cadre des débats théologiques post- conciliaires, se sont toutefois répandues certaines interprétations de la morale chrétienne qui ne sont pas compatibles avec la " saine doctrine " 2Tm 4,3. Il est évident que le Magistère de l'Eglise n'entend pas imposer aux fidèles un système théologique particulier, encore moins un système philosophique, mais, pour " garder saintement et exposer avec fidélité " la Parole de Dieu (48), il a le devoir de déclarer l'incompatibilité de certaines orientations de la pensée théologique ou de telle ou telle affirmation philosophique avec la vérité révélée (49).
(48) DV 10. (49) Cf. Concile Vatican I, Const. dogm. sur la foi catholique Dei Filius, ch. 4 : DS 3018.
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En vous adressant cette encyclique, chers Frères dans l'épiscopat, je désire énoncer les principes nécessaires pour le discernement de ce qui est contraire à la " saine doctrine ", et rappeler les éléments de l'enseignement moral de l'Eglise qui semblent aujourd'hui particulièrement exposés à l'erreur, à l'ambiguïté ou à l'oubli. Ce sont d'ailleurs les éléments dont dépend " la réponse aux énigmes cachées de la condition humaine, qui, hier comme aujourd'hui, troublent profondément le coeur humain : qu'est-ce que l'homme ? Quel est le sens et le but de la vie ? Qu'est-ce que le bien et qu'est-ce que le péché ? Quels sont l'origine et le but de la souffrance ? Quelle est la voie pour parvenir au vrai bonheur ? Qu'est-ce que la mort, le jugement et la rétribution après la mort ? Qu'est-ce enfin que le mystère dernier et ineffable qui entoure notre existence, d'où nous tirons notre origine et vers lequel nous tendons ? " (50). Ces questions - et d'autres encore comme : qu'est-ce que la liberté et quelle est son rapport avec la vérité contenue dans la Loi de Dieu ? quel est le rôle de la conscience dans la formation de la physionomie morale de l'homme ? comment discerner, en conformité avec la vérité sur le bien, les droits et les devoirs concrets de la personne humaine ? - peuvent se résumer dans la question fondamentale que le jeune homme de l'Evangile posa à Jésus : " Maître, que dois-je faire de bon pour obtenir la vie éternelle ? " Envoyée par Jésus pour prêcher l'Evangile et " de toutes les nations faire des disciples, leur apprenant à observer tout " ce qu'il a prescrit Mt 28,19-20, l'Eglise redonne, aujourd'hui encore, la réponse du Maître, car elle possède une lumière et une force capables de résoudre même les questions les plus discutées et les plus complexes. Cette force et cette lumière incitent l'Eglise à développer d'une manière constante, non seulement la réflexion dogmatique, mais aussi la réflexion morale dans un cadre interdisciplinaire, ce qui est particulièrement nécessaire pour les problèmes nouveaux qui se posent (51). C'est toujours sous cette lumière et avec cette force que le Magistère de l'Eglise accomplit son oeuvre de discernement, accueillant et faisant sienne à nouveau la recommandation que l'Apôtre Paul adressait à Timothée : " Je t'adjure devant Dieu et devant le Christ Jésus, qui doit juger les vivants et les morts, au nom de son Apparition et de son Règne : proclame la parole, insiste à temps et à contretemps, réfute, menace, exhorte, avec une patience inlassable et le souci d'instruire. Car un temps viendra où les hommes ne supporteront plus la saine doctrine, mais au contraire, au gré de leurs passions et l'oreille les démangeant, ils se donneront des maîtres en quantité et détourneront l'oreille de la vérité pour se tourner vers les fables. Pour toi, sois prudent en tout, supporte l'épreuve, fais oeuvre de prédicateur de l'Evangile, acquitte-toi à la perfection de ton ministère " 2Tm 4,1-5 Tt 1,10 Tt 1,13-14.
(50) NAE 1. (51) Cf. GS 43-44.
1993 Veritatis Splendor 16